Se séparer
Depuis que j'étais à son service, ma vie était devenue plus compliquée. Sa vie aussi. Je l'avais fait pleurer, chose qui ne devait pas souvent arriver. Notre relation n'était peut-être ce qu'il lui fallait. Je n'étais pas ce qu'il lui fallait.
- Pas la peine de m'expliquer. Je crois qu'il est préférable que je m'en aille. Je t'ai déjà assez causé d'ennuis.
J'attrapai ma veste et partis vers la porte d'entrée. Autant couper net, lui faire mes adieux mettrait à l'épreuve ma volonté.
- Je savais que c'était trop beau pour être vrai. Tu n'es qu'un lâche.
Sa phrase eut l'effet d'une douche froide. Elle n'était pas croyable ! Je fis demi-tour et vint me placer face à elle. Je m'étirai au maximum pour la dominer.
- Ta haine te rend aveugle, Léo. Tous les hommes ne sont pas des salops. Si je pars, c'est parce que c'est la meilleure solution pour nous deux. Je ne suis pas celui qui te faut. Tu as besoin de quelqu'un pour épauler, pour t'aider à surmonter tout ça. Ça ne peut pas être moi. J'ai déjà du mal à affronter mes propres démons. Je déposerai ma démission demain.
Je tournai les talons et claquai la porte derrière moi. Il fallait que je sorte d'ici avant de revenir sur ma décision. Pendant que l'ascenseur descendait, je sentais mon ventre se serrer. Cela me vrillait les tripes mais je n'avais pas vraiment d'autres choix. Mon téléphone se mit à vibrer. Je le sortis rapidement et je fus déçu de constater que c'était Novac. Comme un idiot, je m'attendais à ce que ce soit elle. Quand je lus le message, je grimaçai. Merde ! J'avais oublié cette histoire de rendez-vous arrangé. Amy m'avait tellement cassé les pieds que j'avais cédé. Maintenant, j'étais coincé. Ce soir, j'allais devoir tenir la chandelle.
La journée fila heureusement très vite. Léo ne fit pas appel à moi et c'était tant mieux. Je quittai l'immeuble dès que je pus et filai chez moi pour m'affaler sur le canapé. Je ne pensais pas que cette décision allait autant jouer sur mon moral. La bouteille de whisky me faisait de l'œil mais si je commençai à boire, je ne sortirai jamais d'ici et Amy m'étripera demain matin. Je les rejoignis au bar à l'heure prévu. Amy était déjà là. Quand elle m'aperçut, son sourire s'effaça aussitôt.
- Mais qu'est-ce qui t'arrive, Adam ? Tu en fais une tête !
- Laisse tomber. Je n'ai vraiment pas envie d'en parler.
- Tu sais que je suis là si tu veux parler.
- Je sais.
Soudain, une grande main claqua mon épaule avec vigueur.
- Bonsoir.
Novac avait sorti son sourire de charmeur.
- Je m'appelle Nikolaï, mais tout le monde m'appelle Novac. Tu dois sûrement être Amy. Adam ne m'avait pas menti en disant que tu es magnifique.
Amy rougit légèrement à la remarque de Novac. Cela me donnait envie de vomir. Et j'allais devoir le supporter durant une soirée entière. Je les laissai en tête à tête pour aller prendre des boissons. Je revenais carrément avec la bouteille. Il me faudrait au moins ça pour supporter tous ces débordements hormonaux. Les voir se tourner autour me donna envie de boire deux fois plus. En général, pour digérer mes problèmes, le cocktail sexe et alcool faisait des merveilles, mais ce soir-là, ça allait ceinture pour moi. A chaque fois que je posais les yeux sur une femme, c'était elle que je voyais. Son visage était tatoué sur mes rétines. La désintox allait être longue et difficile.
Je ne sais pas comment j'étais rentré chez moi. Au bout d'une bouteille et demi de whisky, ça a été le black-out total. La bonne nouvelle était qu'a priori, je n'avais pas fait de grosses conneries. Je portais toujours mes vêtements et personne ne partageait mon lit. Je jetai un coup d'œil à mon téléphone. Huit heures. Il était temps d'aller mettre un terme à tout ça. Vu le taux d'alcool encore présent dans mon sang, il valait mieux ne pas trop m'attarder. Poser le papier avec Léo et partir sans se retourner.
Vingt minutes plus tard, je me retrouvai au pied de l'immeuble et mon estomac avait décidé de jouer au yoyo. Je ne savais pas si c'était à cause de l'alcool ou parce que j'allais la revoir. Je pris mon courage à deux mains et entrai dans le bâtiment pour la dernière fois. Je saluai subrepticement Amy, qui me sourit tendrement. C'était bon signe, il ne m'était rien arrivé de fâcheux hier soir. L'ascenseur prit un temps fou pour arriver à l'étage de son bureau. Je traversai à la hâte le couloir et ne m'arrêtai même pas quand Hernandez m'apostropha.
Elle était là, concentrée sur ses documents. Mon cœur tressaillit en la voyant. Je pris une grande respiration et posai ce fichu papier sur son bureau.
- Voici ma démission. Je passe prendre mes affaires dans mon bureau et je m'en vais. Si tu as besoin de quelqu'un pour me remplacer, je peux te proposer un nom. C'est un homme fiable.
Léo ne leva même pas les yeux vers moi. Elle se contenta de prendre le carton dans le bouquet de roses posé sur son bureau. Celui-ci attira mon attention. C'était exactement le même que j'avais vu, il y a quelques jours.
Soudain, Léo se mit à trembler de la tête aux pieds. Sans réfléchir, je contournai le bureau et vint la prendre par les épaules. Elle tenait fermement le petit bout de papier entre ses doigts crispés et ne le quittait pas des yeux. De grosses larmes se mirent à déferler sur ses joues. Sa réaction me rappela de mauvais souvenirs. Elle était en état de choc. Je la soulevais aussitôt dans mes bras. Il fallait que je l'emmène dans un lieu familier où elle se sentirait en sécurité.
- Elle ne se sent pas bien, je la ramène chez elle, dis-je en passant devant Hernandez.
Je n'attendis pas sa réponse et me dirigeai vers l'ascenseur. Léo s'agrippa désespérément à ma veste. Je savais que trop bien ce que ça faisait. Elle était en panique. Son esprit était coupé de toute réalité, incapable de se raisonner. Il lui fallait retrouver un endroit où toute source de stress était supprimée, où elle avait ses repères.
Arrivés dans son appartement, je l'emmenai droit dans sa chambre. Je l'allongeai sur le lit mais elle refusa de me lâcher. Je m'installai donc à ses côtés et la berçai contre ma poitrine. Naturellement, ma main se mit à lui caresser les cheveux. Mon cœur se brisa de la voir dans un état pareil.
- Léo, tu es en sécurité. Je suis là pour toi, pour te protéger. Dis-moi ce qui te bouleverse autant.
En guise de réponse, elle me donna le carton. Mes yeux parcoururent rapidement le mot : « Maintenant, le temps est venu que tu paies pour ce que tu as fait. » Une menace. Elle semblait vraiment la prendre au sérieux. Qu'avait-elle donc à se reprocher pour être prise de panique à ce point ?
- Il faut que tu m'expliques. Qui te menace ? Pourquoi ?
Elle serra encore plus fort ma veste entre ses doigts et secoua la tête.
- Je ne peux pas t'aider si tu ne me dis rien. Je te l'ai promis. Je serais toujours avec toi.
- Tu étais prêt à me quitter, bredouilla-t-elle enfin.
- Pour ton bien, uniquement pour ton bien.
- C'est de toi que j'ai besoin.
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