Chapitre 21 - 3
III
Dès les premiers rayons du soleil, Kal ouvrit les yeux, alors que l'autre homme ronflait encore. Instinctivement, il descendit de son perchoir, pour aller vérifier l'état des chevaux, qui manifestement demeuraient en bonne forme. Il gratta un peu son cheval, avant de réveiller son compagnon qui grommela :
- Quoi ? Tu es vraiment obligé de me déranger ?
- Le soleil vient tout juste de se lever. Il faut que l'on parte.
- Bien sûr jarrive.
Puis le bougon retrouva le sol.
- Tourne-toi, ordonna-t-il à Kal qui sexécuta.
Evrard en profita pour troquer son masque et son foulard contre son éternelle cape à capuche, avant d'aider Kal à seller les chevaux.
- On retourne sur le sentier, et on avance. Il faut sortir de la zone au plus vite.
- Pourquoi tant de précipitation ?
- On va dire que j'ai un mauvais ressenti. On aurait dû entendre des lycanthropes hurler cette nuit, mais rien ne s'est produit. Ce n'est pas normal. Pas du tout même. Puisque cela signifie qu'une autre créature rôde dans les parages.
- Tu penses à une créature en particulier ?
- Un Déserteur.
- Il y en a par ici ? s'étonna Evrard.
- Oui, ils vivent en petit groupe de trois ou quatre, et s'amuse à terroriser les habitants de cette terre. S'ils nous tombent dessus, on sera dans de beaux draps, alors mieux vaut se dépêcher.
- Oui, tu as raison.
Ni une, ni deux, et ils étaient sur le dos de leurs chevaux. Comme les chevaux n'étaient plus protégés par les tissus, le groupe pressa l'allure pour rejoindre le sentier. Les Vers pouvaient être agressifs même leur proie en mouvement, ce qui les rendaient encore plus dangereux. Le sol humide enfonçait les chevaux, et de temps à autre, un squelette animal faisait son apparition. La quasi-totalité des arbres de cette partie de la forêt étaient morts, laissant à leur pied des branches et des feuilles aussi friables qu'un vieux croûton de pain. Un vent était en train de se lever à travers les arbres.
En arrivant sur le sentier, ils se mirent à galoper. Enfin, se fit surtout Kal qui imposa le rythme. Il sentait peser un regard sur eux. Un regard lourd et malveillant.
- Des Déserteurs nous observent. Il faut se dépêcher avant que le drame arrive !
- Oui ! Allons-y !
Les deux accélèrent leur allure. Kal montait bien mieux qu'Evrard à cheval, ce qui lui permettait d'être bien plus à l'aise et d'aller plus vite sans avoir la peur de tomber, contrairement au Possèdeur. Ce dernier rebondissait durant quelques foulées à intervalles irréguliers. Mais même si Kal en était conscient, il continuait d'aller toujours plus vite. Affronter un Déserteur ne l'enchantait pas du tout, mais il n'en était pas pour autant effrayé. Il avait déjà eu affaire à un être de cette espèce, et il n'avait pas le souvenir d'avoir ressenti une grande difficulté, malgré son jeune âge.
Les arbres défilaient à grande vitesse, et ce regard pesait toujours sur eux. Le vent leur fouettait le visage, et la crinière des chevaux volait. Écho était le meilleur des deux et commençait à distancer le deuxième duo, ce qui ne devait en aucun cas continuer.
- Ralentis Kal !
- C'est ce que je fais, mais avance plus vite ! On ne peut pas rester dans cette situation. Il nous reste environ cinq minutes pour atteindre la partie vivante de la forêt.
- Bien ! Allons-y dans ce cas.
Evrard se cramponna à la crinière de son cheval, et tendit ses jambes sans le faire exprès, pour ne pas tomber. Puis, plusieurs minutes plus tard, Kal repassa au trot, suivi de son compagnon qui ne se fit pas prier.
- Enfin !
- Tu n'as qu'à savoir monter.
Il ne répondit rien, vexé.
Environ une heure plus tard, le petit groupe arriva à un point d'eau, et les deux hommes en profitèrent pour remplirent leur gourde et laissèrent les chevaux s'abreuver et brouter un peu l'herbe. Le lac se trouvait en plein milieu des montagnes, et l'herbe demeurait aussi verdoyante que de jeunes bourgeons. L'air frais de la montagne contrastait avec la forêt dans laquelle ils avaient passé la nuit. Ici, tout semblait paisible, comme un endroit hors du temps, sans contexte
- Que penses-tu que nous allons trouver là-bas ?
- J'espère la pierre, sinon de multiples babioles, et je pense aussi des livres qui pourraient nous intéresser.
- Il y aura dautres personnes qui recherchent la même chose que nous ?
- Que nous ? Peut-être. Mais qui te cherche toi, oui.
- D'accord.
- Je ne serai pas toujours là pour te surveiller, nous allons devoir nous séparer pour chercher plus efficacement, donc méfie-toi.
- Oui, entendu.
Ils burent une dernière gorgée, puis repartirent dans les montages, pour rejoindre la forêt suivante. Les petits sentiers étroits ne permettaient qu'une allure calme telle que le pas, mais cela ralentissait fortement leur voyage. Kal écoutait le champ des oiseaux, et le bruit du vent se frotta au flanc des falaises. Un petit écureuil sauta sur les arbustes qui poussaient sur les murs de roches, avant d'atterrir sur la tête de Kal, puis dans son coup où il s'enroula en boule.
- Je crois que tu t'es fait un ami, commenta Evrard.
- Il doit partir.
À ces mots, le jeune homme emprisonna l'animal dans ses mains, avant de le libérer au sol. Le petit cria, mécontent, puis repartit aussi vite qu'il était apparu.
- Tu aurais pu lui laisser le temps de profiter de ton épaule, non ?
- Non.
Le Possèdeur n'insista pas, se retenant de critiquer sa froideur, sachant que ça ne servirait à rien. Un vague silence s'installa, laissant le chant de la nature parler à leur place. Kal observa le dos de l'homme qui l'accompagnait, il se mit à réfléchir à la manière dont il pouvait prendre les pouvoirs, ou capacités des autres. Il n'en parlait jamais. Une image lui vint peu à peu à l'esprit, celle d'un homme se penchant au-dessus d'un cadavre pour en récolter les propriétés. Kal ne pouvait rester avec cette vision à l'esprit, et demanda alors :
- Evrard ?
- Oui ?
- Comment fais-tu pour prendre le pouvoir d'autres créatures ?
Le concerné se racla la gorge.
- Ma nature me force à faire des choses qui ne sont pas glorieuses.
- Je veux savoir, affirma le jeune Chasseur dun ton sec et froid, qui ne laissait place à aucune contradiction.
- Bien. On va dire, que pour commencer, je repère une cible dans laquelle je descelle suffisamment dénergie. Ensuite je la tue, en faisant attention à ne pas abîmer son cur. Ce dernier pompe le sang, c'est donc ici que réside la partie avec la plus grande énergie. Ensuite, je n'ai plus qu'à le manger.
- Tu en as tué combien ?
- Je ne sais pas exactement. En un centenaire, on a le temps de voir le monde, et de faire des choses.
Kal fronça les sourcils.
- Que veux-tu dire par là ?
- Je veux dire que je nai aucune idée du nombre de créatures que j'ai assassiné.
- Tu dis que c'est ta nature qui te pousse à faire des choses. Ça veut dire que tu n'y prends aucun plaisir ?
- C'est plus complexe que ça. Les Possèdeur sont en général assez faibles, petits, et ont besoin du pouvoir d'autrui pour se développer et permettre à leur corps de grandir sans risque anormal de mourir. Au début, on est souvent répugné à cette idée, mais les années passant, on ressent comme un besoin que l'on doit assouvir.
- Si ça devient plus un besoin qu'autre chose, ça veut dire que tes capacités acquises se conservent ?
- En effet.
Kal serra les dents.
- Quand tu pars, c'est pour aller chasser ou-
- Non. Je vais vraiment chercher des informations. Je ne pars à la chasse qu''environ une fois par an, ou tous les six mois.
- Donc tu ne sais pas combien de pouvoirs et de capacités tu as actuellement, si ?
- Non, en effet. Parce que certains pouvoirs s'amenuisent avec les années, car ils sont faits pour durer un temps déterminé, ou bien ils s'annulent quand j'en absorbe un autre.
- Pourquoi ne fais-tu pas attention à cela ?
- Je ne peux avoir qu'un fragment des capacités ou des pouvoirs d'un individu, et je ne peux pas choisir.
- Tu as des capacités sensorielles ?
L'homme qui le devançait ricana.
- Je veux bien te parler de ma nature, mais certainement pas de ce que je possède comme atout.
- Je m'y attendais. Pourquoi m'as-tu dis tout ça ?
- Parce que nous devons être égales, si nous voulons travailler ensemble. Je connais le fonctionnement de ta nature, tu connais la mienne.
- C'est honnête de ta part.
- Je ne suis pas un voyou, j'espère que tu le comprendras un jour.
Un silence fut sa réponse, mais néanmoins, Kal réfléchissait à lui accorder une partie de sa confiance, même si l'idée de le tuer au moindre souci demeurait présente.
Hey !
Comment allez vous ?
Le nouveau chapitre est donc posté, et j'espère qu'il vous a plu :)
Bonne soirée !
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