9- Rencontre

Notre vie est ponctuée de rencontres de toutes sortes. Certaines nous font avancer, d'autres reculer. Cependant, il faut être bien conscient que chaque être, qui croise notre chemin, a une signification qui nous appartient de découvrir. Sur le moment, cela peut nous paraître futile, insignifiant mais par la suite, son influence sur notre quotidien ou notre avenir prend une signification particulière. D'un geste, d'une parole, d'une réflexion ou d'un simple sourire, le souvenir et l'essence de la rencontre imprègnent notre destin de leurs couleurs uniques. Ils restent en nous et nous marquent à jamais. Nous sommes privilégiés et nous ne le savons pas immédiatement.

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Le soleil se lève sur les montagnes.  Dans la station de Stotelss, les troupes n'ont pas chômé. Voilà déjà trois semaines que de petits convois de rescapés viennent grossir furtivement les rangs des Gardiens de la montagne Bleue, comme s'amuse à dire Linadar.

Dans le « Centre », là où Noah a vu William s'adresser aux survivants, les Mistrals et leurs amis sont attroupées autour d'une table, comme ils le font chaque matin afin de mieux s'organiser.  La table, grande et ovale, la seule pouvant tous les accueillir, est jonchée de papiers et de résidus des derniers repas pris en vitesse, ainsi que de rapports et de feuilles griffonnées en désordre.  Noah arrive en grimpant l'escalier métallique et dépose Veena sur la table.  L'Aywas se met à grignoter des noix que lui tend Yohan après l'avoir salué en silence.  Le jeune homme s'assoit sur un banc, près de Gabby qui l'accueille avec une sourire.

- Juste à temps.  Cela a bien été ? demande-t-elle anxieusement à voix basse, faisant allusion au dernier convoi de réfugiés.

- Oui, un gros groupe, ma foi le plus grand depuis le début.  Et aucun fautif selon Veena sur les onze personnes, répond à voix haute Noah en regardant les gens autour de lui.  J'ai ici leurs inscriptions et leurs attributions, dit-il en faisant circuler une feuille afin que chacun la consulte.  Il y avait deux mères avec chacune un enfant en bas âge, dont une avec son conjoint blessé.  Ces adultes étaient des ouvriers à l'usine de Pemplinn. Il y avait aussi trois hommes qui travaillaient à l'hôpital de Rotts, dont un médecin, cela nous aidera grandement à l'infirmerie. Aussi deux jeunes filles sans famille d'une dizaine d'années et un femme d'une quarantaine d'années qui les a pris en charge, une chimiste.

Noah voit Gabby qui baisse la tête, déçue.  Yohan lui sert la main tendrement.  Tout comme Noah, qui espère à chaque fois voir arriver sa mère, le couple désire retrouver leur fils de 18 ans, Kyle, qui travaillait à Rotts, pour une société d'informatique avec Juna, sa copine.

- Désolé, lui murmure Noah dans l'oreille avant de déposer un baiser aux coins des beaux yeux de la femme.

Gabby secoue la tête avec un petit sourire.  Yohan soupire et relève lui aussi les épaules en conservant la feuille, afin d'inscrire ces nouvelles personnes dans la liste qu'il conserve et gère afin d'organiser les groupes de travail selon les capacités de chacun.  Le système informatique installé par le Mistral est bancal et manque de ressources mais il s'affaire à le perfectionner constamment.  Il en fait une réelle fixation.

Linadar est debout, accoudée à une table près du mur.  Elle retire les écouteurs de ses oreilles et leur fait signe de la main, afin d'obtenir le silence.  Elle triture encore une commande sur l'appareil, qui occupe le mur où elle se trouve, augmentant ainsi le son des ondes de la radio civile captée, comme à tous les matins.  Dans l'attention silencieuse qui suit, ces paroles envahissent l'espace autour d'eux :

« ... communiqué important : les autorités de ... des principales villes côtières, principalement Rotts et Pemplinn, ne sont plus que débris abandonnés par leurs habitants. Le nombre des victimes est indéterminé mais on estime qu'au moins la moitié de leurs populations est actuellement portée disparue. Nous vous rappelons qu'il se déroulait, la journée des drames mortels, à ses deux endroits des rassemblements populaires afin de souligner le vingtième anniversaire de l'incident du barrage de Rouan.

À Pemplinn, on a confirmé la thèse d'un attentat à la bombe près de la raffinerie, dans le quartier des industries.  Les autorités en sont encore à tenter de circonscrire le foyer d'incendie, mais elles doivent maintenant attendre qu'il s'épuise de lui-même, à court de combustible.  Ceci donnera, on s'en doute, des arguments forts à ceux qui voit d'un œil critique la poursuite du raffinage du pétrole, alors que d'autres énergies plus vertes sont à notre portée.  L'attentat n'a pas encore été revendiqué mais le mouvement des Disciples du Soleil, qui milite pour la cessation totale de l'utilisation des carburants fossiles, est en ce moment soumis à une enquête. 

Par ailleurs, l'explosion au port de Rotts, a fait grimper le décompte des victimes de cette triste semaine.  Au moment du drame, avait lieu l'inauguration de la Plaza du mémorial, rappelant ironiquement les victimes du barrage d'il y a 20 ans.  Presque tous les habitants de la ville et des environs y étaient.  En effet, les autorités avaient décrété jour férié et fête populaire pour toute la région. 

Dans les deux villes sinistrées, ce sont des quartiers entiers qui se sont écroulés, jetant les survivants sur le pavé.  Des centres d'hébergement ont été ouverts afin d'accueillir les survivants.  Nous conseillons à quiconque entend ce message, de se rendre à ces centres où ils recevront des soins, de l'aide alimentaire et un abri.  En attendant, sachez que des contingents de l'armée patrouillent dans les villes afin de porter aide et assistance.   Ils s'affairent aussi à déblayer les grandes artères de la ville ainsi qu'à rétablir les principales ressources essentielles. Les autorités ont bon espoir que la reprise des activités normales se fassent dans les prochaines semaines.

Il est souhaité que les habitants ne quittent pas les centres d'hébergement et ne traînent pas dans les rues afin de ne pas nuire au bon déroulement des travaux.   Il est également à noter qu'il serait inutile de tenter de quitter la région, puisqu'on nous signale que, malheureusement, les principaux axes d'accès : routes, autoroutes et ponts, sont impraticables pour l'instant.  De vous y engager serait susceptible de mettre votre sécurité, et celle de vos proches, en danger.  De plus, l'aéroport de Rotts, ayant subi des dégâts collatéraux, est réservée au transport des équipes d'urgence ainsi qu'à la circulation de l'aide alimentaire et sanitaire.

On nous signale aussi l'émergence d'une souche de grippe assez virulente dans le secteur.  Les spécialistes en virologie auraient identifié les facteurs de contagion comme étant les chats et tout animal de race féline.  Actuellement, les seules consignes de prévention de cette grippe féline sont les mêmes qu'à chaque début de saison hivernale : lavage des mains et isolement dans le cas de symptômes chez les humains.  Aucun vaccin n'est encore disponible.  On décompte déjà vingt-trois victimes de cette grippe qui peut devenir mortelle si non diagnostiquée à temps.  Cependant, le principal vecteur de contagion et de dispersion étant les félins, les autorités ont pris la décision d'isoler la plus grande proportion des chats et de tout animal apparenté.  Si vous posséder un félin, vous pouvez venir le confier auprès du centre zoologique de Rotts, qui a été spécialement aménagé afin de prendre soin de votre animal de compagnie en attendant que la crise soit passée.   Vous n'aurez qu'à vous enregistrer et votre animal sera entre bonne mains.  En ce qui concerne les animaux errants ou sauvages, une flotte de gardes a été assignée afin de sillonner les rues et les abords de la ville afin de capturer tous les spécimens rencontrés.  Éventuellement, des trappes se feront aussi dans les bois et les montagnes ainsi que sur les côtes du fleuve.  Les bêtes seront mises en cage, pour observations et soins vétérinaires, en attendant le passage du pic de contagion ou la mise au point d'un vaccin efficace.  Si vous voyez un félin ou pensez savoir où il s'en cache un, vous êtes priés de communiquer avec les autorités.  Ne tentez pas de l'attraper vous-même, vous pourriez être contaminé.  Il s'agit d'un geste de citoyen responsable que de participer à la capture et à la détention totale des félins de notre région.  Toute personne trouvée en possession ou en train de dissimuler un félin pourra être soupçonnée ou accusée d'entrave à la sécurité publique et de mise en danger de la santé humaine.

Finalement, pour clore ce bulletin sur une note plus positive, nous vous signalons que les communications, comme vous avez dû le constater, sont partiellement rétablies dans la région côtière.  Cependant, seules les ondes provenant et allant dans notre région réussissent avec succès à être émises et reçues.  Ainsi, vous pourrez recevoir le canal de télévision de Central Pemplinn ainsi que l'antenne 1013 Radio Rotts, celle que vous avez la joie d'écouter en ce moment ! Ces deux outils de communication serviront surtout à vous tenir informés des développements dans la crise que nous traversons. 

Cependant, comme prévu, les émissions spéciales sur la commémoration du vingtième anniversaire de l'attaque du barrage de Rouan seront diffusées en simultané sur la radio et la télévision ce soir, dès 17 h.  C'est un rendez-vous. 

Nous vous rappelons que vous pouvez consulter les registres des victimes au centre des manœuvres de Pemplinn et de Rotts.  Vous pouvez aussi y déposer des avis de recherches et vous enregistrer afin de réussir à rejoindre vos proches.  Des centres de rendez-vous sont disponibles afin de pouvoir fixer des lieux de rencontres, avec vos amis et parents, étant donné qu'aucune onde téléphonique ne circule à l'intérieur de notre région.

Nous passons maintenant à une pause musicale et, au-delà de cette pause, nous nous entretiendrons avec les responsables des cérémonies qui auront lieu à la fin de la semaine pour les premières victimes identifiées dans les attaques de Pemplinn.  Allons–y en musique, à 1013 Radio Rotts... »

Et la musique remplace la voix du commentateur. Linadar baisse le volume au minimum.  Un lourd silence s'abat sur les gens présents. C'est William qui rompt ce calme :

- Alors nous voilà fixé.  Les Stotelss ont isolé la région et font le grand nettoyage.  Ils veulent avoir le contrôle sur tout.  Ils nous cherchent et si je ne me trompe pas, j'ai comme l'impression qu'ils désirent par-dessus tout mettre la main sur notre alliée à longues oreilles.

À ces mots, Veena se déplace sur la table près de l'ex-commissaire, fait un dos rond en envoyant une gerbe de lumières et émet un feulement significativement furieux.  William lui adresse un sourire et lui fait un salut à la manière de Yohan.  Voyant cela, Noah reste interdit, se promettant mentalement de demander plus d'explications à Yohan sur la signification de ce geste, ce que Veena, bizarrement, n'a pas voulu encore faire pour lui.

- Oui, Veena, tu es remarquable... et indispensable à notre communauté.

- Les Stotelss font de la désinformation, proteste Linadar.  Nous devons davantage donner l'heure juste aux rescapés des attaques.

- Nous envoyons des petits groupes de trois personnes à tous les jours, souligne Yohan, et je propose de continuer ainsi tant qu'on n'en saura pas plus sur la stratégie des Stotelss.

- Ces centres, c'est du nouveau ! confirme William.  Nous devons en premier savoir si ces centres d'hébergement sont réellement ce qu'ils doivent être ou des lieux d'incarcération. Noah, voit avec l'aide de Veena, avec les nouveaux venus s'ils peuvent nous informer là-dessus.

- Ce sera la première chose que je ferai après la réunion.  Je vais vérifier avec ceux que je viens de rencontrer.  Mais, les gens qui travaillent, qui patrouillent et tout ça, dans les villes, il ne s'agit pas de terriens, ce sont des Stotelss ? S'il y a des humains, c'est qu'ils participent sous la menace ou la contrainte.  Mais comment aider ceux qui veulent quitter ?  Ou comment communiquer avec eux ?

- Nous n'avons pas le choix, répond Tomas en fixant William.  Il nous faut envoyer des commandos sur place pour prendre contact et agir.  Voir même faire un peu de grabuge !

- Doucement Tomas ! Je te vois venir.  Oui, oui, devance William en voyant le rouquin sur le point de réagir, nous allons agir mais nous devons avant tout nous assurer de la sécurité et du secret de notre position.  Si en envoyant une troupe, les Stotelss détectent son point d'origine, nous ne serons pas avancés. Ceci ne sera possible que lorsque Yohan aura terminé de rendre totalement autonome la station et que son système de sécurité sera complété. Yohan ?

- On y arrivera bientôt.  L'équipe de Tomas a déblayé la galerie inférieure et nous avons réussi à remettre en marche les générateurs hydriques des Stotelss depuis hier, grâce à ce drôle de mécano que Tomas nous a présenté... Ulrik Torin.  Un personnage qui gagne à être connu !  Je l'ai mis en charge de diriger une équipe d'ingénieurs et de techniciens.  L'hiver vient et nous devons être prêt à subir les pires tempêtes et des froids intenses.  Il sait ce qu'il doit faire, il est vraiment plein de ressources.  Nous ne devrions plus avoir de manque d'énergie.

- De l'énergie !  Enfin ! Donc terminées les nuits obscures ? soupire Gabby. Tant mieux, cela facilitera l'installation des lieux de repos, des cantines et les soins des blessés à l'infirmerie. L'équipe médicale est en bonne voie de s'organiser.  On manque de médecins, mais bon, rajoute-t-elle en regardant Noah, un de plus ne sera pas de trop !  Du côté de la nourriture, on survit encore avec les rations que les Stotelss avaient placé en stase.  On sait comment les « déstaser » si on peut dire.  Mais, nous sommes plus nombreux qu'il y a vingt ans, les réserves baissent et j'ai déjà donné la consigne de rationner en vue de l'hiver.  Car, nous ne savons pas encore où nous pourrons nous réapprovisionner.  La chasse et la trappe seront des alternatives mais qui risquent de nous dévoiler. On manque de médicament aussi.  Il y en avait bien un peu dans la station, mais j'y ai fait le tri et beaucoup n'étaient plus du tout efficace.  J'ai accompagné une équipe pour la cueillette d'herbes médicinales mais l'hiver est déjà trop avancé.  Il faudrait trouver des réserves ailleurs.

- On le mentionnera aux prochaines équipes qui iront en ville pour chercher des rescapés, répond William.  Mais désolé, en ce moment, c'est tout ce que nous pourrons faire.

- Alors prions pour ne pas avoir de gros blessés prochainement, murmure Gabby.

William ne sait que répondre.  L'organisation de la station et son commandement lui ont été désignés quasi automatiquement.  Il en a accepté la responsabilité, tout aussi naturellement.  Mais il constate que ce n'est pas aussi simple que de diriger un commissariat.  Il y a bien des domaines où il est profane et il apprécie grandement le partage qui s'est opéré entre lui et ses amis.  La population de la station grandissant, ils auront besoin bientôt de davantage de ressources et de bien plus d'organisation.  Mais...

- Mais le plus urgent demeure notre sécurité, complète-t-il à voix haute.  Avec la lumière jour et nuit, nous pourrons profiter de toutes les heures pour avancer le renforcement de notre position.  Tomas, j'aimerais bien que notre mécano en chef, Ulrik Torin soit avec nous demain pour que nous puissions tous le rencontrer.  Yoan, je veux que tu définisses des équipes de nuits qui prendront le relais dans l'exploration de la station et de ses ressources. Et qu'en est-il donc du système de sécurité ?

- Celui-là me cause encore bien des maux de tête, répond ce dernier en se passant la main sur ses yeux fatigués et son crâne nu.  Les systèmes électroniques et informatiques de cette station ont deux principaux défauts : ils sont vieux et Stotelss !  Trouvez-moi du matériel mistral ou terrien, ainsi que deux ou plusieurs bons génies en informatiques et je te promets, je te fais un système de sécurité tel que nous passerons inaperçu sur tous les radars de l'Univers !

- Bien, on te cherchera ça.  Mais en attendant d'avoir le secours de l'électronique, on conserve les patrouilles nuit et jour, d'accord Tomas ? Et pour prendre contact avec l'extérieur de nos frontières ? Linadar ?  Des moyens de transport ? Car on oublie les ondes, le contrôle des Stotelss est insensé et inviolable jusqu'à maintenant.

- En ce moment, on n'a que nos jambes William !  répond la Mistrale avec une grimace.  Cependant, je me rappelle qu'il y avait une flotte de motoneiges quelque part dans la station.

- Mais elles auront plus de vingt ans, tes mécaniques ! ricane Tomas.

- Là, ce sera à tes amis mécanos de faire des miracles, tu sais le groupe de l'usine que tu as été si heureux de retrouver !

- Ah oui, ceux aux commentaires machos ! sourit l'homme en se croisant les bras.

- Exact !  Ils pourront montrer ce qu'ils savent faire avec leurs dix doigts, au lieu de nous remplir les oreilles de leurs platitudes, réplique Linadar en s'assoyant lourdement près du terrien.

- C'est entendu, Linadar, reprends William avec un sourire.  Tu mets une équipe sur cette recherche. Et Tomas, tes chers mécanos feront de cette réparation une priorité !  Bien, je crois qu'on a fait le tour de notre planning de ce matin.  Maintenant...

William fait une pause puis fait un signe à une femme au fond de la pièce, qui s'approche doucement pour venir se placer près de lui.  Bien emmitouflée dans un épais chandail, un bonnet de lainage et portant des gants coupés à mi-doigts, elle semble malgré tout souffrir du froid.

- Je tiens à vous présenter Chimey Taï Mee, dit William en posant son bras sur les épaules de la petite femme.  Elle est ex-commissaire elle aussi.  Elle travaillait conjointement avec moi à partir du commissariat de Rotts, dans la section des renseignements et de la mise sous écoute.  Ensuite, nous sommes devenus amis.  C'est une personne étonnante et pleine de ressources.  J'aimerais qu'elle se joigne à notre petit comité de « direction », si je peux le nommer ainsi.

- Je vous salue tous et je suis très heureuse de faire enfin votre connaissance, dit la femme d'une voix basse avec petit accent asiatique, tout en toisant nerveusement l'assemblée de ses yeux bridés.

Elle incline légèrement la tête en guise de salut, ce qui fait s'échapper une longue tresse noire de son bonnet.  Elle l'enlève et empoche celui-ci, avant de repousser ses cheveux dans son dos.

- Je dois vous avouer que c'est une des rares personnes à qui j'ai confié mes aventures avec vous, avoue William avec un air un peu ennuyé.  Mais, j'ai toute confiance en elle, tout comme en chacun de vous.  Hier, elle m'a expliqué et montré quelque chose.  En fait, bien des choses... Je crois qu'elle doit vous les partager aussi.  Je lui laisse donc vous entretenir là-dessus, rajoute-t-il en s'assoyant.

- Je vous préviens que je dois en effet vous expliquer bien des choses, mais je tenterai d'être claire malgré tout.  Je suis spécialiste en communication, en électronique sans fil et en gestion des réseaux informatiques, déclare-t-elle d'une voix rapide et légère en souriant au regard intéressé de Yohan.  Oui, je pourrais vous aider, Monsieur Yohan, avec votre système de sécurité.  Il faudra aller traficoter un peu dans les circuits de communication de cette base, qui si je ne me trompe pas est un ancien vaisseau spatial naufragé...  Bien que je n'en ai jamais vu d'aussi près...  Ou même de loin !  Même jamais !  Enfin bref !  J'ai déjà jeté un œil attentif... et admiratif, à tous ces appareils, même s'il s'agit de matériel d'origine ennemi, dit-elle en englobant d'un geste large l'ensemble des consoles de la salle.  Ici, se trouve votre solution.  Il y a assez de technologie rassemblée dans ces consoles pour pouvoir sécuriser cette station, installer un radar de détection de l'ennemi, car oui je considère que les envahisseurs... Les Stotters ... Les Sott...

- Stotelss, murmure William avec un petit sourire face aux babillages exubérants et habituels - pour lui - de son amie.

- C'est ça.  Bien, je les considère comme des envahisseurs.  On doit non seulement nous cacher d'eux mais aussi les surveiller.  On ne peut pas rester là à nous terrer - car en effet nous sommes littéralement « enterrés » sous des tonnes de roches et de glace - et les laisser faire ce qu'ils veulent.  Car ils ne resteront pas sans rien faire, croyez-moi !

Un léger silence passe, pendant lequel Chimey regarde chacun d'entre eux et réalise bien qu'elle n'est pas assez claire, comme promis, et qu'elle parle trop... pour changer.  L'ensemble de ses interlocuteurs, sauf William, sont estomaqués par la rapidité d'élocution de ce petit bout de femme.  « Si elle programme aussi vite qu'elle parle... » pense Yohan.

- Trêve de bavardage, déclare-t-elle tout en coiffant son nez d'une petite paire de lunettes au contour rouge, qu'elle a saisi au cordon de cuir suspendu dans son cou.  Elle pige ensuite, dans un sac en bandoulière, un mini-ordinateur qu'elle dépose sur la table devant elle.  Elle se penche vers le clavier, en repoussant sa tresse dans son dos, et se met aussitôt à pianoter à toute vitesse.

Yohan lance un regard interrogatif à William.  Mais ce-dernier se contente de lui faire un sourire énigmatique.  Il lui avait un peu parlé de cette femme d'origine tibétaine qu'il avait rencontrée, lors d'une mission avec la brigade de Rotts, il y a cinq ans environ.  Il lui avait expliqué, à mots couverts, qu'il avait revu la jeune femme régulièrement. Yohan se doute bien que ce n'était pas que pour des intérêts professionnels. Le Mistral reporte son attention sur Chimey.  Elle semble plus jeune que William, qui est le doyen du groupe.  Mais la tibétaine a une jeunesse sans âge.  Lorsqu'elle se concentre, comme maintenant, sur son ordinateur, de fines rides plissent son front et le coin de ses yeux, dénotant une certaine expérience de vie.  Ses mains sont fines, mais fortes et vives.  Elle tape à une vitesse incroyable, aussi vite que le débit de ses paroles ! Ses cheveux noirs, avec une longue mèche blanche près de la tempe droite, sont nattés en une longue tresse qui se balance constamment sur son épaule droite. 

- Je vais vous montrer ce que j'ai déjà débroussaillé la nuit dernière...  Avec l'accord de William naturellement.  Je ne voulais pas prendre des renseignements qui ne m'appartiennent pas, mais ... ils ne vous appartiennent pas non plus, n'est-ce pas, donc on est quitte, et ... De plus, je fais cela pour votre bien, notre bien ... À tous.  Et puis, si cela peut ... Bref..

William pose sa grande main sur son bras pour calmer son agitation.  Elle le regarde et le remercie d'un sourire pour son appui.  Après avoir terminé d'entrer ses commandes tout en replaçant ses lunettes sur son nez, elle se relève et appuie sur une dernière touche, un sourire en coin, en croisant ses bras sur sa poitrine, un air confiant sur son visage. Rien ne se passe immédiatement et Tomas pousse un gloussement moqueur. Mais, il sursaute, comme ces compagnons, lorsque tous les postes de commandes de la salle s'allument d'un coup.  On entend des tintements et de légers vrombissements.  De multiples lumières clignotent un peu partout et le reflet bleuâtre des écrans poussiéreux envahit la pièce.  Sur la table, où il se sont installés pour discuter et manger, la seule grande table ovale de la pièce pouvant les accueillir, des écrans luminescents se distinguent subitement sur la surface ainsi que des touches translucides.  Veena, son regard vert fixé sur ces apparitions, les contourne du bout des pattes pour aller rejoindre, un peu craintive, les genoux de Noah.  Ce-dernier repousse les papiers et détritus qui recouvrent l'écran devant lui.  Il ouvre de grands yeux, observant l'écran devant lui. Puis, il se lève, Veena dans ses bras, pour mieux observer ce qui se passe dans l'ensemble de la pièce.

Yohan aussi s'est levé et se rapproche de Chimey et William.  Le regard qu'il coule vers la Tibétaine et son ami est rempli de respect sincère.

- Une nuit pour faire cela ? déclare-t-il en plongeant ses yeux dans le regard de la femme.  Eh bien, je vous accorde toute mon admiration et je m'incline devant votre talent.

- Je vous remercie de votre appui, Monsieur Yohan.  Cependant, je suis restée un peu bloquée par le langage utilisé par ce système. J'aurai besoin de votre aide.  Paraît-il que vous avez une solution dont profite encore mon ami William.

- Oui, cela peut s'arranger, répond Yohan.  Ta puce transducteur fonctionne donc encore William ?

- En effet. J'ai pu ainsi aider un peu Chimey.

Durant ce bref échange, les systèmes ont fini de démarrer.  Les Mistrals et leurs compagnons se retrouvent bien vite complètement subjugués par ce qu'ils voient.  Sur le mur du fond, qui était nu et vide, apparaissent deux grands écrans sur lesquels s'affichent des écrits.  Pour Noah comme pour Chimey, il n'y a que des symboles sans aucune signification mais les gardiens et leurs amis les reconnaissent comme étant du Dviraks. 

- Ashfatts ! déclare Tomas en s'avançant vers les écrans et en prenant place près de Linadar.

- Depuis quand tu connais des gros mots en Dviraks Jeffrey ?  lui demande Linadar en lui donnant un coup de coude dans les côtes.

- C'est connu, ce sont toujours les premiers mots que l'on apprend dans une nouvelle langue, répond l'ancien soldat le plus sérieusement du monde. Pas besoin de puce pour ça !

*****

Quelques instants plus tard, ils sont de nouveau rassemblés autour de la table ovale, libre cette fois de tous résidus.  Chimey, son propre portable en main, dirige les différents écrans que les auditeurs ont devant les yeux.  Elle commente les images avec précision et prestance.  Son visage expressif et son discours coloré conserve l'attention de tous.

- Les villes de Rotts et de Pemplinn sont bouclées, surveillées, ratissées.  L'ennemi éradique la vermine... C'est à dire nous ! Pas très fin dit comme ça, mais passons !  Oui, il serait bien imprudent d'aller se balader en plein jour dans les rues, surtout avec les incendies, les bâtiments détruits, les patrouilles et tout.  Ils nous attraperaient et tenteraient de nous faire parler.  Bon, je suis une habituée des actions d'infiltration secrète.  Mais je ne vais jamais en plein dans la tanière de l'ennemi, je passe par dessous.  Une ville, comme en archéologie, se révèle être construite en étages, en strates.  La plus récente sur la plus vieille.  Et notre région côtière est parmi les plus vieilles de notre pays. Les colonisateurs s'installaient toujours près des cours d'eau et donc ici sur les côtes du fleuve et du grand lac.  Je m'y suis intéressée entre autre dans le cadre d'une mission où on cherchait un pollueur... - ou était-ce en premier pour un trafic d'armes ? - ... Bon passons.  Disons juste que j'ai accumulé une base de données solides sur le sujet et que mes cartes remontent à presque trois strates sous les sous-sols actuels des bâtiments de surface.  Et comme il n'y a plus beaucoup de monde au courant de ça, même de ma propre équipe.... - J'espère juste que les méchants n'avaient pas infiltrés mes plus proches collaborateurs.... Brrr. -  Okay, j'arrête là !  De plus, je me suis souvent servie des plans des souterrains des villes de Rotts et de Pemplinn pour y faire de l'écoute secrète, c'est ce que j'appelle vivre en taupe !  Bon et bien, je peux vous donner accès à ces plans et vous diriger d'ici.  Vous les voyez en ce moment sur vos écrans.

      Devant leurs yeux défilent des images des deux villes avec les plans correspondants à chaque grande région.

- Voilà un véritable fromage Gruyère, souffle Tomas.  J'ignorais qu'on avait ça sous les pieds.  Ce sera une voie d'accès privilégiée pour s'infiltrer et aussi pour exfiltrer les réfugiés.

-  J'étudierai les plans afin de trouver une entrée proche de nous et surtout indétectable, affirme Linadar.  Il faudra envoyer une équipe sonder les chemins rapidement car nous pouvons être sûr qu'il y aura des obstacles imprévus. Je vois qu'il y a déjà des annotations pour les plans dans certains quartiers.

- Oui, c'est le travail d'un jeune collègue, Erik, qui... la voix de Chimey s'éteint et ses yeux deviennent larmoyants

    Un silence flotte avant que Linadar ne murmure :

-    Nous avons tous perdu un proche, un ami, de la famille.  C'est pour eux que nous devons sauvegarder ceux qui restent.  Et ton aide sera précieuse Chimey.

    La Mistrale regarde la jeune femme afin de lui apporter support et réconfort.  Cette-dernière lui fait un petit sourire, puis relève la tête afin de continuer son exposé :

-    Nous devons aussi trouver un moyen de communication rapidement.  En ce moment, les gens qui quittent la montagne, deviennent sourds et muets.  Pour coordonner nos actions, ce n'est pas l'idéal.  Oui, je sais, ce ne sera pas par téléphone ni radio...  Les ondes sont bloquées, les tours de communications détruites ou contrôlées.  Les communications libres ne sortent ni n'entrent dans notre région.  À croire qu'ils ont fait exploser les satellites de communications !

Chimey jette un coup d'œil à William et ce qu'elle lit dans ses yeux la foudroie et elle avale péniblement sa salive.  Puis elle continue :

-    Oh tant que ça ?  Okay...  Revenons. Je tiens compte de ce que William a pu me dire des moyens de communication des sto... des envahisseurs.  Vous voyez, les techniques utilisées ici sont vieilles... Mais bien meilleures que les nôtres sur Terre.   Elles utilisent des rayons de lumières interphasés de microondes.  Appelons cela les ondes croisées (OC).  Or, les nouveaux envahisseurs n'utilisent plus cette technique actuellement.   J'ai vérifié, tous les canaux des ondes lumineuses croisées sont muets.  Il doit y avoir une raison.  Peut-être ont-ils trouvé mieux ou encore les OC ont une faiblesse que je ne sais pas.  Dans tous les cas, on n'a pas d'autre alternative pour communiquer librement - à part le sémaphore et le code morse.   Il y a en stockage dans cette station, des formats miniatures de communicateurs tout à fait remarquables.  Je vous équiperai en appareils OC dont je crypterai les émissions, dès qu'on m'aura fourni un décodeur de leur écriture. Nous avons donc un moyen de communications « secret ».  Nous avons ainsi la solution pour aller voir l'ennemi sans être vu et pour faire du grabuge, ainsi que les outils pour communiquer entre nous !  Ces solutions le resteront tant que les Stotelss... - je l'ai eu ! -  ... donc tant qu'ils ne penseront pas à regarder en détail dans la montagne Bleue !

     Elle observe un instant les gens autour de la table, elle y trouve des sourires, des airs étonnés mais constate qu'ils sont littéralement accrochés à ses lèvres.  Elle poursuit, après avoir pianoté quelques instructions sur son clavier et ainsi apparaissent de nouveaux croquis sur les écrans :

- Je connais très bien la géographie et la topographie de notre région.  J'aime la spéléologie. Vous savez :  les grottes, les stalagmites et les stalactites...  Bon, si j'avais pu imaginer qu'il y avait cela ici !  J'aurais organisé une virée !   Bon, ce sont des plans qui viennent de mon ordinateur à moi.  C'est pour cela que je peux lire... Et vous ? Humm... Oui, bien sûr ! Ici, vous voyez la montagne Bleue.  C'est nous.  On l'a appelé bleue à cause de la présence des luminosités bleues à son sommet.  Il y a longtemps, les habitants en avaient peur et pensaient que c'était des esprits.  Maintenant, bien que le phénomène demeure surprenant, on le connaît :  les particules de gaz sont ionisées par le vent solaire et emportées vers les pôles sud et nord par la magnétosphère.  Bon, okay, j'arrête mon cours de sciences naturelles.  En passant, si vous me donnez les outils technologiques, et il y en a ici, je serais capable de sonder de fond en comble cette montagne et de vous en faire une cartographie assez précise.  À mon avis, au vue de ce que j'ai pu entrevoir depuis les deux jours que je suis ici, il y a un encore plus gros Gruyère à découvrir et à exploiter....   Êtes-vous vraiment sûr que les Stotelss ne sont restés que deux ans ici ?  ...  Ils sont habiles en tout cas. 

- Chimey... murmure William pour la ramener sur le sujet. Le camouflage du Refuge...

- Oui, donc cela m'amène à résoudre un autre problème, notre propre refuge qui doit rester incognito.  William m'a expliqué que le lieu où nous sommes, cet immense vaisseau caché sous la montagne se propulse en inversant la gravité.  Oui ?   Wow ! Qui aurait cru cela possible.  Ceci peut vous sembler normal mais moi ...   Ouf !  Bon c'est vrai que si je regarde la masse de ce vaisseau ainsi que son emplacement...  Réussir à faire stationner ce mastodonte dans le creux d'une montagne...  Super le conducteur !  Et ce sans se crasher !  Mais c'est certain que si on rajoute à vos talents la capacité d'aller contre la gravité, alors c'est comme stationner une mini dans un stationnement vide d'un supermarché le dimanche à six heures du matin.  Un jeu d'enfant ! 

Elle observe les réactions, encore des petits sourires mais ils attendent la suite.  Elle pose son ordi et s'explique :

- Voilà où je veux en venir. Vous devez connaître cette technologie mieux que moi.  Or, s'il y a moyen d'augmenter la gravité en suivant les contours de la station et disons... de tous ses embranchements, on pourrait éventuellement faire dévier les rayons lumineux incidents qui bombardent la station et les renvoyer selon un angle mort.  En effet, on sait que la lumière à une composante particulaire, donc nous agirions sur la masse de ses particules photoniques en les déviant avec la gravité inversée.  L'image de la station serait ainsi déviée pour l'observateur et nous pourrions la remplacer par celle, toute innocente, de la neige, des rochers et des arbres.  Donc quelqu'un qui chercherait à voir ce qu'il y a sous lui, en nous survolant, par exemple en avion, en hélicoptère ou en... soucoupe volante, ne verrait rien... Nada !   On pourrait même influencer, avec cette gravité contrôlée, les particules de la thermosphère afin de faire littéralement « tomber » les particules responsables des aurores boréales beaucoup plus bas que la normale.  Cela devrait brouiller les ondes que la station émet et ce même sur les radars ou les satellites.  Nous pourrions alors sans crainte entrer et sortir de la station sans être vus.   En influençant ou en brouillant les ondes envoyées par l'ennemi pour nous sonder, nous pourrions aussi contrôler ce qu'ils reçoivent de nous, ne leur envoyant que le reflet de notre position géographique naturelle, c'est-à-dire celui de notre chère et innocente montagne Bleue.  Nous serions invisibles à tout appareil.

    Chimey prend une grande inspiration et se rassoit près de William. Celui-ci lui accorde un franc sourire et conclut :

- Mes amis, vous venez de rencontrer ma brillante et volubile amie. 

- Je suis époustouflé, concède Yohan.

- Ce qui me rend encore plus enthousiaste, déclare Tomas, c'est que la technologie de nos ennemis d'il y a vingt ans nous permet de contrer les ennemis d'aujourd'hui.  Ils ne nous verront pas, nous communiquerons en secret et on pourra les voir.

- On va jouer au chat et à la souris avec eux.... La souris c'est nous.... avoue Noah.

- Pas grosse mais invisible et elle va les déranger ! déclare Gabby, un franc sourire naissant enfin sur son visage.

- Tu vois Chimey, dit William en la prenant par les épaules et en embrassant la jeune femme sur le front, je te l'avais dit. Ils sont littéralement sous ton charme.  Étourdis mais charmés, rajoute-t-il d'un air entendu. Allez tout le monde : au boulot !

- Bienvenue Chimey !  dit Gabby en se levant.

- Pour savoir autant de choses, rajoute Tomas en la saluant en partant avec Linadar, vous devez avoir un gène commun aux Mistrals sauf que ... la vitesse de réflexion et de paroles dépasse tout ce que j'ai pu voir chez mes amis gardiens !

- Donc je suis acceptée ?  s'exclame Chimey.  Yeah !

Elle se jette dans les bras de William qui pique un fard avant de savourer cet instant avec son amie.  Puis, elle murmure doucement dans l'oreille de l'ex-commissaire, l'air très sérieux :

-    William, je te préviens, ne mettez plus de nourriture sur la table centrale de contrôle. C'est vraiment ... irrespectueux, énonce-t-elle sous le regard de Biron qui se tourne vers elle, amusé par cette remarque.

Alors que Noah s'approche d'eux avec Veena, William emboite le pas de Yohan, qui se dirige vers la sortie avec Gabby, en posant une main sur l'épaule du Gardien.  Il lui glisse à mi-voix :

-    Je crois qu'on a besoin de deux transducteurs en oreillette : Noah et Chimey.

-    Je m'en occupe, répond son ami avant de s'éloigner.

    Se postant à la porte du Centre, William se retourne et observe son amie tibétaine qui parle avec Noah. De loin, il sourit à Chimey et fait un bref salut de la tête envers le jeune Étolias.  Chimey fait ensuite face à Noah, un peu incertaine face à l'Aywas.

- Enchanté Noah et Veena, dit-elle en inclinant la tête.  Je suis désolé, j'ai toujours eu peur des chats, ils griffent et j'y suis allergique... De plus, apparemment que les chats ne sont plus trop à la mode...

- Pas de problème, rassure Noah.  Veena n'est pas un chat, c'est une Aywas. Nous communiquons ensemble, elle et moi.  Elle est impressionnée par votre exposé et vos idées.

- J'en suis flattée.  Ce n'est pas un chat ?  Je peux la toucher ?

Chimey tend la main et doucement effleure le museau de Veena.  Elle ressent un chatouillement dans sa tête.  La tibétaine penche la tête de côté, sa longue tresse suivant le mouvement, et en scrutant les yeux étranges de l'Aywas, un doux sourire s'épanouit sur son visage.  Elle porte la main à son front puis le dépose doucement sur celui de la Tenstei de Noah.

D'abord surpris par ce geste, déjà vu, mais instinctif pour Chimey, Noah comprend qu'une communion spéciale a eu lieu entre les deux.  Il voit les yeux de Veena briller brièvement et ceux de Chimey se fermer en un salut silencieux.  La jeune femme s'éloigne ensuite pour rejoindre William. 

Le jeune homme se penche vers Veena quelques instants, puis suivant des yeux la Tibétaine, il murmure :

-    Oui, tu as raison, elle est spéciale.  Et Tomas a raison quand il dit qu'elle doit avoir un gène particulier...

    L'Aywas grimpe sur l'épaule du jeune homme et se met à ronronner alors que celui-ci quitte le Centre pour aller rencontrer les nouveaux réfugiés de ce matin.

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