- C'était notre dernière soirée

- Carrie -



Cette journée est magnifique, il fait tellement bon dans cette région, je pourrais largement vivre dans un endroit aussi aride et ensoleillé.

Du bruit me fait tourner la tête, c'est Harry qui sort de la chambre en réajustant son bas de jogging sur ses hanches. Mon regard coule un instant sur son torse fin aux muscles dessinés puis se fait happer par les tatouages sombres de sa peau, jusqu'à ce que je cligne vite les yeux et les repose sur le jus d'orange frais que je presse.

— Tes cheveux c'est trop violent dès le réveil, gromelle-t-il en feignant d'être ébloui, je suis sûr que ça peut foutre des crises d'épilepsie.

J'enclenche son café en soupirant, puis c'est le sachet de la boulangerie que je lui secoue sous le nez. Il attrape son sablé aux amandes en me scrutant.

— Gaffe à toi, je m'habitue très vite.

— Désolée de te décevoir, mais dès que j'aurais un homme, c'est lui qui m'apportera le déjeuner tous les matins.

Il arque un sourcil moqueur, puis tourne la tête en direction de Louis qui gratte sa guitare derrière la véranda.

— Tu lui as demandé son avis au moins ? On va voir s'il est d'accord de se frapper la boulangerie avant le boulot chaque matin.

Il mime qu'il va gueuler vers la terrasse, alors je plaque ma main sur sa bouche dans un couinement horrifié. Mes joues rosissent, ça lui arrache un sourire mauvais contre mes doigts. Il se libère puis croque à pleines dents dans son sablé, imitant le bruit d'un carnivore.

Je lui tire la langue puis repart à mes occupations. Harry s'installe à la terrasse avec sa guitare, Louis lui sourit de toutes ses fossettes et il enchaine sur des accords simples pour qu'il puisse suivre.

Une fois les cafés et jus d'oranges prêts, je les rejoins au soleil. Ils discutent et rient, je ris aussi. Louis embrasse mon front, Harry fait exprès d'enlever le marque page de mon livre pour me rendre folle, alors je fais semblant de crier et ils sourient.

La fin de matinée passe agréablement, à ne strictement rien faire. Je me sens si bien, c'est comme si je m'étais habituée à ce quotidien, qu'il me convenait bien mieux que le mien, là-bas chez ma mère, à me sentir encore comme une petite fille, alors qu'ici je me sens grande et intéressante.

L'après-midi, Louis m'emmène faire la partie de la vieille ville que nous n'avons pas pu voir, nous déambulons dans les allées colorées aux senteurs d'été et je le dévore des yeux, lui, son sourire plus lumineux que le soleil, ses éclats de rires et son corps sublime sous ce débardeur fluide. Je crève d'envie qu'il me prenne la main, peu importe que ce soit mal ou pas, malheureusement il ne le fait pas.

En fin d'après-midi, nous reprenons la route. Louis reçoit un coup de téléphone qui le rend fou de joie. Les gars sont arrivés plus tôt que prévu et sont déjà à l'appartement avec Harry. Il raccroche et me regarde en agitant comiquement les branches de ses lunettes, je ris jusqu'à ce que le feu passe au vert.

Dieu que je voudrais me jeter sur sa bouche...

Nous arrivons dans la résidence. Il prend mon sac en papier rempli de souvenirs et je me précipite vers les escaliers. Ils sont là ! Eparpillés partout dans le petit salon, à rigoler et discuter très fort. Je pose mon sac en osier à l'entrée et m'approche dans un sautillement stupide de gamine que je regrette immédiatement.

— Carrie ! S'exclame Liam en venant me serrer contre lui.

— Je suis si contente de te revoir !

Son parfum frais me renvoie vers d'agréables souvenirs. Il me tient à bouts de bras et nous nous regardons avec de grands sourires. Il a grandi encore, comme les autres d'ailleurs. Niall approche et m'enlace les épaules d'un bras en me faisant la bise, il me pose plein de questions enjouées jusqu'à ce que Zayn vienne m'embrasser. Ça fait beaucoup d'attentions qui fusent de partout, j'en glousse de plaisir.

Louis passe la porte d'entrée à ce moment-là. Sans même lui laisser le temps de poser nos sacs, ils se jettent sur lui et le secouent dans tous les sens, ébouriffant ses cheveux et tirant sur ses joues. Leur joie est contagieuse, mon cœur devient si gros. Ils s'aiment vraiment ces garçons ça se voit.

Harry balance des bières dans les airs. Des conversations excitées jaillissent de partout, accompagnées de vannes et de rires gras, se sont de belles retrouvailles.

Une fois le typhon des garçons passé, je m'écarte et aperçois Loriane sur le canapé. Je la rejoins et elle me serre dans ses bras.

— Salut puce.

Je lui souris et elle le fait aussi, bien que je la trouve plus distante que les premiers jours où elle me sautait carrément dessus en criant. Elle se lève et gueule fort elle aussi au milieu des garçons, elle réclame une bière et va passer son bras autour des épaules de Louis. Moi je me lève et me dirige sur la terrasse pour passer un coup de téléphone à ma mère et Fabien, histoire de laisser les autres se retrouver.

Ma mère est ravie de me parler, Fabien un peu moins. Nos appels sont presque gênants désormais, nous nous forçons. Chaque soir je me demande s'il ne va pas avoir le courage de mettre un terme à notre histoire qui n'en est pas une... mais il ne le fait pas, et je n'ai pas la force de gâcher mes derniers moments agréables ici avec ça.

La nuit tombe sur l'appartement. Nous sommes tous dehors sur le balcon, c'est fantastique, ils chantent sans s'arrêter et malgré les mois sans se voir, on dirait qu'ils ne se sont jamais quittés.

Louis gratte sa guitare, accompagné de Liam sur celle d'Harry. Niall s'est improvisé une batterie avec le dossier d'une chaise et des bouteilles de bières vides. C'est un bordel organisé, car même comme ça, ils sont géniaux. Les voisins sont sortis sur leurs propres terrasses pour les écouter et moi je filme dès que je peux.

Louis déborde de bonheur, ses prunelles transparentes brillent comme jamais et ses rires explosent dans le crépuscule. Harry lui, ne se départit plus de ses sourires en travers qui plissent les coins de ses yeux.

L'alcool coule à flot. Avec Harry nous enchainons les Tequila Paf. Je suis encore maladroite mais il gère à ma place, il me saupoudre le sel sur la main et quand j'ingurgite le shooter dans ma grimace d'horreur il me fourre le quartier de citron dans la bouche.

Au quatrième j'avoue que je commence à avoir des bouffées de chaleur.

La sonnette retentit tout à coup, Louis ouvre et trois filles sublimes entrent en levant des bouteilles de champagnes au-dessus de leurs brushings parfaits. Moi j'ouvre de gros yeux. Loriane se jette alors dans leurs bras en criant, tout ça sous le regard brillant des mecs qui étirent de larges sourires. Toujours dans ce tourbillon imprévu, elles s'éparpillent sur la terrasse avec l'aise des jolies filles. Je me sens petite et inintéressante tout à coup, alors je me sers une autre Tequila pour la peine.

Elles ne devaient venir que pour chercher Loriane, mais en à peine trente minutes les deux groupes fusionnent. C'était évident, au vu des visages enflammés des garçons qui proposent d'eux-mêmes l'idée.

Des plans pour la fin de soirée commencent à être proposés, j'en profite pour aller me changer dans la salle de bain. Je vire donc mon éternel short en jean et mon débardeur pour passer une jolie tunique asymétrique sur mon épaule nue.

Après un regard discret vers la porte, je fouille la trousse de maquillage de Loriane et lui prend son mascara et son écrin de fard à paupière Dior, je le caresse avec envie et m'en applique un peu sur les yeux pour les charbonner. Je ne crois pas que j'aurais osé le faire sans les Tequilas, ce noir sur moi c'est inhabituel, mais ce soir les filles ont donné le ton et n'y sont pas allé de main morte.

Dans ma lancée, je cherche dans ma propre trousse ma minuscule fiole de parfum, cet échantillon gratuit que je me fais servir dès que je croise un Sephora dans lequel je ne suis pas déjà trop connue par les vendeuses. Je presse le doigt sur le bout de verre transparent et le frotte sur ma nuque puis mes poignets, sur lesquels j'inspire avec plaisir cette odeur précieuse d'Yves Saint Laurent.

Est-ce que ces minuscules efforts serviront à quelque chose ? J'en doute...

Des pizzas sont servies, la musique puissante des enceintes a remplacé leurs voix, puis ils décident de rejoindre le bar où Louis et Harry travaillent.

Dans des cris de sauvages, ils bondissent tous sur le parking et se dispersent entre la décapotable et la voiture de Liam. Zayn monte sur la moto derrière Harry, ils sont beaux tous les deux, sombres et tatoués. Ils font un dérapage sur les graviers avant de filer sur la route.

Je me dirige vers la décapotable mais il n'y a plus de places, Loriane sur le siège passager est tournée vers ses trois copines à l'arrière. Quand Louis accélère, elles lèvent toutes les bras en criant. Je trottine alors vers l'autre voiture et monte derrière, Liam démarre fort. Niall sort le buste de la fenêtre quand ils rattrapent Louis, il gueule vers les filles qui gueulent aussi, puis Louis fait rugir la voiture en les laissant sur le carreau.

Ça m'aurait fait rire si je n'avais pas la sensation d'être invisible.

Nous passons les portes du bar en faisant tellement de bordel que tout le monde tourne la tête sur nous.

C'est un bar aux airs de pub irlandais avec beaucoup de monde, il est très grand. La lumière légèrement tamisée, accompagnée de ce bois sombre, donnent une ambiance intimiste et fêtarde.

Harry et Zayn sont déjà debout sur la petite scène et chantent à tue-tête The eye of Tiger qui passe dans les enceintes. Les autres garçons se jettent sur l'estrade avec eux dans les applaudissements des clients et un vieil homme au crâne rasé déboule pour leur serrer la main en se marrant, sans doute le patron.

Louis attrape un tabouret et s'assoit avec sa guitare, immédiatement le patron coupe le son et les garçons enchainent dans un nouveau tonnerre d'applaudissements des clients.

Je m'installe avec les filles à une table et je fais des sourires un peu nerveux, mais elles sont tournées entre elles et ne me calculent pas. J'entends qu'elles débattent de leurs goûts sur les différents mecs de la soirée, elle se les disputent. Moi je sors mon téléphone et fais mine d'envoyer des messages, pour ne pas paraitre seule, mais je fais mal illusion. Parfois je tente d'attirer un peu l'attention de Loriane, mais c'est comme si elle se faisait un malin plaisir de détourner le regard en plein milieu de ma phrase, ne me la faisant même pas terminer, j'en baisse le nez sur mes genoux.

Elle s'était montrée si gentille et prévenante au début, maintenant on dirait qu'elle m'en veut. Sans doute parce qu'à cause de ma venue, elle n'a plus vu Louis du reste des vacances et que leurs rapports ont été tendus. En même temps, au vu de mes sentiments pour Louis, je serais bien mal placée de la juger.

Les minutes filent et je déteste être ici, je déteste cette soirée. J'ai conscience de me montrer très égoïste sur le coup, car après tout j'ai eu Louis rien que pour moi cette semaine, alors c'est normal que ce soir il s'amuse avec sa copine et ses amis en me délaissant un peu.

Les garçons mettent le feu, il n'y a rien à dire, malheureusement le cœur n'y est pas de mon côté. Je suis perdue dans mes pensées.

Demain je ne le verrai plus Louis. Demain je retournerai à ma vie et lui à la sienne, j'entrerai dans cet internat et nous ne nous reverrons certainement plus.

C'était notre dernière soirée et je ne l'avais pas imaginée comme ça.

Une tournée est servie, je prends une tequila paf et ne la sens même plus couler dans ma gorge. Le bar commence à tourner. Je n'entends plus la musique, je n'entends plus que Loriane ronronner à ses amies à quel point Louis est génial, qu'elle est folle de lui et qu'il fait l'amour comme personne. Chaque mot me déchire le cœur un peu plus.

Lorsque les garçons descendent de scène une heure plus tard, ils récupèrent des chaises et des tabourets pour s'installer entre les filles. Impossible de discerner ce qu'ils se racontent avec excitation, de toute façon ça n'a aucun intérêt, ils ne font qu'outrageusement flirter.

Harry ne lâche pas la rousse aux gros seins qu'il dévore des yeux. Elle s'est penchée face à lui, son décolleté incroyable bouge quand elle le fait et il y plonge les yeux sans même s'en cacher. Mes épaules se referment instinctivement sur le mien de décolleté, enfin plutôt sur celui que je n'ai pas.

J'ose ensuite tourner un œil vers Louis, mais je n'aurais jamais dû le faire, car Loriane s'est assise sur ses jambes et l'embrasse langoureusement tandis qu'il s'accroche à ses cheveux. Une douleur me transperce comme ça ne m'était encore jamais arrivé, je me lève de cette banquette sans que personne ne le remarque vraiment, passant entre les tables et quittant le bar en ravalant mes larmes du mieux possible. J'arrive sur une immense terrasse en bois où se massent les fumeurs, il y a un autre petit bar au fond et des sortes de canapés et poufs éparpillés partout, sauf qu'on les voit à peine tant il y a de gens.

Je me faufile en longeant le mur et j'arrive sur le parking de graviers, immédiatement, j'inspire fort et ça va un peu mieux. Je m'adosse au mur rêche et m'entoure de mes bras, comme pour contenir ma peine et l'oppresser, pour qu'elle cesse de me ravager comme elle le fait, mais ça n'empêche pas mes larmes de m'embuer les yeux.

Personne ne m'a tourné un regard ce soir, personne n'a voulu me parler, c'est que je dois vraiment être insignifiante. Voilà pourquoi Charlotte ne me voulait plus comme amie, parce que je suis insipide et qu'on ne s'amuse pas avec moi.

— Bonsoir !

Je sursaute et me raidis lorsqu'une silhouette s'approche dans la nuit, faisant crisser les graviers. Un jeune homme me fait face et me sourit en coin. C'est un brun plus petit que la moyenne, avec un visage plein de sympathie, le genre de visage qui inspire confiance. Il porte un jean et une chemise blanche retroussée aux manches.

— Bonsoir, lui dis-je d'une voix fluette.

— Est-ce que tu fumes ? Me demande-t-il gentiment.

— Non.

Il acquiesce et sort son paquet de cigarettes pour s'en allumer une.

— Je ne vais pas te demander si ça va, reprend-il en soufflant la fumée, ça serait franchement nul.

Je souris en hochant la tête et il lâche un petit rire sympa.

— Tu vas trouver ça très nul comme approche, mais ça me fait mal au cœur de voir une fille triste et seule sur un parking.

— C'est d'être triste et seule sur un parking qui est nul...

Il rit encore et écarte les bras.

— T'es plus seule regarde ! Ton cas est de moins en moins désespéré. En plus sans me vanter, on dit que je suis un vrai comique, alors dans quelques minutes tu ne seras même plus triste ! Paf, problèmes réglés.

Un sourire inespéré m'apparait et je lève enfin les yeux sur son visage. Il me sourit lui aussi et même si son reflet tangue dangereusement, ses joues pleines et sa légère barbe de trois jours me le rendent amical. Il a vraiment l'air gentil.

— Comment tu t'appelles ?

— Carrie.

— Alors salut triste-et-seule-Carrie, moi c'est Julien, Ju' pour les intimes.

— Salut.

— Je suis embêté, je t'aurais bien proposé un verre si le mur ne te tenait pas déjà, car je suis poli, mais je suis bienveillant aussi alors y a conflit.

J'acquiesce en me mordant la lèvre.

— Ça se voit tant que ça ?

— Non, rétorque-t-il en levant sa main droite comme s'il jurait, je suis un peu devin c'est pour ça, personne d'autre n'a rien vu.

— Devin ? Fais-je avec une bouille moqueuse.

— C'est de famille, ma mère lit l'avenir en regardant le tambour de la machine à laver tourner.

Je ris de bon cœur tandis qu'il tire une nouvelle taffe de sa cigarette qui illumine de rouge ses traits amusés quelques secondes. Je me sens mieux tout à coup, moins en détresse et pathétique.

Il écarte les jambes en remuant dans cette stature de guai luron et il me fait la conversation avec humour, c'est agréable. Il me raconte tout et n'importe quoi, en passant par ses études en littérature ou même son chien à moitié aveugle qui se cogne dans tous les meubles. Je ris beaucoup et j'oublie.

Les dizaines de minutes filent. Quand il se rapproche un peu je lève le visage face au sien. Sa voix se fait plus basse et il parle encore longtemps, il a la magie des mots et de leur tournure, je bois ses paroles sans même m'en cacher.

Passé un moment, un de ses amis le cherche, il le hèle depuis la terrasse mais Julien lui fait signe de le laisser tranquille en lui disant qu'il a rencontré une chouette fille sur un parking qui n'est plus seule et triste, ça me fait sourire.

Cette atroce soirée devient finalement supportable voire même agréable, quelqu'un me porte enfin de l'attention.

Mon portable vibre tout à coup dans mon sac, je le sors et regarde, c'est Louis. Une profonde tristesse m'envahit, se muant immédiatement en déception. Il lui aura fallu près de cinquante minutes pour réaliser que j'ai disparu.

J'éteins le téléphone et le range avec des gestes trop brusques pour que ça n'échappe pas à Julien. Il frotte son pied dans le gravier, l'ambiance redevient tendue. La magie s'est évaporée et je replonge dans ma dépression alcoolisée.

Quand il relève mon menton avec sa main, son expression se fait plus secrète, tout comme sa voix.

— C'est un mec qui te rend triste ce soir ?

J'acquiesce, un pincement au cœur. Il me jauge un instant, tout l'amusement a quitté ses traits.

— Quel âge tu as ? Me demande-t-il.

— Quoi que je fasse, je ne suis jamais assez vieille....

— T'es surtout pas assez vieille pour être aussi désillusionnée. Elle est belle la vie, et toi aussi, alors ne sois plus triste c'est du gâchis.

En achevant sa phrase il tire légèrement sur mon menton en approchant son visage, je ne le repousse pas. Il presse sa bouche sur la mienne, mes yeux se ferment. Je ne ressens pas grand-chose, ni papillons dans le ventre, ni terrible culpabilité pour Fabien.

Je ne ressens plus rien et c'est agréable.


Mes louloutes !

Ce chapitre j'laime pas.

Ben ouais c'est dur d'écrire un truc qui fait mal et vous énerve (et tant qu'on y est, vous plonge clairement dans vos anciens complexes et anciennes situations de merdes d'ados), mais je me suis promis d'écrire à fond dans le réalisme, et ça c'est réaliste.

Je vous embrasse et vous dit à Lundi

PS : merci pour les 10k vues. Je suis trop émue

Vote et si t'as la flemme de commenter, laisse un #fuckladolescence



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