Chapitre 26


Chapitre 26

Des sensations grisantes, une adrénaline débordante, le rêve de voler était devenu réalité pour les élèves qui étaient au comble de l'excitation en chevauchant leur balai. Norbert était le seul à ne pas prendre un véritable plaisir à cette action. Ses mains se contractaient sur le bois rêche de son balai, le froid mordait ses pommettes qui n'avaient pas la chance d'être recouvertes. Il avait de plus en plus de mal à respirer, et il sentait une odeur d'orage... Au-dessus d'eux les nuages menaçaient. Ils n'allaient pas tarder à éclater dans un déluge de pluie. Norbert les regardait avec une certaine appréhension. Il aimait les averses, mais pas quand il se trouvait sur un balai à une cinquantaine de mètres du sol.

– Tout va bien, Newt ? cria Leta en voyant qu'il avait stoppé sa montée.

– Hum, pas vraiment, je crois que je vais redescendre à la surface du lac.

– Ok, on y va.

– Non, tu peux continuer sans moi, je vais faire attention.

– Mais bien sûr, on est une équipe, signala la jeune fille qui n'avait pas l'intention d'abandonner son camarade.

Norbert était à la fois touché et gêné. Il culpabilisait de l'empêcher de profiter pleinement des cours de vol, mais en même temps il était ravi d'avoir son soutien.

– Et surtout, je ne veux pas faire perdre 10 points à ma maison, ajouta-t-elle avec humour.

Les deux amis piquèrent doucement vers le bas, laissant derrière eux les cris enthousiastes des autres élèves. Plus Norbert s'approchait du sol, plus la boule dans sa gorge se dissipait. Heureux, il ne retrouva pas le plancher des Trolls, mais la surface scintillante et envoutante du lac Noir. Leta s'en approcha bien plus encore et du bout des doigts en caressa l'étendue.

– Tu ne devrais pas faire ça, déclara Norbert.

– Pourquoi ? Un beau Selkie risquerait de m'attraper le bras, m'emmener dans l'eau et me noyer ?

Le Poufsouffle la regarda sans comprendre son humour. Ce qui amusa beaucoup Leta.

– Je suis sérieux tu sais, personne ne sait quelles créatures magiques se trouvent dans les profondeurs de ces eaux.

– Toi qui prônes la sauvegarde de ces animaux fantastiques, tu es en train de me dire qu'elles sont dangereuses ?

– Bien évidemment qu'elles le sont. Il faut les étudier pour les comprendre. Tu ne peux pas t'approcher d'un hippogriffe sans l'avoir regardé dans les yeux, t'être incliné devant lui en gage de respect et attendre patiemment son salut, expliqua Norbert avec application.

– J'y penserai la prochaine fois que j'en verrai un, le taquina Leta qui remonta tout de même dans les airs.

Les deux élèves restèrent un moment à contempler cette immensité. Norbert rêvait de plonger dans ces eaux pour découvrir toutes les créatures qui s'y trouvaient. C'était pour lui bien plus engageant que de voler sur un balai.

Tandis que son regard se perdait dans les vaguelettes qui dansaient à sa surface, Norbert ne vit pas l'ombre menaçante qui s'approchait.

– Newt, il y a un truc étrange, commença Leta qui avait perçu le danger.

Norbert n'eut pas le temps de comprendre ce qu'il se passa. Une masse de petites créatures se propulsèrent hors de l'eau pour l'agripper et l'emmener avec eux aux tréfonds du lac.

– Newt ! hurla la Serpentard en agitant désespérément sa baguette.

Malheureusement, la seule chose qu'elle put faire c'est d'appeler leur professeur avec un sortilège Lumos particulièrement puissant.

Malgré la peur et le manque d'oxygène qui se faisait déjà sentir, Norbert ne paniqua pas. Il observa les démons des eaux autant qu'il le put. Les Strangulots étaient trop nombreux, se débattre n'aurait servi à rien sauf à s'épuiser plus rapidement. L'eau lui léchait le visage et rendait plus lourds ses vêtements tandis que les doigts longs et fins des êtres du lac collaient ses chevilles pour l'entrainer toujours plus bas. La main droite de Norbert n'était pas prisonnière, mais il ne connaissait pas encore de sort offensif, et il n'arrivait toujours pas à maitriser le sort de Têtenbulle. Il ne lui restait qu'une solution. Il attrapa dans la poche de sa cape le coquillage que Méridia lui avait offert et utilisa son dernier souffle pour lui demander de l'aide. La pression de l'eau, la fatigue et l'absence d'oxygène eurent raison de lui. Il ne ressentit aucune douleur, non, il eut simplement l'impression de s'endormir.

Un coup brutal lui écrasa le thorax suivi d'une texture froide et visqueuse sur ses lèvres. De l'air emplit aussitôt ses poumons et Norbert se redressa précipitamment pour sortir toute l'eau nauséabonde qui avait pris possession de lui. Il mit quelques secondes à comprendre ce qu'il s'était passé, l'attaque sans raison des petits démons et son appel désespéré dans le coquillage. Il cligna des yeux, essuya la vase poisseuse et malodorante de son visage et regarda sa sauveuse. Deux grands yeux jaunes l'observaient avec inquiétude.

– Méridia, merci, souffla-t-il avec quelques difficultés.

Puis, il se rallongea sur la pierre froide et humide pour reprendre ses forces. Il examina le plafond de ce qui devait être une caverne.

– Que s'est-il passé ? demanda-t-elle en dévisageant ce petit humain si peu résistant.

– Je ne sais pas trop, nous stagnions au-dessus du lac avec Leta en attendant la fin du cours de vol, raconta Norbert. Ils ont surgi de l'eau et ont essayé de me noyer.

– Les Strangulots sont agressifs, mais ils n'attaquent pas les humains qui ne sont pas sur leur territoire.

Méridia rampa jusqu'à une cavité remplie d'eau et en sortit un démon des eaux. Norbert se tourna pour regarder la créature. D'apparence humanoïde, il n'était pas bien grand. Sa mâchoire était petite, mais pourvue de dents tranchantes, ses yeux, enfoncés dans leurs orbites, étaient d'un blanc macabre et des dizaines de cornes aiguisées recouvraient cette bestiole verdâtre. Mécontente d'être ainsi sortie de son habitat, elle poussa des petits cris particulièrement dérangeants. La Selkie le fit taire d'un claquement de langue. Le Strangulot se ratatina sur lui-même par peur de représailles. Norbert observa Méridia lui parler dans une langue propre aux peuples de l'eau. Ce n'était pas vraiment des mots, mais des bruits de bouche impossibles à décrypter pour le jeune humain. Pourtant, il comprit qu'elle ne se déroulait pas bien quand les sons se firent plus forts.

Norbert se redressa et attendit la fin du dialogue. Il n'était pas à l'aise avec ses vêtements mouillés et ce froid menaçait de le rendre malade. Et surtout, il s'inquiétait pour Leta. Elle devait se ronger les sangs de ne pas le voir remonter à la surface du Lac. Malgré ça, il patienta.

Mérida poussa un juron et jeta le Strangulots dans la cavité remplie d'eau. Elle semblait confuse et en colère.

– Que se passe-t-il ? osa demander Norbert.

– Ils... Le peuple de Strangulots vient de subir de lourdes pertes. Beaucoup ont disparus et ils pensent que c'est de la faute des humains.

– Pourquoi ?

– Je n'ai pas bien compris, mais pour eux vous êtes responsables et vous devez payer. Je te conseille d'en parler avec votre chef, les abords du lac ne seront pas sûrs pour les jeunes sorciers...

– Tu as raison, j'en parlerai à notre directeur. En attendant que cela se calme, il prendra des mesures.

Norbert s'arrêta un instant pour penser à la première mise en garde de Méridia.

− En début d'année scolaire, tu nous avais dit que délivrer les fantômes nous soumettrait à un sort funeste et qu'ils étaient dans leur maison. Tu savais tout ça grâce aux créatures des bas-fonds. Comment pouvaient-ils être au courant et est-ce que cela peut avoir un rapport avec la disparition des Strangulots ?

Les iris jaunes de la Selkie brillèrent d'une manière dangereuse. Tout en continuant de fixer Norbert, elle pencha la tête à quarante degrés. Méridia lui semblait alors agressive et particulièrement dangereuse, mais il n'en démordit pas et ne baissa pas les yeux. Il devait savoir pour venir en aide à la famille de ses Cynospectres.

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