Début de vie sociale

Le travail de garde du corps était en soi un travail peinard. Emmener la boss d'un point A à un point B, la suivre dans chacune de ses sorties comme un gentil toutou, faire des petites courses normalement dédiées aux stagiaires. Je m'emmerdais. Je ne savais pas comment Stanford avait pu supporter de faire ce job aussi longtemps. Un mois allait être le bout du monde. En plus, je devais composer avec l'attirance que j'avais pour elle. Chose particulièrement difficile, vu qu'elle s'employait savamment à mettre en appétit chaque homme qui franchissait la porte de son bureau. Elle avait un don pour ça. Rien de très provoquant, juste ce qu'il fallait pour brouiller l'esprit de ces mâles en rut et obtenir ce qu'elle voulait. C'était perturbant de voir ce qu'elle était capable de faire.

A part la distraction sensuelle que me procurait Mlle Gallo, j'avais beaucoup trop de temps pour moi. Trop de temps pendant lequel mon cerveau se mettait à ressasser le passé. Les flash-backs commençaient à être de plus en plus nombreux. Il me fallait trouver une occupation, un exutoire. Après le départ de Stanford, je négociais donc avec la patronne la possibilité d'aller boxer pendant les heures où elle restait au bureau, c'est-à-dire quasiment tout le temps. Pour me maintenir en forme, lui avais-je expliqué. Ce qui me valut un regard concupiscent.

Je trouvais une salle à cinq minutes à pied. Elle ne payait pas de mine, mais elle était bien équipée. Frapper dans des sacs de sable, soulever de la fonte me permettait de tenir à distance ces mauvais souvenirs. Devoir masquer tout ça ne fut pas simple quand j'étais encore dans l'armée. C'est pourquoi démissionner avait été la meilleure solution. Et puis, je ne supportais plus tout ça, la violence, le désespoir, la peur omniprésente, et ce sentiment de ne pas toujours être le bienvenu. On nous envoyait aider des populations qui souffraient de la guerre, mais je m'étais rendu compte que souvent on était considéré comme les fauteurs de trouble, ceux qui attiraient le malheur sur le village. Les civils étaient malheureusement pris entre nos feux et ceux de l'ennemi.

Un soir, alors que je me défoulais sur un sac de frappe, le gérant de la salle me présenta un homme d'une trentaine d'années. Grand, baraqué, il me donnait l'impression d'être originaire d'Europe de l'Est. Ces yeux noirs reflétaient une froideur que l'on ne rencontrait que chez ceux qui avaient été confrontés aux horreurs de la guerre.

- Nicolaï Novac, se présenta-t-il, me serrant la main d'une poigne d'acier.

- Adam O'connell, répondis-je, soutenant son regard dur.

- Novac cherche un partenaire pour s'entrainer, expliqua le gérant. J'ai pensé à toi. Vous avez les mêmes gabarits. Ça devrait être équitable.

Novac eut un rictus moqueur. Il se croyait plus fort, j'allais le faire déchanter. Nous nous équipâmes et montâmes sur le ring. Cet homme me toisait du regard. Je détestais qu'on se foute de moi. Ce fut lui qui se lança à l'attaque le premier. Manque de pot pour lui, j'étais plus agile. Ses coups me manquaient, les miens l'atteignaient à chaque fois. Au bout de trois assauts infructueux, il commençait à perdre de sa superbe. Et moi je jubilais.

- Où avez-vous appris à boxer comme ça ? me demanda-t-il, tout en m'assénant un crochet du droit.

- Royal Navy, répondis-je succinctement.

- Un militaire ?

- Ancien. Et vous ?

- Serbie, mercenaire. Ancien. Je me suis rangé, termina-t-il, en souriant.

Ma première impression avait été la bonne. Deux faces d'une même médaille. Moi à la solde du gouvernement, lui à celle du plus offrant. On avait des points communs. Soudain, Novac tenta un uppercut qui me rata de justesse. Mais il prit mon direct en pleine face. Il chancela et dût s'accrocher aux cordages. Un peu sonné, il leva le gant en signe de trêve.

- C'est bon, on fait un break, dit-il en riant. Vous avez une sacrée droite !

- Il faudrait travailler votre jeu de jambes, vous êtes trop lent, ironisai-je.

Novac rigola de plus belle.

- Vous, je vous aime bien, répliqua-t-il. Je vous invite à boire un verre.

Sur le coup, j'eus envie de décliner, mais, au vu de ma vie sociale misérable qui se résumait à boulot – boxe – alcool et sexe, je me suis dit qu'un ami ne sera pas de trop. Alors j'acceptai.

Cesoir-là, nous écumâmes tous les bars de Miami Beach, jusqu'au petit matin. Jene fis pas de cauchemar, pas vraiment le temps. Je finis par m'endormir auxpremières lueurs du jour, affalé dans mon lit, nu, la tête sur le cul d'unejolie blonde.

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