01
Les Hommes ont passé des siècles à se battre au nom de leurs valeurs, de la condition humaine, et voilà que tout était remis en cause.
- Saul tu sais que danser sur du Patrick Sébastien remet en cause la dignité humaine ?
Toute cette lutte, tous ces sacrifices, pour en arriver là, un vendredi soir de septembre pluvieux, entassés dans le salon exigu de Saul où se trémoussaient sur la piste une dizaine d'adolescents en sueur, un verre d'alcool au trois quart vide à la main.
Noah s'était posté en retrait de la scène, assis en équilibre sur le dossier d'un fauteuil afin de dominer la mêlée des âmes sur le dance floor. Il était hors de question qu'il danse, et voir son ami qui ne l'écoutait déjà plus, s'époumonant sur des tubes des années 80, il en vint sérieusement à se demander ce qui les unissait.
Les dernières notes kitch du morceau retentirent et Saul se déhancha jusqu'à ce qui semblait être son meilleur ami.
- Noah, dit ce dernier cérémonieusement. J'espère très fort que tu ne comptes pas passer toute la soirée dans cette posture fort douteuse à regretter jusqu'à la création du monde.
L'intéressé esquissa un rictus.
- je pensais plutôt attendre le moment où tu tomberais ivre mort afin d'agrémenter ma galerie photo de la douceur de ton visage.
Saul laisse échapper un rire franc. Il porta à ses lèvres un verre rempli de mélanges douteux et lui adressa un clin d'œil. Ses cheveux châtains clairs, s'échappaient de toute part en boucles folles, encadrant un visage fin, rehaussé par deux yeux bleus pétillant de malice. Il était grand et longiligne, son corps perdu dans un t-shirt noir simple, jean et baskets.
Les deux garçons se connaissaient depuis la maternelle, où ils avaient commencé en se lançant des cailloux pour finalement prendre la route de ce qui semblait être une solide amitié.
Ils avaient partagé leurs doudous, leurs billes à la récré, leurs premières antisèches, leurs premières clopes, enfin clope au singulier, les deux garçons n'ayant jamais réitéré l'expérience. Toutes ces mésaventures les avaient considérablement rapprochés, unis comme les doigts de la main, si bien qu'on prenait souvent les garçons pour des jumeaux, et ce bien plus souvent qu'entre Noah et Maya, sa véritable jumelle.
Ils étaient la plupart du temps fourrés ensemble, appartenant à un petit groupe de leur classe où ils se sentaient à l'aise, mais c'était bien plus les amis de Saul que ceux de Noah. Il remarquait en effet parmi les invités les visages familiers d'Isis et Paloma, avec qui il partageait ses repas le midi et parfois quelques pauses, mais avec qui il ne ressentait pas de véritables atomes crochus. Noah ne ressentait pas le besoin véritable d'aller à la découverte des gens, et ses amitiés lui tombait souvent dessus par hasard ou sur un malentendu. Si Saul avait visé ne serait-ce 10° de plus vers la gauche, rien de tout cela ne serait arrivé, il n'aurait pas reçu une poignée de gravier alors qu'ils avait trois ans, et il ne lui aurait pas donné de coup de tête.
De même, sans un lancer de ballon malencontreux lors de l'AS basket en sixième, il n'aurait jamais croisé le regard pétillant de Matteo qui était rapidement devenu quelqu'un qu'il affectionnait particulièrement. Le reste, il ne s'en souciait pas davantage, et jugeait superflux toute tentative de sociabilisation. A quoi bon ? Il avait ses potes, d'autres gravitant autour et auxquels il adressait tout de même la parole, et puis le reste...
Il tolérait pourtant la présence d'Ariane, ses grands yeux verts expressifs et le rose qui tintait ses joues lorsqu'on croisait son regard trop longtemps. Oui, il appréciait les heures d'études à ses côtés à parler de romans dont personne n'avait jamais entendu ne serait-ce le titre, dans le calme reposant de la bibliothèque du lycée, à une heure où seuls les plus fous osaient encore s'aventurer dans les bâtiments. Ariane et lui se connaissaient depuis leur plus tendre enfance et leurs parents étant relativement proches, ils avaient pour ainsi dire grandi ensemble. A la différence de Saul, elle n'avait pourtant pas semblé prendre beaucoup de place dans son existence, si ce n'est qu'elle avait toujours été plus ou moins là, au détour d'un couloir ou dans le jardin d'à côté. Ariane faisait parti de son quotidien, ses cheveux noirs au carré et ses genoux salis, son air effronté et sa volonté de disparaître par toute occasion.
Noah lança un regard empli de mépris mais surtout de rage impuissante à Saul et Alyssa, dansant un slow sur du Arctic Monkeys. Avec tact, Saul lui tira la langue. Noah était célibataire depuis la création du monde, et il n'en revenait pas que même Saul ait trouvé l'amour avant lui.
Et c'est toujours assis sur le rebord du dossier du fauteuil, le regard perdu dans des réflexions insondables, que Noah tomba assoupi vers les coups de quatre heures.
Sa tête lui semblait lourde alors qu'il émergea difficilement d'un sommeil peu réparateur. Son crâne le lançait et son estomac criait famine, lui faisant amèrement regretter tous ses choix de la veille. Le soleil perçait à travers les rideaux blancs, éclairant doucement la pièce, la table basse en verre ayant miraculeusement survécu à la nuit. Le tapis lui semblait touché en différents points éparses, contrastant avec son blanc cassé d'origine. Quelle idée aussi d'avoir mis de la moquette, avait maintes fois ronchonné Saul, ce qui ne l'avait pourtant jamais empêcher d'organiser à nouveau une soirée dès que l'occasion se présentait.
Noah s'était miraculeusement retrouvé allongé sur le fauteuil, surement grâce à un ange anonyme ayant œuvré pour sa survie. De nombreux autres adolescents se trouvaient endormis ça et là, le visage enfouis sous un coude ou entre deux oreillers. Il sourit à la vue de Paloma et Tina, toujours debout, un verre à la main et dansant sans musique, toujours pétillantes d'énergie.
Le brun se redressa tant bien que mal, frotta longuement ses yeux fatigués et se leva. Il se rendit dans la cuisine, où le poste de radio grésillait comme toujours depuis quatorze ans et se servit un verre de jus d'orange dans le frigo. Il sourit à la vue d'un dessin qu'il avait réalisé quelques dix ans plus tôt, représentant la famille Dumont au complet, Saul et ses cheveux bouclés, sa mère en tablier de cuisine, son père le visage enfoui derrière d'épais verres de lunettes... On aperçoit également Trévor le chat, que l'on pourrait facilement confondre avec une grenouille. En effet, Noah du haut de ses sept ans semblait considérablement avoir été influencé par le nom de l'animal et celui même de Neville Londubat.
Il n'y avait pas à dire, Noah avait toujours dessiné comme une bille et ce malgré des années d'entraînement. Le coeur y était, c'était l'essentiel.
Il replaça la bouteille dans le frigo, chercha longtemps des yeux sa veste et, ayant enfin mis le grapin dessus, se dirigea vers l'entrée avant le réveil de la maisonnée. Pour Noah, il n'y avait rien de pire qu'un petit déjeuner gueule de bois en compagnie d'autres personnes dans le même état. ou même juste un déjeuner avec des gens. Le problème était peut être tout compte fait la simple présence de ces gens.
Le week-end risquait de paraître long à certains, et connaissant son meilleur ami, le brun était persuadé qu'il en garderait des séquelles plusieurs jours.
Et voici, dans sa version la plus travaillée, le premier chapitre de Noah et son épopée.
N'hésitez surtout pas à partager votre ressenti et vos commentaires, même s'il vous semblent futiles c'est toujours bon à prendre (tout avis à son importance).
Que pensez vous de cette première approche de Noah ?
Des personnages en général ?
Des remarques ?
Je posterai une à deux fois par semaine, selon la production. Un casting sera disponible en début dès la parution du chapitre trois.
En vous souhaitant une bonne continuation,
Jay
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