Chapitre 12


Une fois à l'intérieur, Valentin s'assit derrière son bureau et incita les jeunes à faire de même sur le canapé. En face d'eux, se trouvait un duo atypique. La femme très grande se leva avec une telle grâce qu'on aurait crue qu'elle flottait. Ses longs cheveux rouges se confondaient avec sa robe de la même couleur qui enrobait ses formes à merveille. Le marron de ses yeux adoucissait son visage.

A ses côtés, se tenait un homme si musclé et trapu qu'on pourrait croire que ses muscles exploseraient à tout moment. Le mélange de cuir, de jean et de noir dans lequel il s'était habillé lui donnait un air de biker menaçant que confirmaient ses longs cheveux noirs et sa moustache. Ses yeux de la même couleur lui donnaient aussi un air dangereux mais sérieux.

— Professeurs, s'exclamèrent O'Connor et Taylor en chœur.

Les deux se levèrent pour embrasser le duo en rouge et noir.

— Ravie de vous revoir.

La voix de la femme en roue était aussi douce que sa robe en satin. Elle se plaça en face de Cassiopée, qui s'était levée mais restait pantoise face à la situation.

— Tu dois être Cassiopée, vous vous ressemblez tellement avec Taylor. Personne ne pourra nier que vous êtes jumeaux. Pardonne-moi, je ne me suis pas présentée. Je m'appelle Ervelyne Joro et voici Peeter Leeste, mon mari. Nous sommes professeurs à Senner.

— Enchantée, murmura Cassiopée comme intimidée par les deux figures.

— Bien, la journée va être longue alors commençons de suite, exposa Valentin Coden. La rentrée à lieu demain et il ne faut surtout pas que vous preniez du retard. À Senner, nous tenons à ce que les élèves poursuivent un cursus scolaire terrestre mais apprennent aussi à maîtriser leurs facultés. C'est pourquoi, notre école fonctionne sur le même modèle que les lycées anglophones : il s'agit de cours à la carte. Vous choisissez la matière ainsi que le niveau.

Il marqua une pause pendant laquelle il s'assit aux côtés des deux professeurs.

— Le matin vous avez quatre heures de cours normaux, dira-t-on. Il s'agit des matières que vous connaissez déjà : mathématiques, histoire, langues et autres. L'après-midi est consacré à l'apprentissage niléen. Deux heures d'entraînements et des cours optionnel. Le mercredi après-midi est libre pour que vous puissiez vaquer à vos occupations, principalement liées aux devoirs. Le rythme est intense ici et le niveau exigeant, c'est pourquoi nous sommes l'une des meilleures écoles.

Le directeur se dirigea vers son bureau pour y prendre des feuilles. Il lui en tendit deux.

— Voici la liste des cours terrestres et des options niléennes. Il vous faut donc choisir quatre cours et vous avez jusqu'à trois options possibles.

Cassiopée détailla le tableau d'une longueur vertigineuse sur la première feuille et la plus petite liste sur la deuxième.

— Il faudra me donner votre choix avant le dîner. En ce qui concerne les entraînements, puisque votre don ne s'est pas encore manifesté vous passerez l'après-midi avec Peeter pour tenter de le stimuler. Il assurera votre sécurité également. Dès qu'on découvrira votre faculté, vous intégrerez les entraînements.

La jeune fille opina du chef, pressée de savoir ce qu'elle avait de spécial.

— Sachez qu'il existe deux sortes d'entraînements. Ceux avec des nilées aux facultés similaires à la vôtre et ceux avec un groupe d'étudiants aux pouvoirs totalement éloignés. Vous apprendrez des autres dans les deux cas, la rassura-t-il. Est-ce que ça va pour l'instant ?

— Oui, mais comment est-ce qu'on...stimule mon don ?

— On verra ça cet après-midi ensemble.

La voix grave du biker Peeter était en harmonie avec son look. De ses yeux bleus perçants, Valentin fixa Cassiopée pour lui expliquer les règles :

— La Révélation se déroule dans des salles spécifiques au sous-sol. Chaque professeur en charge de la Révélation se doit d'assurer ta protection et éviter tout débordement. Peeter sera donc ton référent et si jamais tu penses qu'il va trop loin, tu dois le lui signaler. C'est compris ?

Sans trop vraiment comprendre dans quoi elle s'engageait, elle répondit par la positive.

— Et tu passeras la matinée avec moi.

Le sourire chaleureux d'Ervelyne la rassurait.

— Avec les garçons, reprit-elle, nous allons t'en apprendre un peu plus sur le monde niléen car tu dois être perdue.

Avant même qu'elle ne puisse répondre, Valentin reprit la parole :

— Bien dans ce cas, on se revoit ce soir dans mon bureau, Cassiopée.

Les trois jeunes sortirent du bureau en compagnie d'Ervelyne tandis que Peeter ne bougea pas d'un poil. Ils prirent la direction du premier étage, où les salles de classe s'enchaînaient avant de rentrer dans l'une d'elle. La pièce était sobre, avec plusieurs tables en bois massif, le mur d'en face dévoilait un bureau imposant et un tableau. La femme de rouge vêtu les invita à s'asseoir. Cassiopée obéit et les deux garçons se placèrent à ses côtés. O'Connor s'était installé nonchalamment avec les bras croisées e l'air renfrogné tandis que Taylor en élève modèle, se tenait droit, les mains sur le bureau. En remarquant leur posture, Ervelyne ne put s'empêcher de souligner :

— Vous avez beau ne vous être jamais côtoyé auparavant, vous vous ressemblez bien plus que vous ne le pensez. Bien ! Il te faut un minimum de base sur notre monde.

C'est ainsi qu'Ervelyne lui expliqua que les facultés sont le fruit de mutations génétiques qui se réalisent depuis des millénaires. Une infime partie du cerveau est utilisée par le commun des mortels mais une simple modification au niveau des gènes fait que certains voient d'autres facultés s'accroître ou se développer. Ils apparaissent lorsque la personne est à bout d'une émotion, souvent le stress, la peur, la colère mais aussi la joie et l'excitation. Il existe des milliers de nilées avec une école et un gouvernement sur chaque continent et plusieurs raisons justifient le fait que les terrestres n'ont pas connaissance de l'existence des nilées :

— Comme n'importe quel être vivant, les terrestres ont peur de ce qu'ils ne peuvent pas comprendre. On a peur de la mort car on ne sait pas ce qu'il y a après, il en va de même avec nous. Certains peuvent nous considérer comme des extra-terrestres, des dénaturés ou des fous. C'est pourquoi avant de se dévoiler au monde entier, il faut comprendre ce gène, comment il se développe. Il y a ainsi un laboratoire en Afrique dédié à cette recherche.

— Il existe donc des métiers spécialement pour les nilées ? demanda Cassiopée

— Oui. Tu peux en trouver dans le gouvernement, l'éducation, la recherche. Certains font du bénévolat en secret en se prenant pour des justiciers ou des messies mais la plupart se cachent parmi les terrestres et mènent une vie normale.

Cassiopée trouvait cela très intéressant, Ervelyne avait répondu à presque toutes ces questions sur les nilées, mais une seule part d'ombre persistait.

— Je sais que cela n'a rien à voir, commença la jeune fille, mais je ne sais pas grand chose de mes...ravisseurs. Ceux qui sont à ma poursuite et qui font que j'ai été protégée et surveillée. Pourquoi me voulaient-ils ?

Une tension immergea dans la salle, Cassiopée pouvait le sentir. Elle vit les trois nilées se regarder à tour de rôle tandis qu'O'Connor se redressait sur sa chaise. Un long silence s'ensuivit et rapidement Cassiopée comprit qu'elle était témoin d'un échange silencieux entre les trois. Elle décida d'intervenir :

— J'en ai marre des mensonges, alors autant tout me dire, je suis prête à l'entendre.

Ervelyne capitula :

— Ils vous veulent, toi et Taylor. Il s'agit d'une organisation mondiale qui traque tous les jumeaux niléens existant sur Terre.

— Mais pourquoi ?

— Une...prophétie raconte que quatre individus pourront déterminer l'avenir du monde. Ils pourront soit offrir des facultés à tous les terrestres soit éliminer ceux sans facultés. C'est un vieux mythe mais qui persiste tant l'étendu des conséquences est grave. Depuis, des personnes font une chasse aux jumeaux niléens, ce qui explique que la majorité des jumeaux sont séparés à la naissance. Il y en a qui se retrouvent plusieurs années après, comme Taylor et toi, tout en gardant le secret de leur gémellité tandis que d'autres n'ont jamais vent de leur double.

— Pendant un temps, il y avait une pratique très courante qui existe encore aujourd'hui.

Fascinée par cette légende, Cassiopée en avait presque oublié le blondinet à sa droite qui venait d'intervenir. Elle attendait qu'il poursuive mais il semblait réfléchir, à moins qu'il ne le fasse exprès, ce qui ne l'étonnerait pas. Enfin, il développa ce qu'il avait commencé :

— Pour ne pas que l'organisation retrouve les jumeaux, les parents prenaient la décision de tuer l'un des deux. De cette manière, leur descendance ne pourrait jamais être kidnappée et leurs enfants ne seraient jamais les jumeaux prophétiques.

— C'est horrible !

— Horrible mais les gens sont prêts à tout pour sauver leur progéniture. Estime-toi heureuse que tes parents vous ai séparé au lieu de t'avoir étouffé à la naissance.

Encore sous le choc de ce procédé, Cassiopée mit un certain temps à passer outre. Elle imaginait toutes ces familles qui avaient dû recourir au meurtre pour ne pas que leurs enfants soient attrapés par ces horribles malfaiteurs. Sans trop savoir pourquoi, elle fixait Taylor, peut-être se demandait-elle ce que la vie lui aurait réservé s'il n'avait jamais existé ? Aurait-elle été plus heureuse ? Triste à jamais ? Finalement, elle relativisait le fait qu'ils se soient connus, dix-sept ans après leur naissance. Puis, soudainement, Cassiopée percuta :

— Vous avez parlé de quatre individus, il s'agit donc de deux paires de jumeaux ?

La tension était à nouveau palpable bien que d'un nouveau genre. O'Connor se passait la main dans les cheveux, fixant la professeure, elle-même raidie par le stress, alors que son frère respirait longuement.

— En fait, commença-t-il, il s'agit de deux jumeaux et de leurs wagens, ce qui est extrêmement rare.

— Leur quoi ?

Cette fois-ci ce fut O'Connor qui lui répondit mais avec une voix qui se voulait neutre même si elle perçut les fissures dans sa voix.

— Des Wagens. Des Genetical Warriors.

Elle le fixait, gourmande d'en apprendre plus. Il paraissait hésiter, regardant Taylor et Ervelyne avant de visser ses yeux particuliers sur ceux de Cassiopée. O'Connor essayait de prendre cet air inflexible qu'elle connaissait mais il était visible que le jeune homme était perturbé. Avec une voix peu assurée qui tentait de l'être, il reprit :

— C'est une réalité qui, chez la plupart des terrestres, est un mythe. Elle possède plusieurs noms, plusieurs histoires mais chez nous, elle est réelle. Chacun possède un ADN très particulier, encore plus lorsque l'on est nilée. Et il existe des gens pour qui cet ADN s'emboîte parfaitement avec celui d'un autre.

En même temps qu'il expliquait, il joignit ces deux poings pour que ses articulations métacarpo-phalangiennes s'emboîtent.

— C'est comme si tu prenais une feuille que tu déchirais en deux et que tu prenais une moitié. Alors il n'y a qu'un seul morceau qui correspond à cette moitié. Certains parlent de fil rouge, d'âme sœur, de toska, comme tu veux mais chez nous ce sont des wagens.

— Donc, reprit Cassiopée, les wagens sont des âmes-sœurs complètes, jusque dans leur ADN ?

En temps normal, il lui aurait balancé une pique sur le fait qu'elle répète, mais l'instant n'avait rien d'habituel. O'Connor se contenta de hocher de la tête avec de compléter :

— Exactement. L'une de leur particularité, c'est que comme leur ADN, leurs facultés s'opposent ou se complètent.

— Alors chacun possède un wagen ?

— Non.

Ervelyne avait pris le relai.

— C'est très complexe la notion de wagen. Les historiens expliquent qu'à l'origine, il existait sept duos de wagens, donc quatorze personnes. Quand un duo meurt, un autre né et n'est que la réincarnation de ce dernier.

— Il y a donc toujours sept couples de wagens sur Terre.

— Eh bien non car les wagens ne meurent pas en même temps. Cela veut dire que les septs ne vivent pas forcément en même temps ni à la même époque. Ils se réincarnent, c'est tout.

— Et si l'un du duo meurt ? s'inquiéta Cassiopée.

— Alors, l'autre moitié devient comme vide, confessa Ervelyne. Elle continue de vivre mais elle n'est plus pareille. La mort d'une moitié de wagen enclenche la réincarnation des deux wagens, puisque l'autre est considérée comme morte également.

La jeune fille ferma les yeux comme si cela allait lui permettre de mieux comprendre les wagens.

— Peut-être devrions nous en reparler une autre fois ? proposa O'Connor.

Ervelyne approuva avant de la rassurer :

— Sache que Taylor et toi, vous êtes en sécurité ici mais si vous venez à vous déplacer dans le monde terrestre, il vaut mieux ne pas révéler l'existence de ton frère et éviter d'être vu ensemble.

Cassiopée hocha en signe d'approbation. Elle était également d'accord sur le fait que tout ça était trop d'informations importantes à retenir.

— Si ça ne vous dérange pas Ervelyne, je pense que l'on va aller prendre l'air, déclara Taylor.

— Bien sûr, je comprends. Si tu as la moindre question, je suis là Cassiopée. Toutes les deux, nous avons plus en commun que tu ne le penses...

Son ton doux comme du velours la rassurait. Cassiopée lui sourit et se dirigea vers la sortie en compagnie des deux garçons. Au dernier moment, elle se retourna pour faire face à la professeure :

— Par curiosité, Ervelyne...

— Oui ? demanda la concernée.

— Quel est le vôtre ?


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J'espère que vous arrivez à suivre. C'est un chapitre compliqué, je l'avoue et j'ai fait de mon mieux pour vous expliquer tout ceci. Si ce n'est pas clair, n'hésitez pas à m'en faire part :) et ne vous en faites pas, le tout sera approfondi avec des exemples plus tard ;)

Statut : réécrit - en attente de correction

Ariel

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