05
Noah franchit la porte de sa maison d'un pas rapide. Celle-ci se rabattit avec fracas, preuve de sa robustesse malgré les armées de mains l'ayant refermée sans ménagement. Il jeta un coup d'œil au décor familier, son regard parcourant les murs crèmes laissant à peine la place pour un vestibule étroit, puis longeant sur la gauche les vieilles marches de l'escalier menant à l'étage. Face à lui se trouvait la porte de la cuisine, à droite celle du salon et la salle à manger. Il se dirigea droit devant lui sans plus tarder, laissant son sac giser au beau milieu du vestibule, retirant ses baskets avec ses pieds et les laissant exactement là où il les avait chacun retirée. Il ouvrit le frigo d'une main pressante, à la recherche de quelques denrées à se mettre sous la dent. On y retrouvait les mêmes dessins que sur tous les frigos, trois légumes se courant après et un aliment douteux en bas à gauche.
Il entendit alors la porte se refermer et Maya fit son apparition dans la cuisine. Elle lui sourit d'un air las, ses cheveux bruns retenus par un chignon mal fait. Sa sœur de quatre minutes son aînée se laissa tomber sur une des chaises avec fracas et massa ses poignets sans réelle conviction.
Aux premiers abords, Maya et Noah n'avait rien en commun. L'un brun aux cheveux rebiquant, l'autre châtain aux cheveux fins comme du fil à coudre, les yeux noisettes de Noah contre ceux bien marrons de sa jumelle. Tout cela ne portait pas à les rassembler. Mais après s'être posé un moment en leur compagnie il était possible d'apercevoir une mimique au coin de l'œil ou une expression qui ne laissait plus de place au doute. Ils n'avaient pas grand chose d'autre en commun, si ce n'est une maison et un nom de famille.
Ils restèrent un moment en silence avant qu'elle ne lance d'un air détaché :
- la prof de grec nous a fait un contrôle surprise et bien on peut dire qu'on a été surpris. C'est ma moyenne qui va être contente.
Noah leva les yeux au ciel. Dans le vocabulaire de sa sœur, cela équivalait à descendre sous les dix-sept.
Il ne savait pas pourquoi sa sœur se bornait à lancer des conversations stériles sans jamais chercher à aller au delà. Il était au courant pour ses contrôles de grec ou une blague de Connor. Il ne savait jamais comment elle se sentait au fond ou sa philosophie de vie. Il ne se remis pas en cause pour autant.
La littéraire fouilla dans son sac et en sorti un livre aux pages cornées :
- tiens, Ari' m'a donné ça, il paraît que ça pourrait te plaire. Je lui ai dit d'arrêter de croire que tu savais lire.
Noah rougit et récupéra rapidement le recueil. Il ne releva même pas la pique envoyée par sa sœur. Il s'empressa de déchiffrer le titre à demi effacé : chroniques martiennes de l'auteur Ray Bradbury. Ariane raffolait des vieux ouvrages. Elle dégotait ses livres dans des brocantes, magasins de livres d'occasion, grenier de grands parents, voire chez des particuliers...
Il passa son pouce sur la couverture jaunie. Ariane avait donc retenu son goût pour la science-fiction. Noah ne jurait que par Barjavel ou H.G. Wells. Il se rendit alors compte qu'il avait quelque peu oublié son amie ces derniers temps et il s'en voulu presque.
Il entama sa lecture sans plus tarder, debout au milieu de la cuisine, retournant les pages dans un bruissement caractéristique et ne releva la tête que lorsque sa mère entra.
Un sourire éclatant illumina ses lèvres comme à chaque fois qu'il avait quelque chose à demander. Madame Delrio arqua légèrement un sourcil mais se contenta de répondre à ses salutations.
A sa surprise, ce fut Maya qui aborda la première la fête de Connor. Noah avait complètement oublié que sa sœur se trouvait être très proche du garçon en question.
- Je suis invitée à la soirée de Connor. Annonça-t-elle simplement sans lever les yeux de son cours de littérature.
Illaria Delrio redressa la tête de son ouvrage et sourit tendrement. Elle aimait voir sa fille travailler avec assiduité, bien qu'elle se réjouissait de la voir sortir de temps en temps et passer du bon temps, pour contrebalancer.
- moi aussi je suis invité.. ajouta Noah rapidement.
Les deux femmes se tournèrent vers lui avec surprise.
- Mais moi je ne comptais pas y aller, rétorqua Maya.
Noah pesta : elle ne lui rendait pas la tâche facile. Le travail étant nettement assidu chez le garçon que chez sa jumelle, l'approbation de sa mère était moins simple à obtenir. La famille Delrio restait de mœurs traditionnels, si bien que Noah n'avait pas connu autant de barrières que ses sœurs, il le sentait bien. Elles avaient été conduites à être plus sérieuses, au grand damne de Noah qui maintenant se rendait compte qu'il aurait aimé certainement plus de rigueur. Mais bon, c'est un garçon ! Disaient les adultes et cela lui laissait un goût amer dans la bouche. Il dû promettre de se mettre à ses devoirs dès son réveil le lendemain matin (sans stipuler l'heure du réveil) et garantir de rester sage. Sa mère, inquiète, ne cessait de l'interroger. Surtout, le fait que Noah puisse sortir sans son acolyte de toujours Saul la perturbait, ce qui agaçait Le Brun au plus haut point. Tu sais maman j'ai quand même une vie autre que ce que tu vois à la maison. Sa mère se vexa, mais elle revint à la charge plus tard dans la soirée.
C'était une petite femme brune, l'air inquiet et débordé, s'affairant en permanence et se préoccupant de tout. Son père et elle s'étaient bien trouvés, et ne cessait de se transmettre un stress étouffant qui rendait fou Noah.
Il réussi à abattre toutes les pièces de défense de sa mère et obtint de se rendre chez Connor ; échec et maths.
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Le lendemain matin, Noah se leva étonnamment tôt, et ne sachant que faire, il partit vers le lycée. Il fit mine de patienter quelques minutes face aux menaces silencieuses de sa mère mais claqua la porte sans attendre sa sœur, au désespoir de sa mère qui souhaitait les voir plus unis.
Et c'est avec dix minutes d'avance sur la sonnerie que Noah franchir le portail. Il jeta un coup d'œil autour de lui et réalisa alors pourquoi il arrivait toujours au dernier moment : ne pas parler à grand monde était une chose, se retrouver seul comme un gland à la récréation du matin en était une autre. Il se planta au beau milieu de la cours et tenta d'emprunter un air dégagé. De petits groupes se formaient ça et là, laissant échapper des gloussements qui irritaient notre personnage principal. Le temps se rafraîchissait avec l'arrivée de l'hiver et il ne manquait plus que la pluie pour compléter le tableau de Saint Scenac en octobre. Les élèves du lycée Pouzol se ressemblaient tous, enfants de la campagne habitués à l'air frais et au soleil. La plupart étaient enfant de paysans, des vignerons, qui tentaient tant bien que mal de transmettre leur passion de la terre à leurs enfants. La plupart suivraient, par déterminisme, mais ils étaient à un âge où chacun rêvait d'urbanisation et de fuir le domaine familial. Beaucoup revenait après, c'était cyclique.
Noah aperçu alors une masse brune et sautillante s'approcher vers lui et reconnut sous un bonnet de laine grossièrement tricoté le visage fin d'Isis. Il arqua légèrement un sourcil.
Isis à sa vue laissa échapper un cri de surprise :
- vous ici ? S'exclama t'elle en claquant une bise sur sa joue fraîche battue par les vents. Noah esquissa un sourire.
La brune se laissa tomber sur un banc avec un soupir :
- il va falloir que cette journée se termine assez vite ou je risque d'y laisser ma peau. Ajouta-t-elle avec son énergie habituelle.
Noah se contenta d'acquiescer en silence, non pas qu'il ne souhaitait pas s'entretenir avec Isis mais bien parce qu'il lui était impensable de prononcer le moindre mot à une pareille heure. Il n'était même pas huit heures !
Il s'assit à côté de la fille aux yeux mordorés qui babilla joyeusement jusqu'à la sonnerie. Il l'écouta plaisamment, saisissant à peine la moitié de ses propos. Elle se redressa promptement, salua avec vivacité et s'échappa. Noah resta quelques minutes assis, un mince sourire étirant ses lèvres, avant qu'un Saul hystérique vienne le sortir de sa torpeur.
- Noah !
Il redressa la tête rapidement, surpris par l'invective. Le Saul qui se tenait face à lui détonnait de l'habituelle larve qu'on pouvait apercevoir. Noah fronça les sourcils, inquiet :
- elle me fait suer ! S'écria le bouclé sans se perdre en salutations inutiles.
Alyssa et lui s'étaient disputés. Encore. Tout était parti d'un week-end à la mer prévu depuis six mois, remis en question face à un match de tennis du petit frère de Saul elle m'a dit qu'elle s'en foutait, mais il joue national c'est hors de question. Alyssa ne supportait pas qu'on la contredise, encore moins qu'on vienne contrecarrer ses plans. Et puis Saul détestait qu'on le contredise. Les deux faisaient la paire jusqu'à ce qu'un imprévu pointe son nez. Saul était extrêmement fier d'Uriah, son benjamin de trois ans. Il était un miracle pour la famille Dumont, le premier sportif depuis des générations.
Noah, quelque peu rassuré et considérant l'incident comme mineur, laissa Saul continuer son monologue alors qu'ils se dirigeaient calment vers leur salle de cours.
Le cinquième chapitre, idéal pour un point sur la question. Donc cela fait maintenant plus d'un mois que Noah est publié, et nous avons franchis la barre des 200 vues, merci ! J'ai toujours autant de plaisir à vous partager ses aventures mais suis face à un tournant de l'histoire qui me prend du temps à l'écriture.
De votre côté j'espère que vous êtes toujours enjoué ! Que pensez vous du déroulement ? Des suggestions ?
Une intrigue plus explicite vous semble t'elle nécessaire ?
N'hésitez pas à partager la moindre remarque, sur ce à bientôt
Jay
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