🍍Chapitre 1 🍍
Clip, clap, clip, clap…
Le son des vagues qui se cognaient sur la coque du bateau, l’air frais de la nuit, la lune et les étoiles qui se reflètaient sur les flots comme un parfait miroir du ciel… C’était pour ce genre de petits plaisirs tranquilles que Marco acceptait de bon cœur d’assurer le rôle de vigie, une fois le voile sombre de la nuit tombé. Ce calme, cet environnement, tout lui donnait envie de déployer ses ailes, de laisser son côté aviaire prendre le dessus pour partir explorer les nuages, pour sentir le vent titiller ses flammes. En d’autres circonstances, peut-être aurait-il laissé ses instincts prendre le dessus.
Mais pas ce soir là.
Du bout des doigts il effleura le visage endormi à ses côtés, un fin sourire sur les lèvres. Son amant avait quelque chose de magnétique qui faisait qu’une fois qu’on posait les yeux sur lui, on ne pouvait plus s’en détourner. Marco ignorait si c’était la candeur encore présente dans certains de ses traits, ses cheveux un peu fous ou les multiples tâches qui envahissaient son visage qui provoquaient cette attraction, mais il avait au moins une certitude : Ace était beau. Et il l’était sûrement encore plus chaque fois qu’il souriait. Un sourire que Marco désirait ardemment préserver depuis qu’il l’avait vu pour la première fois. Un sourire qui avait fait flancher son cœur resté depuis bien trop longtemps insensible aux sentiments romantiques. Marco sourit à cette simple pensée et délaissa le visage de son amant pour se concentrer sur l’immensité bleue de la mer.
Ace avait insisté pour lui tenir compagnie cette nuit, prétextant que sans Marco à ses côtés, les draps seraient bien trop froids et qu’il y dormirait mal. Marco avait simplement secoué la tête, amusé par ses réactions enfantines, et comme promis, Ace s’était présenté le soir même avec une couverture et de quoi grignoter pour la nuit. Du moins, avait-il ramené un bon nombre de gâteaux en tout genre pour lui et un sachet de graines pour Marco. « Parce que c’est ce que mange les piafs dans ton genre » lui avait sourit innocemment Ace. Petit con. Mais qu’est-ce qu’il aimait cet idiot fini. Et alors qu’Ace lui racontait une énième aventure qu’il avait vécu plus jeune avec ses frères, sa voix s’était tut pour laisser place au silence et à une respiration plus régulière, signe qu’il s’était endormi. Crise de narcolepsie. Marco l’avait entouré tendrement de la couverture même s’il n’y avait que peu de risque qu’Ace ressente une quelconque fraîcheur. Il était la chaleur elle-même après tout.
Depuis, Marco attendait le réveil de son amant, se délectant du calme environnant tout en regrettant les jérémiades d’Ace.
Un geignement l’arracha à sa contemplation. Un nouveau cauchemar, se désola Marco en secouant tendrement l’épaule d’Ace pour le sortir de son songe. C’était de plus en plus fréquent ces derniers temps. Marco ne savait pas ce qui était à l’origine de ces mauvais rêves mais une chose était sûre : ils impactaient Ace. Le brun avait beau n’en garder aucun souvenir au réveil, Marco voyait bien à ses traits tendus et aux sillons de larmes sur ses joues qu’il ne passait pas un agréable moment. Et il répétait, encore et encore, inlassablement la même phrase. "Je n’ai pas le temps". Mais pas le temps de quoi ?
Nouvelle secousse, nouveau sanglot, plus fort que les précédents. Mais Marco ne désespèra pas. Au bout de la cinquième fois, Ace ouvrit les yeux, deux billes onyx où se mêlaient peur et incompréhension. Il regarda partout, fou, comme s’il cherchait à s’ancrer à la réalité, loin de ce cauchemar dont il était prisonnier. Puis, une fois calmé, il sourit à Marco. Ce sourire qu’il haïssait. Ce sourire si différent de celui qu’il aimait. Celui qui lui disait « Je suis désolé de t’avoir dérangé », « J’ai besoin d’être un peu seul ». C'était la manière d'Ace de l’éloigner de lui, de dresser un mur entre eux.
Oui, Marco haïssait ce sourire.
***
« Tu as l’air perturbé, mon fils »
Marco n’osa pas regarder son capitaine, connaissant d’avance l’expression que tiendraient les traits de celui qu’il aime comme un père. L’inquiétude. Ce même sentiment qu’il ressentait chaque fois qu’il posait son regard sur Ace. Trois jours s'étaient écoulés depuis le dernier cauchemar et Ace semblait plus absent que jamais. C’était comme si il était là, présent physiquement, mais que son esprit était ailleurs, loin d’eux, loin de lui. Ses frères l’avaient même chambré, lui demandant ce qu’il avait fait pour qu’Ace soit aussi distant avec lui, mais il n’avait eu aucune réponse à leur rétorquer, parce que lui-même l’ignorait.
Ses yeux de phœnix suivirent les moindres mouvements d’Ace tandis que celui-ci lavait paresseusement le pont avec sa flotte. Il n’était pas le seul à avoir remarqué le changement étrange dans le comportement d’Ace. Deuce était même venu le voir, un soir, pour lui demander si il s’était passé quelque chose avec son ancien capitaine pour qu’il soit autant à l’ouest. Mais à nouveau, il n’avait eu aucune réponse à fournir.
Habituellement, il savait tout concernant les comportements des membres de l’équipage. En tant que second de Barbe Blanche et commandant de la première flotte, il se considérait un peu comme le grand frère de cette immense famille et prêtait une attention toute particulière aux changements d’humeur de chacun pour que rien ne perturbe l’ordre au sein de l’équipage.
Il savait par exemple que lorsque les yeux d’Izô se peignaient d’une lueur nostalgique, c’est qu’il pensait à sa terre natale, à ses compagnons laissés derrière lui mais surtout à sa sœur qui lui manquait atrocement. Que si Satch draguait chaque femme qu’il croisait, c’était parce qu’il voulait rendre sa couche un peu moins froide et vide que lorsqu’il y dormait seul, parce que la solitude et la peur de finir un jour seul lui pesait. Mais avec Ace, c'était différent. Quand le jeune homme se renfermait sur lui-même, comme c’était le cas depuis trois jours, il était impossible de connaître ses doutes et ses pensées. Même pour son propre compagnon.
« Père, suis-je le genre de partenaire en qui on ne peut pas avoir confiance ? »
« Quelle genre d’idiotie me racontes-tu encore ? »
« C’est juste que… Laisse tomber »
Barbe Blanche n’insista pas et se contenta de prendre une gorgée d’alcool sous le regard noir et désapprobateur de l’infirmière. Il n’avait pas encore de raison d’intervenir, c’était un souci qu’Ace et Marco devaient régler entre eux, et au plus vite pour que la bonne humeur flotte à nouveau sur le Moby Dick. Mine de rien, l’atmosphère sur le bateau dépendait énormément de ces deux idiots.
***
Marco était plongé dans ses cartes maritimes lorsqu’Ace fit enfin son entrée dans la cabine qu’il partageait. 23h35. Marco retira ses lunettes et frotta ses yeux devenus piquants à force de concentration. Il s’étira, prêt à se plonger dans son lit aux côtés d’Ace mais se figea en voyant celui-ci prendre une couverture et un oreiller avant de faire demi-tour en direction de la porte.
« Je peux savoir ce que tu fais ? » questionna Marco d’une voix dure et d’où ressortait une pointe de confusion.
« J’ai… J’ai besoin d’être seul »
« Ace, ça fait trois jours que tu me répètes ça, trois jours que j’ai l’impression que tu n’es plus là, avec nous. Parle-moi ! Dis-moi ce qui ne va pas ! »
« Ce n’est rien. Marco s’il te plaît, n’insiste pas. C’est… C’est juste pour ce soir »
Et ce fut ses seules paroles avant de quitter la pièce, sans même un regard pour le blond.
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