Prologue
— Par le sang des quatre Divinités, Kal, Rosar, Elaïa et Bellori, je vous nomme apprentis Chasseurs de Créatures. Que le Dragon Noir vous protège.
Les quatre apprentis, à genoux sur les pierres blanches du Temples déjà en ruines depuis des siècles, se levèrent avec émotion. Tous les sacrifices qu'ils avaient fait, allaient enfin être récompensés. Une flamme nouvelle brûlerait dans leur cœur. Ils tendirent, la tête haute et fière, une main ouverte face au ciel et leur poing à la verticale au centre de celle-ci. Puis, dans un même temps, ils récitèrent d'une voix solennelle :
Au nom des quatre Divinités, devant les yeux du Dragon Noir, je jure que je me dévouerai corps et âme aux Mondes Réunis. J'aiderai mes semblables et toutes personnes dans le besoin. Qu'importe le danger, j'accomplirai mon devoir.
Les quatre jeunes reprirent leur souffle, avant de s'engager d'une même voix :
— L'abandon est le crime sacré. Alors je promets que force et courage seront en moi, et que mon nom inspirera à mes frères, humilité et respect.
L'Ancien se plaça face à eux, avec dans sa main, un bol. Il leva ce dernier en direction du ciel, tout en priant, dans une langue dont le sens ne pouvait être compris que par ceux dont la connaissance semblait infinie. Le contenu du récipient, commença à bouillir, tout en virant petit à petit au noir. Quand la substance visqueuse redevint, lisse, l'Ancien s'approcha des jeunes initié, pour leur dessiner le symbole de leur fonction. Elaïa retira donc sa toge blanche, dévoilant ainsi sa poitrine, au grand malheur de Kal, qui se sentit obligé, par respect, de détourner le regard. Le vieil homme plongea deux doigts dans la substance noire, et traça les contours d'une tête de Dragon sur la poitrine de la jeune fille. Il souffla ensuite sur son tracé, pour qu'il ne puisse s'effacer. Tandis que la jeune blonde se rhabillait, se fut autour de ses autres camarades, qui à leur tour se sentirent comme galvanisés par une puissance divine. Tout en reculant et de sa voix posée, l'Ancien leur confia :
— Avec ceci, tous vous reconnaîtront. Bon voyage, mes enfants. Que le Dragon Noir vous protège.
Kal lui adressa un petit sourire, avant de serrer sa toge au niveau de son cœur. Le garçon s'appliqua à passer son doigt sur le symbole, représentant le profil du Dragon Noir. Leur Dieu tout puissant, au cœur de toutes coutumes chez leur peuple.
Ce fut Elaïa qui s'agenouilla la première face au Dragon. Elle ferma les yeux, et remercia sa Divinité. Puis elle se leva pour s'avancer devant le bol en chêne, déposé au pied de la statue, où elle empoigna la dague en argent déposée sur une feuille de fougère. Son cœur battait fort dans sa cage thoracique, comme s'il voulait se projeter à l'extérieur. Elle fixait son poignet, tout en coupant sa peau. Puis, en savourant la chaleur du liquide qui coulait sa main, elle prononça :
— Par le sang, je te prouve ma loyauté. Nous sommes à présent liés d'un lien indéfectible, que rien ni personne ne pourrait briser.
Puis, comme à son habitude, sûre d'elle, la tête haute et le regard perçant, elle retourna au côté de Kal, qui à son tour se plaça face à la statue.
Après qu'ils furent tous allés prier, ils descendirent les marches du Temple pour rejoindre leurs parents qui les attendaient impatiemment, au premier rang de l'immense foule. Cette dernière se dirigeait avec excitation vers le buffet.
Le Temple était construit sur une grotte, dont l'entrée se trouvait interdite au public. Seuls les Anciens pouvaient y pénétrer pour la prière et les offrandes. Les Ruines du Temple, là où tout jeune recevait son titre, se trouvait être une structure ouverte, puisqu'elle ne possédait ni toit, ni mur. Seulement un sol en pierre, accompagné de plusieurs débris, et cailloux. Il n'y avait que quelques piliers asymétriques, sculptés pour entourer le sol. L'entrée de la caverne, à droite des marches, était constamment gardée, et permettait de se rendre au sous-sol du lieu sacré. Tout cet espace était entouré par la végétation de la forêt environnante, et permettait de garder un calme global. Il n'y avait que la grande place en face de la grotte qui n'était pas envahie de plantes, permettant donc l'accomplissement des diverses fêtes religieuses.
Les parents félicitèrent en premier leur progéniture, avant de complimenter leurs camarades et de se rendre à la fête dédiée aux nouveaux Wiräs.
Les Wiräs représentaient les Chasseurs de Créatures les moins compétents. Ils n'avaient aucune aptitude particulière, et si leur statut persistait avec le temps, ils devenaient parfois la risée des passants. Bien que rares étaient ceux qui savaient les reconnaître. Mais les jeunes atteignaient souvent le grade le plus commun quelques années après leur première cérémonie. Comme tout Chasseur, les Traqueurs ne pouvaient vivre de leur profession qu'après un certain temps passé à économiser. Tuer était un devoir, pas un métier. Ce pourquoi, la plupart du temps, ils vivaient au gré de leur voyage, sans avoir de réel foyer, en se nourrissant de ce qu'ils trouvaient dans les forêts. De temps à autre, ils leur arrivaient d'aider une personne en échange d'une récompense, mais la majorité de leur temps, ils le concentrait à la régulation des populations dévastatrices. Les Chasseurs les mieux répertoriés, avec le plus de talent, pouvaient être gradés : Scelleurs.
Beaucoup de monde était présent pour les festivités, et nombreux étaient ceux qui dansaient au rythme des percussions, suivant la chorégraphie des flammes. Elaïa entraîna le groupe vers le grand buffet, tandis que leurs familles partirent danser. Tous commencèrent à boire et à manger en riant. Bellori draguait Rosar, qui n'était pas très réceptif, tout le contraire d'Elaïa et Kal qui dansaient, se collaient, s'embrassaient et s'embrasaient, sous l'ambiance survoltée de la fête. Pourtant, malgré la joie qu'il pouvait éprouver, Kal ressentait une étrange pression sur ses épaules...
Bellori prévint rapidement Elaïa et Kal qu'elle s'éclipsait de la fête pour aller prendre un peu l'air, seule. La jeune fille, aux beaux cheveux roux, se sentait vexée par l'attitude de celui qu'elle aimait. Il n'avait d'yeux que pour une fille qu'elle trouvait sans intérêt. En marchant vers dans la forêt, elle prit plaisir à regarder à travers le feuillage des arbres, le ciel étoilé. Il n'y avait pas un nuage. Le sol restait quelque peu humide, malgré la chaleur qui pouvait être étouffante pour certains. Elle se mit à grimper à un arbre, comme elle aimait tant le faire, profitant ainsi d'une belle vue sur l'immense lac et la lune qui s'y reflétaient. Au loin, on pouvait entendre une chouette hululait. Une légère brise se levait.
Au niveau de la fête, Kal s'amusait beaucoup moins depuis quelques minutes. Une sensation étrange, pesante, qu'il ne pouvait décrire se faisait de plus en plus forte.
— Elaïa, lui dit-il en haussant la voix pour se faire entendre.
— Oui ?
— Viens avec moi.
Il lui prit la main sans attendre de réponse, ce qui était loin de déplaire à la jeune fille. Elle aimait sa tendance à décider sans attendre le moindre accord, la fougue sans limite qui l'habitait.
Sur le chemin, Elaïa eut l'envie d'entamer une discussion, mais au vu de la tête que tirait Kal, elle savait que ça n'était pas le bon moment. En marchant sur la petite route de terre, ils croisèrent Bellori, qui adressa un clin d'œil à Elaïa.
Quand ils furent dans un endroit plus calme, dans la forêt face au lac, ils s'assirent sur des rochers. Un lourd silence passa. Kal semblait soucieux, il ne savait quoi dire... La petite blonde le regardait tendrement, tout en lui prenant la main. Elle n'aimait pas le voir dans cet état.
— Parle-moi Kal...
— Je ressens quelque chose... une présence anormale. Je sens une chose que je n'arrive pas décrire, à voir, ni même à entendre.
— Mais qu'est-ce que tu racontes ! Si un Esprit était là, je le saurais aussi. Tu t'inquiètes pour rien, les épreuves sont passées, la pression doit redescendre maintenant. Regarde ! La nuit est claire, les étoiles sont scintillantes. Profite !
Elle le regarda avec tendresse, en passant une main sur sa joue.
— Je sais que ça a été compliqué pour toi, car tu ne savais pas toujours cibler précisément l'endroit où se trouvait un esprit. Mais tu t'es entraîné, et maintenant tu n'as plus rien à craindre. Relâche-toi un peu et prend du bon temps.
Kal pinça les lèvres, il n'était pas convaincu. Ce sentiment d'inquiétude ne voulait pas le quitter. Il avait l'intime conviction que quelque chose se tramait dans le silence. Mais après tout, c'est vrai que cette dernière épreuve l'avait bien secouée. Les difficultés de cette épreuve avaient engendré chez le jeune Chasseur une inquiétude constante à la moindre sensation étrange. Il devait se calmer, et ça irait mieux.
On distinguait trois épreuves : une en automne, une en hiver et la dernière au printemps. Celle d'automne consistait à évaluer l'aptitude des apprentis à aider leurs camarades, et à protéger une population. Elle avait été baptisée : l'Épreuve de Bonté. En hiver, on examinait leur capacité à survivre dans des conditions extrêmes, à dévoiler leurs capacités physiques et à prouver qu'ils maîtrisaient la force du Chasseur de Créatures qui avait dû s'Éveiller au cours des dernières années. On la nommait : l'Épreuve de la Force. Puis, au printemps il y avait celle des Esprits Rôdeurs, qui évaluait la capacité à localiser ces derniers, à déterminer leur espèce et à les éliminer.
Kal voulut répondre, mais n'en eut pas le temps. Elaïa grimpa sur ses genoux, passa ses bras autour de son cou, et lui intima :
— Mais puisque nous sommes seuls...
— Arrête... tu sais très bien que nous n'avons pas le droit.
— Suivre les règles n'a jamais été notre fort. Et puis on a dix-sept ans.
— Mais pas vingt ans.
Elle planta ses yeux dans les siens. Le vent souffla sur leur peau mate, faisant voler les longs cheveux blonds de la fille.
— Tu vas vraiment me faire de la résistance, alors que tu en meurs d'envie ?
Pour seule réponse, il l'embrassa fougueusement.
— Tu vas me le paiera de m'avoir rendu si faible.
— On verra bien !
Leurs mains s'aventuraient un peu partout sur leur corps, tandis qu'ils s'embrassaient sous la nuit étoilée, au clair de lune. Plus le temps passait, plus leur corps se consumaient d'un désir qui leur était encore inconnu auparavant.
Ils passèrent la nuit dans les bras l'un de l'autre.
Le lever du soleil approchait, lorsqu'ils furent réveillés par des cris stridents. Ils se rhabillèrent en vitesse, et coururent le plus rapidement possible dans la direction du vacarme. Pourtant, malgré l'urgence, ils s'arrêtèrent bien vite.
— Le bruit vient de droite et de gauche à la fois ! paniqua Elaïa. Je vais à droite, tu vas à gauche.
— Non. On ne se sépare pas. Le carnage se produit à la fête, j'en suis sûr.
— Comment le sais-tu ?
— Aucune idée. Mais dépêche-toi !
Les cœurs des Wiräs battaient la chamade. Sauf que l'un avait peur. L'autre était rempli d'adrénaline.
Quand les jeunes amants arrivèrent sur place, la panique avait déjà gagné la foule. La scène semblait surréaliste. Les convives criaient et couraient dans tous les sens, mais rien ne bougeait autour d'eux. Elaïa se hâta vers leurs amis et tous trois essayèrent de combattre cette force invisible. Mais ils n'étaient pas assez puissants. Kal resta seul. Il voyait les habitants de son village tomber les uns après les autres, sans la moindre trace de sang, créant une panique plus grande encore. Ses amis n'arrivaient pas à utiliser leur force cachée pour l'attraper ou pour communiquer avec la chose, comme ils l'auraient fait avec n'importe quel autre Esprit Rôdeur.
De son côté, instinctivement, Kal tente de visualiser mentalement cette chose dont il avait senti la présence. Il commença à faire le vide dans son esprit, puis à se concentrer sur toutes les sensations qu'il ressentait. Tout était noir. Ses paupières voulaient s'ouvrir, mais il s'y opposait. Le jeune homme était perdu. Jamais il n'avait été entraîné à ça. Pourtant, il sentait comme un lien, dont il ne connaissait pas la nature, entre lui et cette chose. Il ait sa présence à un endroit, puis rapidement à l'opposé. L'air ne changeait pas de température, pourtant sa nuque était couverte de frissons. Kal se concentra sur ses impressions, et cette sensation si particulière. Comment était cette chose ? Blanche, transparente, opaque... noire ? Noire. Il ne voyait que ça. Tout était d'un noir flou. Ou du moins, c'est ce qu'il percevait. Il sentit quelque chose arriver face à lui, et ouvrit doucement ses yeux qui avaient pris une teinte rouge foncé. Mais il n'eut pas le temps de comprendre d'où venaient tous ces cadavres ni de se retourner.
Il tomba d'un coup, comme mort.
Heyy ! J'espère que vous allez bien.
Voici le prologue de ce livre, j'espère qu'il vous a plus. N'hésitez pas à me faire part de vos critiques, c'est avec plaisir que je les lirais !
Bonne journée/soirée.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top