21 - Étincelle

Deux petites cellules qui se rencontrent créer une étincelle de vie,  Une main sur une épaule ou un mot murmuré à l'oreille, une étincelle d'espoir.  Un sourire d'un enfant, une étincelle de joie.   Comprendre un concept ardu, une étincelle d'intelligence.  La réussite d'un ami ou les premiers pas d'un enfant, une étincelle de fierté.  Réaliser que notre doux sentiment est partagé par l'être aimé, fait vibrer nos yeux qui se rapprochent d'étincelles de lumière qui formeront des étincelles de chaleur sur notre peau et provoqueront des étincelles de plaisir derrière nos paupières...  Notre existence est formé d'étincelles :  on les souhaite positives et épanouissantes.  Cependant, dans notre cheminement, nous aurons à vivre des étincelles de rage, de fureur, de jalousie ; tout comme nous verrons peut-être pâlir l'étincelle de tendresse dans les yeux de l'autre ou de satisfaction ou de reconnaissance.   Et un jour, que nous souhaitons lointain, s'éteindra l'étincelle de vie dans le corps de l'être bien-aimé ou dans le nôtre.

                ************************************************

        Je marche sous un chaud soleil le long du Grand fleuve.  Les rayons de l'astre font miroiter l'horizon d'une lumière étincelante.  Le ciel azuré est limpide et clair.  Au-dessus de ma tête, des goélands naviguent sur les vagues des courants d'air.  Je m'approche de l'eau, irrésistiblement attiré par sa fraîcheur, alors que mes pieds touchent à la crête des petites vagues qui clapotent sur les berges rocheuses.  Je suis heureux de me retrouver ici, là où je venais, tout gamin, observer les bateaux qui passaient pour se rendre au port de Roots, plus à l'est.  Être ici me rend serein et calme.  Je sais bien que ce n'est qu'un songe et que seul mon esprit hante ce lieu ;  mon corps est endormi dans la station de géologie de la Capitale.

     Alors que je m'assois sur mes talons, je sens deux petites mains qui s'accrochent à mes épaules et une douce chaleur familière m'envahit.

- Veena ?

« Oui Sensei,  c'est bien moi. »

    Je vois la jeune fille entrevue dans mon rêve de la caverne.  Elle vient me rejoindre au sol en s'installant en tailleur, son corps collé près du mien. Mince et svelte, bien moins grande que moi, elle ressemble à une enfant d'une dizaine d'années. 

«  J'aime cette apparence.  Elle me donne le sentiment d'appartenir à ce monde. »

- Te sentirais-tu mise de côté ? Si c'est le cas ...

« Non, mais... Oui, parfois. »

- J'en suis désolé, lui dis-je en prenant sa main dans la mienne.

« Tu n'y es pour rien Noah » me répond-elle avec un doux sourire. « J'imagine que cela est normale pour une Aywas.  Nous n'appartenons à aucun monde. Et rarement nous rencontrons un semblable.  Nous sommes assez rares et isolés. » 

- Tu m'es chère Veena, jamais je ne t'abandonnerai.

     Veena me regarde un instant avec un intensité incompréhensible. Je me sens presque malheureux de la voir si troublée. Sous ses yeux d'émeraude, je deviens blême et inconfortable : que se passe-t-il ?  Puis, elle me fait un petit sourire, ferme les paupières et offre son visage à la chaleur du soleil.  Un silence s'installe, seulement troublé par les cris des goélands dans le ciel et le feulement des vagues qui meurent près de nous.  Le vent est doux et soulève doucement ses cheveux gris et noir, poils duveteux qui lui caressent les épaules.  C'est sans ouvrir ses paupières qu'elle me confie : 

- Je ressens une lourde perte comme si je t'avais perdu.

     Je reste interdit tant par ses paroles que par le fait qu'elle a utilisé la voix de son apparence.  Une petite voix, basse, très douce mais hésitante.  Je plonge mon esprit vers elle et je constate qu'une lourde peine l'envahie.  Cela me fait peur, vu ses capacités : est-elle en train de m'annoncer un malheur ? 

- Tu ne m'as pas perdu Veena. Je suis là.

- Je sais Noah. Mais la perte que je ressens est plus forte que moi, je l'éprouve mais ne peux l'expliquer. 

          Elle se tourne vers moi et je constate que ses yeux sont brillants de larmes.  De voir une réaction si humaine me désarme complètement.  Je ne peux que la prendre par l'épaule et approcher ma tête de la sienne pour lui donner du réconfort.

- J'ai peur de te perdre... murmure-t-elle en tentant de reprendre son souffle.

- Je suis là Veena. Tu es mon alter ego.  Je ne comprend pas tout comment cela marche... et ce que je dois faire mais je suis là, sois en sûr.

        Je la garde près de moi quelques instants puis, je crois comprendre d'où lui vient son malaise :

- Ce sont les souvenirs de Pentaa que tu ressens.

Elle me regarde un instant interdit.

- À cause du récit de Mannie, cela a dû réouvrir la mémoire de ton ancêtre.

- Mais je ne veux pas vivre son chagrin... riposte Veena.  Je veux bien y compatir mais pas le vivre.  C'est trop atroce de perdre son Sensei.

- Pourtant Pentaa s'était englobée avant le récit que Mannie nous a raconté.  Pourquoi alors ressentir la perte maintenant ?

- Je l'ignore... Mais mes craintes sont tellement réalistes qu'elles me font peur.

        Je prend sa main dans les miennes : comme c'est bon d'avoir ce contact avec elle.  Nous restons immobiles à observer les oiseaux qui planent au-dessus du fleuve. Je sens que Veena se détend doucement et que son chagrin se meut doucement en sympathie.  Que ma Aywas soit réticente à partager un mal-être me perturbe.  Je repense au récit de Mannie.

- Simon, celui dans la cellule avec Mannie...

- Simon l'Évadé..

- Oui, celui-là... C'est vrai, c'était mon père ?

- J'en ai bien peur...

        Là, c'est moi qui suis submergé par une peine immense devant la réalité.

- Désolé Noah, murmure Veena de sa petite voix tout en envoyant vers moi un baume de réconfort.

- Je ne réalise que maintenant... cette réalité : il n'y a plus aucune chance que mon père soit vivant.  Il a été torturé, fouillé dans le fond de son âme.  Il ne savait même plus qui il était... Qui j'étais, ni ma mère...

         Ma voix se casse en fin de phrase.  Je ne connais pas non plus le sort réservé à Iris Caissy... Dois-je déjà abandonner tout espoir de la retrouver.  Dans ma tête les images des souvenirs de Mannie tournent.  J'y ai découvert le visage et l'âme de mon père, Elros Eeltor Hias, loin de la brume de mes souvenirs d'enfant.  Un homme à qui je ressemble tout en lui étant différent. Un être droit et décidé, ayant à coeur de protéger ceux qu'il aime au delà de toute prudence pour lui-même.  Je sens mon sang qui chevauche dans ma tête et ma poitrine.  Je lâche la main de Veena de peur de lui faire mal et je me lève face au fleuve.  Ma voix se perd sur les flots, appelant à témoin ce lieu de mirage :  

-  Ils lui ont tout pris !  Sa vie, ses souvenirs et son identité !  Il est tombé de cette falaise, blessé et meurtri : en donnant à Mannie tout ce qu'il possédait.  À elle... une Stotelss !  Je les hais !

- Noah...

- Je veux les retrouver Veena, je veux qu'ils paient tout ce mal qu'ils amènent avec eux, qu'ils propagent tel une maladie auprès des êtres qu'ils exploitent.  Même leur propre population, comme Mannie, n'a aucune valeur réelle.  C'est du lavage de cerveau, tu as vu ?  Et ces espèces qu'ils sacrifient pour leur gloire.  Ils se fichent totalement du respect de la vie. Ils viennent sur une planète pour obtenir une ressource et ils détruisent sans conscience.  Veena, je veux les empêcher à tout prix  de continuer à tuer les gens que j'aime ! 

          Je me retourne vers elle, à bout de souffle.  Je sens mes joues qui brûlent et ma gorge qui m'élance suite à mes cris.  Veena ne dit mot, mais me regarde d'un regard triste.  Je la sens indécise mais encline à me faire un reproche comme lors de la scéance de tir à l'arc.  Elle vient pour parler mais je l'arrête de ma main tendue devant moi :

- Non, cette fois-ci, tu ne m'arrêteras pas !  Fini les beaux principes de respect de la vie à tout prix pour ceux qui ne la respecte pas.  Veena !   Je...veux tuer les Stotless.

- Tu veux faire cela Tenstei ? me demande-t-elle en se levant de toute sa petite silhouette en en plantant ses prunelles flamboyantes dans les miennes.  Aller vers eux ? Les tuer tous ?  Et s'il y en a d'autre comme Mannie ?  Tu vas les tuer aussi ?  Et Mannie, tu veux l'éliminer ?  Elle s'est rallié aux terriens, tu te rappelles ?

- Elle n'a pas sauvé mon père !  ils ont déjà détruit toute la côte de Pemplinn et de Rotts.   Ils S'apprêtent à tous nous noyer !

          J'ai crié sur Veena plus que de raison.  J'ai les yeux secs,  les poings fermés,  le souffle court. Une tempête d'émotions me submerge et m'empêche de voir clair dans mon esprit.  Je surplombe la Aywas de ma grandeur et je tente d'imposer mon point de vue par ma seule supériorité physique.

      La petite silhouette devant moi me toise calmement avec des yeux contrastant de douceur avec ma férocité.  Son regard fixé sur moi, les deux bras immobiles et détendus le long de son corps, elle n'esquisse aucun geste de défense.  Dans mon champ visuel, je constate que le paysage autour de nous s'estompe doucement et que le nuit tombe brusquement.  Une grosse Lune monte dans le ciel sombre.  Le vent s'est absenté et l'eau est aussi calme que le regard de ma Tenstei.  Le cri mélancolique d'un huard monte dans la nuit alors que j'entend le bruit d'une cascade qui glougloute tout près.  Le chant des rainettes rythme le silence de cette nature.  Ce changement magique d'atmosphère fait se taire mon émoi.  Je regarde autour de moi.  Je reconnais : voici l'endroit de prédilection de ma mère pour faire des excursions d'escalade, situé sur la rive d'un lac de montagne, nous allions y camper parfois.

- Comment as-tu su pour ce lieu ?

      Un sourire naît sur les lèvres de Veena qui s'approche doucement de moi pour prendre ma main.  Une onde de douceur m'envahit.  Sans un mot, elle me conduit à la limite de la berge du lac, dans une toute petite avancée de sable surélevée.  Nous avons une vue imprenable sur le lac où se reflète la Lune.  Lieu des bivouacs de mon enfance, je le reconnais avec plaisir.  Un petit feu de camp y brûle déjà joyeusement.  J'observe un instant les étincelles qui dansent en montant dans le calme de la nuit.  L'Aywas me tire vers le halo du feu de camp.  Nous nous installons sur le sol sableux, le dos appuyé sur un vieux tronc d'arbre couché.

- Serais-tu prêt à détruire ces lieux ? me demande soudain Veena.

- Non, jamais !

- Pourquoi Noah ? Ce n'est qu'un bout de terre coincée entre la montagne, une cascade et un lac.

- Mais regarde toi-même : ce lieu est exceptionnel. Ce calme, cette nature, c'est beau, c'est pur.  Rien ne justifie de le faire disparaître.

- Pourtant ce lac a eu sa part de noyés, ce feu peut brûler la forêt, cette cascade emporter des arbres et des animaux lors des crues du printemps et la falaise là bas, des gens se sont blessés gravement et sont même morts en l'escaladant.

- Mais pas nécessairement, si on est prudent et que nos comportements sont raisonnables.  On apprend à agir en accord avec eux, à les respecter.  On connaît les dangers et les risques.

- Je n'aurais pas pu dire mieux, conclue Veena en me regardant fièrement.

- Tu veux dire que pour les Stotelss, c'est le même raisonnement ?

- Ou les Terriens, les Miklawans, les Mistrals, les Bricks, les Camarris... ou, oui, les Stotelss, complète mon alter ego.  Chaque étincelle de vie est précieuse.  En détruisant une vie sans discernement, tu risques de faire disparaître d'autres êtres innocents. Alors qu'en prenant le temps d'agir avec réflexion, tu pourras essayer de sauvegarder ou de secourir au maximum les vies, de quelques origines soient-elles.

      Cette vision nuancée de la nature des espèces ne simplifie certainement pas mes sentiments mais porte à réflexion. 

- Si Mannie n'avait  pas été sur ce vaisseau, mon père serait sûrement mort plus tôt, avec tout son bagage. 

- Exact.  Tu sais qu'il l'a vu dans son apparence de Stotelss, comme toi tu vois Mannie ?

- L'influence de son lien avec  Pentaa ?

- Oui, ce lien a développé son omniscience. 

- Et il l'a accepté telle qu'elle était.

- Il a su voir au delà de son apparence.  Et Mannie elle-même a ouvert les yeux sur la manipulation que son peuple subit.  À force de se faire dire ou de penser qu'il n'y a qu'une seule façon d'agir, on y croit.

- Comme les Miklawan qui se morfondent, au fond des vaisseaux Stotelss,  d'être responsable de la destruction de leur monde et qui ont accepté de servir pour payer leur dette d'avoir été sauvé de l'extinction ? Aurait-il pu empêcher l'exploitation excessive de leur monde ?

- C'est la réponse que nous devons trouver.

- La Terre pourrait subir le même sort que Bliess ?

- Déjà les Mistrals ont bloqué l'avancé des projets des Stotelss. 

- Les barrages : je me demande ce qui s'y passe. J'aurai tant aimé y être.

- Notre place est ici, Tenstei. Nous aiderons à prendre contact avec tout ceux qui veulent sauvegarder cette planète. Humain ou autre... Nous tenterons de sauver le plus d'étincelles.

- Et mon oncle... Strom.

- S'il n'est plus à la station.  Il sera en ville, nous le trouverons, promis.

      Après un silence, Veena s'assoupit près de moi, la tête sur ma jambe avec un comportement félin que je reconnais bien.  D'une main distraite, je passe ma main dans ses cheveux, il me semble l'entendre ronronner !  De mon côté, mon esprit s'embrune alors que mes yeux se perdent dans les lueurs changeantes du feu de camp et les braises qui pétillent vers les étoiles.

********

      Noah se réveille. On l'a étendu sur un lit de camp dans la salle commune où a eu lieu sa rencontre avec Mannie.  La salle est dans la pénombre.  Assit à une des tables, un ordinateur devant lui - Noah croit reconnaître le sien avec sa charge Mistrale -  il ne reste que William.  Le jeune homme s'assoit et  passe une main sur ses yeux pour en chasser le sommeil.  Il se lève et va rejoindre Biron.

À son approche, William se tourne vers lui, un café  la main :

- Noah !  Tu es enfin réveillé. Approche.

           Veena, dans son apparence plus habituelle de petit chat-hibou, dort sur une chaise couchée en rond.  Sur le dossier, Noah prend son veston Mistral tout en regardant d'un oeil nouveau la broderie. Il s'assoit près de Biron qui lui verse un café et pousse vers lui une assiette recouverte d'un couvercle.

- Mange. Tu en as besoin, petit.

- Où est Ayanah et les autres ? demande Noah en prenant une gorgée du café avec précaution : pas de vin d'arbre cette fois !

- Ils ont rejoint les dortoirs.  Toi, tu n'étais pas réveillable et, quand on a voulu  te transporter, ton garde-du-corps personnel n'a rien voulu savoir, sourit William en désignant Veena.  Elle a feulé et craché tellement fort que plus personne ne va oser t'approcher... Donc on t'a installé ici.

      Noah découvre dans l'assiette un pain de céréales, du fromage et des dattes qui font gargouiller son estomac.  Il mord avec appétit dans son repas.  Tout en mastiquant, il jette une œil par-dessus l'épaule de l'ex-commissaire qui analyse avec concentration des cartes sur le portable, qui est en effet son propre ordinateur.  William surprend le regard inquisiteur de Noah :

- Kaïra et Ludvig ont installé des dossiers sur ton ordinateur...  Ce sont assez doués et s'entendent plutôt très bien ! ... Je consultais les dossiers.

- Ça dit quoi ?

- Il y a le journal de Josh Doowning depuis l'arrivée de Mannie... intéressant.  Ensuite des plans de la ville... utile.  Différentes preuves obtenues par Strom quand il était ici sur la présence des Stotelss... utile aussi.  Et je pense que nous devrions...

- William ? l'interrompt Noah avec gravité.

L'homme se retourne sur sa chaise pour être face à lui.

- Que sais-tu sur Strom ? se décide à demander le jeune homme.

- Qu'il était ici lorsque Mannie a été recueillie par le professeur Doowning, répond prudemment William..

       Noah ne sait pas ce que Mannie leur a dit mais il se doit d'être franc avec William, le meilleur ami de son père. Mais avant, il doit savoir ce que Mannie leur a dévoilé :

- Que vous a-t-elle raconté ?

- Son arrivée ici et l'organisation de la station dans le but de combattre les Stotelss et surtout de se protéger d'eux.  Toi et Ayanah vouse sembliez dormir.  Elle aussi m'a posé cette question avant de quitter tantôt.  Elle a dit que tu m'en parlerais. Pourquoi cette question ?

- Je t'en prie, dis-moi ce qu'elle vous a dit pendant que nous dormions et ensuite je te dirai les visions que nous avons eu, elle et moi.

- L'effet Aywas c'est ça ?

- Oui, en effet.

William ouvre un page de texte sur l'ordinateur et tourne l'écran vers Noah.

- Tu pourras consulter ce journal, c'est très édifiant et encourageant.  Nous ne sommes pas les seuls à vouloir nous opposer à l'invasion.  Mais, ici ils ont eu un éclairage un peu différent envers l'ennemi.  Admettons que d'avoir une Stotless parmi eux, nuançait les propos.  Seuls, Josh Doowning, sa femme Sofia et Strom savaient pour Mannie.  Ludvig m'a avoué aussi qu'il le savait :  Kaïra lui en veut d'avoir caché cela !   Ce sont ceux qui ont soigné Mannie les premiers temps, tu comprends.

- Strom a été longtemps ici ?

- Depuis qu'il a quitté Pemplinn.  Nous aurions pu le trouver et le ramener...  Mais nous nous sommes contentés de nous cacher... Je m'en veux !  J'aurais dû empêcher Elros de partir seul à sa recherche.

- William, tu n'as pas à t'en vouloir.  Mon père a pris cette décision.  Il n'aurait pas aimé que tu le suives.

- Mais apparemment, il n'a pas pris le bon chemin, constate William devant Noah qui se retient d'intervenir. C'est ici qu'il aurait dû venir.  Depuis dix ans, Josh, Simon et Mannie ont tout organisé ici à la station.  Ils ont recueilli du monde, monté un réserve d'armes, un bunker - le silo et les sous sols  - et tenté d'accumuler des preuves de la présence Stotelss sur Terre.  Car la présence des Stotelss demeure difficile à prouver car ils se cachent sous une apparence humaine, comme tu as pu le voir.  Ils ont monté des attaques éclairs et incognito contre les Stotelss.   Naturellement, en tant que Mistral, Simon avait de la facilité pour cela et il s'est entouré d'un petit groupe qui lui ont fait confiance.  Le Major Dan l'a aidé aussi à établir un semblant d'organisation.  Mannie, en chaise roulante, allait rarement sur le terrain mais elle était leurs yeux.  Naturellement, on sait maintenant pourquoi elle les connaît si bien. 

       Le Commandant fait une pause et remplit à nouveau sa tasse de café.  En offre en Noah, qui refuse puis, il continue :

- Au printemps dernier, tout est parti en vrille.  Tu sais qu'ils étaient quasiment une cinquantaine dans cette « division » ?  Ils avaient décidé de porter un gros coup aux Stotelss en attaquant un quartier général près du Parlement... Et oui, les Stotelss y sont !

- À la tête du gouvernement ?

- Pas le Premier Ministre car Mannie l'a déjà croisé en personne.  Il y a une liste qu'ils nous ont donné.  Mais Mannie n'a pas pu voir en vrai tout le monde au Parlement. Nous devrons vérifier avec toi et Veena.

- Mais que s'est-il passé au printemps ?

- Tout a commencé avec l'aboutissement du projet d'études sur la Barrage de Rouan de Kaïra. Josh y avait plongé à pieds joints sur les conseils de Mannie qui faisait un lien avec l'arrivée des Stotelss sur Terre. Lorsqu'il réalise le noeud de vipères que Kaïra a déterré, Josh refuse de mettre son équipe en danger : il exige de Kaïra qu'elle disparaisse et se met à l'avant-scène pour répondre aux enquêteurs du Ministère de la Sécurité intérieure.  Alors que le Professeur Doowning accompagné de Ludvig se dirige au Ministère pour une « entrevue », le Major Breton et Strom dirigent malgré cela la grande partie des effectifs dans l'attaque prévue.  Mais, ils semblent avoir été démasqués et alors qu'ils empruntaient les sous-sol à la station du métro de la Garde, il se produit une explosion.  Cela a été un hécatombe.  Ce qu'une simple explosion peut causer de dégâts, c'est incroyable !  Seulement quelques membres de la division sont revenus ici, dont Dan, gravement atteint.  Josh n'est jamais revenu du Parlement alors que Ludvig n'y a jamais mis les pieds, expulsé dès le début du Parlement. 

William pose une main sur l'épaule de Noah :

- Mannie croit que Simon est toujours vivant.  Elle dit qu'elle le saurait sinon.  Moi aussi j'ai certains doutes mais... je suis désolé Noah : nous n'avons aucune preuve réelle. 

- Ma mère avait trouvé une photo de mon oncle...

- J'ignorais que tu le savais.

- Son message, explique Noah.

- Ah bon.  Oui, elle avait cette photo qui lui a donné l'espoir qu'on le retrouverait. Mais rien ne prouve que ce soit vraiment lui.

- Tu l'as cherché ?

- Oui, à plusieurs reprise je suis venu ici l'été passé.  Sans le dire à ta mère car elle voulait faire ça seule.  Lorsqu'elle venait, elle venait me voir pour que je garde un œil sur toi et j'envoyais toujours deux hommes pour la suivre en douce.  Sauf la dernière fois malheureusement... Elle ne m'a pas prévenu. Elle aura...

- ...oublié de le faire, complète amèrement Noah.

- Sûrement.  Et nous n'avons pas retrouvé Strom.  Et crois-moi, cela aurait été un grand bonheur.  J'aurais aussi raviver un espoir pour...

     Biron baisse la tête et Noah se mord les joues, de plus en plus mal à l'aise de cacher ses propres réalités à cet homme qui l'a pris sous son aile depuis la disparition de sa mère.  Ignorant le tumulte qui sévit dans la tête du demi-Mistral, le Commandant poursuit :

- Mannie, Ludvig et Dan ont tenté de restaurer la division, mais sans le gros du groupe, ils sont un peu désorganisés.  Ils tentent davantage de se cacher que de monter des actions.

- Ils survivent.  Comme nous, dans la Montagne.

            Le commandant termine son café puis, il regarde Noah en déclarant :

- Tu sais petit, tout le temps que Mannie nous racontait son histoire, je me suis demandé pourquoi Strom n'avait pas pensé à venir vers nous, à Pemplinn ou à Rotts ? Ce n'est pas logique. 

        Noah sent que Veena monte sur ses genoux comme pour l'encourager.  Elle passe ensuite sur ceux de William en ronronnant.  Ce-dernier lui sourit et commence à caresser le pelage-plumage de l'Aywas.  Ressentant l'onde bienfaisante que Veena lui décerne, il relève son regard gris qu'il fixe dans le jade du jeune homme :

- Que sais-tu que j'ignore, petit ?

- Des vérités, William...  Pour mes parents.

- Je t'écoute Noah.

Et Noah de raconter, d'une traite pour ne pas perdre le courage de formuler ces vérités, ce qu'il sait.  Le krark du coffret Aïldi, le récit de la vidéo de sa mère, la vision de la rencontre entre Mannie et Simon l'Évadé-Elros...  La certitude de la mort de celui-ci.

Lorsqu'il termine, le soleil, dans un ciel éclatant d'azur, darde ses rayons au-dessus des sapins enneigés, éclairant de ces étincelles de lumière les deux humains par la haute fenêtre de la salle commune.  Noah se sent comme asphyxié.  William ému, l'attire contre lui et le jeune Étolias éclate en sanglots.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top