Combat déloyal
Je me mis donc en position de combat. Avec mon mètre quatre-vingt tout en muscles, elle ne faisait pas le poids. Pourtant, elle ne semblait absolument pas impressionnée. Qu'importe c'était elle qui avait demandé cet affrontement. Je roulais un peu des mécanismes pour la déstabiliser. Cela ne réussit qu'à l'agacer encore plus. Nous nous regardâmes un moment. Elle attendait que j'attaque, mais il en était hors de question. C'était une femme, et ma patronne qui plus est. Elle se lança donc la première. Elle tenta un coup à la gorge, que je repoussai facilement. Mais, j'étais trop présomptueux car la seconde d'après, j'étais étalé au sol. Il m'en fallut quelques secondes de plus pour comprendre ce qui venait de se passer. Elle m'avait foutu au tapis. Merde ! Je me relevais à la hâte. Dans son coin, Stanford tentait de masquer un sourire. Je pinçai les lèvres. Il m'avait foutu dans un vrai traquenard !
Je reportai ma concentration sur la patronne. La première fois je m'étais fait avoir. A présent, j'étais prévenu. Je la laissai venir à moi. Elle se lança dans une nouvelle attaque que j'esquivai encore, mais préparé, je réussis à parer le deuxième mouvement de jambe. Malheureusement, elle avait plus d'un tour dans son sac, me poussa des deux mains, ce qui me fit tomber lamentablement sur les fesses. Cette fois-ci, Stanford se mit carrément à ricaner.
- Je vous avais prévenu qu'elle était forte, se moqua-t-il.
Mon orgueil en prenait un coup. Elle voulait un combat ? Soit j'allais lui offrir un combat ! Je me relevais une nouvelle fois. Alors que je lançai un regard noir en direction de Stanford, Mlle Gallo tenta une attaque en traite, mais sur le qui-vive, je l'esquivai et lui donnai une petite tape sur le postérieur. Cette fois, c'est moi qui riais. Elle fronça les sourcils mais un sourire s'étira sur ses lèvres. En fait, elle n'attendait que ça. Puisqu'il en était ainsi, il était de mon devoir de satisfaire ma boss. Je tentais alors de l'attraper par l'encolure, mais elle fut plus vive et se glissa sous mes bras. D'un geste automatique, je lui fauchai les jambes. Elle s'étala de tout son long et j'en profitai pour me positionner au-dessus d'elle, lui bloquant la gorge de mon bras. Elle avait beau se débattre, elle n'arrivait pas à se dégager. Je l'écrasai de tout mon poids, empêchant tout mouvement intempestif. Je lus alors dans ses yeux de la peur. Sa respiration s'accéléra. Elle ferma aussitôt les yeux. Elle commençait à paniquer. Je relâchai un peu la pression, ne sachant s'il s'agissait d'une ruse ou d'un réel mal-être.
- C'est bon, vous avez gagné, me dit-elle doucement.
Je relâchai aussitôt mon étreinte, me relevai et lui tendis la main pour l'aider à se mettre debout. Elle la prit timidement. Il me semblait que l'entrainement était allé trop loin. Mais, soudain, elle me tira vers elle et je basculai en avant. Elle me fit alors passer par-dessus sa tête et je volais de l'autre côté de la pièce comme une poupée de chiffon. La seconde d'après, c'est elle qui me chevauchai. J'en fus complètement abasourdi. Quant à elle, elle souriait, triomphante. Lentement, elle rapprocha sa bouche de mon oreille.
- Ne jamais croire que la partie est gagnée d'avance, chuchota-t-elle.
Son souffle chaud contre ma joue et son corps comprimé contre le mien provoqua inévitablement une réaction incontrôlée de mon entrejambe. Elle se met à sourire de plus belle, en constatant l'effet qu'elle avait sur moi.
- Eh bien, je vois que tu as bien profité de mon retard, tonna une voix masculine inconnue derrière nous.
Mlle Gallo se leva, sans me quitter des yeux.
- Mon nouveau garde du corps s'est gentiment proposé de m'aider à m'entraîner en t'attendant, dit-elle en se tournant vers l'homme qui venait d'arriver.
Je me relevai et me dirigeai penaud vers Stanford, qui tentait de masquer son fou rire avec la main. Il s'amusait autant qu'elle de la raclée qu'elle m'avait mise.
- Elle n'a pas besoin de garde du corps, bougonnai-je. Je plains celui qui essaiera de s'en prendre à elle.
Stanford partit dans un rire tonitruant. Je ne pus m'empêcher de rire, moi aussi. L'entraîneur nous dévisagea, d'un air suspicieux. Mlle Gallo, quant à elle, me fixait des yeux d'une manière qui me déstabilisa. Je ne savais s'il s'agissait de colère ou de désir. Ce vert intense avait le ton de m'embrouiller l'esprit.
Je passais l'après-midi dans le bureau de Stanford, le nez dans ses dossiers. Celui-ci avait profité de l'accalmie pour aller régler quelques affaires en cours. Ses notes étaient richement détaillées. J'avais un dossier sur chaque collaborateur haut placé, sur chaque concurrent un peu trop véhément. Tout y était : adresse, casier judiciaire, généalogie, petits amis éventuels et même mensurations. Il s'était même documenté sur chaque nouveau client de manière plus succincte. Un travail digne du MI6.
Un dossier cependant attira mon attention, celui d'Eleonora Gallo. Celui de ma boss. Sa mère était morte depuis peu. Son père était inconnu. Stanford avait souligné en rouge un nom, qui renvoyait à un autre dossier.
Celuidu beau-père de Léo, Manuel Rossi. Je fouillai les dossiers jusqu'à tomber surle sien. Une photo de famille figurait en première page. On y voyait un brund'une quarantaine d'années, bien bâti, tenant contre lui une femme aux cheveuxnoirs et aux yeux chocolat. Elle ressemblait énormément à Mlle Gallo. J'endéduisis qu'il devait s'agir de sa mère. De l'autre côté, il y avait uneadolescente aux yeux verts. Je la reconnus tout de suite à son regard hypnotisant.Elle n'avait pas encore cette rage que j'avais perçu, mais une immensetristesse. Tout comme sa mère. Les deux femmes semblaient malheureuses. L'hommelui était tout sourire. Une sensation étrange me prit tout à coup à la gorge.J'eus l'impression que cet homme était l'auteur du désespoir qui habitait leurregard. Je détachai mes yeux de la photo pour me reporter aux annotations deStanford. « Introuvable. Hautement dangereux. » Je compris alors unpeu mieux les raisons de ce débordement de mesures de sécurité. Mlle Gallo nese sentait pas en sécurité, sachant cet homme en liberté. Je décidai donc demémoriser chacun des traits de ce visage au sourire diabolique, dansl'éventualité d'une réapparition indésirable.
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