•26. Roméo•

Eren

Le temps semble s'arrêter. Je suis immobile, silencieux de surprise face à L.

Face à Livaï.

- Tu...

Je laisse ma phrase en suspension, perdu dans mes paroles tandis qu'il me regarde.

- Je ?

- Pourquoi ? Pourquoi tu me fais confiance comme ça ? je poursuis devant son air interrogatif. Je suis personne, on se connait à peine dans le fond, et pourtant tu viens de mettre ton secret entre mes mains.

Que je remette les choses en place : intérieurement je jubile. Je suis en délire complet de connaître le prénom de mon idole, mais aussi d'un homme que j'apprécie de plus en plus. Je me sens comme riche de cette confiance qui me réchauffe le cœur.

Mais ma raison m'oblige à me demander "pourquoi".

Le chanteur devant moi s'asseoit calmement et semble prendre le temps de choisir ses mots avant de finalement me répondre après quelques secondes de silence.

- Je t'apprécie Eren. Je me plains pas ok ? Mais les trois quarts des gens avec qui je cause font toujours des manières à plus en finir, si bien qu'en dehors du groupe, de mes deux amis d'enfance et de ma famille j'ai personne à qui parler de façon tranquille et normale. Et ça me fait chier, j'en ai marre. J'en ai marre de moi aussi faire des manières de tout ça, je veux juste être normal, faire une rencontre normale et parler normalement. Et c'est pas normal de pas dire son prénom, alors merde.

L'honnêteté de sa tirade est juste frappante, et je prends conscience que tout ceci doit-être dur à gérer. Qu'il a du mal avec ça, avec le fait de toujours se cacher.

Il détourne le regard visiblement gêné d'avoir ainsi avoué ses maux ainsi. J'hésite un instant puis prends doucement sa main dans la mienne. Il vient, il me semble, de faire un grand pas vers moi, et même si je n'ai aucune idée de vers où tout ceci pourrais nous mener, je reporte mes doutes à plus tard.

Sa main dans la mienne est douce et tiède alors que son propriétaire pose finalement son regard sur moi.

- Moi aussi je t'apprécie, Livaï, je lui souris doucement en prononçant pour la première fois son prénom à l'oral.

- C'est parce que je suis parfait ça, il dédramatise tranquillement.

- Ah bah tiens ta modestie m'avait manqué, je ris doucement.

Il souffle doucement en souriant et finit son petit verre d'alcool.

- Puisqu'on en est aux confidences, parle-moi donc un peu de toi Eren, dit-il.

Je termine aussi mon verre de jus et lui fait une petite grimace.

- J'ai rien de très intéressant à raconter par rapport à toi tu sais, mais bon, tu veux savoir quoi ?

- Moi je trouve très intéressant de connaître son interlocuteur, dit-il en caressant doucement ma main, me procurant bien des frissons. Pourquoi tu veux être photographe ?

- J'ai pas de raison particulière, j'amorce. Depuis tout gosse j'aime bien prendre des photos, des souvenirs. Quand j'avais six ou sept ans je piquais souvent le téléphone de mon père pour prendre des photos de tout et n'importe quoi, donc je me suis jamais vraiment interrogé sur ce que je voulais faire de ma vie, je suis plutôt du genre à suivre mes envies, je verrais bien où ça me mène.

Je me rend compte que c'est exactement ce que je suis entrain de faire avec Livaï : suivre mes envies et voir ensuite où je vais.

Je sais pertinemment que c'est risqué, mais il a l'air si honnête J'espère juste ne pas me planter.

- C'est courageux dans un certain sens, il lâche doucement ma main et se lève pour sortir de quoi dresser la table.

- Et toi ? Comment tu en es arrivé là ? M'enfin, vous m'avez déjà dit les grandes lignes mais toi particulièrement, ça s'est juste fait comme ça quand M et H se sont mis à jouer ?

- Moi j'ai toujours été un littéraire. J'écrivais tout le temps. Quand j'étais tout gosse je ne parlais presque pas, ma mère dit que j'étais timide et mal à l'aise avec les autres. Je ne me suis relâché qu'à mon entrée au collège mais j'ai continué de beaucoup écrire.

- Tu écrivais des paroles ?

- J'écrivais un peu de tout, texte, poème, même quelques histoires, il sourit légèrement en lâchant un souffle du nez. J'étais le genre de garçon à avoir un journal intime t'imagine le tableau ?

Je souris en imaginant la scène.

- Parfois, ça fait du bien d'écrire sa vie, ça aide à réfléchir et à extérioriser les choses, dis-je.

- Mmmmh, il jette un coup d'œil à sa montre avant de reprendre. On passe à table ?

J'acquiesce alors qu'il sors une salade de son frigo en guise d'entrée, surveillant au passage son plat qui mijote avant de se rasseoir face à moi.

- Tu es originaire de Nancy où tu y vis juste pour des études ?

Je prend mon plus bel accent pour lui répondre.

- Nein, nein, ich bin Deutsher, je souris devant sont air mi-amusé mi- surpris. Je suis né à Berlin et j'y suis resté jusqu'à mes huit ans, ensuite on est venu dix ans en France à Dijon pour le travail de mon père puis quand il a plus ou moins prit sa retraite il est reparti avec ma mère habiter près de Munich et moi ben je suis entré à la fac à Nancy du coup.

- Ah ouais sacré parcours, il dit étonné.

Nous partageons ainsi un repas calme ensemble, tout en discutant de lui, de moi. On parle de nos amis, de nos famille. Il me confia ainsi qu'il n'avait pas vraiment connu son père, que celui-ci était décédé alors qu'il n'était encore qu'un bébé et qu'il a donc grandi avec sa mère, femme au foyer, et son oncle, gérant d'un bar dans la banlieue parisienne. Il m'avoue cash qu'il n'a jamais eu de relations sérieuses et qu'il s'est toujours contenté de conquêtes d'un soir dans sa vie privée, empêchant ainsi tout développement de relations pour préserver son identité professionnelle. Je lui avoue quant à moi ne jamais avoir trouvé la bonne personne tout en argumentant qu'à 21 ans j'ai bien le temps de chercher (et de trouver).

Il se montre très sympa avec moi, et j'apprécie grandement faire connaissance avec lui, je découvre enfin l'envers du décors; l'homme derrière l'idole. Cependant, ses paroles démontrent il me semble une certaine ambiguïté. Joue-il avec moi ? Ou est ce que je me fait des idées ?

- Le repas t'as plu ? Bon c'est pas non plus de la gastronomie hein mais...

- C'était niquel, et c'était très bon, je le coupe en souriant sans laisser filtrer mes interrogations.

Il me sert un café tandis que je le regarde. Est ce qu'il s'intéresse à moi ? Pourquoi il le ferais, je suis personne. Mais pourquoi je suis là alors ?

- Ça te dis de rester regarder un film ? Tu bosses pas demain, le shooting à été décalé, et on est dimanche ? il demande l'air de rien.

Est ce que je suis parano ?

Je le soupçonne d'avoir lui même décalé la séance photo. Mais et si c'était moi qui me faisais des idées ?

Mais et si c'est volontaire ? Ou voudrais il aller ? Pourquoi ?

Est ce que je ne prendrais pas mes désirs pour des réalités ?

En attendant: je vais clairement pas refuser.

- Pourquoi pas, tu veux regarder quoi ?

- On va bien se trouver quelque chose à la télé ou sur Netflix, viens on va se mettre au salon je m'occuperais de la vaisselle plus tard.

Je le suis dans son grand séjour et m'assied doucement sur le canapé tandis qu'il amène mon café et son thé et les poses sur des dessous de verre sur la table basse puis allume la télévision.

Est ce qu'il me drague ?

Quels seraient ses objectifs si toutefois c'était le cas ?

Tout n'est jamais tout noir ou tout blanc.

- Au pire tu pourras dormir ici s'il est trop tard à la fin, il dit en zappant cherchant quoi regarder.

Je vais devenir fou.

Un rire nerveux m'échappe.

- Qu'est ce qui te fait rire morveux ? il fronce les sourcils.

- Oh euh rien rien, , je tente d'enterrer le poisson.

Il n'en fait pas cas et porte son attention sur la télévision.

- Dit Livaï, pourquoi tu fait tout ça ?

- Tout ça quoi ?

Son air innocent est si bien joué, est il vrai ?

- Ben, le dîner, la soirée...?

- Bah pourquoi je le ferais pas ?

- Eh bien...

- Ça fait trop Roméo pour toi ? il lâche un sourire subtil.

- Oh Roméo ! Pourquoi es-tu Roméo ? je me sors de l'impasse.

- Nan ta gueule, vraiment.

- Roh, t'es pas drôle, je souris. Oh y'a Labyrinthe sur TF1.

Quel changement de sujet prodigieux, il remarque (je pense) mais ne relève pas et mets la 1.

Je ne suis pas vraiment le film. Trop perdu dans mes pensées.

Faire référence à Roméo et Juliette, c'est bien une histoire d'amour. Donc je l'intéresse ?

Lui non plus ne semble pas suivre le film, et son air amusé ne semble pas quitter son regard.

Puis il s'appuya contre moi, d'une façon fluide et naturelle.

C'est pas possible que ce soit un malentendu. Il va me rendre fou.

Après dix minutes de torture mentale supplémentaire, j'abandonne et me cale doucement contre lui, 

Nous passons tout le film ainsi installé.

Finalement les Blocard parviennent s'échapper du Labyrinthe, et après un regard à sa montre Livaï se redresse et tapote ma cuise avant de prendre parole.

- Tu dors ici ? Il est tard.

Il se fout de ma gueule. Et ça marche ! Ça cours même. 

- Oh oui, onze heure et demie du soir Moi qui me couche à neuf heure d'habitude, j'entre dans son jeu.

- Tu dois être épuisé alors, il pouffe. Allez viens.

Visiblement je n'ai pas le droit de refuser, je capitule et le suis.

- Oh, comme c'était pas prévu j'ai pas mis de chauffage dans les chambre d'ami, ça te dérange pas de partager la mienne ?

- Euh..

- Pour dormir, en toute amitié bien sur.

Je sens le sourire dans sa voix. Suite à mon silence il fini par se retourner et me regarde.

- J'ai dit "dors" du verbe "dormir", sale gosse.

Je rougis et bafouille une réponse digne d'un adolescent alors qu'il me coupe.

- Eh c'est bon relax, il affiche un air amusé. Bon du coup, tu veux bien ?

- Je... Oui, ouais d'accord.

- Je vais te montrer la salle de bain, et je vais aller te chercher des fringues pour la nuit.

Je le suis et m'exécute. Une fois douché j'enfile des vêtements trop grands appartenant à mon chanteur et qui portent son odeur (et ce n'est pas pour me déplaire) puis le rejoins. Lui aussi sort de la douche, j'en déduis donc qu'il possède plusieurs salle de bain. Foutu riche.

Et il y fait pas froid dans ses multiples salles de bains ?

Plus ou moins timidement, je me glisse avec lui dans le grand lit deux place alors qu'aussitôt il me tire à lui.

Il affiche un petit sourire en coin puis s'approche de moi soudainement.

Oh putain il m'embrasse.

Et c'est loin de me déplaire.

Sa main se déplace doucement et fait pression sur ma nuque, approfondissant notre baiser tandis que mes mains se posent quant à elles naturellement sur les hanches du chanteur.

Correction: sur les hanches musclées du chanteur.

Notre étreinte perdure ainsi encore quelques longues et agréables secondes, allant de caresses en caresses avant que nos lèvres de se quitent.

Et que nos regards ne se croisèrent.

- Aussi agréable que dans mon souvenir, lâcha finalement le chanteur. Bonne nuit morveux.

Ma seule réaction c'est de planquer mes rougeurs. Mon corps réagi en désaccord avec ma conscience, je doit prendre confiance ou avoir peur pour mon cul ?

- Je croyais que tu voulais juste dormir, je marmonne.

- Ça t'as déplu ?

- Non.

- Alors tait toi.

Le chanteur s'installe bien, assez proche de moi pour que je le sente sans toutefois me toucher, lui qui est en débardeur et jogging qui laissent parfaitement sentir son torse musclé.

Le silence s'établit. Me laissant me perdre dans mes songes.

Qu'étions nous ? Si toutefois il y avait un « nous », étions-nous des amis ? Des amants ? Des connaissances ? Rien du tout je me fair un film ?

Je ne doutais pas un instant de mes envies, mais je doutais de leurs fondements ainsi que de leurs réciprocités.

L'aimais-je pour ce qu'il était ou pour qui il était ?

Et...lui...qui était ai-je pour lui ? Un gamin photographe ? Un fan intéressant ? Est-ce qu'il me voulait moi pour moi ou pour du sexe ? Est ce qu'il me voulait tout court ?

Il y a trop de chose, de hasard pour que ceci ne soit que des coïncidences.

Je dû réfléchir longtemps ainsi, nouant encore plus mon cerveau à chaque interrogation alors qu'il était maintenant presque minuit et qu'un homme aux cheveux noirs dormait sous moi. Respirant de façon stable contre ma peau et me tenant contre lui.

Et ok je l'avoue: j'ai eu un bug typique d'un gros fanboy de merde à ce moment.

La tête endormie et relâchée de Livaï lui donnait un air...magnifique, mignon, paisible...et horriblement attirant je l'avoue.

Et plus je le regardais plus je le voyais beau, avec sa peau pâle et ses cheveux noirs de jais.

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