Chapitre 68


- Nous avons de la visite.

Les deux wagens, intrigués et choqués par les dernières nouvelles, accoururent dans le salon pour faire face à deux femmes. Cassiopée pensait ne jamais les revoir mais rien ne pouvait tromper la couleur du carré de la première et le voile rose pastel de la seconde :

- Qu'est-ce que vous faites là ? aboya Cassiopée

Laurine et Adastrée se retournèrent vers elle mais avant même qu'elles n'aient pu dire quoique ce soit, Cassiopée fonça vers elles :

- Dégagez.

Alex la retint par le bras, évitant ainsi une probable catastrophe.

- Laisse les parler d'abord.

- Ben oui, toi ça t'arrange, comme ça, tu pourras dormir avec les deux après ! Elles pourront te réconforter après tout ce qu'on a découvert.

- Arrête.

- Et puis d'abord comment vous avez fait pour nous trouver ? C'est l'EGN c'est ça ?

- Cassiopée.

- Tais-toi O'Connor !

- Non, toi, tu te calmes ! Tu les laisses parler.

- Que je me calme ? Comment veux-tu que je me calme alors qu'elles sont là ? Ce sont nos ennemies au cas où tu l'aurais oublié. Elles appartiennent à l'EGN !

- À ce que je saches ta mère et mon père aussi alors-

- Attendez quoi ? coupa Taylor.

Tellement elle était énervée qu'elle en eût oublié la présence de son frère, qui lui n'en savait rien des dernières découvertes.

- Nous avons trouvé un livre, un journal intime de maman où elle explique avoir travaillé avec James O'Connor pour l'EGN.

- C'est d'ailleurs en rapport avec l'EGN que nous sommes là, intervint Laurine.

Malgré le regard noir que Cassiopée lui jetait, Laurine poursuivit.

- Après vous avoir vu à l'école Haile, je ne pouvais pas rester ainsi-

- Après avoir embrassé O'connor, tu veux dire.

- Cassiopée arrête ! Ta jalousie ne mène à rien, en plus tu n'as pas de quoi être jalouse, t'es juste chiante.

- Mais je ne suis pas jalouse ! C'est toi qui te crois unique. Alors oui tu l'es peut-être génétiquement parlant mais tu n'es en réalité qu'un petit con à l'ego surdimensionné, qui croit que le monde est à ses pieds ! Tu te crois tout permis, à faire saboter une mission pour lui bouffer la langue tranquillement, à m'insulter et revenir comme une fleur. C'est toi, qui n'acceptes pas qu'on puisse apprécier d'autres personnes que toi. Et je te connais maintenant, t'es content qu'elles soient toutes les deux, là, parce qu'elles sont de ton fan-club. Elles vont tomber dans tes bras et sur gonfler ton ego de petit insolent tout en te consolant toute la nuit.

Elle était énervée mais quand elle vit le regard sombre d'O'Connor, elle comprit que lui aussi.

- Tu mélanges tout, tu ne discernes plus rien ma pauvre, tout ça parce que ta jalousie excessive t'aveugle. Tu ne vois pas que le problème c'est toi ? Nous avions une vie équilibrée, tous, et toi tu débarques comme un pissenlit pour tout gâcher. J'aurais préféré que tu naisses morte-née et difforme comme les autres, parce que tout ça, tout ce qui nous arrive, c'est à cause de toi.

- À cause de moi ? Répéta-t-elle ahurie. Aux dernières nouvelles, c'est ton taré de père qui a engendré tout ça, et tu es comme lui, égoïste, guidé par tes désirs et tu t'en fous du reste, tu t'en fous des autres et des répercussions que cela peut avoir. Alors s'il y a une personne qui ne mérite pas de vivre c'est toi et ton père.

- Bon je pense que ça suffit les menaces de mort, tenta Robert. Et puis techniquement ça fait deux personnes...

- Tu ferais mieux de rester en dehors de ça, chuchota Taylor. J'ai l'impression qu'on en apprend plus qu'on ne le devrait.

Cassiopée ne prit même pas la peine de répondre à ses amis. Elle était plus que remontée par O'Connor qui voulait lui faire porter le chapeau. Elle avait tellement de choses à dire :

- Je ne vois même pas pourquoi on parle pour savoir à qui la faute. Le problème actuel, c'est que ces deux là se sont ramenées chez ma mère, chez moi, comme si de rien n'était. Tu crois que c'est anodin ? Alors dans ce cas, c'est toi qui es aveugle. Ta Laurine là, elle te fait croire que c'est pour tes beaux yeux, pour ta soi-disant belle personne mais non. Elle fait partie de l'EGN je te rappelle, ces sans-cœur aux idées extrémistes. Tu vois, une fois de plus, ton égoïsme et ta vision des choses vont te perdre. Non...cela va nous perdre, O'Connor.

- On devrait aller se mettre à l'abri au cas où ça dégénère...mumura Robert.

- Ta logique, Wilson, va te perdre! cria O'Connor ignorant les autres. Tu fais toute une histoire pour un simple baiser, qui, tu le sais n'était pas pour mon bon plaisir. Tu es jalouse à en mourir, parce que tu m'aimes et que ça te tue de l'admettre. Tu ne veux pas l'avouer parce que tu penses te rabaisser aux filles de mon fan club ou à je ne sais qui, mais en réalité tu as, comme toutes les filles, succombé à mon charme.

Elle était hors d'elle. Intérieurement elle bouillait, mais elle n'arrivait pas à bouger, restant ainsi statique devant la réincarnation de Narcisse.

- Mais c'est pas possible ! hurla-t-elle. Arrête de te croire si-

- Je ne peux pas lire dans tes pensées, la coupa-t-il, mais je sais qu'à chaque fois que je m'approche de toi, ton cœur palpite, qu'à chaque fois que je te parle, tu penses à mes yeux qui regardent les tiens et qu'à chaque fois que nos corps se touchent, tu frémis. Et comment je le sais ? Parce que c'est ce que ça me fait. Tu veux faire ta fille solide et indépendante, mais au fond, tu es accro. À moi. Alors garde tout l'amour que tu me portes un moment, parce que là tu vois ce n'est pas le moment d'être jalouse, pas après ce qu'on a découvert et ce que Laurine et Adastrée vont nous dire.

Si elle le pouvait, elle lui aurait fait vivre des peurs, ses plus grandes, pour le faire taire, peut-être à jamais. La colère montait en elle face à ce ramassis de paroles égocentriques, de mensonges qu'il venait de lui jeter à la figure, et devant tout le monde, juste pour la rendre faible. Mais elle ne l'était pas, elle n'était rien de tout ce qu'il venait de dire.

Cassiopée inspira lentement, pour refréner une envie de le frapper de toutes ses forces, peut-être qu'il n'y avait que de cette façon qu'il pouvait comprendre, mais avant elle choisit les mots pour une nouvelle défense :

- Saches O'Connor, que je ne t'aime pas, cesse donc de rêver, je-

- Tu penses que tu ne m'aimes pas. Mais au fond, tu l'es !

O'Connor aussi semblait hors de lui, ne cessant de l'interrompre :

- Pour l'instant, tu ne veux pas te l'avouer alors dans ce cas admets au moins que tu as besoin de moi et ça sera déjà un bon début ! Je ne suis pas un prince charmant, je ne suis pas ton mec idéal, je ne suis même pas gentil tu vois, et pourtant je suis ce dont tu as besoin, insista-t-il. Et pour l'instant cela me suffit pour savoir qu'un jour ou l'autre, tu te rendras compte que je suis celui qu'il te faut.

Tout ça c'en était trop : les derniers évènements, les dernières révélations, l'arrivée des deux personnes qui la répugnaient le plus au monde. Et maintenant il fallait que lui vienne en rajouter une couche avec toutes ces paroles en l'air, juste pour la faire sortir de ses gonds, la provoquer au mauvais moment. Elle en était lasse. Ce soir, après les récentes découvertes, elle n'avait plus la hargne qui l'habitait quotidiennement pour se disputer avec lui. Un silence de gêne pesa un long moment avant qu'O'Connor ne soupire. Il souffla en fermant les yeux comme s'il était à cran et qu'il essayait d'y remédier.

- J'ai une famille influente et riche, des dizaines de filles sont à mes pieds comme tu le dis, elles m'appellent même le Prince ! Ma faculté est l'une des plus puissantes et utile sur Terre. Tout ça renforce mon appartenance à une certaine élite et cela gonfle mon estime et mon ego comme tu aimes tant le dire. Peut-être que tu réaliseras tout ça un jour, que tu réaliseras qu'il y a des raisons pour lesquelles je suis ce que je suis. Mais en attendant ce jour, ce que j'aimerais que tu comprennes, c'est que quand tout ça disparaît, quand tu penses n'avoir plus aucun repère de ta vie équilibrée, toi, tu...

Il se grattait la tête en levant les yeux au plafond, incertain de ce qu'il essayait de formuler.

- Durant toute une vie, tu ne cesses de rencontrer des gens. Il y a des gens adorables comme ton frère et il y a des gens chiants comme moi. Il y a des gens à qui tu n'adresseras qu'un sourire et des gens importants au premier regard. Une personne avec qui la complétude arrive comme un tsunami, une connexion comme l'impression de se connaître depuis toujours. Et malgré tout, tu ne veux pas l'admettre parce que c'est trop beau pour être vrai, comme si on se jouait de toi. Et qu'est-ce qu'on fait dans ce cas-là ? Tu joues aussi, tu bluffes en permanence. Et c'est ce que j'ai fait avec toi plus qu'avec les autres : des jeux de séduction et de taquineries sans fin, jusqu'à te pousser à bout, tester tes limites, savoir si toi aussi tu bluffais. Je suis devenu accro à ces jeux. Mais avec toi, je ne veux plus jouer de cette façon. Ramasse tous les jetons, tu as gagné la partie. Et depuis longtemps. Parce que moi, j'ai accepté le fait que t'aimer m'est irrépressible quand te détester m'est impossible.

Comment faisait-il pour lui faire changer d'émotions aussi rapidement ? Elle voulait lui en vouloir, être encore colérique mais bizarrement ses dernières paroles lui avaient touchées en plein cœur. Pourquoi ? Elle n'en était pas sûre.

Il passait inlassablement sa main sur son front, mal à l'aise, peut-être était-ce aussi parce que Cassiopée ne disait rien, ne sachant quoi ressentir, comment réagir et quoi dire. Elle avait l'air bien débile comme ça, tel un poisson hors de l'eau, les yeux ricochant sur tout ce qui l'entourait à la recherche d'une échappatoire ou d'une réaction de ses amis à copier. Alex aussi de son côté avait une mimique qu'elle ne lui avait jamais vue, celle qu'on aborde quand on est gêné par ce qu'on vient de dire, quand on n'est pas sûr d'avoir dit ce qu'il fallait.

Ne sachant quoi répondre, elle se demanda soudainement comment ils en étaient arrivés là. À cette...confession, à cette dispute mais aussi à leur relation conflictuelle, à ces révélations, ce nouveau monde. À cet instant, Cassiopée revoyait les dernières semaines de sa vie, se demandant sans cesse comment elle en était arrivée ainsi, elle, simple étudiante venue passer des vacances. Le silence était insoutenable, pour tout le monde, même leurs amis qui restaient ébahis par le monologue du blondinet.

- Bref. Voilà pourquoi je ne dis pas toujours ce que je pense.

Il se racla la gorge, les joues rosies par la honte qu'elle venait de lui faire vivre et se tourna vers les deux nouvelles arrivées.

- Du coup, après ce vent monumental, je suis complètement à vous deux mesdemoiselles, sourit Alex.

Laurine avait les larmes aux yeux par cette déclaration mais se reprit aussitôt :

- Je disais que-

- Certainement pas, l'interrompit Cassiopée.

Il eut à peine le temps de la regarder que déjà Cassiopée se jetait sur ses lèvres. C'était différent et similaire à la fois de son premier baiser avec Alex. Elle n'était pas enivrée par la boisson et pourtant elle l'était par ce contact, ce baiser qui la faisait frémir. C'était un délicat baiser et pourtant un torrent de sentiments se déversait en elle, une tempête se déchaînait au plus profond de son être. Quand ils s'embrassaient, elle connaissait un bonheur délicieux, une extase sans pareille. Il lui avait dit toutes ces choses auxquelles elle n'avait su répondre.

Mais au final, ce contact brûlant, ce baiser ardent et rempli de douceur, c'était son aveu à elle, la confirmation qu'il attendait, la réalisation de ce qu'elle n'osait lui dire. L'embrasser ainsi, prendre autant de plaisir c'était sa façon à elle d'écrire à l'encre indélébile « tu es peut-être chiant mais je t'apprécie quand même ».

Elle se détacha à contre cœur, tout doucement et leva les yeux avec une lenteur extrême, de peur de voir ce qu'elle y trouverait. Ses yeux si particuliers, dont l'origine avait été élucidée, la regardaient simplement. Mais plus elle le fixait plus une certaine malice y apparaissait. Pas de taquinerie ou de regard moqueur, non, il semblait...content.

- Voilà ça commence par un baiser, ça finit par un bébé.

- Robert !

La remarque de son ami et la voix de son ancienne coloc la ramenèrent sur Terre et Cassiopée se sépara promptement de son wagen. Elle était gênée, ne sachant où se mettre.

- Bien, euh... maintenant que ma sœur s'est calmée, peut-être que vous pourriez nous expliquer ce que vous faites là, chez ma mère, pourquoi vous débarquez toutes les deux maintenant ? Ou commencer par vos révélations, Cassie et Alex, avec le journal ?

- Taylor, pouffa Zekaryah. De ce que j'ai compris, un tournant vient d'avoir lieu. Ils sont encore en plein ascenseur émotionnel et, toi, tu crois vraiment qu'ils vont discuter comme si de rien était ?

Chacun rigola timidement face à sa remarque.

- Dans ce cas, laissez-nous vous expliquer pourquoi nous sommes là, proposa Adastrée.


•~•~•~•~•~•~•~•~•~•~•

...

Par quoi on commence ?

Il y a un chapitre qui n'était pas prévu dans cette histoire, un chapitre que j'ai écrit plusieurs fois et c'est celui-ci. Dans mon histoire originale, ils n'étaient pas censé être ensemble, s'aimer, enfin, dites-le comme vous voulez, et puis, vous avez débarqué, montrant un engouement particulier pour ce duo....et le voici qui a changé de statut. Il n'était pas censé y avoir de déclaration, de vrai baiser. Mais c'est fou l'influence qu'ont les lecteurs sur une histoire !

Plusieurs fois on m'a demandé quel a été le passage le plus dur à écrire. Je parle souvent du 33, celui de sa Révélation, et de la scène finale (j'en suis pour l'instant à ma 17e réécriture). Mais ça c'était avant de le publier sur Wattpad. Maintenant, je réalise que celui-ci, le 68, celui qui n'était pas prévu, figure dans le top 3 des plus durs à écrire.

Pourquoi ? Parce que justement il n'était pas prévu, et pour une bonne raison, les scènes d'amour, c'est pas mon truc, j'aime pas les lire, je trouve ça niais et culcul la praline, j'aime pas les écrire, je sais même pas comment les écrire ! Mais voici mon premier jet (ou plutôt mon énième essai sur le même chapitre ^^').

Deuxième raison : vous. Vous, lecteurs, vous attendiez une scène de ce genre et la pression était assez... présente 😅. Je devais donc créer une scène plausible qui colle aux personnages. Cela signifiait que Cassiopée ne devait pas tomber dans les bras d'Alex, tout de suite après, en mode "oh je t'aime, tu es toute ma vie blablabla". Non, il fallait qu'elle garde son côté décalé. Pareil pour Alex, je ne voulais pas qu'il se transforme soudainement en canard, qu'il devienne une guimauve qui a changé de comportement pour sa belle. Il devait faire une déclaration en restant fidèle à lui-même. Et tout ça, ça a été extrêmement dur. Plus que vous ne pouvez le penser.

A cela s'ajoutait le "right moment", quand placer cette scène ? Quand plus rien n'allait, quand ils n'ont presque plus de repère, comme le dit Alex, et malgré tout, ce fut difficile de l'incorporer pour la rendre crédible.

Alors, j'espère avoir été à la hauteur de vos attentes, pour tous les aspects cités juste avant et que d'avoir attendu autant en valait la peine. J'espère que ce baiser s'insère bien dans le fil de l'histoire, correspond aux personnages, qu'il est plausible et surtout qu'il vous a plu.

Enfin, pour retourner à nos brebis (depuis le temps vous avez peut-être compris que j'aime bien changer les expressions ^^), est-ce que vous vous attendiez à Laurine ET Adastrée ? Que pensez-vous qu'elles sont venues faire ?

On se dit à lundi ?

🧜🏼‍♀️♥️

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