Livaï

C'était sans y penser que j'avais passé ma main sur la joue de l'étudiant.

Et cela, au delà de m'avoir surpris de moi-même, m'avais plus.

Je me délecte des petites rougeurs de ses douces joues, de son petit air peu assuré.

Et j'ai beau être un grand joueur, je commençais doucement à enfreindre ma règle numéro une: pas les fans.

« Il faut que je prenne mes distances. »

Je songe tout en montant un léger escalier qui m'amène directement dans les coulisses de la scène, où m'attendent Mike et Hanji.

- Alors, il est enfin prêt? me demande le blond.

- Ouais tout est bon de ce côté. Pour vous c'est comment ? je demande.

- Ça va, il n'y a plus qu'à, me répond Hanji.

Je prends quelques respirations calmes tout en fermant les yeux, puis nous faisons ensemble la dernière mise au point avant que l'heure fatidique arrive.

De nôtre planque, nous pouvions voir une partie du public.

Public très dense puisque les places de ce concert en plein air s'étaient vendues en à peine trois jours.

Le groupe qui fait notre première partie vint nous saluer brièvement avant de se rendre sur scène, Hanji Mike et moi partons donc brièvement pour finir de nous préparer dans nos loges avant de remonter près de la scène lorsque l'ouverture fût terminée.

- Au signal No Name, dit Jack. C'est parti allez y !

Après le signal du metteur en scène, des tonnes de fumée dirigée vers l'avant de la scène masquèrent nôtre entrée aux yeux du public.

Hanji se grouille alors d'aller se mettre à sa place, guitare autour de la taille, devant Mike sur sa droite.

Le blond quant à lui prend place sur son tabouret derrière sa batterie et son synthé.

Adoptant une respiration calme et sentant l'adrénaline monter dans mes veines, je me dirige vers l'avant de la
piste, devant mon micro.

Les fans situés dans la fosse sont les premiers à voir à travers la fumée, et ils se mirent alors à crier diverses choses.

- L JE T'AIME !

- M !!! H !!!

Des centaines voir des milliers d'autres cris se firent entendre. Les acclamations envers No Name me volèrent un sourire en coin de façon imperceptible.

Je lève doucement la main gauche vers le ciel et fait un décompte avec mes doigts alors que le public hurle.

- TROIS !

- DEUX !!

- UN !!!

Et ce fut le décollage.

~~~

La soirée passe, chanson après chanson. Titres calmes après chansons provocantes.

Puis vient la dernière, un titre calme, pour faire redescendre la pression: Song for a Dream.

Une mélodie assez calme malgré des paroles assez fortes.

- J'aimerais être vivant et ne plus avoir peur, j'aimerais aimer mon père.

Le public, en cœur, continue à ma place.

- J'aimerais savoir quoi faire, j'aimerais bien le comprendre.
J'aimerais bien qu'il attende.

Et je reprends:

- J'aimerais être important, j'aimerais être un désir. J'aimerais être un fossile.

Devant moi j'aperçois Eren, coincé entre deux photographes de magazine. Il baisse son appareil photo et me regarde tout sourire, fredonnant les paroles. Et mon regard s'arrête sur lui.

- J'aimerais te voir guérir, j'aimerais te voir grandir. Atténuer tes douleurs.

Je tends le micro en l'air devant moi pour faire chanter le public, sans toutefois lâcher l'étudiant du regard.

- Tombera les croix. Mon rêve réussira. Tomberont les diables.
Les dieux n'existent pas !

Et je m'arrache à ma contemplation du jeune homme aux yeux verts et fait volte-face, faisant signe au public de chanter avec moi le refrain.

- Attaque mes rêves ou détruis mon âme ! On sera un rêve incroyable !
C'est juste ma vie, c'est juste mon âme !

- On sera un rêve idéal !On aura une vie incroyable !

- Je voudrais un rêve idéal !

Chanter en dialogue avec le public est une des choses que je préfère dans mon métier. Et je vis même, Eren, encore une fois, se prêter à ce petit jeu.

Au alentour des trois minutes de musique, je rebrousse chemin sur la scène et m'approche du tableau de Mike, m'occupant avec lui de quelques petites percussions en reprenant les paroles.

- On m'avait dit. Que toutes mes peurs disparaîtraient.

Je change de ton, toujours en m'occupant des percussions à une main.

- Et moi la nuit. Je rêvai d'une vie incroyable.

Percussions, encore. On y est presque, je me sens me calmer. Eren me prend en photo ainsi, regardant devant moi, une main sur le tableau, micro dans l'autre.

Puis le silence et le noir.

C'est la fin.

Puis de petites lumières se rallument, le public applaudit.

Mike, Hanji et moi avançons ensemble côte à côte, jusqu'au bout de l'avancée, et là on s'incline. Ensemble sous l'objectif du jeune étudiant qui en profite pour faire son job.

Le concert est fini.

~~~

Quelques minutes plus tard, de retour dans notre loge commune, je me laisse tomber sur une chaise, ôtant rapidement ma veste, mon bandage (désormais plein de sueurs) et mes chaussures (dont je ne peux vous décrire l'odeur de transpiration). Je me saisi aussi d'une bouteille d'eau et m'empresse de la vider au trois quart en une gorgée sous l'œil de mes deux amis eux aussi lessivés.

- Un peu soif ? ironise Hanji en ôtant également son bandage.

- J'ai rêvé de ça toute la soirée, j'avoue en terminant la bouteille.

- T'a pas forcé j'espère ? demanda Mike. J'ai remarqué que t'as fait deux trois fausses notes vers la fin.

Je tourne la tête vers lui.

- Sérieux ?

- Ouais, t'as accéléré un peu aussi.

- J'ai pas fait gaffe alors.

- Sûrement, je l'ai remarqué aussi, approuve Hanji.

- En tout cas le public était à fond ce soir, dit Mike.

- Ouais, un vrai truc de fou, fait Hanji.

- Normal t'es là Hanji, j'observe.

- Pourquoi tu t'en prends toujours à moi bordel Livaï ? dit-elle avec un air triste digne d'une gamine de cinq ans, soit l'équivalent de son âge mental.

- Parce que c'est beaucoup, beaucoup trop facile, j'avoue en me levant et en me rinçant rapidement afin de changer de chemise.

Mike se lève et fait de même, Hanji, quant à elle, se vautre dans le canapé, et sort son téléphone.

- Oh, et le gamin au fait ? Ça a été ? demande Mike.

Je m'essuie rapidement le visage puis attrape une chemise propre.

- Je l'ai aperçu deux ou trois fois, je crois qu'il nous à mitraillé.

- Bien alors. Et il est où là ?

- J'en sais rien, j'avoue.

- Bah je vais aller voir alors, propose Hanji en se redressant.

- Change de chemise avant duconne, elle est degeulasse putain, t'as transpiré dedans toute la soirée, je remarque.

- Eh c'est humain de transpirer !

- Bah change toi !

Mike nous regarde un instant par le reflet du miroir en face du quel il se tient, un air blasé collé au visage.

- Vous m'épuisez tout les deux.

Il soupire puis deux coups se firent entendre contre la porte de la loge.

- Mr Jäger est dans la loge privé de L, informe la voix de Erd, un de nos chauffeurs de l'autre côté du battant. Je l'ai conduit jusqu'à son sac, souhaitez-vous que je vous l'amène ?

Je réfléchis un court instant et toise Hanji un quart de seconde avant de répondre.

- Nan laisse Erd, je vais y aller.

- Crédit-

- Song of a Dream, Indochine, album 13.
https://youtu.be/DkffTDkSADI