🍍chapitre 5🍍
Bzzzz… Bzzzz… Bzzz-
Marco observa la mouche tomber au sol, les ailes carbonisées. Il fallait croire qu’elle agaçait quelque peu Ace. On pouvait dire que l’île où ils venaient de se poser était assez dense en végétation, et qui disait végétation disait obligatoirement insectes. Au grand dam de la plupart des membres de l’équipage.
« J’espère qu’on restera pas longtemps » grommela Satch en chassant un énième moustique et rapidement des plaintes se mêlèrent à la sienne.
« Ce n’est que l’histoire d’une nuit ou deux, le temps que l’on se ravitaille » affirma Marco.
Des grognements peu enjoués suivirent ses paroles et Marco eut un sourire amusé. Ils étaient les redoutables membres de l’équipage de Barbe Blanche, des pirates aguerris et sans peur… Et les voilà à geindre pour deux malheureux insectes. Comment ne pas rire devant l’ironie de la situation ? Il jeta un regard à son capitaine et après avoir obtenu son accord silencieux, Marco proposa à Ace une balade, rien que tous les deux. Un rendez-vous, même si Marco préférait ne pas formuler sa pensée à voix haute, c’était un risque à voir ses frères se moquer de lui et de son côté fleur bleue. Mais heureusement pour lui, il n’eut besoin d’aucune parole pour qu’Ace comprenne ce qu’il avait en tête.
Le brun lia leur main et le poussa à la suivre avec un sourire malicieux, ce petit sourire qui faisait toujours autant tressauter le cœur du phénix. Ils flânèrent dans les rues animées de l’île, Ace s’arrêtant à tous les stands de nourritures possibles et Marco examinant les livres proposés par les petites librairies de la ville. Si l’on faisait abstraction des insectes un peu trop désireux de se brûler les ailes, le cadre de l’île était tout à fait charmant. Dire qu’à une époque, un temps où Marco n’était encore que le jeunot de l’équipage, cet endroit était un repère de pirates sanguinaires et abusifs, qui faisaient des habitants des esclaves et qui tuaient sans aucune once de pitié. Barbe Blanche avait mit fin à cette période de tyrannie en proclamant l’île sous sa protection et depuis, c’était devenu un havre de paix dans lequel les enfants pouvaient grandir sans craindre une attaque, où les habitants étaient libres de vivre selon leurs désirs, sans avoir à servir des êtres ignobles et sans scrupules.
Perdu dans ses pensées, il mit du temps à réaliser qu’Ace s’était figé. Il haussa un sourcil, surpris par ce soudain arrêt.
« Qu’est-ce qu’il y a ? »
« Je... »
Il pointa un passant, renforçant l’incompréhension de Marco. Le jeune homme était tout ce qu’il y avait de plus banal. Ses cheveux d’un blond sale étaient en partie camouflés par un chapeau de paille, ses vêtements étaient couverts de boue et des morceaux de paille étaient collés à lui, comme s’il sortait tout juste d’une sieste sur un tapis de foin. Sûrement un paysan du coin. Marco ne comprenait pas pourquoi un tel homme intéresserait Ace. Et l’explication ne tarda pas à arriver.
« J’ai déjà vu ce type... »
« Vraiment ? Pourtant il ne me semble pas que nous ayons fait escale ici depuis ton arrivée dans l’équipage. Tu l’as rencontré sur une autre île ? »
« Non »
Il affichait un air perdu, la confusion se lisant aisément dans son regard.
« Non je crois… Je crois que je l’ai déjà vu dans un de mes cauchemars »
« Dans un de tes cauchemars ? »
« Ouais, mais je ne me souviens plus très bien de ce qui se passait dedans. J’ai juste le souvenir d’un écho, d’un hurlement »
« Suivons-le, il est sûrement lié à tes rêves, d’une manière ou d’une autre »
Ace acquiesça et ensemble, ils débutèrent leur filature. Malheureusement, ils furent forcés de constater que cet homme ne leur apporterait pas le moindre indice. C’était un citoyen tout ce qu’il y avait de plus commun. Il était passé d’échoppe en échoppe, se fournissant en grains et en matériaux utiles pour l’exploitation des champs, soit rien d’extraordinaire. Marco se demanda un instant si Ace n’avait pas confondu cet homme avec un autre. Après tout, il n’existe pas d’homme plus commun que lui. Au bout de trois heures de poursuite, les deux pirates durent se rendre à l’évidence : leur filature était inutile. Le paysan n’avait pas le moindre rapport avec Ace et ses rêves. Il était temps de le laisser tranquille.
« J’étais pourtant sûr que c’était lui… » Dit Ace d’une voix faible, comme s’il craignait que Marco ne le croit pas.
« Ace… Tu vois bien que cet homme n’a rien de spécial. Laissons tomber pour aujourd’hui, ça ne sert à rien de continuer pour le moment »
Le plus jeune fit un petit mouvement de la tête mais Marco voyait qu’il n’était pas satisfait de ses paroles. Il soupira et se gratta la nuque, incertain de l’attitude à adopter. Il ne savait pas quoi lui dire pour lui faire retrouver le sourire et il se sentait mal à cette constatation. Il avait l’impression d’être un mauvais amant. Décidé à penser à autre chose, il jeta un coup d'œil à la rue et s’aperçut sans surprise que le paysan avait disparu.
Mais au même moment, non loin d’eux, une explosion retentit. Ni une, ni deux, Ace et Marco se précipitèrent vers le lieu de la détonation et découvrirent un bar en flammes. La tenancière, une femme robuste et au visage parsemé de cicatrices, observait son établissement s’effondrer avec désespoir, englouti par les flammes. Marco repéra sans difficulté Haruta à quelques pas d’eux et se dirigea vers lui.
« Que s’est-il passé ? » Questionna-t-il en s’arrêtant au côté de son camarade.
« Un mec s’est énervé parce qu’un paysan lui avait volé un bout de terrain et il a voulu le menacer avec un pistolet. Sauf que sous le coup de l’énervement il a tiré sur un baril d’huile et tout a pris feu. On a pu sauver la plupart des clients et le personnel du bar mais… Le paysan était trop prêt du tonneau, je pense qu’il est mort sur le coup »
Marco acquiesça et fronça les sourcils lorsqu’Ace se dirigea à l’intérieur du bar. Il le suivit, intrigué, et écarquilla les yeux face au corps inerte aux pieds d’Ace.
C’était l’homme qu’ils avaient pris en filature un peu plus tôt.
***
« Je comprends pas »
« Moi non plus pour le coup », avoua Marco avant de tendre une tasse de café à Ace.
Ce dernier scruta le liquide noir sans conviction et grimaça à la première gorgée. C’était évident qu’il se forçait. Mais il n’avait déjà rien mangé au repas, chose inhabituelle de sa part, alors Marco l’avait obligé à boire au moins quelque chose pour ne pas rester le ventre vide. Il s’inquiétait pour Ace, encore plus depuis la découverte du cadavre. Ace ne comprenait pas pourquoi cet homme était apparu dans ses cauchemars, ni pourquoi il avait péri et Marco n’avait hélas aucune réponse à lui apporter. Tout ce qu’il pouvait faire, c’était d’être là pour lui. Il glissa sa main dans les cheveux d’Ace et le massa, dans l’espoir de le détendre, ne serait-ce qu’un minimum. Cela sembla faire son effet car Ace déposa sa tête contre son épaule et ferma les yeux, tenant fermement sa tasse entre ses mains.
« J’aimerais tellement pouvoir vivre une vie normale, où ma seule préoccupation serait de fuir la marine, de mater les matelots un peu trop chiants et de te satisfaire au lit…»
« Pour ça tu n’as pas à t’en faire, je suis très satisfait », fit Marco avec un sourire taquin auquel répondit fragilement Ace avant de reprendre un visage sombre.
« Mais ces putains de cauchemars gâchent tout. Ils me pourrissent la vie»
« On trouvera une solution Ace, je te le jure »
« Merci d’être là Marco »
« Je t’aime Ace », fut son unique réponse avant qu’un silence confortable ne s’installe entre eux.
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