Chapitre 1. Joyeux anniversaire, Cole

Cole

Trois cent cinquante-cinq jours. Cela faisait déjà un an. J'avais pourtant l'impression que tout s'était déroulé la veille. Je revois son corps criblé de balles, gisant sur le sol boueux que la pluie malmenait depuis plusieurs heures déjà. Ses yeux bleus semblaient contempler le ciel grisâtre de cet après-midi. Ses muscles s'étaient relâchés mais son visage semblait pourtant si calme...

Se sentait-il apaisé avant de mourir ? Savait-il ce qui l'attendait et n'attendait-il que ça ?

Il me répétait souvent : « Mon heure viendra et ce jour-là, je le saurai. Cesse d'être sur tes gardes Cole, j'ai la situation en main ». Quelle ironie.

Le situation lui avait échappé et je n'avais rien pu faire. À force de me répéter de baisser ma garde, j'avais fini par le faire. Voilà une erreur que je ne reproduirai plus. Plus jamais. Il reposait à présent six pieds sous terre par ma faute. J'avais été trop stupide pour penser que ce monde n'était pas si dangereux tant que le grand Asher Blake était au pouvoir. Je m'étais trompé et jamais je ne me le pardonnerai.

- Voilà mon grand frère préféré, vociféra Riley tandis que je fixais un point imaginaire à travers la grande baie vitrée du salon.

Putain. Pas lui, pas maintenant.

- Tu n'en as qu'un, pestai-je avant de me lever pour me servir un verre de scotch.

Il inspecta la pièce ainsi que la cuisine afférente avant de s'asseoir sur le canapé. Le sourire malicieux qui s'affichait sur ses lèvres ne m'assurait rien de bon. Il avait une idée derrière la tête et ce n'était vraiment pas le bon jour pour jouer avec les limites de ma patience.

- Exact ! Un que j'aime d'ailleurs tellement que je voudrais l'emmener faire une petite virée ce soir...

Qu'est-ce que je disais déjà ? Ah oui, qu'il avait une idée derrière la tête. Qu'est-ce qu'il pouvait m'agacer avec ses plans stupides qui n'intéressaient que lui et son fichu manque de maturité.

- Pas aujourd'hui Riley, je n'ai pas la patience pour un énième moment foireux.

Il se leva pour se rapprocher de moi. Je serrai les poings à la vue de son rictus que ne voulait pas mettre les voiles. Une lueur de malice éclaira ses yeux tandis qu'il inspectait la grande bibliothèque faisant face aux fenêtres du rez-de-chaussée de ma maison. Il tira un livre au hasard, se mit à feuilleter les pages avant de le reposer nonchalamment sur la table basse située à quelques mètres de la cheminée qui crépitait.

Je vais lui arracher les cheveux un à un.

- Remets ce putain de livre à sa place. Je n'ai pas envie de rire avec toi.

Je sentais mon rythme cardiaque s'accélérer alors même que j'avais déjà repris place dans mon fauteuil. Mon coeur pulsait frénétiquement, laissant un bruit sourd dans mes oreilles qui ne faisait qu'attiser ma colère. Je jure que s'il continuait cette mascarade, j'allais finir par le propulser dans le jardin. Et il n'allait pas passer par la porte d'entrée.

- Oh ça va, faut te détendre un peu ! Lexie m'avait parié que tu ne serais pas d'humeur ce soir et il faut croire que je vais devoir lui donner mes derniers billets.

Il fit la moue tout en sortant les revers vides des poches de son jean. Il s'assit à nouveau avant de pousser un soupir. Je l'observai dans le reflet de la vitre. Il triturait la chevalière en or de son annulaire tout en la regardant avec intensité. Il ouvrit la bouche mais se ravisa lorsqu'il m'entendit taper du pied.

Alors que je commençai à perdre patience face à sa présence et son mutisme sans fin, je me rappelai à moi-même de plus souvent fermer cette foutue porte d'entrée. Mon frère entrait chez moi comme s'il s'agissait de sa baraque et ça me mettait hors de moi. Ce n'était pourtant pas faute d'avoir prévenu les dizaines d'hommes censés monter la garde. Il fallait que je fasse du tri là-dedans avant de le rejoindre dans sa tombe à cause de la crise cardiaque que cet imbécile finirait par me causer.

- Écoute Cole..., commença-t-il sans cesser de jouer avec son bijou. Ce n'est pas une journée facile pour moi non plus. J'aurais juste aimé qu'on fasse un truc normal pour une fois, histoire de se...

- Je t'interdis, et je dis bien t'interdis, de me parler de ça. Je n'ai pas besoin de me changer les idées et encore moins de traîner avec toi, crachai-je sans lui laisser le temps de finir sa phrase.

Je savais que cette conversation allait mal tourner. Et plus je regardais son reflet, plus j'avais envie de lui en coller une. Il fallait qu'il parte d'ici avant que je le fasse pour de bon. Il lui ressemblait trop, beaucoup trop pour que je puisse me contrôler. Or, aujourd'hui, je n'étais pas d'humeur charitable. Je n'allais pas m'empêcher de saccager sa jolie petite gueule d'ange. Et si Lexie devait gagner son parie, alors, elle le gagnerait. Je les emmerde tous, eux et leur humeur joviale à la con. Ils ne font rien pour maintenir la Famille à flot, rien pour me délester de tout ce poids qui pèse sur mes épaules depuis maintenant douze mois. Ils ne savent qu'obéir aux ordres mais ne sauront jamais ce qu'est être à la tête de toute cette merde sanglante.

- Dégage, finissais-je avant de rejoindre ma chambre à l'étage.

Je claquai ma porte avant de m'écrouler sur le lit. J'entendis vaguement l'écho de sa voix ronchonnante se perdre dans le hall avant qu'il ne fasse trembler les murs en refermant violemment la porte d'entrée. Mon sang ne fit qu'un tour et je me relevai précipitamment pour le rattraper. Si ce fils de pute continuait à croire qu'il pouvait faire sa loi ici, il s'était trompé de terrain.

Sans un mot, je marchais frénétiquement dans sa direction. J'avais putain d'envie de me le faire. Ma colère ne pourrait s'apaiser qu'une fois ma main tremblante rassasiée.

- Mon territoire, mes lois, vociférai-je avant de lui coller mon poing dans le nez. Et ne t'avise plus jamais de toucher le moindre centimètre de cette baraque sans mon autorisation.

Je m'éloignai alors de lui sans lui jeter un regard. Il l'avait bien cherché. Je sentais cependant encore le sang pulser dans mes veines. Je n'arrivais pas à me calmer et j'avais envie de le tuer.

C'est ton frère, Cole. Tu ne peux pas le massacrer.

La petite voix dans ma tête essayait de m'en dissuader. Je n'y arrivais pas. Tout ce que je voyais n'était pas le visage décomposé de mon frère mais le visage de cet homme, ce soir-là. Il souriait à pleines dents tandis que sa capuche noire dissimulait son regard que j'imaginais à présent rieur. Le souvenir de son tatouage représentant une calavera sur le côté de son cou me donnait envie de lui arracher la peau. Lentement, très lentement jusqu'à ce qu'il me supplie d'arrêter. Je revois son arme pointer sur nous et tirer, lâchement, à plusieurs reprises, sur le dos de mon père tandis que je tentai de me précipiter sur lui pour le sauver. Mais son corps gisait malgré ma voix hurlant son nom et mes mains qui tentaient de compresser les plaies.

Je me retournai alors une énième fois vers Riley. Je le voyais tenir son visage tandis que ma main s'éleva au-dessus de ma tête. Il fallait que je remplace ces images par une nouvelle. Et ce soir, ce serait au tour de mon frère de s'inviter dans mon esprit.

- Putain Cole, arrête !, s'écria alors Lexie en accourant vers Riley. Tu vas finir par le tuer.

Je m'arrêtai net. Elle prit alors sa tête dans ses mains et le força à la pencher en avant tandis qu'elle compressait son nez.

Qu'est-ce qui m'avait pris ?

J'observai la scène se déroulant sous mes yeux L'espace de quelques secondes, je n'avais plus le contrôle de mes mouvements. C'est comme si le temps s'était arrêté, comme si j'étais mort et spectateur d'un corps qui n'était plus le mien. Riley était mon frère. Riley était mon frère et j'avais hargneusement eu envie de l'envoyer dans les cieux. Cela faisait un an que ces fichus accès de violence ne me quittaient plus. Malgré tous mes efforts, je ne parvenais plus à reprendre le contrôle sur moi-même. Pourtant, je le devais. Ma position ne me permettait pas de continuer sur cette voie.

Je voyais l'inquiétude luire dans les yeux de Lexie et du blessé qu'elle soignait. Et ça, ça me mettait encore plus hors de moi.

Qui étaient-ils pour me juger ? Personne. Car personne n'avait été là le jour où j'avais pourtant le plus besoin d'eux.

- Allez vous faire foutre, prononçais-je avant de leur tourner les talons.

Ils ne répondirent rien, bien conscients que l'impact de leurs mots pourrait raviver mes muscles encore tendus.

Je me rappelai alors que Lexie n'était pas censée être là. Je me rappelle très bien de ce qui était prévu ce soir. Elle devait être dans un casino de San Francisco, en train d'épier les moindres faits et gestes du chef des Martinez. L'enfoiré qui avait pris la vie de mon père ne devait plus respirer une seule seconde sans être épié par les miens et ce, jusqu'à ce que je mette mon plan à exécution. Il n'était cependant qu'une heure du matin tandis que Lexie ne devait rentrer qu'au lever du jour. Je m'apprêtai alors à me retourner pour écouter ses nouvelles face à mon regard accusateur.

Mais là, des coups de feu retentirent.

***

Et voilà, un premier aperçu de Cole et de ses démons...

J'espère que le chapitre vous a plu et bonne lecture 👀

Avec tout mon amour,
Ox

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