- J'ai choisi

[Rafistolage de l'illu du chapitre "J'ai couru de toutes mes forces". Leurs têtes tronquées me rendaient ouf pour la couv  du T2,  j'ai rebidouillé le merdier ]

- Louis -



Mon reflet que me renvoie le miroir du pare-soleil est terrifiant. Mes yeux sont gonflés, mes cernes énormes et ma peau translucide. Le manque de sommeil et la tristesse pèsent lourd sur mes épaules.

Sortir de cette voiture et aller affronter les choses m'est insupportable.

Le bourdonnent de l'interphone retentit, puis une voix.

— Oui ?

— Mon cœur, c'est moi.

Le portillon se déverrouille, me donnant accès au petit jardin. La porte d'entrée au bout de l'allée de dalles blanches s'ouvre aussi. Carrie me regarde, les traits autant tirés que les miens. De la stupeur traverse son regard gonflé, mais elle ne me repousse pas quand je me précipite pour la saisir contre moi. Nos bouches se scellent, j'enlace ses reins et empoigne ses cheveux, l'embrassant avec urgence. Elle aussi s'agrippe à moi, m'entraînant dans la petite maison vide puis jusqu'à l'étage.

Le temps que nous arrivions jusqu'à sa chambre et que je l'allonge sur le lit, notre baiser est devenu humide et salé de ses larmes.

Elle pleure parce qu'elle va me quitter.

Ma main glisse sur son ventre superbe tandis que mes lèvres caressent le dessin de sa nuque. Ses sanglots sont silencieux, font frémir son corps, ce corps que je savoure une dernière fois. Je grave dans mon cœur le mouvement de ses courbes qui ondulent, la vibration de ses gémissements, le goût de sa peau. Sentir son corps qui tremble, ses bras qui m'agrippent comme si rien d'autre de comptait, son baiser encore chargé des vestiges de son plaisir et de notre amour. Profiter une dernière fois de sa chaleur, de sa présence, avant que la réalité et le froid ne mordent à nouveau.

Pas une seconde je n'ai fermé les yeux. Pour ne rien rater de ce moment, pas même les regards emplis de rancœur.

À présent Carrie est assise en tailleur sur le matelas, si loin de moi que je ne pourrais pas la toucher en tendant le bras. Elle s'est enveloppée des siens, réflexe de protection pour contrer mes justifications évasives qui paraissent monstrueuses sans la vérité.

— Louis, tu es toute ma vie, et je t'aime à en mourir...

Le « mais » va tomber, je m'y suis préparé, laçant mes chaussures pour occuper mes mains.

Voilà, c'est dit. Elle m'aime mais n'a plus les épaules pour supporter la relation que j'entretiens avec Harry, souffre de toujours passer après lui, s'épuise de ne pas trouver sa place dans ma vie.

Elle m'aime mais n'a plus la force de se battre contre lui, contre nous.

Elle m'aime mais me quitte.

Lorsque je sors de sa maison, j'ai la sensation d'y laisser un morceau de mon âme. J'avance en chancelant le long des dalles, conscient que l'époque la plus heureuse de ma vie restera bloquée derrière ce portillon.

*

La maison de repos est claire, le personnel charmant, le jardin frais et arboré... c'est bien loin de l'image que je m'en faisais.

Une jeune femme en blouse m'indique le chemin à travers les couloirs, puis à sa chambre. C'est une petite pièce épurée qui, malgré la luminosité et les quelques décorations, ne peut faire oublier qu'elle est médicalisée.

Harry est allongé sur le flanc, dos à l'entrée, alors je contourne le lit pour m'approcher. Quand je le découvre, les yeux perdus dans le néant, la bouche à demi ouverte et l'expression vide, j'en plaque ma main sur la mienne, contenant un hoquet.

Harry. Ho merde Harry.

L'émotion me noue la gorge. Je m'assois sur le matelas et tend la main vers sa tête, mais son ricanement me fait sursauter. L'enfoiré redresse le buste et se tourne, me détaillant verticalement comme si j'étais débile.

— Tête de con, raille-t-il.

— Putain Styles ! Comment tu peux faire un truc pareil ?!

— T'as cru qu'ils m'avaient lobotomisé ? Avoue que ça aurait fait du bien à la communauté.

Si parfois je doute qu'il puisse encore me choquer, il me le démontre toujours. Cette blague était vraiment affreuse, j'en fusille sa gueule satisfaite des yeux. Il m'étire alors ce sourire en coin, celui qui me donne envie de lui éclater la tronche, ou de le serrer très fort contre moi. Je crois qu'il s'en rend compte, car son œil se plisse dangereusement.

— Si tu me touches je te casse le nez.

— T'es en forme, ça fait plaisir.

— Toujours.

Il remue sous les draps. J'observe malgré moi la blouse rayée qu'il porte, ça le met mal à l'aise alors je contemple le ciel bleu par la fenêtre.

— Ta mère arrive dans une heure c'est ça ?

— Deux vu comment elle conduit.

— T'es sorti un peu aujourd'hui ?

— Ouais. J'ai eu les entretiens habituels, la psy qui n'ouvre pas la bouche, les médecins qui me font la morale sur ma mauvaise prise de traitement et compagnie.

— Je te jure que je vais te les faire gober tous les matins. Tu soulèveras la langue pour que je sois sûr.

— M'emmerde pas Lou.

— Bon, et il a dit quoi ce psy ?

— Soi-disant je m'ouvre pas assez et je sociabilise pas. Du coup j'ai fait des efforts et je me suis fait des potes cet aprem : Ted, un mec qui parle aux rideaux, et Denise, une nana qui pleure tout le temps. Y a Thibault aussi, c'est le seul avec qui j'ai eu un semblant de conversation, mais vu qu'il en est à sa troisième tentative de suicide faudrait pas trop que je m'attache.

Mes yeux se ferment, j'expire lentement.

Est-ce qu'ils en ont parlé de ça les psys ? De sa faculté à toujours se planquer derrière des vannes ou des sarcasmes pour ne pas avoir à parler de ses faiblesses ?

Nous ne relançons rien après ça, je triture mon jean, pensif et épuisé. Je n'ai toujours pas dormi, sans compter toutes les heures de trajets que je me suis frappé jusqu'à la maison de Carrie.

— Lou, je suis désolé.

Mon regard se relève brusquement dans le sien, fuyant.

— T'excuses jamais pour ça Harry.

Ses sourcils se froncent davantage, lui cachant même les yeux.

— Comment elle va ?

Nous y voilà. Je m'étonne qu'il soit le premier à en parler, c'est que ça doit énormément le travailler.

— Bien, fais-je simplement, je suis passé chez elle aujourd'hui.

Il blêmit, déglutissant difficilement.

— Tu le lui as dit, me lance-t-il alors.

Cette affirmation me hérisse tous les poils du corps, je lui gronde même au nez.

— Comment t'oses penser que je fasse un truc pareil !

— Parce que ! Si tu lui dis pas, elle comprendra pas et te pardonnera jamais.

— Je sais. Mais je ne le dirai pas Harry. Je t'ai fait une promesse.

— Une promesse, s'énerve-t-il. Ouais j'veux pas qu'elle sache, mais donc on fait quoi ?! On va juste faire comme s'il ne s'était rien passé ? Comme si je ne l'avais pas insultée et ne lui avais pas balancé des horreurs à la gueule ? Comme si tu l'avais pas laissée en plan, effondrée et sans un rond toute seule dans la nuit ?

— Essaye pas de me pousser à la trahison, je le ferai pas.

Lui aussi grogne en se frottant les cheveux.

— Elle n'oubliera jamais ! Elle te prendra pour un enfoiré !

— C'est moi que ça regardera le moment venu. Si jamais on devait se revoir, je me démerderai pour trouver une solution.

Et voilà, les mots ont fait mouche, car sa main au milieu de ses boucles noires s'est immobilisée.

— Comment ça, « si tu devais la revoir » ?!

— Elle m'a quittée.

Y avait-il une meilleure façon de l'annoncer ? Je ne crois pas. Harry secoue fermement le visage, car il ne me croit pas.

— On a longtemps discuté ce matin et...

Ses yeux s'arrondissent, je vois les muscles de ses mâchoires battre.

— Elle ne sentait plus ca-

— PUTAIN ! Vocifère-t-il. Comment t'as pu laisser faire ça ! Pourquoi tu l'as laissée te quitter par ma faute ! Pourquoi t'as fait ça ?!

— C'est pas par ta faute ! Tôt ou tard ça aurait pété. On faisait n'importe quoi. "Je" faisais n'importe quoi. T'avais raison.

— Merde, grogne-t-il en s'attrapant la tête comme pour ne plus m'entendre, je délirais Louis, pourquoi tu m'as écouté !

— Ce que t'as dit cette nuit, lucide ou pas, tu le pensais malgré tout et t'avais raison. J'ai merdé et je m'en excuse. Je t'ai fait plaquer tes études pour me suivre, je t'ai sorti mes grands discours et t'ai fait miroiter des choses... tout ça pour prendre le boulot à la légère. J'ai refusé des contrats et j'en crève de honte, c'est ton avenir à toi aussi.

— C'EST PAS UNE RAISON ! Hurle-t-il en frappant la carafe d'eau que je rattrape de justesse.

Il essaye de s'en prendre à la table de chevet mais je lui saisis la gorge et lui donne une violente secousse.

— Calme-toi tout de suite ! Tu veux qu'ils te gardent trois jours de plus ?!

Nos deux têtes se tournent vers la porte, puis je le relâche, braquant mon regard implacable dans le sien.

— Qu'est-ce qui t'énerve là, tu le sais au moins ? Tu te la poses la question ? T'es furieux parce que tu penses qu'on se sépare à cause de toi ou t'es furieux parce qu'avec cette décision, tu ne verras plus Carrie toi non plus ?!

C'est dit. Je l'ai dit. Ce moment est crucial.

Ses pupilles se sont dilatées, il s'est accroché aux draps. Moi je ne cille même pas, scrutant ce voile de panique lui blêmir le visage. Pendant un quart de seconde, je crois qu'il tente de feindre l'incompréhension, avant de se résoudre.

Ça ne sert à rien. Je sais ce qu'il éprouve. Et maintenant il sait que je sais.

— Putain Louis je suis désolé, râle-t-il en se planquant dans ses mains. Je voulais te le dire. Je te jure que je voulais le faire.

Aussi vite qu'il s'est plié en deux, je lui saisis les cheveux en me penchant à sa rencontre, pressant fort mon nez dans le creux de son épaule.

— C'est moi qui suis désolé ! Je l'ai vu Harry, je le vois depuis des mois et j'ai rien fait. Je te laisse souffrir alors que je suis parfaitement conscient de ce qui t'arrive.

— Je l'aurais jamais touchée, je te jure sur ma vie que je l'aurais pas fait.

— Je sais. C'est pour ça que j'ai fermé les yeux.

Nos deux voix chevrotantes font écho entre nos corps, sans surprise je n'arrive pas à contenir l'émotion qui brule mes yeux clos.

— J'aurais dû faire quelque chose, j'aurais dû venir te parler ou l'éloigner de toi. J'ai pas pu Styles, j'ai pas réussi. Je l'aimais tellement cette vie qu'on menait tous les trois, et je savais que si on en parlait, tout changerait, plus rien ne pourrait redevenir comme avant. Il aurait fallu que je choisisse, et je pouvais pas putain, je pouvais pas... alors j'ai fermé les yeux comme le pire des égoïstes, en te laissant souffrir, en t'obligeant à régler seul ce problème et en porter toute la responsabilité. Pardonne-moi Styles. Pardonne-moi.

Un silence brutal retombe dans la chambre, je suis à bout de souffle et à bout de forces. Son corps frémit, mes bras le serrent plus fort. Cette fois il ne me hurle pas de reculer, il ne se débat pas pour quitter mon étreinte. On dirait que lui aussi, n'a plus aucune force.

— J'ai tout niqué.

— Y a rien qui est niqué Harry.

— Qu'est-ce que qui va se passer alors ?

— Les choses vont changer.

— Comment ?

— On va reprendre nos vies en main. Je veux continuer cette aventure autant que toi. Je veux percer dans la musique et à partir de maintenant je m'en donnerai les moyens. Ça sera notre passion avant tout le reste, je te le jure. Je ne foutrai pas mon rêve en l'air et encore moins le tiens !

— Et Carrie ?

— Carrie a ses études à terminer, sa propre vie à construire. Elle en a besoin, c'était le déclic qu'il lui fallait. Peut-être qu'avec le temps elle saura dépasser ma fau-

— Putain c'était pas ta faute !

— Tais-toi. Quoi qu'il en soit si jamais elle me pardonnait, alors cette fois je saurai gérer. Je ne mélangerai plus le boulot et les sentiments. Je ne ferai plus souffrir personne.

Son buste se recule, il braque son regard vert dans le mien, plongeant au plus profond de ma tête et mes pensées. Cherche-t-il la faille ? Le mensonge ? Il ne trouvera rien, car je n'ai jamais été aussi sérieux de ma vie. Je hoche la tête pour l'en assurer.

— On va terminer ce qu'on a commencé Harry, et le terminer en beauté. Déconne pas avec les psys, parce que dans deux jours on balance valises et guitares dans la caisse et on se barre très loin.

Ses dents se plantent dans sa lèvre, son regard s'est allumé. Depuis combien de temps ne l'avais-je plus vu briller ? Trop longtemps, et c'est entièrement ma faute. Plus jamais il ne se ternira, j'en fais la promesse.

L'autre promesse que je me fais également, plus lointaine mais pas moins réelle, est de me battre de toutes mes forces pour Carrie.

J'attendrai. Des années même s'il le faut. J'attendrai car c'est elle et ça ne sera pas une autre. Le projet semble ambitieux mais ça ne m'effraie pas. Je ramperai à ses pieds puis écraserai un à un ses prétendants jusqu'à ce qu'elle m'apparaisse vêtue d'une superbe robe blanche en me faisant fondre en larmes.

J'attendrai. Je me battrai.

Mes nouilles !

Voilà la seconde partie, et surtout, le dernier chapitre de ce Tome 1.

Seriously, j'ai jamais eu autant hâte qu'un vendredi débarque, parce que l'épilogue il est costaud, tout comme l'illu, je dois en être à 15 heures dessus, je voulais vraiment refaire une couverture pour ce tome 1, parce que l'autre je peux plus me la voir.

Donc bon, je relis 15 fois l'épilogue ce soir et demain je termine la tête d'Harry. On se retrouve Vendredi ! Hiiiiiiiiiiiiiiii !

Ps : 700 vues et 10 abonnés de plus en 2 jours, je vous kiffe trop <3

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