Trente-cinq.

Je pense que le cerveau a un certain fonctionnement pour se défendre dans les situations critiques. Le plus utilisé, c'est le déni, s'enfermer dans ses propres mensonges et croire une réalité abstraite, éviter de se confronter à la vérité pour ne pas que notre château illusoire fait de sable s'écroule. Et souvent, la vérité est cachée si loin, si loin, ô tellement loin, qu'elle te semble à jamais perdu. C'est précisément ce que nous voulons ! Ce que je voulais, à l'époque. Le problème dans cette solution chimérique, c'est le choc lorsqu'on en ressort. La tristesse enfouie, la colère, l'incompréhension qui reviennent nous poignarder violemment. Ce fonctionnement est plutôt pour les faibles, c'est pourquoi je l'ai utilisé, par peur de la vérité, de la réalité trop brutale.

Parce que je n'étais pas aussi forte que ça. Je ne valais pas mieux que ces filles qui se décarcassent et sombrent pour un cœur brisé, un homme mauvais, ou une relation toxique. Au fonds, j'étais l'une d'entre elles.

Mes pensées fourmillaient et je ne savais plus d'où venait le bourdonnement dans mon crâne : elles ou le coup que j'ai reçu.

Non, tu n'as rien eu, tout va bien, Yanaëlle, me sermonné-je mentalement

Je refusais de confronter les faits, je ne voulais pas voir le garçon que j'aimais en ce monstre qui m'a attaquée.

Ça suffit !

— Ça va la tête ? La glace arrive à calmer ta douleur ou tu veux un cachet ? m'a demandée l'infirmière en me souriant gentiment.

Tu n'es pas capable de savoir ce qu'il me faut ?

Mes lèvres m'ont brûlé de lui dire à quel point elle était nulle et inutile dans son travail. Lorsque j'avais les nerfs à fleur de peau, mon sarcasme me démangeait plus que d'habitude — et cette bonne femme au sourire idiot accentuait cette impression.

Il faisait chaud et le ventilateur presque pourri n'arrivait pas à me rafraîchir. La glace qui irritait ma peau non plus. J'avais envie de ne plus ressentir de douleur, de m'anesthésier de tout mal, surtout celui qui abrasait mon cœur. J'ai gratté nerveusement mon épaule découverte par la manche fine de mon débardeur qui collait mon corps en sueur.

— J'aimerai avoir un cachet.

Je n'avais même pas essayé de sourire car ma mâchoire me faisait souffrir le martyr. J'osais à peine penser à l'immense bleu qui devait la recouvrir, et à la réaction de mes parents s'ils demandaient ce qui m'était arrivée —  nous rentrions dans deux jours et le temps était trop court pour effacer la trace... autant sur mon âme que ma peau bronzée.

— D'accord. Et ne t'inquiète pas, Yanaëlle, tout va bien se passer.

Elle m'a doucement serrée l'épaule, me procurant une révulsion profonde. Merde ! Je détestais ce contact moite qui se voulait rassurant, cette lueur dans son regard et ce mensonge qu'elle avait sorti si facilement. Pourquoi devions-nous modifier la réalité, mentir pour avoir un peu de contrôle sur notre vie ? Pourquoi me faire croire qu'elle pouvait m'aider alors qu'elle n'était même pas fichue de faire correctement son travail ?! Les grandes personnes ont ce don de nous enseigner la vérité en prêchant le mensonge !

Tout allait forcément mal finir, c'était sûr. Je n'étais pas la seule victime de la folie de Thimoé, bien évidemment. Cependant, j'étais la seule sur qui il s'était jeté sans qu'elle n'ait essayé de l'arrêter.

La dernière personne qu'il avait touché avant de s'écrouler dans une mer de pardon et de lamentations.

Et surtout, j'étais sa petite amie. Et ses mains qui tenaient mon visage il y a quelques jours étaient celles qui m'avait blessée.

Mon thorax s'est brusquement serré et j'ai eu soudainement la gorge trop sèche pour avaler le comprimé blanc.

— Merci, ai-je répondu d'une voix rauque.

— De rien. Tu as la plus maigre blessure comparé aux autres, pourtant tu me sembles être la plus touchée.

Elle avait raison. Les autres blessés étaient rentrés se reposer, il tendait vers la nuit à présent. Je mettais vider de mes larmes sur le carrelage froid de la cantine en soutenant le regard brisé de Thimoé avant de m'évanouir sous le choc. Juste quelques secondes, mais suffisantes pour effrayer les moniteurs. Et moi aussi par la même occasion. Jamais je n'avais réagi ainsi. Jamais.

— Oui.

— J'imagine qu'être l'unique fille sur laquelle il s'est défoulé doit être horrible. Je ne comprends pas pourquoi les moniteurs ont accepté un tel cas ici. Certes, nous avons plutôt des cas difficiles, mais quelqu'un d'autant agressif et instable ? Il aurait pu vous blesser gravement ! Je me demande comment ils vont l'expliquer à vos parents. Surtout ceux du pauvre Noir, celui qui le suit partout.

Non ! Tu as tout faux espèce de sale vipère, ont rugi mon amour, mon affection et ma compassion. Thimoé n'était pas une personne violente, il était la douceur, la beauté et l'innocence dans son regard, ses gestes et ses sourires. Seulement... seulement il cohabitait avec un monstre qu'il avait sous-estimé. Peut-être était-il une partie du monstre. Ou peut-être pas. Et je lui trouvais sûrement des excuses... mais ce n'était pas vraiment lui ! Non ! Ce n'était pas un pervers narcissique qui manipulait les autres, ce n'était pas quelqu'un de violent ! Sa maladie était juste toxique, elle lui faisait du mal. Il devait la vaincre, la dominer et ne pas se transformer totalement en ce monstre.

— Thimoé n'est pas de nature agressive ! a claqué sèchement Debby en entrant dans la petite salle. Il a des problèmes, qui ne justifient pas ses actes, mais les expliquent. Il va les résoudre et pas par votre tolérance. Rufus est le frère de Thimoé, et il est amérindien. Leurs parents seront fiers qu'il n'abandonne pas son frère dans un tel moment. Vous ne pouvez pas parler sans savoir !

— Et toi qu'est-ce que tu sais ?! Ce jeune homme a fait un véritable massacre ! La pauvre Yanaëlle en est traumatisée. Il est dangereux et toxique.

— Non ! Il va mal, tellement mal... il se bat contre lui-même. Vous ne le connaissez pas.

— Bien sûr que si, a ri amèrement l'infirmière en jouant avec sa natte. Ce genre d'homme ont des doubles personnalités, ce sont des monstres, des malades et il n'y a que des idiotes pour s'en enticher. Un conseil, Mademoiselle O'Brien, tout le monde ne peut pas être sauvé.

La dernière phrase a sifflé dans ce silence accablant. Personne ne rôdait autour et l'absence de bruit donnait l'impression que même les murs prenaient note de la leçon qui venait d'être enseignée. Pouvons-nous sauver quelqu'un qui ne voulait pas l'être ? Thimoé voulait-il vraiment être sauvé ? Si oui, pourquoi il ne faisait pas plus d'efforts ? Pourquoi nous avoir conduit à une telle situation ?

— Je vous laisse seule car visiblement vous avez besoin de parler. Je reviens vite, a fini par dire mon aide-soignante en me désignant de la tête.

— Vous savez, Mademoiselle, a murmuré Debby d'une voix chevrotante tandis que son interlocutrice avait franchi le pallier. Tout le monde peut être sauvé si on s'en donne la peine. Personne ne mérite de finir seul dans la misère.

— Quitte à se blesser ?!

D'un regard doux, rempli d'amour, d'affection et de compassion, Debby lui a souri.

— S'il n'avait pas quelque chose à y perdre, cela n'aurait pas été extraordinaire et important. C'est le risque qui rend l'acte puissant et poignant.

Mes lèvres ont frémi, essayant vainement de sourire malgré ma lèvre inférieure enflée.

La porte a claqué comme réponse et je me suis retrouvée seule avec Debby O'Brien. J'avais eu plusieurs visites au cours de ces quelques heures, et celles que je voulais recevoir — dont la sienne—  n'étaient pas venues. Enfin... à part maintenant.

Lentement, elle s'est rapprochée, le visage dégagé par ses cheveux tirés en arrière. Ses grands yeux marrons semblaient me poser mille questions, mille inquiétudes. Son parfum sucré a violemment pris possession de mes sens, à mesure que ses pas diminuaient. L'appréhension titillait mon ventre car je savais où elle était pendant tout ce temps : avec Thimoé. Elle avait beau être mon amie la plus proche, son lien avec mon petit ami était plus étroit. Et elle ne voulait sûrement pas me parler pendant qu'il y avait des témoins.

— Tu te sens mieux ? a-t-elle timidement demandé en s'asseyant sur le matelas peu confortable.

J'ai détourné le regard sur le médicament que je serrais dans ma paume moite.

— Je suis obligée de me droguer pour aller bien. Et toi ? Qu'est-ce qui se passe dehors ?

— La panique. Certains campeurs voulaient virer Thim, d'autres voulaient appeler leur parent et tout ça. Heureusement, les moniteurs ont pu calmer le jeu, ils comptent discuter avec nos parents à la fin du camp et leur expliquer les désagréments. Je pense que tout va bien finir. C'est calme à présent.

— D'accord.

— Quant à Thimoé...

— Non ! ai-je crié en faisant réveiller la plaie à ma lèvre. Je ne veux pas entendre parler de lui.

— Pourquoi ? Tu lui en veux ? Tu le détestes ?

Oui et non. Bien sûr, c'était difficilement acceptable que mon petit ami m'aie frappé, peu importe la raison derrière sa colère et sa folie. La pilule était énorme et je préférais m'enfermer à double tour dans le déni pour éviter d'en pâtir. Je refusais d'entendre parler de Thim car tout deviendrait plus vrai, plus vrai encore que la marque sur mon corps. D'un autre côté, je voulais vraiment savoir comment il allait, s'il avait besoin de quelque chose et si ma simple présence pouvait l'aider. Si ma chaleur, mon parfum qu'il semblait vénérer et mes baisers qu'il appréciait autant que son dessert préféré pouvaient, ne serait-ce qu'un peu, le réconforter, lui donner de la force. Mes membres se sont contractés à cette pensée tandis que mes yeux sont devenus humides. Tout mon être criait d'être près de lui, de m'immiscer dans son espace vital, le délivrer de tout ses maux, oubliant les derniers événements. Sa trahison était une écorchure devant sa fureur. Et je me demandais si nous — lui, moi, notre amour—  survivrions à nos différents démons.

Finalement, mon égoïsme remporta la victoire. Je ne voulais pas entendre parler de lui.

En réponse à Debby, j'ai pris mon cachet.

— Tu ne réponds pas ? a-t-elle insisté.

— Je suis épuisée et déboussolée. Désolée mais j'ai besoin de sommeil.

— On dirait que tu fuis, ça ne te ressemble pas.

— Et qu'est-ce qui me ressemble ô grande prêtresse de la psychologie et l'analysement du comportement humain ? Que voudrais-tu m'apprendre sur ma propre personne ?

Je me suis moquée pour la déstabiliser, pour la faire taire, et surtout pour ne pas lui donner raison car je m'éloignais de plus en plus de celle que j'étais censée être : une femme courageuse, pas une lâche.

— Tout ce que je sais de l'humain, je l'ai appris avec toi, Rufus et Thim. Tu ne sais pas comment réagir, c'est normal, mais fuir, c'est tellement bas de ta part.

— Va le dire à Thimoé, vous aimez bien discuter de moi dans mon dos, pas vrai ? Tout ce foutoir, c'est de votre faute.

— Tu es injuste ! s'est-elle indignée en se levant. Tu es injuste de nous lancer nos erreurs dans le visage comme ça. Tu es peut-être méchante, Yanaëlle, mais t'es pas comme ça.

— Que sais-tu de moi si ce n'est ce que je te montre ? Ne joue pas à ce jeu avec moi, s'il te plaît.

— Alors montre-moi plus, dis moi ce qui te chagrine, ce que tu ressens, ce que tu penses ! Montre-moi plus de toi, Yanaëlle, aide-moi à te comprendre s'il te plaît. Parle de ton ressenti, mais ne te cache pas dans des mensonges, pas encore, pas cette fois.

La supplication dans sa voix s'est aussi transmise dans ses yeux marrons. Ils étaient chauds et embués, comme la mousse sur un chocolat chaud. Mes remparts que je croyais indestructibles sont tombés un à un, faibles devant la force de la vulnérabilité de Debby. Ça a commencé par mon orgueil qui a glissé sur moi pour finir à nos pieds, puis mon sarcasme et mon ironie l'ont suivi rapidement, mon déni et cette coque rigide de perfection se sont brisées en milles éclats. Je suis restée nue, à l'instar d'un soldat sans munitions, cible parfaite pour toute personne malintentionnée. Cependant, Debby était la gentillesse incarnée, elle était sûrement le dernier être humain au monde à profiter de ma fragilité.

Si on critique souvent les personnes gentilles, c'est parce qu'on les pense faibles et fragiles, au contraire ce sont elles les plus fortes car jamais elles ne se protègent de la méchanceté humaine et gardent toujours leur cœur ouvert pour aimer, pardonner et aller de l'avant. Peut-être certains pensaient perdre leur bonté à cause de tout le mal qui dévore notre société, mais quelqu'un qui est réellement gentil, ne se retrouve pas mauvais jusqu'à la moile. Sa bienveillance se cache juste là, sous ses blessures et ses cicatrices.

— Je n'avais jamais ressenti ça, lui avoué-je dans un murmure brisé. Et c'est dur de mettre les mots dessus. Je me sens blessée, Debby, par son geste et par mon incapacité de l'aider. Je sais que Thimoé n'est pas toxique... mais il pourrait l'être pour moi ! Nous ne nous faisons pas du bien, tu sais, regarde tout ce qui nous arrive. Et puis... je ne sais pas si j'ai envie d'être avec un homme capable de me frapper dans ses moments les plus sombres. J'ai déjà été dans une relation peu conventionnelle et ça c'est tellement mal fini pour l'autre. Je ne le regrette pas, jamais je ne regretterai Zayne. Le souci c'est que je ne veux pas de regret entre Thimoé et moi, et c'est précisément ce qui va arriver...

Le dernier mot m'a écorché la bouche, j'aurai pu cracher du sang tant ça me blessait. On aurait dit que je voulais rompre avec lui. Était-ce la bonne solution ? Celle que je voulais ?

Non ! Non ! Non ! criait mon coeur en se débattant dans sa prison de chair. N'abandonne pas ! Je le faisais ? J'abandonnais Thimoé ? La douleur à la simple supposition de le laisser tomber a brûlé ma poitrine. Même mon corps se liguait contre moi. Pourtant, j'avais déjà entamé les préparatifs pour m'éloigner de lui : ça a commencé en laissant Arte me toucher dans le réfectoire après que je me sois fermée à toute négociation, et ça a continué lorsque j'ai refusé de voir la vérité en face.

— Donc tu veux le quitter ?

— Si l'une de tes petites sœurs était dans cette situation, tu lui aurais dit de rester envers et contre tout ?

Cette question était pertinente parce que si on acceptait de subir le pire, on ne le souhaitait pas à nos proches.

— Je te considère déjà comme une de mes sœurs, Yanaëlle, a souri tristement Debby à travers le voile embué de son regard. Je veux le meilleur pour toi, je veux que tu sois heureuse, que tu t'épanouisses, que tu arrêtes de t'avilir. Et d'un côté je suis l'amie de Thim, et je refuse qu'une histoire comme la vôtre se termine ainsi.

— Les Happy end ne sont pas forcément les meilleures.

— Peut-être. Ou peut-être pas. Donne l'occasion à votre relation d'aller jusqu'à dans ses profondeurs, Yanaëlle ! Vous ne vous êtes sûrement jamais dit « je t'aime » ! Il vous reste tant encore à vivre. À moins que tu ne le veuilles pas ? Tu le veux n'est-ce pas ?

Oui ! ai-je pensé. Je le voulais.

— Est-ce que tu peux lui pardonner cet acte impardonnable ? Es-tu prête à prendre le risque pour lui ? À te battre ?

Oui !

— Je ne dis pas que Thimoé est ton grand amour, cependant... je suis persuadée qu'il faut ce battre pour l'amour, surtout s'il est grand, puissant et véritable. Ce n'est pas simple d'aimer, non ? Mais vous le faites si bien.

— Et comment on le fait ? ai-je demandé d'un ton ironique. En se blaissant ? En se frappant ?

— En étant maladroit, en essayant continuellement de vous améliorer, en étant simplement vous, a-t-elle répondu en haussant les épaules.

J'ai acquiescé en réfléchissant. Mes doutes n'avaient pas intégralement disparu, or je n'avais plus aussi peur qu'avant. Je devais juste être courageuse, et ne plus m'enfermer dans le déni.

J'ai pris mon souffle en me tournant vers le miroir de l'infirmerie afin d'affronter mon reflet que je fuyais depuis mon entrée dans la pièce. Mes cheveux étaient ébouriffés, comme après que Thimoé ait tiré dessus pendant un baiser passionné. La comparaison m'a arraché un petit rictus. Il me manquait avec l'impression d'avoir un trou dans le thorax. Mes doigts ont caressé le pansement sur ma mâchoire. C'était affreux, et de petites rougeurs entouraient la blessure. Et dire que c'était le poing de Thimoé qui m'avait fait cela, je me suis sentie vaciller dans la tristesse. Toutefois, j'ai continué de regarder la sueur sur mon front, ma lèvre enflée, mon air débraillé et mes yeux rouges. J'étais vraiment en mauvais état, pourtant...

— Comment va-t-il ? ai-je prudemment demandé à Debby en touchant délicatement mon pansement.

Mon regard s'est accroché au sien dans le reflet de la glace.

— Mal. Je crois. Je ne l'avais jamais vu ainsi, tu sais, et je me demande si Rufus peut le réparer. Il traînait dans ses larmes, Yanaëlle !

J'ai clos mes paupières sur lesquelles l'image de sa rage était tatouée, l'expression qu'il avait juste avant de me frapper. Ma souffrance a grandi et ironiquement, une pointe de satisfaction a surgi. Nous étions deux à souffrir alors.

— Je crois que je suis prête à l'affronter, ai-je déclaré en ouvrant les yeux, déterminée.

J'ai cru voir Debby frissonné.


— Et pourquoi t'as pas abandonné ? Pourquoi t'es restée ?

Il posait la question sérieusement.

— Pour toi, pour nous.

— Malgré l'incertitude ? Malgré nos propres défauts ? Malgré ce que je t'ai fait ?

— Le risque à prendre n'égalait pas le grand prix. Jamais. Tu vaux plus qu'une lèvre abîmée.

Yanaëlle Cox, 17ans.

۞

Publié le 2 Janvier 2021

Bonne et heureuse année, que vos résolutions soient respectées et je vous souhaite d'avoir la santé ❤ prenez soins de vous ❤

Bisous

Longuement

Tendrement

Phanuelle 👑💚

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top