La phase 0
Les chaînes autour des poignets de Wilfried tintaient doucement à chaque pas qu’il faisait sur le sentier de pierre menant à la grande cité des Elfes. Sous son apparence d’Immanity, il gardait le regard bas, ses cheveux ternes cachant une grande partie de son visage. À ses côtés, Troxz, ou plutôt Gilda sous une apparence modifiée, jouait à merveille son rôle de marchande d’esclaves. Son allure, hautaine et impérieuse, trahissait un dégoût à peine voilé pour les chaînes qu’elle tenait en main.
Les murs d’émeraude et les grandes tours cristallines de la cité elfe se dressaient devant eux, reflet de l’arrogance et de la supériorité des habitants de ce royaume. Gilda observa ces lieux avec un mélange de fascination et de répulsion, tandis que Wilfried restait silencieux, concentré sur son objectif.
— Rappelle-moi pourquoi on fait tout ça ? murmura-t-elle, tout en gardant son rôle.
Wilfried tourna légèrement la tête, ses yeux dissimulés par ses cheveux.
— Trois raisons, comme je te l’ai expliqué, répondit-il doucement, pour que seuls elle et lui puissent entendre.
Point 1 – La menace de Sora et Shiro
— Mon monde était déjà un champ de bataille intellectuel, expliqua Wilfried. Mais ici, les règles sont bien plus cruelles. Ce n’est pas seulement une question de logique ou de stratégie, c’est une question de survie absolue.
Gilda roula des yeux, mais elle ne répondit pas, le laissant continuer.
— Depuis que Sora et Shiro sont arrivés, cet équilibre a basculé. Ils sont… dangereux. Pas maintenant, peut-être, mais à long terme.
Gilda fronça les sourcils, clairement mécontente de l’entendre.
— Et donc, ta solution c’est quoi ? Les éliminer ?
— Pas tout de suite, répondit-il calmement. Je dois les affaiblir, les isoler, les rendre vulnérables. Si je peux diviser leur lien indestructible, je pourrais peut-être les neutraliser… ou les absorber.
Cette dernière phrase fit l’effet d’une bombe. Gilda s’arrêta net, le regard rempli de colère.
— T’oserais faire ça ? s’indigna-t-elle. Ce serait… ignoble !
— Ignoble, oui, mais efficace, répliqua Wilfried avec une froideur qui la fit frissonner.
Elle lui donna un coup sur la tête, assez fort pour qu’il trébuche légèrement.
— Parfait, dit-il en se frottant la tête. Continue comme ça, tu joues parfaitement ton rôle de maîtresse cruelle.
Elle grogna mais reprit sa marche, toujours bouillonnante de colère.
Point 2 – Garder son identité secrète
En approchant des portes de la cité, Wilfried continua d’expliquer son plan à voix basse.
— Personne ne doit savoir qui je suis vraiment, dit-il. Pas avant que Seventeens soit une réalité.
Le nom seul fit lever un sourcil à Gilda.
— Seventeens ? Ce projet absurde où tu veux rassembler toutes les races sous ta bannière ? Sérieusement, tu y crois encore ?
— C’est plus qu’un rêve, c’est une nécessité, répondit-il. Si le monde apprend qui je suis avant que tout soit prêt, tout s’effondrera. Et si Sora et Shiro l’apprennent, c’est game over.
Et réalité ce fut pas ce que Gilda pense mais Wilfried fit genre.
— Et si c’est Tet qui parle ?
Wilfried lui lança un regard chargé de reproches.
— Tet ne trahira pas.
Elle haussa les épaules, pas totalement convaincue. Et pourtant, Tet ferait-il abstraction de ce qu'il est pour intervenir dans le jeu des autres races ?
— Bref, reprit-il. Cette phase est cruciale. Je dois infiltrer les Elfes, y semer le chaos, et placer un agent de confiance comme leur nouveau représentant.
— Et tu comptes faire ça comment ? demanda-t-elle, sceptique.
— En battant Fiel Nirvalen, répondit-il avec assurance.
Gilda éclata de rire, attirant quelques regards curieux des passants elfiques.
— Bonne chance, dit-elle en reprenant son calme. Parce que franchement, même avec ton “Huma”, je doute que tu puisses réussir ça sans un miracle.
Wilfried haussa les épaules, un sourire en coin.
— Si j’échoue, dis-toi que je ne suis pas du genre à abandonner aussi facilement, répondit-il.
Cette remarque arracha un soupir exaspéré à Gilda.
Point 3 – Phase 0 : Les Elfes
Arrivés à l’entrée de la cité, ils furent arrêtés par deux gardes elfiques. L’un d’eux, grand et imposant, dévisagea Wilfried avec mépris.
— Que voulez-vous, Immanity ? demanda-t-il d’une voix froide.
— Un esclave, répondit Troxz d’un ton sec. Je suis ici pour vendre cet imbécile.
Wilfried baissa la tête, adoptant une posture soumise. Il sentait le regard scrutateur des Elfes, mais il ne broncha pas.
Les gardes les laissèrent passer, et ils pénétrèrent dans la cité.
Gilda se pencha légèrement vers lui.
— Et maintenant ? demanda-t-elle.
— Maintenant, murmura Wilfried, le vrai jeu commence.
Wilfried, désormais enchaîné et officiellement vendu comme esclave, suivit silencieusement sa nouvelle maîtresse dans les vastes corridors dorés de la demeure elfique. La transaction s’était déroulée sans accroc, exactement comme prévu. Gilda, sous sa fausse identité de Troxz, était partie avec une somme impressionnante en gemmes et artefacts, une richesse qui ferait baver d’envie la plupart des Immanities.
Cependant, Wilfried ne souriait pas, ni intérieurement ni extérieurement. Il était concentré, enfoui dans son rôle. Une erreur, un faux mouvement, et tout son plan s’effondrerait.
Une femme influente, un danger calculé
Sa nouvelle maîtresse, une femme elfe à la prestance imposante et aux yeux d’un vert perçant, n’avait pas prononcé un mot depuis qu’elle l’avait acheté. Son regard hautain balayait les environs tandis qu’elle avançait, traînant Wilfried derrière elle comme une vulgaire marchandise. Lady Calistriel, comme elle s’était présentée pendant l’achat, était une figure influente parmi les Elfes, connue pour ses manières cruelles mais calculées.
Wilfried aurait préféré éviter une telle propriétaire, mais il savait que c’était mieux que d’être vendu à la famille Nirvalen. Contrairement aux autres Elfes, les Nirvalen ne traitaient pas leurs esclaves avec la même brutalité systémique. Fiel Nirvalen, en particulier, était une énigme parmi son peuple. Son comportement maternel envers Chlammy témoignait d’une humanité rare pour une Elfe.
Mais, précisément à cause de cette singularité, tomber entre les mains des Nirvalen aurait été une erreur stratégique. Une interaction avec Fiel trop tôt dans son plan risquait de compromettre ses intentions. Il ne pouvait pas se permettre de révéler ses cartes devant une femme aussi astucieuse.
Une demeure d’or et d’arrogance
Lady Calistriel s’arrêta devant une grande porte gravée d’inscriptions elfiques. Avec un simple geste de la main, elle fit s’ouvrir les portes, révélant une vaste salle décorée de tapisseries magiques et de sculptures lumineuses. Chaque détail respirait l’excès et l’arrogance, caractéristiques typiques des Elfes.
— Entre, ordonna-t-elle d’un ton sec.
Wilfried obéit sans mot dire, ses chaînes cliquetant doucement.
— À genoux, ajouta-t-elle en s’asseyant sur un trône d’émeraude au centre de la pièce.
Il s’exécuta, baissant la tête pour compléter le tableau de soumission.
— Tu es un Immanity bien silencieux, remarqua-t-elle.
Wilfried garda le silence, jouant parfaitement son rôle.
— Bon, je n’ai pas acheté cet esclave pour son intelligence, marmonna-t-elle pour elle-même.
Une fausse soumission, un plan en marche
Wilfried savait que ce moment était crucial. Il ne devait pas attirer l’attention sur lui plus que nécessaire. Il se contenta donc d’obéir à chaque ordre, exécutant les tâches qu’on lui confiait avec une apparente docilité.
Pendant les jours qui suivirent, il apprit à connaître les routines de Lady Calistriel, ses habitudes, ses faiblesses. Chaque information, aussi insignifiante soit-elle, était une pièce du puzzle qu’il assemblait lentement.
Cependant, il ne pouvait s’empêcher de remarquer que les Elfes, pour toute leur arrogance, avaient un système social fissuré. Leur obsession pour la perfection les rendait aveugles à leurs propres vulnérabilités.
Une tâche inattendue
Un soir, alors qu’il nettoyait un des innombrables couloirs de la demeure, Wilfried entendit des voix provenant d’une pièce voisine. Curieux, il s’approcha discrètement.
— Lady Calistriel, avez-vous entendu les rumeurs ? disait une voix masculine.
— Quelles rumeurs ? répondit la voix de sa maîtresse.
— Les Nirvalen, murmura l’homme. Il paraît qu’ils manigancent quelque chose.
Wilfried sentit son cœur s’accélérer. Il se força à ne pas bouger, tendant l’oreille.
— Les Nirvalen ? répéta Lady Calistriel avec un rire moqueur. Vous me parlez de cette famille déshonorée ? Ils ne représentent aucune menace.
— Peut-être, mais…
L’homme baissa la voix, rendant le reste de la conversation inaudible. Wilfried se détourna lentement, retournant à son travail.
Une opportunité à saisir
Ces rumeurs sur les Nirvalen pouvaient être utiles. Si Lady Calistriel ignorait leur potentiel, cela signifiait qu’il avait une ouverture. Mais pour l’instant, il devait rester prudent.
En terminant ses tâches pour la journée, Wilfried réfléchit à ses prochains mouvements. La phase 0 de son plan avançait bien, mais il restait encore beaucoup à faire. Il ne pouvait se permettre aucune erreur.
Avant de s’endormir dans sa petite cellule, il se remémora les paroles de Gilda.
— Même un lâche a de l’amour-propre, avait-elle dit.
Un sourire amer effleura ses lèvres. Il n’était pas un lâche. Pas cette fois.
La nuit de l'affrontement
Dans les vastes salles illuminées de la demeure de Lady Calistriel, le silence de la nuit fut brisé par l’arrivée d’un visiteur inattendu. Une elfe vêtue d’une tenue sobre, mais élégante, se tenait dans l’embrasure de la porte principale. Son visage était masqué par une capuche, mais son port de tête et son aura dégageaient une confiance écrasante.
Lady Calistriel, assise sur son trône d’émeraude, observa l’intruse avec un mélange de curiosité et d’agacement.
— Qui oses-tu être pour troubler mon repos, étrangère ?
L’elfe mystérieuse s’inclina légèrement, puis parla d’une voix calme, mais ferme :
— Je suis ici pour te défier, Lady Calistriel. Si je gagne, je prendrai tout ce qui t’appartient, y compris cet esclave que tu viens d’acquérir.
Un éclat de rire méprisant résonna dans la pièce.
— Prendre tout ce qui m’appartient ? Insolente. Et si par miracle je gagne ?
L’étrangère inclina légèrement la tête.
— Alors tu pourras imposer la condition de ton choix, quelle qu’elle soit.
Intriguée, Lady Calistriel posa son menton dans sa main, réfléchissant à la proposition.
— Très bien, dit-elle enfin. Puisque c’est moi qui suis défiée, je choisirai le jeu. Ce sera Oracle Card.
Les deux femmes échangèrent un regard, et d’un commun accord, elles prononcèrent la formule rituelle :
— Ashante.
Les règles d’Oracle Card
Une table fut dressée au centre de la salle, et les serviteurs apportèrent deux jeux de cartes identiques, composés des 22 Arcanes Majeurs du tarot. Les règles étaient simples : chaque joueuse choisirait deux cartes par tour et les poserait face cachée. Une fois révélées, les combinaisons de cartes seraient utilisées pour attaquer ou se défendre, selon les parchemins magiques prédéfinis.
Le duel se jouerait en trois rounds. Chaque joueuse aurait la possibilité d’abandonner après le premier ou le deuxième round. Mais si aucune des deux ne se rendait, le duel continuerait jusqu’à ce que l’une des joueuses soit incapable de poursuivre à cause des « blessures » infligées par les parchemins.
Lady Calistriel sourit avec arrogance.
— Prépare-toi à regretter ton insolence.
L’étrangère resta silencieuse, retirant lentement sa capuche pour dévoiler un visage d’une beauté froide et austère.
Premier round
Le premier tour commença. Lady Calistriel, sûre de sa maîtrise du jeu, choisit ses cartes avec confiance. L’étrangère, en revanche, semblait hésiter, comme si elle découvrait les règles pour la première fois.
Les cartes furent révélées :
Lady Calistriel : L’Empereur et La Lune.
L’étrangère : Le Fou et Le Soleil.
Les parchemins s’activèrent. Les cartes de Lady Calistriel libérèrent une attaque magique puissante, un flot d’énergie qui força l’étrangère à battre en retraite.
Le round continua ainsi, et Lady Calistriel domina facilement. L’étrangère semblait maladroite, comme si elle testait simplement les mécaniques du jeu. À la fin du round, Lady Calistriel se leva triomphalement.
— Pitoyable. Est-ce là tout ce que tu as à offrir ?
L’étrangère releva la tête, un sourire en coin sur les lèvres.
— Disons que je voulais m’assurer de bien comprendre les subtilités des parchemins.
Lady Calistriel haussa un sourcil, mais ne répondit pas.
Deuxième round
Dès le début du deuxième round, l’atmosphère changea. L’étrangère choisit ses cartes avec une précision redoutable, et chaque combinaison qu’elle créait semblait anticiper les mouvements de Lady Calistriel.
Lady Calistriel : La Tour et Le Diable.
L’étrangère : La Justice et La Force.
Cette fois, les parchemins de l’étrangère déclenchèrent une défense parfaite, absorbant l’attaque de Lady Calistriel avant de riposter avec une force dévastatrice.
Lady Calistriel grinça des dents. Elle tenta de reprendre le contrôle, mais l’étrangère domina chaque tour suivant avec une facilité écrasante.
À la fin du deuxième round, Lady Calistriel était visiblement ébranlée.
— Qui es-tu vraiment ? demanda-t-elle, sa voix tremblant légèrement.
L’étrangère ne répondit pas.
Troisième round
Le troisième round fut bref. Lady Calistriel, désespérée, tenta une stratégie risquée, mais l’étrangère prédit chaque mouvement. Elle posa ses cartes avec une telle assurance que le duel sembla déjà décidé avant même que les parchemins ne s’activent.
Lors du dernier tour, les cartes révélèrent leur verdict :
Lady Calistriel : Le Jugement et L’Hermite.
L’étrangère : La Mort et Le Monde.
Une lumière aveuglante emplit la salle, et Lady Calistriel tomba à genoux, incapable de se relever.
— Non… Ce n’est pas possible…
La véritable identité de l’étrangère
L’étrangère se leva lentement, s’approchant de Lady Calistriel avec une expression impassible.
— Comme convenu, tout ce qui t’appartient est désormais mien.
Avant que Lady Calistriel ne puisse protester, une sphère lumineuse se forma autour d’elle. Son corps se désintégra lentement, et la sphère fut absorbée par l’étrangère.
Lorsqu’elle se retourna, son apparence commença à changer. Ses traits elfiques s’adoucirent, sa stature diminua légèrement. En un instant, l’étrangère avait disparu, remplacée par… Wilfried.
Il se tenait là, un sourire satisfait sur le visage.
Un plan accompli
Wilfried avait utilisé le pouvoir aux mille visages de Shemed pour créer cette fausse elfe, une personnalité entièrement distincte qu’il pouvait contrôler à volonté. Désormais, cette personnalité existait indépendamment, prête à représenter les Elfes dans son projet ambitieux : Seventeens.
La première membre de son équipe était née, une Elfe dotée de pouvoirs impressionnants et d’une loyauté absolue envers lui.
— Tu porteras la marque de la survie, dit-il en traçant un symbole sur son oreille droite.
L’Elfe inclina la tête.
— Quelle est ma mission ?
Wilfried sourit.
— Bats Fiel Nirvalen. Fais-le en mon nom, et assure-toi que les Elfes croient que tu es l’une des leurs. Pendant ce temps, je resterai dans l’ombre, jouant mon rôle d’esclave docile.
L’Elfe acquiesça.
Wilfried se tourna vers la fenêtre, contemplant les étoiles. Son plan avançait parfaitement, et il sentait qu’il était sur le point de changer le destin de ce monde.
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