17. Flamboiement







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Chapitre dix-sept





« Quand ce n'était pas toi, le fait d'aimer me semblait si éphémère. »


















Au-dessus de leurs têtes, le piaillement des oiseaux voguait ici et là, certainement en pleine migration vers des pays chauds. Les branches des arbres étaient dénudées de feuillages, le lac du parc à côté était complètement gelé et le temps, quant à lui, avait revêtu son manteau gris. L'hiver était là, ancré dans le paysage urbain et les températures décroissantes. Le calme régnait sur l'horizon. À l'extérieur, les tons semblaient tristes, moroses et légèrement mélancoliques.

Jeongguk, le regard rivé au-delà de la baie vitrée, se força à tourner la tête pour éviter de tomber de nouveau dans un flot de souvenirs loin d'être poétiques. La pâleur de la ville ne faisait qu'enlaidir son esprit. Misérable fourberie.

Un souffle de plénitude fit écho dans la pièce.

Taehyung, les bras enroulés autour du corps frêle de son cadet, était en train de se réveiller doucement . Les pupilles noisette de Jeongguk se posèrent avec tendresse sur le profil délicat de l'homme à ses côtés. Il avait trouvé là, une chose encore plus agréable à regarder que le monde qui le prenne en pitié. Il le trouva beau, tellement beau sous ses traits endormis et sa bouille apaisée, presque enfantine à cet instant. Sous tous les angles, il l'admira, se perdant dans cette contemplation idyllique. Mirifique.

Ce fut ce moment-là que Taehyung choisit pour entrouvrir ses paupières.

Par automatisme, leurs iris s'ancrèrent sous le flamboiement matinal ombragé. L'ambre doré se mélangeant au gris bleuté. Et c'était magnifique. Transcendant.

Jeongguk se perdit dans le regard envoûtant et métallisé. Plus il regardait ces deux billes nébuleuses, plus il y trouvait l'amour qu'il recherchait. Un brin de tendresse, un bout de folie et une dose de sincérité, avec également beaucoup de bienveillance et de sérénité. Il en fut tout à fait charmé.

Il y avait dans le regard du professeur quelque chose qui reflétait un certain calme, mais aussi une légère fébrilité. Une névrose sous-jacente qu'il ne montrait pas souvent ; la peur de sentiments non partagés.

Pourtant, s'ils prenaient tous les deux le temps d'écouter la résonance de leurs cœurs, ils verraient que ces mêmes sentiments étaient bien plus que cela ; ils avaient le goût de l'éternité.

― Salut, ronronna Taehyung.

― Bonjour, lui chuchota en retour Jeongguk.

Ils s'offrirent le plus beau des sourires, apaisés. Réconfortés de leurs présences mutuelles.

Le romancier qui avait vu tant de nuages et tant de pluies, traversant des épreuves plus que difficiles, se trouvait comblé et remercia allègrement la vie pour cette deuxième chance.

― Tu as pu dormir un petit peu ? interrogea le grisé.

― Oui, grâce à toi. Merci, Tae.

Taehyung, heureux que son cadet aille mieux, lui offrit un prompt baiser sur le front. Rapide, mais délicat.

― On pourra le refaire si tu veux ? Dormir ensemble je veux dire, proposa le professeur.

― C'est une proposition assez tentante... Et puis, je me sens bien au creux de tes bras, répondit Jeongguk d'une voix timide avant de replonger sa tête contre le torse de Taehyung afin de cacher l'arrivée de ses rougeurs.

Un faible rire retentit dans le salon berçant plaisamment les oreilles du plus jeune.

Une dizaine de minutes supplémentaires passèrent où tous les deux profitèrent de la présence de l'autre et du calme ambiant avant que, alerté, Taehyung ne se redresse vivement, emportant avec lui le corps de Jeongguk.

― Oh, putain !

― Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce qui se passe ? demanda Jeongguk, le regard rivé sur le plus âgé qui courait à travers l'appartement, à la recherche de vêtements propres.

― J'ai cours dans une heure ! Bordel, où est passé mon jean noir ? pesta-t-il, essoufflé. Ah ! Le voilà ! Putain, où est ma sacoche maintenant ?

Jeongguk pouffa, véritablement amusé de l'image que renvoyait son ancien compagnon, lui qui, habituellement, restait élégant en toutes circonstances, toutes situations.

― Tu jures comme un véritable charretier, Tae.

D'une manière adulte et complètement mature, Taehyung lui répondit un gnegnegne à peine audible tout en continuant ses recherches. À plusieurs reprises, il continua de maudire ses ancêtres sur plusieurs générations jusqu'à ce qu'il ait trouvé toutes ses affaires et soit enfin prêt à partir.

― Il y a des restes dans le frigo ! À ce soir, mon lapin !

Les mèches grises de Taehyung volèrent une dernière fois et la porte derrière lui claqua.

― À ce soir mon p'tit ronchon, murmura Jeongguk dans un dernier sourire.




☆★☆




Un peu plus tard dans la soirée, alors que dehors le soleil hivernal se faisait quelque peu timide et craintif, Taehyung était encore assis derrière son bureau de professeur des écoles.

Dans la salle de classe, il y avait une cacophonie agaçante.

Un mélange de voix, Taehyung qui haussait légèrement la sienne, un brouhaha persistant, des effusions de rires, des stylos qui cliquetaient, des trousses qui s'ouvraient puis se fermaient, des pages qui se faisaient tourner et des chaises qui raclaient le sol. Un tintamarre bruyant, mais plutôt bien orchestré, proche d'une symphonie. Et, selon le rythme, c'était joli à entendre, bien que très énervant.

Le regard de la plupart des élèves était rivé sur l'horloge qui se situait juste au-dessus du tableau.

Les dernières minutes étaient toujours les plus longues à venir lorsque l'impatience des vacances se faisait ressentir. Chacun semblait prêt à sauter de sa chaise. Taehyung, lui, s'amusait à contempler les œuvres d'art que formaient certains gribouillis sur les exercices ratés de la dernière évaluation surprise qu'il finissait de corriger. Il laissait peu de bleu et de noir sur les marges, préférant les traces agressives de son feutre rouge, son côté sadique s'exprimant sans une once de pitié. Pauvres enfants qui n'avaient rien révisé.

Enfin, la sonnerie retentit, exprimant l'heure d'une libération certaine et d'un soulagement commun tant chez les élèves que chez le professeur. Les bousculades étaient de la partie au milieu des au revoir avant que le silence ne reprenne sa place, tel un roi sur l'échiquier.

― Tae ? Je te dérange ?

Le grisé qui était occupé à ranger ses affaires, releva la tête en direction de la porte restée ouverte.

― Jamais, Chim. Entre.

D'une démarche enjouée, son ami d'enfance s'avança dans la pièce presque en sautillant jusqu'à atteindre le bureau de Taehyung.

― Dis, vous serez là au Nouvel An avec Jeongguk ? Ça fait des années que je ne l'ai pas vu, il me tarde de le revoir ! s'exclama-t-il, les zygomatiques relevés.

― Oui, on passera faire un coucou.

― Cool ! tapa joyeusement Jimin dans ses mains. Oh, est-ce qu'il a toujours cette bouille de lapin trop adorable ?

― Ah ! Ne t'avise même pas de l'embêter avec ça !

― Mais non... Tu me connais tout de même, fit le rouquin, un sourire railleur au visage.

Taehyung, déjà fatigué par cette future soirée qui n'avait même pas encore commencé, soupira.

― Justement... Et c'est bien ça le problème.

― Ne t'inquiète pas, je gère !

Jimin lui fit un signe de la main et lui envoya un clin d'œil qui ne signifiait rien de bon. Taehyung leva les yeux au ciel, peu confiant envers son ami.

― Mouais. Bon, j'y vais, il m'attend.

― D'accord, sourit une nouvelle fois son ami. Passe-lui le bonjour de ma part !

Le professeur hocha la tête et récupéra ses affaires avant de sortir de sa salle de classe qui resterait vide les deux prochaines semaines.

Pressé de retrouver l'homme qui peuplait ses pensées, Taehyung marchait dynamiquement dans les rues animées de Paris. Les lampadaires s'allumaient, les voitures klaxonnaient et les passants se dépêchaient de rentrer, tout comme lui. Ce fut une quinzaine de minutes plus tard qu'il ouvrit sa porte et entra dans son appartement.

Comme à son habitude, il entreprit d'abord de se déchausser se baissant pour défaire ses lacets, mais se stoppa net dans son mouvement lorsqu'il réalisa qu'autour de lui, tout n'était que silence.

Une absence totale de sons qui était loin d'être rassurante.

― Gguk ?

Une nervosité soudaine prit rapidement possession de son corps qui se tendit. Ses traits reflétèrent une peur nouvelle. Son palpitant, déjà fébrile par le manque de réponse, battit à tout rompre dans sa poitrine de manière rude et douloureuse.

― Jeongguk ?

Il n'obtint toujours pas de réponse.

De manière précipitée, il déchira presque ses lacets et jeta ses chaussures dans l'entrée avec tellement de force qu'elles rebondirent sur la porte. Ses jambes se déplaçaient à grande vélocité, arpentant le premier couloir qui le mena jusqu'à la pièce à vivre. D'abord, ce fut la petite cuisine ouverte qui entra en premier dans son champ de vision. Taehyung y lança un rapide coup d'œil avant de continuer sa route, n'y voyant pas son cadet à l'intérieur.

Cependant, il se figea à l'entrée du salon. La pièce était baignée d'une douce lumière orangée. En arrière-fond, la télévision diffusait une émission qui n'avait pas grande importance. De toute façon, il n'y avait aucun spectateur pour s'y intéresser.

Taehyung s'avança à pas de loup dans la pièce, ne souhaitant pas faire de bruit. Il se positionna proche du canapé, juste devant une masse informe, mais surtout, très endormie. Jeongguk s'était laissé prendre par le sommeil alors qu'il était en train d'écrire sur son prochain livre, son ordinateur encore ouvert sur lui.

Une main sur le cœur, le professeur souffla, soulagé.

Son inquiétude se dissipait petit à petit, au même rythme que les battements de son cœur qui se stabilisèrent. Il reporta son attention sur le corps de Jeongguk et lâcha un sourire attendri avant de tirer le plaid pour recouvrir son cadet. Il récupéra l'ordinateur portable qu'il posa sur la table basse et s'agenouilla ensuite face au châtain.

― Hé, trésor... chuchota-t-il.

D'un geste délicat, Taehyung replaça une mèche de cheveux de Jeongguk, libérant son visage. Il prit quelques secondes pour l'admirer et fut, comme à chaque fois, époustouflé par sa beauté.

― Mon ange, réveille-toi, dit Taehyung d'une voix toujours relativement faible.

Jeongguk papillonna des yeux, un peu perdu. Il mit du temps à s'adapter à son environnement, tournant plusieurs fois la tête avant de tomber sur le regard tendre et envoûtant de Taehyung. Il s'étira et lui offrit un sourire un peu bancal en raison de ses traits encore endormis.

― Salut, ronronna Jeongguk.

― Bonsoir, lui murmura en retour Taehyung.

Le romancier pouffa légèrement.

― J'ai comme une impression de déjà-vu.

― N'est-ce pas ? lui sourit son aîné.

Leurs orbes s'accrochèrent à nouveau, puissamment. Taehyung perçut dans ceux de Jeongguk une lueur un peu malicieuse qui semblait lui souffler une demande muette.

― Tu sais que tu peux tout me demander, hm ?

Jeongguk rougit.

― Est-ce que... je peux avoir un câlin ? demanda le romancier en se triturant les doigts tel un enfant qui quémanderait une sucrerie.

Le visage baissé vers son torse, il ne vit pas le corps de Taehyung se relever pour se mettre à son niveau. Ce n'est que lorsqu'il sentit des bras chauds l'entourer qu'il comprit et se décala vers le fond du canapé pour permettre au grisé de s'allonger à côté de lui.

Et tandis que Jeongguk se tournait pour se mettre sur le flanc et se coller davantage à Taehyung, le plus âgé le couvrait d'un regard amoureux.

Les pupilles brillantes d'un amour pur, sincère et véritable.






☆★☆

Hello, vous allez bien ?

L'update du jour est un simple chapitre de transition qui reste néanmoins très soft entre notre Taekook qui se rapproche de plus en plus !

Je sais pas vous, mais moi j'aime beaucoup leur relation basée sur le respect mutuel, la douceur et l'observation de l'autre.

Le chapitre 18 va suivre assez rapidement, peut-être même lundi ou mercredi !

À bientôt,
Ostaraa_
♡︎♡︎

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