Chapitre 3: Cali, une fille ordinaire?

          La semaine se passa tranquillement, autant pour Athénaïs que pour le reste de sa classe. Cali récupérait les cours un à un, et profitait des cours d'anglais et de TIPE pour réviser les autres matières, qui étaient selon elles plus importantes. Athénaïs ne comprenait pas comment elle pouvait ainsi négliger une matière, mais elle lui donnait tout de même les cours et l'aidait à les comprendre entre deux révisions pour ses colles et DS. Elle sentait toujours cette étrange peur qui la prenait lorsque la jeune gothique était dans les parages et l'observait, et avait eu plusieurs échos des autres élèves qui confirmaient qu'elle n'était pas la seule à ressentir cette chair de poule lorsque Cali posait son regard sur elle. Rapidement, des murmures se mirent à courir sur la jeune femme, plus ou moins flatteurs et avec plus ou moins d'adeptes. Clarisse déployait des efforts immenses pour tenter d'intégrer la jeune femme à la classe, et faisait de son mieux pour lui parler le plus possible, mais Cali ne parlait pas énormément, et ne faisait aucun effort pour s'intégrer davantage. Au contraire, elle semblait même essayer d'éviter au maximum ses camarades, sauf Athénaïs, et cette dernière ne comprenait pas pourquoi. Elle était de plus en plus méfiante par rapport à elle, de plus en plus inquiète à mesure que Cali montrait de plus en plus d'intérêt pour elle.

          La semaine suivante se déroula de la même façon. Toutefois, le jeudi, les étudiants avaient organisé une soirée avec toute la classe, une fête à laquelle tout le monde voulait participer. Athénaïs était partagée: elle aimerait y aller, surtout pour faire plaisir à ses amies, mais elle comptait également réviser au maximum, car elle avait une colle de maths le lundi suivant et souhaitait avoir la meilleure note possible. Le mercredi soir, elle hésitait encore à venir. Et le sujet revenait sans cesse depuis le vendredi à chaque repas. Ce soir-là, ce fut Jeanne qui posa la question à la jeune femme blonde:

-Athénaïs, tu viens à la soirée, demain?

La jeune femme haussa les épaules.

- Je sais toujours pas... avoua-t-elle. J'aimerais bien, mais... j'ai peur de ne pas pouvoir suivre vendredi matin, et je ne suis pas sûre qu'une soirée de moins pour réviser ma colle de maths soit une bonne idée...

- Athénaïs... fit Clarisse. Tu t'en sortiras comme une reine encore une fois, j'en suis certaine! Arrête de t'inquiéter pour cette colle... Tu es la meilleure de la promo en maths, et d'après le prof de l'autre classe, tu serais même la meilleure du lycée, devant les MPSI et les PSCI...

La blonde rougit.

- Oui, mais... pour garder ma place, faut que je bosse... tenta-t-elle.

-Non! répliqua Jeanne. Demain soir, tu viens avec nous! Ça te fera du bien de sortir un peu... Tu vas devenir folle si tu restes en permanence dans tes cahiers comme ça!

- J'ai pas de tenue de soirée... tenta une nouvelle fois la jeune femme.

-On fait la même taille, je peux te prêter une robe! proposa Manon.

Athénaïs soupira, et ses amis se regardèrent, certaines d'avoir gagné.

- Bon, d'accord! céda-t-elle enfin. Mais hors de question que je boive autre chose que de l'eau ou de l'oasis!

Ses amies se mirent à rire.

- On y veillera, ne t'inquiète pas, fit Manon avec un petit sourire.

Athénaïs soupira intérieurement. Elle n'avait pas envie du tout d'y aller, mais ses amies avaient raison: une sortie lui ferait probablement du bien... Elle termina de manger en écoutant ses camarades de chambre parler de la soirée du lendemain et planifier les tenues qu'elles porteraient, ainsi que leur potentiel maquillage. La jeune femme blonde se décida enfin à parler lorsque Louis passa près du petit groupe, son plateau vide dans les mains, et que la conversation dévia sur Manon et lui. La principale intéressée rougit violemment lorsque les trois filles commencèrent à élaborer différentes stratégies pour la soirée du lendemain, afin de les rapprocher et, pourquoi pas, peut-être, réussir à faire en sorte qu'ils s'avouent leurs sentiments l'un à l'autre même si la jeune femme niait catégoriquement l'aimer. Toutefois, ses joues écarlates prouvaient aux trois autres qu'elles ne se trompaient peut-être pas...

          Le reste de la journée se déroula dans la joie et, pour certains, une certaine fébrilité. Quelques étudiants avaient prévu de faire un tour en ville en fin d'après-midi afin de trouver des vêtements pour la soirée, mais Athénaïs avait une colle d'anglais et ne pouvait faire de même pour se trouver une robe. Au fond, elle s'en fichait complètement: elle n'aimait pas vraiment se mettre en avant, et si elle portait parfois des vêtements chics pour quelques occasions comme des fêtes de fin d'année, des anniversaires ou un mariage, elle n'aimait pas non plus trop se mettre en valeur et ne mettait que très peu de robes, excepté en été lorsqu'il faisait chaud et qu'elle allait à la plage.

          C'était sa première colle d'anglais en compagnie de Cali. Les trois filles avaient eu une heure de libre avant de passer à la colle, et Athénaïs et Jeanne en avaient profité pour aller réviser les maths en attendant l'heure de la colle. Lorsqu'elles arrivèrent devant la salle, cinq minutes avant l'heure prévue, Cali était déjà sur place, adossée au mur, une paire d'écouteurs enfoncés dans les oreilles et un petit sourire aux lèvres alors qu'elle regardait son téléphone. Elle leva les yeux sur ses deux camarades et son sourire disparut aussitôt, laissant place à une expression neutre tandis qu'un léger reflet de lumière venait faire briller ses lunettes. Athénaïs fut frappée une seconde par la blancheur éclatante de ses dents au soleil, et ne put s'empêcher de sentir un frisson la parcourir à nouveau quand le regard de Cali se posa sur elle... Elle se demanda alors ce qu'était réellement cette étrange fille qui, contrairement à ce que disait Clarisse, n'était pas juste une gothique. Elle était autre chose, Athénaïs le sentait, et elle sentait également que Cali cachait quelque chose derrière ses lunettes et sa capuche, et pas juste la couleur de ses yeux et l'intensité de son regard braqué sur elle. Elle se prit à penser à cette sensation de malaise qui la prenait chaque fois que la jeune gothique la regardait, à la peur irrationnelle qui la saisissait chaque fois qu'elle voyait la jeune femme tournée vers elle, à l'angoisse qu'elle ressentait à chaque phrase que Cali prononçait. Elle se sentait comme une brebis face à un loup, une gazelle blessée face à une lionne affamée, elle avait l'impression de connaître la terreur d'une bête traquée, d'une proie à la merci d'un chasseur. Pourtant, elle ne saurait expliquer l'origine de cette crainte irrationnelle, de cette peur viscérale qui la saisissait à chaque regard de la jeune femme.

          Jeanne rompit le silence en demandant à Cali:

- Tu t'en sors comment en anglais?

La jeune gothique détourna le regard d'Athénaïs pour le porter sur Jeanne. Elle répondit d'une voix neutre, sans aucune émotion:

- Je sais pas trop... Pas trop mal, je pense... mais je dois retravailler la compréhension écrite, ça me pose quelques problèmes.

Jeanne hocha la tête.

- Je peux te prêter des livres, si tu veux, proposa-t-elle. J'en ai quelques-uns en anglais... Des revues, des mangas, et même deux ou trois romans.

Cali déclina l'offre d'un signe de tête.

- Ca ira, merci.

Le groupe replongea dans le silence. Cali regarda à nouveau son téléphone et pianota quelques instants dessus, alors que la porte de la salle de classe s'ouvrait. La prof invita les trois filles à rentrer pendant que Cali retirait ses écouteurs. Cette fois, le message était passé: la prof était bien au courant qu'il y avait une nouvelle élève dans le groupe, et offrit à Cali de ne pas noter sa colle pour cette fois-ci, afin qu'elle puisse voir comment elle s'en sortait et lui donner autant de chances qu'à ses camarades. La jeune femme hocha la tête. Il fut ensuite question de l'ordre de passage. Cali offrit de passer la première, et les deux internes hochèrent la tête. Athénaïs se proposa pour passer en dernière. Cali passa sur une compréhension orale, et les deux autres filles eurent un document écrit à comprendre. Athénaïs ne commença pas tout de suite son étude de document, puisqu'elle et Jeanne avaient chacune quinze minutes de préparation et ne pouvaient passer pile en même temps, tout en sachant que Cali passait avant. La jeune femme commença alors à réviser en attendant patiemment son tour. Cali, en revanche, avait déjà commencé ses écoutes de la vidéo et passa rapidement à l'oral. Athénaïs tendit l'oreille pour essayer de voir comment s'en sortait la jeune femme. Elle fut stupéfaite d'entendre la prof lui dire que sa compréhension était excellente, et qu'elle avait parfaitement compris l'intégralité du document. Jeanne releva la tête et croisa le regard d'Athénaïs lorsque la prof lui dit qu'elle lui mettait 20/20. Les deux jeunes femmes restèrent bouche bée alors que Cali remerciait la prof et sortait. Athénaïs n'en revenait pas: vingt en compréhension orale, cela lui semblait presqu'impossible! Cali devait être bilingue, elle ne voyait pas d'autre possibilité.

          Jeanne passa un peu après. La jeune femme blonde écouta ce qui se disait distraitement, car la prof lui avait donné son sujet juste avant le passage de son amie. Elle tenta de se concentrer sur son sujet, mais rien à faire: ses pensées étaient tournées vers Cali et son incroyable talent de compréhension orale...

          Enfin, ce fut l'heure pour elle de passer. Elle avait réussi à monter un plan et une problématique autour de l'article qu'elle avait eu à étudier, mais son plan ne lui plaisait pas, et sa problématique lui semblait bien banale. Lors de son oral, elle vit la prof froncer les sourcils plusieurs fois et, à la fin des questions, elle lui dit:

- Athénaïs, tu vas bien? Tu as fait énormément de fautes de grammaire et de vocabulaire... Tu m'as habituée à mieux.

Un instant, la jeune femme fut tentée de lui expliquer. De lui dire ce qui la mettait dans un tel état et faisait chuter sa moyenne depuis quelques temps. Lui raconter ce qu'elle ressentait, ce malaise de terreur qu'elle éprouvait chaque fois que Cali la regardait. Elle voulait tout lui dire, tout lui confier, car elle avait confiance en cette prof, qui cherchait à comprendre ses élèves et à les aider à s'améliorer. C'est pour cela qu'elle commença, d'une voix hésitante, après avoir jeté un oeil à la porte fermée de la salle de classe:

- C'est... c'est Cali, madame.

La prof fronça les sourcils et l'invita à s'expliquer. Un instant, Athénaïs sentit une sorte de malaise peser sur elle, comme si elle s'en voulait d'ainsi accuser sa camarade qu'elle connaissait à peine, mais elle se reprit et expliqua:

- Je... je ne saurais pas vraiment l'expliquer, mais... à chaque fois qu'elle me regarde, j'ai l'impression d'être menacée... c'est assez... bizarre...

La prof fronça les sourcils.

- Sois plus précise, s'il te plaît.

La jeune femme fut surprise de sa réaction, mais obtempéra:

- Depuis qu'elle est arrivée, ça me fait cette impression... j'ai l'impression qu'un danger imminent me menace, que quelque chose de dangereux me guette, et ça ne fait ça que lorsque Cali me regarde... Je pensais que c'est juste à cause de ses lunettes de soleil ou de son look un peu... spécial, mais en réfléchissant bien, j'ai vraiment l'impression que ce n'est pas ça...

La prof resta silencieuse un instant, puis elle demanda à la jeune femme:

- Elle garde toujours ses lunettes et sa capuche?

- Oui, répondit Athénaïs. Tout le temps, peu importe qu'il fasse beau ou gris.

La prof hocha doucement la tête.

- Je vois... fit-elle au bout d'un moment. Reste éloignée d'elle, Athénaïs. Le plus loin que tu puisses.

La jeune femme fut étonnée, mais hocha tout de même la tête.

- Je ferai au mieux pour l'éviter.

La prof se leva, invitant Athénaïs à faire de même.

- Elle t'a déjà menacée ? demanda la prof.

Athénaïs secoua la tête.

- Jamais, répondit-elle.

La prof sembla plonger dans ses pensées. Athénaïs n'osait pas vraiment bouger, des fois qu'elle ait autre chose à lui dire. Au bout de cinq minutes, elle sembla émerger de ses pensées et congédia la jeune femme, en insistant bien pour qu'elle fasse attention à elle. Athénaïs rentra donc au dortoir, où ses amies l'attendaient. Les questions fusèrent aussitôt:

- Alors, pourquoi t'as été aussi longue? fit Manon.

-On discutait avec la prof, répondit évasivement la jeune femme.

- Vous parliez de quoi? demanda Clarisse.

- De l'importance de l'anglais et du fait que Cali ait des meilleures notes que moi, mentit Athénaïs.

- Elle est si douée que ça?

La blonde hocha la tête.

- Oui, elle l'est. Mais elle est bilingue, ça aide...

-C'est de la triche, bouda Jeanne. Ca décourage ceux qui sont moins forts...

- Ou ça les booste pour qu'ils tentent de la dépasser, raisonna Clarisse. On peut aller manger? J'ai faim!

Le groupe éclata de rire et prit la direction de la cantine. A part Athénaïs qui était inquiète à cause de ce que lui avait dit la prof, elles étaient affamées. La jeune femme resta assez silencieuse tout au long du repas, mais se força tout de même à manger et à écouter ses amies rire et parler d'un peu tout et n'importe quoi. Elle passa le reste de la soirée plongée dans ses pensées, inquiète à l'idée que Cali puisse être finalement plus dangereuse que ce qu'elle imaginait...


Le lendemain, la journée passa très lentement, autant pour les trois filles qui attendaient la soirée avec impatience que pour Athénaïs qui ne savait pas quoi faire pour éviter Cali. Cette dernière semblait se douter de quelque chose, car elle ne quittait quasiment pas la jeune femme du regard. Les autres élèves se demandèrent ce qu'il se passait, car ils remarquaient que la jeune femme blonde cherchait à éviter sa camarade gothique, ce qui n'était pas du tout dans ses habitudes malgré le fait qu'elle se méfie d'elle depuis le début, si bien que Jeanne finit par lui demander:

- Athénaïs, tu t'es disputée avec Cali? 

Athénaïs ne répondit pas tout de suite.

- Pas vraiment... Enfin... c'est compliqué, éluda-t-elle.

La camarade de chambre de la jeune femme ne semblait pas convaincue, mais n'insista pas. Elle trouvait certes étrange qu'Athénaïs ne lui dise rien et agisse comme elle le faisait, mais elle ne pouvait lui demander des comptes comme ça... Après tout, elle n,'était pas sa mère, ni sa soeur d'ailleurs.

          La journée s'écoula donc incroyablement lentement. Lorsque, enfin, la sonnerie marqua la fin de la dernière heure de cours, Athénaïs se fit entraîner par ses amies presque de force jusqu'à leur chambre pour qu'elles puissent se préparer pour la soirée, et les trois amies d'Athénaïs avaient décidé de mettre le paquet pour rendre la jeune femme méconnaissable: Manon lui prêta une robe plutôt simple, mais qui mettait en valeur son corps fin et élancé, Jeanne lui fit un chignon simple qui éclairait son visage et Clarisse s'affaira à la maquiller juste ce qu'il fallait pour qu'elle soit belle, sans pour autant ressembler à un pot de peinture. Athénaïs se sentit un peu effrayée en voyant son reflet dans le miroir: elle se reconnaissait à peine, ainsi vêtue et maquillée, et se trouva vieillie par le maquillage, mais pas dans le mauvais sens du terme: Les artifices appliqués sur sa peau la rendaient en effet belle, plus mûre, moins enfantine. La robe et le chignon allaient bien ensemble, et rendaient la jeune femme encore plus belle. Athénaïs se contempla un long moment, émerveillée par la transformation, même si elle avait peur d'attirer les regards. Et elle savait que ça ne louperait pas, aux exclamations de ravissement de ses amies. Elle aida ces dernières à se préparer, nouant une tresse par-ci, un chignon par là, puis elles quittèrent l'internat en direction du métro. Elles avaient chacune au poignet un bracelet qui leur permettrait d'entrer dans le bâtiment où avait lieu la soirée, et elles parlaient avec animation en se demandant comment se passerait cette dernière et qui y serait. Jeanne et Clarisse embêtaient déjà Manon, qui rougissait sous leurs sous-entendus à peine masqués et leur paris sur qui, d'elle ou de Louis, inviterait l'autre à danser. Athénaïs, pour sa part, était nerveuse, et pas seulement à cause de la soirée: elle ignorait si Cali allait être là et si elle devrait encore l'éviter, et se demandait encore ce qu'elle pouvait cacher pour que sa prof d'anglais réagisse comme elle l'avait fait. Elle était si absorbée par ses pensées qu'elle failli rater l'arrêt de métro où elles descendaient, et ses amies durent la tirer derrière elles pour éviter de la perdre et la sortir de ses réflexions. Jeanne lança d'un air de reproches:

- Tu réfléchis beaucoup trop, Athénaïs... pour une fois, arrête un peu de penser et contente toi de vivre et d'agir à l'instinct!

-Facile à dire, répliqua la jeune femme. Je te rappelle que je n'ai jamais été en soirée, et vu ce que mes parents m'en disent, désolée de m'inquiéter.

Jeanne éclata de rire.

- Il ne t'arrivera rien, Athénaïs! fit-elle en lui souriant. On restera avec toi, promis.

- Sauf Manon quand elle ira danser avec Louis, ajouta Clarisse avec un sourire.

L'intéressée se mit à rougir.

- Mais arrête de dire n'importe quoi, toi! Il m'invitera pas à danser et je l'inviterai pas non plus!

Le petit groupe éclata de rire.

- On verra ça, fit Jeanne. En attendant, vous savez par où on doit aller?

Les quatre filles se regardèrent.

- Heu... fit Clarisse. Ils avaient pas dit tout droit en sortant du métro?

Manon secoua la tête.

- J'avais entendu à droite dans la rue derrière le métro.

Athénaïs fronça les sourcils.

- Attendez... fit-elle lentement. Vous êtes en train de me dire que vous ne savez pas où on est, ni où on va?

Les trois autres filles baissèrent les yeux.

- Ben... tenta Jeanne. C'est un peu bizarre, mais... J'étais sûre de savoir où on allait, en sortant du métro...

- Pareil, firent Manon et Clarisse en même temps.

Athénaïs fronça les sourcils, puis haussa les épaules.

- Au pire, on n'a qu'à attendre ici. On est parties avant les autres internes, ils ne devraient pas tarder à arriver.

          Elles s'assirent donc sur un banc, et attendirent. Cinq minutes passèrent, puis dix, puis quinze. L'heure de la soirée se rapprochait, et personne de la classe ne semblait sortir du métro. Le petit groupe commença à angoisser, surtout que certains hommes ne se gênaient pas pour les détailler de la tête aux pieds, les siffler ou leur faire des remarques. Athénaïs frissonna. Quinze nouvelles minutes s'écoulèrent. Toujours personne en vue.

- C'est pas normal, fit Jeanne au bout d'un moment. Ils devraient être là, et pourtant...

Athénaïs hocha la tête.

- Vous êtes sûres que c'est bien là qu'on devait descendre?

- Oui, répondit aussitôt Manon alors que ses amies hochaient la tête.

Athénaïs fronça les sourcils.

- Il y a un problème, fit-elle. Si c'était bien là, ils seraient déjà tous là.

- Je comprends pas non plus... murmura Manon. C'est vraiment bizarre...

Elles patientèrent encore un quart d'heure. Voyant que personne ne venait, elles se décidèrent à envoyer un message à quelqu'un de la classe pour demander des informations. Bien évidemment, dans le métro, le réseau ne passait pas. Athénaïs soupira et remonta le temps d'envoyer un SMS à Louis, laissant ses amies sur le quai du métro.

          Il faisait déjà nuit dehors. La jeune femme frissonna un peu en voyant la rue presque vide, où seules quelques voitures passaient. Elle tenta d'appeler son camarade pour avoir une réponse plus rapide que par SMS, mais tomba sur le répondeur. Elle retenta plusieurs fois de l'appeler, et était sur le point d'abandonner lorsqu'elle aperçut une silhouette familière sur le trottoir d'en face. Cali. Elle commença par frissonner, puis laissa de côté sa méfiance: elles étaient perdues, incapables de savoir où elles devaient aller, et avec un peu de chance, Cali saurait les aider. Elle courut donc vers la jeune femme en l'appelant.

- Cali!

La jeune gothique se retourna vers elle, les sourcils froncés. Pour une fois, elle n'avait pas sa capuche, même si elle portait toujours ses lunettes de soleil. Athénaïs se planta devant elle.

- Cali, tu peux pas savoir comme tu tombes bien! Tu sais pas où on doit aller pour la soirée? Les filles et moi sommes totalement perdues, on sait pas du tout où aller...

La jeune femme esquissa un sourire cynique.

- Je t'aurais bien aidée, fit-elle, mais tu m'ignores depuis ce matin sans raison... Je devrais faire de même, tu ne penses pas?

Athénaïs sentit le rouge lui monter aux joues alors que le regard de Cali la transperçait tout comme il la fit frissonner à nouveau. Elle ressentit encore une fois cette étrange sensation de menace imminente alors que le regard de la jeune femme était posé sur elle. Elle bredouilla:

- Ecoute, c'est pas vraiment contre toi...

Elle fut coupée par un coup de feu, et un réflexe de Cali qui la poussa sur la route. Athénaïs hurla de peur et de surprise, puis tomba violemment sur la chaussée. Elle entendit vaguement un klaxon, puis un nouveau coup de feu. Elle était un peu sonnée, mais elle se redressa tout de même pour tenter de comprendre ce qu'il se passait. Elle sentit un violent choc contre sa mâchoire, et se retrouva de nouveau projetée contre le bitume. Quelques secondes plus tard, ce fut un coup dans les côtes qui lui arracha un cri de douleur. Elle s'attendit à recevoir un troisième coup lorsqu'elle entendit un cri suivi d'un craquement horrible, et sentit un liquide tiède goutter sur elle avant qu'une main ne la saisisse par les épaules. Elle releva les yeux et rencontra le regard de Cali, qui lui cria:

- Bouge toi un peu, cours!

Sauf qu'Athénaïs ne pouvait pas bouger. Elle était pétrifiée par ce qu'elle voyait: Cali avait perdu ses lunettes, et Athénaïs pouvait maintenant voir ses yeux. Et ses yeux étaient rouges.

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