•55. Paranoïa•

Livaï

Assis dans mon minable fauteuil roulant, je fixe inlassablement l'écran pourtant noir de mon ordinateur. Déjà deux semaines que nous habitons ensemble Eren et moi.

J'ai remarqué qu'il avait eu du mal à s'adapter a ce changement, mais je n'ai rien dit. Ne sachant pas vraiment quoi dire.

Et, de toutes façons, je ne parle presque plus.

Trop obnubilé par mes pensées trop souvent noires.

Ma mère me téléphone chaque midi, et Kenny me téléphone chaque soir. C'est un peu comme un roulement en quelques sortes. De même, Eren s'occupe de moi chaque soir, et sa maudite infirmière (la cousine d'un de ses amis à-t-il dit) me colle l'après-midi.

Je sais qu'il s'inquiète pour moi, mais ça ne me fait ni chaud ni froid. Je refuse qu'on se lamente sur moi. Mes blessures, bien que gênante, m'importent peu. En face, Erwin est mort.

Et ça, tout le monde semble s'en taper.

Sans en parler à Eren, j'ai pris contact avec l'ex madame Smith. Je ressentais le besoin de lui présenter mes condoléance, à elle et à sa fille.

Mais elle n'en avait que faire. Elle riait au éclats lorsqu'elle a décrocher. Complètement insensible au trépas de son ex compagnon. Alors, sans même dire un mots, j'avais racroché, et j'avais muselé mon envie de vomir.

- Livaï c'est l'heure de manger, me coupe la voix fluette de Gaby Braun de l'autre côté du bâtant de bois qui nous sépare. Vous voulez bien m'ouvrir ?

Je soupire et recule jusqu'à la porte pour en ouvrir le loquet. Aussitôt, la jeune femme entre et pose son regard brun sur moi.

- Aujourd'hui c'est haricots vert et steak. Vous avez faim j'espère ?

Sans attendre ma réponse, elle se saisit des poignées de mon fauteuil et me pousse jusqu'à la cuisine puis me sers gaiment, ne prêtant pas attention à mes sombres humeurs.

Non pas que Gaby me gêne. C'est une jeune femme dynamique et déterminée. En étude de médecine, elle a pour objectif de devenir infirmière libérale, et par une obscure magouille dont je n'ai pas été informé, elle avait obtenu le droit de s'occuper de moi.

En silence, j'ingurgite une petite moitié de mon assiette puis me pousse seul et en silence jusqu'au salon pour m'établir devant la télévision. Suivant plus ou moins une émission sur le gaspillage alimentaire. Quel ironie.

Le temps passe, Gaby s'occupa de débarrasser et nettoyer la cuisine. Oui, elle ne fait pas vraiment qu'un job d'infirmière. Mais comme je l'ai dit, elle n'est ici que grâce a une magouille. Et n'est pas encore tout à fait qualifiée. Mais c'est le cadet de mes soucis: elle est digne de confiance (d'après Eren) et je n'en ai rien à foutre.

Un temps indéfini plus tard, elle vint poser une tasse de thé devant moi et s'occupe de mon examen quotidien. Son labeur fini, elle s'installe sur la table du séjour avec divers livres d'école, se plongeant visiblement dans une dissertation particulièrement corsée nécessitant qu'elle mâchouille son crayon en se grattants le cuir chevelu.

Il est évident que je suis responsable de la dégradation du moral d'Erwin Smith. Si j'avais été plus compréhensif, plus doux vis à vis de lui, si je l'avais soutenu...

Mais je n'ai fait sue l'enfoncer. En lui disant qu'il ne m'intéressais pas. Que je ne cherchais pas des gens comme lui. J'avais été hautain et insupportable avec lui. Sans même m'en rendre compte. Mais le résultat était là, j'ai tué Erwin Smith. Je lui ai porté le coup fatal.

Alors qu'il était déjà bâillonné à genoux, j'avais pressé la détente.

Mais, en plus de ça, je pensais à sa fille. Je pensais à la petite Maria Smith qui allait devoir grandir sans son père. Et je compatissais. Ayant moi même grandis sans père, je me sentais le bourreau de cet enfant.

Je lui ai infligé la même blessure qu'à moi. Et ça me donne envie de gerber.

Ne fait pas aux autres ce que tu n'aimerais pas que l'on te fasse ?

J'ai provoqué la mort du père de cette gamine. J'aurais dû crever avec lui. Je le méritais, pour avoir ignorer son mal être. Pour avoir été une foutue starlette égoïste. Oui, j'aurais dû mourir avec Erwin Smith.

Mais j'avais eu la chance insolente de survivre. Et désormais, je me dois de vivre avec son souvenir. Je me dois de veiller sur sa fille. Et de me souvenir de lui.

Lui qui était oublié de tous, à peine mort, déjà effacer de la mémoire commune. Les gens préférant parler de mes blessures que de son trépas.

- Bonsoir 'Vaï.

Je papillone des yeux et tourne la tête vers Eren, debout à quelques mètres de moi, le regard inquiet et sa veste encore à la main.

- Salut Eren.

- Ça va ? À quoi tu pensais ?

- À rien.

Je remarque alors seulement deux autres personnes restées dans l'entrée et nous regardant attentivement.

Une femme, plutôt grande, au yeux gris et au cheveux noir coupé carré, et un garçon blond au yeux d'un bleu assez remarquable.

- J'ai ramener deux amis, j'espère que ça te gêne pas ? me demande Eren pour la forme.

Je secoue la tête en me passant de tout commentaire, détaillant simplement les deux arrivants du regard.

- Je t'ai déjà parler d'Armin et Mikasa ? continue Eren.

- Oui.

- Bonjour, Livaï c'est ça ? dit alors la jeune femme.

Je hoche la tête et marmonne un vague bonjour en guise de réponse.

- Pas que je vous aimes pas ! Mais j'ai rendez vous ! intervient Gaby. À lundi !

- Passe le bonjour à Falco, lui lance malicieusement Eren.

Gaby, pourtant sur le départ, fait volte-face, les joues rouges, et fixe mon copain.

- T'inquiète, j'ai rien dit à Reiner.

- Mais...

- Allez va, à lundi

- Mais...

- Pshht, dehors ! intervient le petit blond.

- Vous êtes insupportables, on en rediscutera bande d'enflure.

Après un regard noir et un clin d'œil échangé entre l'infirmière et mon brun, la jeune fille quitte la maison. Nous laissant à quatre dans un silence plutôt gênant.

J'ai beau être chanteur, dans le privé, je suis assez maladroit avec les mots. Et en l'occurrence, rien ne me vient.

J'ai pourtant conscience du regard brulant d'Eren sur moi. Pour la première fois, il me présente quelqu'un de son entourage (autre que sa mère). Et je sais que l'instant est très important. Mais je ne sais pas quoi dire. Pas quoi faire.

Je suis un copain minable.

De fatigue (ou plutôt de honte mais jamais je ne l'avouerais) je baisse le regard et passe une main lasse sur mon visage.

- Faites comme chez vous, intervient alors Eren. Café ?

- Déca si t'as, lui demande Armin.

- Ouep.

Les deux se détournent, et Eren passe devant moi.  Ralentissant juste assez pour poser son regard sur moi. Son regard déçu.

- Thé ?

- Je...

Je relève les yeux sur lui, son regard se ait interrogateur.

- Oui, je souffle presque dans un murmure.

Sans plus de cérémonie, il retourne avec ses invités dans la cuisine. Me laissant seul planté au milieu du salon comme un couillon. Conscient que je suis le fautif mais ne sachant que faire pour bien me comporter.

Je les entends discuter, mais n'écoute pas.

Comment diable Eren a-t-il fait pour socialiser avec mes amis ? Jamais il n'a été gêné en présence de Mike ou d'Hanji. Pourtant, eux sont connus.

Alors pourquoi est-ce-que moi, je suis mis mal à l'aise pas deux jeunes adultes absolument normaux.

Alors que de plus, j'ai déjà converser avec Armin par SMS.

Qu'est ce qui cloche chez moi ?

J'en suis toujours à me triturer les méninges quand deux mains se posent sur mes genoux.

Eren, accroupit devant moi, fixe ses prunelles émeraudes dans les miennes.

- Qu'est ce qu'il t'arrive ce soir ?

- Rien rien.

- Menteur, tu fixe le vide, tu bafouilles et tu baisse les yeux, ça te ressemble pas 'Vaï.

- Je t'ai déçu, pourquoi tu t'attardes sur moi ? Va profiter de tes potes et laisse ton handicapé de copain dans son coin.

Devant moi, le brun fronce les sourcils. Ridant son front à son paroxysme.

- Hein ? Mais qu'est ce que tu dit toi.

- J'suis pas foutu de parler à tes potes. Laisse moi dans mon coin que je gâche pas ta soirée.

Doucement, les lèvres d'Eren laissèrent passer un petit rire.

- N'importe quoi.

Il se redresse et me pique un baiser avant de reprendre.

- Alors primo, tu gâches pas ma soirée. Secundo, d'où tu m'as déçu ?

- J'ai bien vu ton regard tout à l'heure.

- Quel regard ?

- Quand t'es parti faire le café. Que j'ai pas été foutu de dire quelques choses à tes amis.

- Livaï, je crois que tu te fait des films.

- Non.

- Si, Livaï, crois moi, si j'avais quelques choses contre toi tu serais mis au courant directement.

Je vais pour répondre mais il m'en empêche en posant son doigts sur mes lèvres.

- Écoute mon cœur, je sais que tu ne va pas bien. Je sais que tu te torture les méninges depuis l'accident. Mais là, arrête de psychoter, et vient avec nous boire ton thé, soit toi même et c'est tout. C'est comme ça que j't'aime. Et on reparlera du reste plus tard. Arrête de penser des heures durant au moindre détail. D'accord ?

Tout en l'écoutant, je presse ma tête contre sa main qui caresse ma joue, puis acquiesce.

- Et ôte toi de la tête que tu me déçois sale nabot.

- Je te permet pas.

- Je me permet tout seul.

Dans un sourire, il capture mes lèvres. Puis passe derrière moi et me pousse en direction de la cuisine.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top