Relation complexe
Quand je me garais au pied de l'hôtel, je bouillai encore. Tout cette rage à cause d'une fille, et que je n'ai même pas mis dans mon lit, qui plus est. Moi et mon esprit chevaleresque, je me mettrais bien deux baffes ! Allez, Adam, on se reprend. Du professionnalisme. Je soupirai un bon coup et sortis de la voiture. Je montai quatre à quatre les marches jusqu'au hall d'entrée. Léo patientait là, assise sur un des fauteuils luxueux du salon d'accueil. Elle attendit que je sois à sa hauteur pour se lever. Son regard furibond me fit tiquer.
- Vous avez passé une bonne soirée, Mr O'Connell ? demanda-t-elle froidement.
Tiens, c'était Mr O'Connell à présent ! Soit si c'est comme ça qu'elle voyait les choses.
- Je n'ai pas à me plaindre. Et vous, Mlle Gallo, vous avez pu conclure votre « contrat » ? demandai-je, cynique.
Elle pinça les lèvres et me poussa pour aller vers la sortie. Je lui emboitai le pas, le sourire aux lèvres. Elle me soufflait le chaud et le froid. Je pouvais bien lui rendre la pareille. Léo se planta devant la portière, visiblement agacée. Je lui ouvris et elle s'engouffra dans la voiture, sans me lancer un regard. Je m'installai au volant et jetai un coup d'œil dans le rétroviseur. Elle avait les bras croisés et semblait furieuse. Je démarrai la voiture, sans ajouter quoi que ce soit. Je devais la chasser de mon esprit et la meilleure solution était de limiter nos échanges. Sur le siège arrière, Mlle Gallo semblait nerveuse. J'entendais le froissement du tissu de sa robe, comme si elle changeait de position régulièrement.
Quand je garais la voiture au parking, nous n'avions toujours pas échangé un seul mot. Léo descendit de voiture avant que j'aie le temps de faire le tour pour lui ouvrir. Elle marcha d'un pas décidé jusqu'à l'ascenseur, introduisit la clé et la tourna d'un coup sec. Elle était énervée, de toute évidence. Etait-ce à cause de moi ou sa partie de jambes en l'air n'avait pas eu l'effet escompté ? quand les portes s'ouvrirent, Léo s'engouffra à l'intérieur et fit volte-face.
- Inutile de me raccompagner, bougonna-t-elle. Je suis capable de rentrer chez moi toute seule.
Je fronçai les sourcils et entrai dans l'ascenseur avant qu'il ne se ferme.
- Vous me payez pour assurer votre sécurité, dis-je. Alors je fais mon job.
- Puisque c'est comme ça que vous voyez les choses, s'énerva-t-elle.
- C'est comme ça que cela devrait être, m'expliquai-je.
- Alors toute la discussion d'hier matin, c'était du pipeau ? vociféra-t-elle.
- Absolument pas, m'indignai-je. Ce que j'ai dit est la vérité. Mais je ne suis pas sûre que nous soyons prêts pour une quelconque amitié.
- Et pourquoi donc ? demanda-t-elle, les poings sur les hanches.
- Je suis un homme, vous me plaisez. Tout ce que vous ne supportez pas. Autant se cantonner à une relation professionnelle.
Léo resta muette face à ma déclaration. Elle desserra les poings et laissa glisser ses mains le long du corps. Ses yeux me fixaient, cherchant dans les miens la réponse à une question que je ne connaissais pas. Soudain, elle se rapprocha et tira sur le col de ma chemise pour m'obliger à me pencher. Ses lèvres se posèrent délicatement sur les miennes. Je restai totalement tétanisé, stupéfait par sa réaction. A ce moment-là, les portes s'ouvrirent. Léo se détacha et partit. Je restai là, comme un con, alors que les portes se refermaient. Je ne savais pas trop ce que signifiait ce baiser. Cette femme était vraiment déstabilisante. Elle me lançait constamment des signaux contradictoires. Devais-je aller la rejoindre ou partir ? Elle voulait qu'on soit amis ou plus ? Mon doigt se retrouva sur le bouton du sous-sol, sans que j'y ai réellement réfléchi. Il valait mieux que je rentre. Pour m'éclaircir un peu les idées. Pour réfléchir à ce que je voulais réellement. Elle avait réussi à me mettre le doute. Je n'étais plus si sûr de vouloir garder mes distances. Ce soir-là, quand je rentrais chez moi et que je m'allongeai dans mon lit défait, qui sentait encore le parfum d'une autre femme, ce fut vers elle que toutes mes pensées étaient tournées. Elle et son caractère changeant. Elle et ses convictions concernant les hommes. Elle et sa façon de mettre le bordel dans ma tête. Et je m'endormis avec les images de ses lèvres rouges pulpeuses.
La semaine qui suivit fut étrange. Ma relation avec Léo était flottante, entre une relation purement professionnelle et une sorte de complicité. On discutait souvent de sujets hétéroclites quand nous étions seuls, mais dès que l'on se retrouvait en public, Léo changeait et redevenait Mlle Gallo, la femme d'affaires, sûre d'elle et séductrice. Cette duplicité était perturbante, car elle me donnait l'impression de fréquenter deux personnes différentes. La question qui me taraudait était de savoir laquelle était la vraie Léo, celle qui rigolait à mes blagues pourries ou celle qui ne se gênait pas pour faire du charme à chaque homme qui pouvait lui être utile. Je n'aimais pas cette Léo-là. Je la trouvais manipulatrice et sans merci. Elle ne voulait qu'une chose, obtenir ce qu'elle convoitait, quitte à marcher sur les autres ou de profiter d'eux.
Nous n'avions pas reparlé du baiser. Je n'avais pas osé aborder le sujet, et elle avait fait comme si toute la soirée d'hier n'avait jamais eu lieu. J'avais du mal à définir ce que je représentais pour elle et ce qu'elle représentait pour moi. Pour l'instant, je n'avais pas envie d'y mettre un nom. Je voulais juste profiter du temps passé seul avec elle.
Nousavions déjeuné une nouvelle fois avec Chiara et Julian. Chiara était toujoursaussi enthousiaste de me voir, même un peu trop. Je pense qu'elle s'imaginaitque nous étions ensemble, mais que Léo préférait le taire, par respect pourJulian. Ce dernier, par contre, avait de toute évidence une dent contre moi,car il ne m'adressa la parole à aucun moment. Après tout, je le comprenais,suite aux révélations de Léo concernant leur relation. Julian était encoreamoureux, ça crevait les yeux. Mais Léo n'en faisait aucun cas. Moi, jecompatissais car cela ne devait pas être facile d'être à côté de la femme qu'onaime et de se rendre compte qu'elle est passée à autre chose. Je devaisreprésenter pour lui un concurrent, surtout au vu de la manière dont elle secomportait avec moi. Mais je n'en étais pas un. En tout cas, je n'avais pasl'impression de l'être, pour l'instant.
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