Haine-moi

La nuit se lève sur la ville endormie.
Tu es seule.
Je te vois sur le trottoir.
Tu es belle.
La lumière d'un réverbère inonde ton visage apaisé.
Tes jambes sont dévoilés, et ta robe vole doucement sous le vent frais de ce soir de mai.
Tu es jeune.
Ta peau lisse est couverte de maquillage, parce que tu t'es faite belle. J'aimerais que ton rouge à lèvre soit pour moi.

Mais il est pour un autre.

Parce que tu m'as oublié. Irrémédiablement, je suis un souvenir. Quand bien même je t'ai aimé tellement fort, aujourd'hui plus rien ne compte.

Tu es seule sur le trottoir et je te vois.

Je sens ton parfum, celui que tu portais déjà quand nous nous sommes rencontrés.
Tu es belle et tu le sais.
Moi je sais que l'homme que tu attends ne viendra pas.
Qu'il ne viendra plus jamais.
Tu regardes ton téléphone. La lumière bleue effleure ton visage comme mes doigts le faisaient, après l'amour.
Quand tu me caressais, si doucement, et que tes yeux se fermaient à un instant, que ton corps se crispait et que ta bouche, ta bouche, ta bouche, se posait sur la mienne.

L'ampoule du lampadaire grésille. Je m'avance dans la pénombre. Je suis si près que je vois ta peau frémir, la courbe de tes seins et la cicatrice dans ta nuque.

Si tu savais comme j'ai envie d'en faire d'autres.

Je pose ma main sur ton cou, et ta respiration s'arrête. Je murmure, mes lèvres contre ton oreille :
« - Il ne viendra pas. »

Tu ne me demandes pas de qui je parle, parce que tu sais. Au fond de toi, tu as toujours su. Que je te retrouvais.
Que je reviendrais.
Que tu m'étais destinée.

Tu trembles, et c'est si bon de te sentir frissonnante contre moi. J'ai attendu tellement longtemps avant de pouvoir enfin embrasser ta chair.

Ta bouche s'ouvre, fleur fragile et je la dévore. Tu gémis, tu geins, tu te débats, mais je sais que tu aimes ça. Lorsque que j'empoigne ton sein moulé dans ta robe en satin, tu me frappes à la tempe et je dois m'écarter pour éviter un autre coup.

La lueur de haine dans tes yeux ne me plaît pas. Tu craches d'un ton acide :
« - Laisse-moi tranquille. On n'est plus en couple, quel mot tu comprends pas ? Alors vas-t-en. Pars et ne reviens pas. Je ne veux plus te voir, jamais ! »

J'attrape ton bras, tes bijoux tintent et ton corps se crispe. Ton visage est si près du mien que je sens ton haleine. Tes sourcils se froncent, tu arraches ton poignet et je te gifle.

« - Ne me parle pas comme ça. Je sais que tu en as envie.
- Mais arrête ! Je t'ai quitté, OK ? C'est fini entre nous ! Fini ! Je ne veux plus rien du tout de toi, ni de nous. Arrête de me suivre. Tu n'obtiendras rien. »

Tes cheveux ondulent quand tu parles.
Tu mens. Tu mens. Tu mens. Tu m'aimes.
La lame est froide dans ma poche. Je la sens dans ma main. Quand je la sors, tu ne trembles pas.
Tu as cette colère en toi qui t'as toujours empêché d'avoir peur. Je ne voulais pas avoir à t'obliger. J'aurais espéré que tu comprendrais de toi-même.

Je vais devoir te forcer la main.

Tu m'ordonnes, de ta voix froide et prétentieuse :
« - Lâche ça. »
Je ne le fais pas.
« - Viens avec moi. On vivra ensemble. »
Tu ne bouges pas.
« - Je ne veux pas vivre avec toi. »
J'approche le couteau de ton cou.
« - Ne m'oblige pas à te blesser. »
Tu suis la lame des yeux.
« - Je ne vais pas te suivre. Rentre le dans ta tête. »
Du sang glisse dans ta gorge. L'entaille n'est pas profonde, mais elle saigne beaucoup.
Quand je pose ma main sur ta joue, tu recules d'un coup brusque et fais quelques pas en arrière.

« - Je vais crier. On va t'arrêter et tu me laisseras enfin tranquille. Maintenant pars. Pars ou je crie. »

Je souris. Je souris parce que tu es tellement crédule. Alors je te dis, pour voir encore la peur dans tes yeux :
« - La police ne m'arrêtera pas. Rien ne m'arrêtera jamais. Parce que nous sommes liés. Pour la vie. »

Tu trébuches sur tes talons. Tu n'oses pas me tourner le dos parce que tu sais que je suis imprévisible. Tu disparais dans l'ombre et je m'avance. Je marche vers toi sans me presser, tandis que tu commences à courir pour me fuir.

Mais rien ne nous séparera jamais.

La lame transperce d'abord ta jambe, puis ton ventre, puis ta poitrine et ta robe se couvre d'un autre rouge.

Je t'embrasse encore une fois, même si tu ne réagis plus. Puis, j'attends quelques heures.
À l'aube, un homme nous découvre, moi tenant ta main et toi loin de la vie.

Tes blessures sont encore plus belles sous la lumière du soleil.

Ton sang a séché dans ton cou.

Tes cheveux sont agglutinés et collants.

Je les caresse tendrement.

La mort te va si bien.

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