Chapitre 7 - 3
III
Le lendemain, après avoir passé une bonne nuit de sommeil, Kal descendit pour boire une bière. Sa bière matinale. Il profita de ce temps pour dévisager la foule. L'ivresse matinale de certains faisait peur à voir. Kal dégustait chaque gorgée, pour mieux se remplir l'estomac. La saveur de sa boisson lui causait quelques réflexions. Jamais il n'en avait connu de semblables
Lorsqu'il eut fini son "repas", il s'en alla explorer le village. L'ambiance était assez banale, et on ressentait une certaine méfiance envers les étrangers, qui devait certainement être dû aux nombreux assauts que le village avait subi par le passé.
Pour éviter de subir le regard insistant et oppressant que les personnes jetaient sur les voyageurs, Kal avait mis sur sa tête sa grande capuche. La caillasse lui collait aux bottes. Il observait son entourage, et le milieu dans lequel il évoluait d'un œil attentif, histoire de ne pas manquer un détail qui pourrait lui être utile. En apparence tout semblait paisible et normal, mais, avec un peu d'expérience, une présence lourde pouvait être ressentie. Le Chasseur se sentait épié, mais il ferait avec. Pour l'instant, ce qu'il cherchait, c'était une petite boutique, bibliothèque, dans laquelle il pourrait se renseigner un peu plus sur les gardiens de la forêt, qui entouraient la cité.
La ville était plutôt grande, malgré ses petites rues étroites. La boue la rendait plutôt sale, mais on pouvait facilement deviner que lorsque le temps était plus clément, les ruelles demeuraient plus agréables, donnant un peu de charme à la cité. Les enfants se montraient dégourdis et galopaient un peu partout en criant, au grand damne de Kal qui ne les supportait pas. Souvent les adultes les répriment à cause de leur dynamisme, mais rien ils recommençaient une fois que leurs aînés avaient le dos tourné. Parfois, on rencontrait des chats errants, ou bien encore des chiens. Kal croisa un ou deux cavaliers, certainement des voyageurs, qui faisaient halte ici. Des marchands ambulants arrivaient ou repartaient. Tout ce dynamisme donnait un peu de vie à la ville. Ce caractère beaucoup apprécié de la population, ne séduisait en rien le jeune homme. Toute cette agitation l'oppressait. Pourtant, quand il était enfant, la foule ne le dérangeait pas le moins du monde, c'était même presque le contraire. Tout son village, et même les professeurs de l'école, le connaissait pour être ce petit bonhomme qui parle à tout le monde et court partout. Mais après la tragédie survenue, il avait perdu toute sa joie de vivre. Un peu comme si plus rien ne pouvait le rendre heureux. Comme si la majeure partie de ses émotions se révélait terrée dans son réceptacle.
Il s'écarta pour laisser passer une charrette tirée par un cheval qui semblait fatigué. Le Chasseur la suivit brièvement du regard et continua sa route. Autour de lui, le bruit environnant, qui s'avérait fort déplaisant, semblait plus fort depuis quelques minutes, ce qui indiquait à Kal qu'il se rapprochait du centre ville. Un enfant le bouscula, puis se remit à courir après avoir balbutié ce qui devait être des excuses. Ceci finit d'appuyer l'avis plutôt négatif de Kal sur la ville.
Après avoir marché un peu, il demanda à quelqu'un, en relevant sa capuche pour paraître plus avenant :
- Excuse-moi, je cherche une boutique, où je pourrais trouver de quoi me renseigner sur les environs. Y en aurait-il une ici ?
- Oui, continue tout droit, tourne à droite sur la rue principale, et il y a une librairie.
- Merci, conclu-t-il rapidement avant de se mettre en route.
Kal venait de trouver un point positif à cette cité : certaines personnes étaient aimables avec les étrangers. Il n'irai pas jusqu'à dire agréable, mais on pouvait apprécier leur attitude.
Le Chasseur continuait sa route, en suivant les indications. Trouver un moyen de communiquer avec les Géants était une urgence prioritaire.
Quand il entra dans la boutique, après quelques minutes, une agréable odeur de camomille flottait dans l'air.
- Bonjour, salua la vendeuse.
- Bonjour, lui répondit-il en s'avançant dans la pièce en retirant sa capuche, je cherche à m'informer sur la forêt qui entoure votre ville. Auriez-vous des livres ou autres témoignages qui pourraient m'aider ?
- Eh bien j'ai effectivement un journal qui me reste, où on parle des alentours mais c'est tout ce que je vais avoir.
- Je vais le prendre, merci.
Ce n'est pas avec ça que je vais avancer, pesta-t-il à l'intérieur de lui-même.
La femme, qui d'après son physique et sa posture se trouvait à la moitié de sa vie, revint dans l'avant de sa boutique, derrière le comptoir.
- Une pièce, lui dit-elle.
Il la lui donna, puis lui demanda :
- Personne ne sort du village, la nuit ?
- Non, jamais, c'est bien trop dangereux. Pourquoi ?
- Je me demandais, c'est tout. Merci, et bonne journée.
- Au revoir.
Elle le regarda partir, assez surprise par cet échange aussi court que froid. Il fallait dire que Kal n'était pas un garçon très avenant
En sortant de la librairie, assez mécontent, quelqu'un lui tira la manche. Instinctivement, il retira violemment son bras et mit sa main dans son dos, comme tout voyageur s'apprêtant à dégainer. La personne fut déséquilibrée, et sans céder à la panique, toujours sans montrer son visage, elle lui souffla :
- C'est moi. Suis-moi s'il te plaît.
Directement Kal reconnu la voix, et suivit à distance la personne en question, jusqu'à une petite ruelle. Cette dernière était vide. Ce qui n'était encore qu'une silhouette, attendit que le Chasseur soit près d'elle pour ouvrir une petite porte, après avoir vérifié une dernière fois que personne ne les suivait.
Kal entra dans la petite pièce et analysa rapidement la situation et l'endroit où il se trouvait.
- Je croyais que tu ne pouvais plus m'approcher ? questionna-t-il sans aucune formule de politesse.
- Oui, mais tu as l'air d'être quelqu'un de fort et qui pourrait me venir en aide, lui répondit la jeune fille brune.
- Je ne sais quel est ton nom, mais ça m'arrange, je voulais te voir aussi.
- Erlis Leoran. Pourquoi vouloir me rencontrer ?
- En règle générale, personne ne me scrute avec autant d'intérêt, lui répondit-il en s'asseyant sur une chaise, tout comme la fille.
- Je suis désolée... Mais je t'ai vu la nuit où les Géants sont sortis. Tu ne les as pas attaqués, sinon tu serais déjà mort. Je me suis donc dit que tu n'étais pas les autres, et quand on t'a appelé Chasseur de Créatures, j'ai compris. J'ai tout de suite su que c'était de toi dont nous avions besoin.
- Nous ?
- Oui, ces grandes Créatures sont mes amies. C'est avec elles que je reste la plupart du temps, quand je suis seule.
- Je voulais apprendre à communiquer avec ces Géants, pour comprendre le problème qu'il y a, mais apparemment, je ne vais pas en avoir besoin.
- Oui, je vais pouvoir tout t'expliquer, et je servirai d'intermédiaire entre vous.
Si on se fiait à son visage, la jeune fille ne devait pas avoir plus de seize ans, affichait une mine triste, malgré tous les efforts qu'elle faisait pour ne pas montrer son désarroi. Elle portait une jupe, qui laissait apparaître ses maigres jambes, ainsi qu'une cape recouvrant son chemisier taché de sang. Kal continua de la détailler, s'efforçant de ne pas penser aux horreurs qu'elles devaient subir. Il n'était pas là pour jouer le héros. Ses cheveux, lui arrivant jusqu'au milieu du coup semblait sec et malpropre, ce qui contrastait avec son visage qui n'avait pas la moindre écorchure. Ce point étonna d'ailleurs Kal, mais il ne posa pas de question.
Après quelques instants, elle prit une grande inspiration, et commença son récit. Son visage et le ton de sa voix trahissait son bouleversement :
- C'était il y a environ un mois. Comme à mon habitude je me rendais à l'Est pour leur rendre une petite visite. La journée, ils ne ressemblent toujours qu'à de simples arbres, j'imagine que tu le sais. Donc, je me suis adossée à un tronc, et je me suis assoupie. En me réveillant, j'ai remarqué une trace sur l'écorce. Après l'avoir examinée, j'ai constaté qu'ils avaient été écorchés. Mais pour s'en prendre à des colosses comme ça, et savoir où les trouver, il ne faut pas être n'importe qui. Alors je suis restée tard le soir, mais comme rien ne se passait, j'ai fini par rentrer chez moi, avec ma famille. En revanche, le lendemain, je vis une nouvelle marque. Et ce fut comme ça durant plusieurs jours. Mais une nuit, pendant que je quittais la maison, comme il m'arrive de la faire parfois, j'ai vu pour la première fois les Géants marcher. J'ai alors confirmé ma théorie : il se passait quelque chose de dangereux. D'habitude, ils ne se réveillent jamais. Je suis allée dans leur direction, et j'ai aperçu une sorte de mage tout en noir. Il dégageait une aura très puissante que je n'avais encore jamais ressentie. Il s'attaquait à un Géant de la forêt qu'il avait isolé, avec beaucoup d'assurance, et beaucoup de force. Je n'aurais pu imaginer cela. Le Géant essayait de se défendre, mais il n'y arrivait pas. L'homme attaquait toujours plus fort, jusqu'à réussir l'exploit de le mettre à terre. Je n'ai pas pu m'empêcher de crier. Il m'a entendu et durant un instant a baissé sa garde, ce qui permit à un autre colosse, qui arrivait en renfort, de le frapper. Je me suis immédiatement mise à courir le plus vite possible, et je me suis réfugiée dans ma chambre. Comme une lâche. Je regrette tellement de ne pas être intervenue. Surtout que le corps de cet être si brave, a disparu.
Kal, qui avait écouté tout son discours en fixant le coin du mur en s'imaginant la scène, prit la parole :
- Tu ne pouvais rien faire, et en prime tu aurais péri. Pourrais-tu me faire une description de cet homme ?
- Je vais essayer, mais je ne l'ai pas bien vu. Il faisait nuit. Mais je crois qu'il avait une cape, avec une capuche, avec des gants. Il me semble qu'il est juste un peu plus petit que toi. Des flammes bleues jaillissaient de ses mains.
- Merci. Est-ce qu'il a prononcé des incantations, des formules ?
- Oui.
- Tu te souviens de certains mots ?
- Non, désolée.
- Tu as revu le Mage depuis ?
- Non, je n'ai pas eu le courage d'y retourner. Mais vu les marques sur les troncs, il est encore présent.
Kal tâta et remua sa jambe, puis en conclut qu'au vu de son état ce matin, le repos et la lotion de roche avait permis une belle avancée dans la cicatrisation. Mais était-ce suffisant pour se battre face à une telle puissance ? Il n'y réfléchit même pas une seconde.
- On y retournera ce soir, et j'irai défendre la forêt. Tu me guideras jusqu'aux Géants, qui me guideront au Mage. Ça te va ?
- Oui, merci infiniment !
Hey !
Comment allez-vous ?
J'espère que ce chapitre vous a plus ! En tout cas on entre bientôt dans le vif du sujet :)
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top