3. DATE END ?

Ils avaient bien du s'endormir là, en haut de la botte de paille. Ce sont les bruits du centre équestre, des cavaliers, des sabots contre les pavés qui réveillèrent Achille en sursaut. Son premier réflexe fut d'attraper son téléphone afin de voir l'heure, la date, le jour, un peu sonné et perdu. Il était six heures et demie. Le ciel était d'un bleu clair, très clair, l'air frais mais les rayons du soleil commençaient déjà à taper contre leurs têtes. Elvio, étendu sur la paille, les deux mains noués sur son ventre, la bouche entre-ouverte, semblait profondément endormi. Achille le secoua.

« Pssst, debout ! »

Elvio ouvrit un œil, puis l'autre, aveuglé par le soleil dont ils semblaient plus proches à cette hauteur. Comme Achille quelques instants plus tôt, il mit un certain temps avant de faire le lien. Il se releva en se frottant les yeux et en baillant.

Avant qu'un des deux ne puisse dire mot, une voix en bas de la botte de paille brailla :

« Eh ! Mais qu'est-ce que vous foutez-là, vous ? »

Leurs visages se décomposèrent de surprise.

« Dégagez d'ici ! »

C'était un homme de taille moyenne, robuste, les cheveux blanc, un bronzage de paysan. En tout cas, pas le genre d'homme auquel on cherche les ennuis.

Sans perdre une seconde, tout paniqués, les deux garçons dégringolèrent de la botte de paille, poursuivit par le monsieur enragé qui leur hurlait dessus tout en les coursant.

Elvio avait une bonne forme physique, s'en était visible. Achille commençait à s'essouffler et le vieillard en rogne le rattrapait dangereusement. L'espagnol attrapa la main du presque condamné et l'aida à traverser les champs du centre équestre jusqu'à semer l'individu qui voulait leurs peaux.

C'est après un long moment de course, leurs deux visages rouge d'efforts et d'épuisement, qu'ils s'arrêtèrent au beau milieu de la forêt qui longeait le centre équestre. À travers les feuillages se glissaient les rayons du soleil, leurs ombres jouaient sur le sol faits de morceaux de bois, d'herbe, de ronces, de fleurs et de leurs pétales... Le temps était bon, délicieux même. On entendait des criquets, de petits pas pressés au loin dans la forêt - certainement un animal sauvage.

Achille s'appuya contre un tronc d'arbre, le souffle coupé, se ventilant avec les mains. Elvio ricana.

« Tu sais où on est ? Demanda ce dernier en regardant autour de lui : que de la sublime verdure.

-Un peu près. »

Achille n'avait pas l'air si sûr de lui mais plutôt hasardeux. Après avoir reprit son souffle, il fit signe à l'espagnol de le suivre.

La nature craquait sous leurs chaussures, parfois ils dérapaient sur des cailloux. Ils montèrent quelques petites collines, traversèrent la forêt brut pour se perdre plus profondément dans le paysage de plus en plus sauvage.

Sur le chemin, le souffle toujours un peu court, Achille demanda :

« Tu viens d'où, toi ?

-Mon père est d'Espagne et ma mère d'Argentine. Je suis né en Espagne, j'ai grandis dans les deux pays, et puis nous sommes venus en France.

-Pourquoi, si c'est pas indiscret ? »

En même temps, Achille attrapa Elvio, déterminé dans sa marche, par l'avant bras pour le stopper dans son élan. Une grande clairière vide s'offrait à eux et le vendeur de glaces était bien fatigué. Ils se posèrent là, les fesses dans l'herbe, les vêtements sales, les cheveux en bataille, épuisés, mais le cœur léger. Autour d'eux, des millions de tulipes de toutes les couleurs prenaient un bain de soleil. Les yeux marrons d'Achille s'animèrent de passion. Le paysage ici était incroyable, à couper le souffle. Il reposa son regard sur Elvio et fut éprit comme d'un vertige : mais où regarder ?

« Oh ce n'est pas indiscret, souriait Elvio, mes parents aiment voyager, bouger dans tous les coins du monde. On avait de la famille en France et ma mère avait trouvé un super job ici, donc on a déménagé quand j'avais quinze/seize ans. Et toi, tu viens d'où ? »

Un silence plana sur le duo. Pendant ce temps, chacun d'eux regardaient dans une direction opposée, à la fois nerveux et fascinés. Elvio adorait les tulipes rouge.

« Dommage que je n'ai pas mon appareil photo, souffla t-il.

-Tu aimes la photo ? »

Achille avait l'air réjouit et hocha positivement la tête. Toutes ses fleurs, cette étendue de beauté, de verdure, de couleur, l'or du soleil qui rebondissait sur eux et sur ce splendide paysage... ses yeux s'en souviendraient longtemps.

Avant qu'Elvio ne puisse relancer la conversation, Achille prit les devants, se releva en tendant la main à son compagnon de toujours qui la lui attrapa. Dans un mouvement d'effort, il lui demanda :

« Tu m'emmènes où ? »

La réponse d'Achille fut un simple clin d'œil. Il était indéniable qu'il n'aimait pas les interrogatoires.

Les deux garçons continuèrent leur marche tantôt sous le soleil, tantôt à l'ombre des feuillages. Au bout de quelques minutes, Achille, comme prit d'excitation, se mit à courir et à dégringoler, tout en retirant ses vêtements, une petite pente sèche. Surprit, Elvio le suivit en riant.

En bas s'étendait devant eux comme une petite piscine naturelle, l'eau claire, à la toiture faite des feuillages bien vert des immenses arbres. Le soleil passait à travers, se reflétait dans l'eau qu'il réchauffait. Impressionné, Elvio retira à son tour ses vêtements, la bouche en forme de -O parfait.

« Eh ouais ! Se réjouit Achille en lui attrapant encore la main pour l'entrainer vers la baignade.

-Mais attend, comment tu connais cet endroit ? Fit Elvio, abasourdit. Je vis ici depuis quelques années et...et j'avais jamais vu un endroit pareil ! »

Achille se rapprocha d'Elvio, un sourire enjoué au visage, ses prunelles brillantes. Le cœur d'Elvio ne manqua pas de louper un ou deux battements.

« J'ai encore tellement de chose à te faire découvrir. »

Elvio, embarrassé, roula des yeux, n'arrivant pas à se retenir de sourire et repoussa l'autre jeune homme d'un faux coup à l'épaule. Achille l'entraina dans l'eau tandis qu'Elvio se débattait. Il n'aimait pas plonger d'un coup, il faisait parti de ceux qui se mouillait d'abord les pieds, puis la nuque afin de s'accommoder doucement à la température. Achille était du genre à foncer, se jeter dans l'eau glacée quitte à ce que sa respiration se trouve coupée pendant quelques instants et que son cœur ne batte trop vite.

Ils se débattaient l'un contre l'autre en riant à gorges déployées. C'était bizarre, de partager des moments aussi complices avec un inconnu. De toutes évidences, Elvio avait le plus de forces, le plus de muscles ; rien qu'aux bras. Il attrapa Achille par les hanches et le balança dans leur petite piscine privée et naturelle. Achille, certes peu sportif, était un rusé. Dans sa chute, il entraina Elvio avec lui et les deux garçons coulèrent, la tête sous l'eau, agitants mains et pieds pour regagner au plus vite la surface.

Achille s'agrippait à Elvio tout en toussant pour recracher l'eau qu'il avait ingurgiter durant le débat. Elvio tenta de lui remettre la tête sous l'eau ma sa proie réussie à l'esquiver et lui grimer sur le dos.

« Tu sais que t'as loupé ton bus de cinq heures et demie ? »

Un petit sourire, qui signifiait beaucoup de satisfaction, se dessina sur le beau visage bronzé d'Elvio. Il tenait les jambes d'Achille, qui lui avait grimpé sur le dos, pour qu'il ne glisse pas. Achille s'affaissa sur son aimable serviteur, reposa sa tête sur l'arrière du crâne d'Elvio, une sensation de nœud au ventre, de feu d'artifice un peu partout dans le corps le secoua. Il trembla un peu, peut-être qu'Elvio aussi. Pas de froid. L'eau n'était pas si froide.

« C'est pas grave, il y en a plein d'autres des bus. »

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A bientôt pour la suite !

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