Chapitre 32 ➳ Une vengeance sanguinaire

Je hurlais à m'en briser les cordes vocales, déversant toute ma peine. Mon cœur était déchiré, et ce n'était rien de le dire. Mon front était collé à celui de Jojen, ses cheveux blonds chatouillant mes lèvres. J'avais échoué. Misérablement. Je n'avais pas tenu ma promesse. Et je le regretterais toute ma vie.

Je sentis soudain quelqu'un me relever, m'arrachant à Jojen. Je lançais un regard noir à Meera, qui pleurais comme moi.

- On ne peut pas le laisser là ! protestai-je en tentant de repartir vers le corps du blond.

- Moi non plus je ne veux pas le laisser... Mais on n'a pas le temps pour ça ! Alors suis-moi !

J'hésitais mais elle ne me laissa pas prendre de décision, m'emportant derrière elle. Des rochers commençaient à tomber devant la grotte et je vis que trois de nos ennemis, ceux qui n'étaient pas morts, pointaient leurs doigts vers cet endroit. C'était eux qui faisaient ça. Meera et moi accélérions. Et, alors que la dernière pierre menaçait de tomber, nous entrâmes. La roche tomba derrière nous, bouchant l'accès et nous faisant nous retrouver dans un noir des plus total. Le seul bruit qui se faisait entendre était celui des sanglots de Meera. Bizarrement, mes larmes ne coulaient plus. C'était comme si un autre sentiment m'avait envahie. Et j'avais trouvé de quoi il s'agissait. La vengeance. J'avais envie de venger Jojen, c'était certain.

La douce fourrure de Mystic vint se presser contre ma main. Lui aussi semblait pleurer la mort de Jojen. Cora encore plus, à en juger par son attitude : la queue basse, traînant les pattes dans la poussière.

Je repensais à mon pouvoir et tendais la main. Une flamme ne tarda pas à danser à l'intérieur de celle-ci, éclairant la grotte d'une lueur étrange. Nous avancions, moi ouvrant la marche et Cora la fermant. Personne ne parlait en raison des derniers événements. Et heureusement d'ailleurs, car je n'étais pas d'humeur à parler.

Une bise glaciale fit soudain se soulever mes cheveux et je pressais le pas. La lumière du jour commençait à percer dans la grotte et je pus éteindre la flamme dans ma main.

Nous sortions à l'air libre, certes, mais le décor était différent de tous ceux que nous avions aperçus jusqu'à aujourd'hui. La neige couvrait toujours le sol, mais le ciel avait une teinte différente, plus rosée. Et au centre de cette toute petite clairière trônait un arbre. Ce n'était pas n'importe quel arbre. Un chêne, dont le tronc se tordait, et qui avait des feuilles rouges comme le sang. De plus, sa taille dépassait de loin celle de chênes normaux. Le vent soufflant sur ses feuilles me permettait d'entendre des murmures et en comprenant, mes yeux s'agrandirent de stupeur. J'avais devant moi l'Arbre Sacré.

Je m'avançais doucement jusqu'à lui, comme si j'avais peur qu'en faisant des gestes trop brusques il disparaisse. Il semblait m'inviter à aller vers lui. Je voyais même un sourire se dessiner sur son tronc mais il s'agissait sans doute de mon imagination. J'attendais ce jour depuis des décennies, alors il était normal que ma raison se perde un peu.

J'arrivais enfin à son pied, m'accroupissant, et posais une main hésitante sur son tronc. À peine l'avais-je posée que le vent se fit plus fort et que des visions m'apparurent. Le passé, le présent et même le futur s'offrirent à mon esprit, me faisant tituber sur mes genoux. C'était un tourment d'images nettes mais floues à la fois en raison de la vitesse à laquelle elles défilaient. Et lorsque tout se stoppa et que j'ouvris les yeux, la respiration haletante, je sus ce qu'il me restait à faire.

***

J'assommais le garde et tuais son camarade. Faisons d'une pierre deux coups, comme l'aurait dit Tyrion ! D'ailleurs, je l'avais prévenu, le mettant en sécurité. S'il lui arrivait quelque chose à lui aussi, je n'arriverais pas à me relever, c'était certain. J'avais déjà assez mal de mal comme ça à tenir sur mes jambes depuis que Jojen nous avait quittés. Cette unique pensée décupla ma force, rendant ma rage plus féroce encore.

Les gardes tombaient les uns après les autres, soit d'une flèche, soit d'un couteau, soit carbonisés. Ils n'avaient pas le temps de réagir qu'ils étaient déjà morts, et je commençais sérieusement à m'ennuyer. Mes loups s'en donnaient à cœur joie, leur sautant dessus avant de les déchiqueter en plusieurs morceaux.

Quelques mètres devant moi, de la lumière. Et derrière moi, des cris et des bruits métalliques. La garde approchait, menaçant de ruiner tous mes plans. Je sifflais afin d'appeler mes loups et avançais jusqu'à la salle éclairée.

Je pensais que cela serait facile, mais j'avais trop espéré. Car à peine rentrée dans la salle, je m'arrêtais, les yeux écarquillés. J'étais dans une impasse, ils m'avaient coincée... En effet, la moitié des gardes se trouvait en face de moi, me souriant narquoisement tandis que Cersei avait cet habituel sourire hautain suspendu aux lèvres. Je me crispais, faisant grincer mes dents. Qu'est-ce que je ne donnerais pas pour l'étriper !

Mystic et Cora s'arrêtèrent à mes côtés, surpris aussi. Les gardes approchaient par derrière à une vitesse hallucinante. J'étais bloquée. Car si je tentais de reculer, les gardes devant moi lanceraient les flèches qu'ils retenaient avec leurs arbalètes. J'abandonnais tout espoir, baissant les bras. C'est alors que je vis une forme noire bondir devant moi, faisant tomber les hommes qui me visaient avec leurs arbalètes, les désarmant un par un à une vitesse extrême. Cora, car c'était elle, tourna un regard victorieux vers moi. Et, rapide comme l'éclair, je décochais une flèche, qui vint se planter en plein dans le cœur de Cersei. J'avais déjà tué Tywin un peu plus tôt, il ne me restait qu'elle. Elle loucha sur sa poitrine avant de s'écrouler, non dans m'avoir avant adressé un dernier regard empli de haine.

C'est alors qu'un hurlement déchira l'air, me faisant reculer et hurler d'effroi à mon tour. Un garde venait de planter son couteau dans le cœur de Cora, qui gisait maintenant au sol. Mystic voulut accourir auprès d'elle, mais je le retins. C'était trop tard, je le savais pertinemment...

Alors j'entraînais le loup, qui tentait de se débattre, derrière moi, abandonnant celle qui m'avait accompagnée durant toutes ces années. Celle qui était le dernier souvenir qu'il me restait de Jojen.

Des gardes tentèrent de me poursuivre mais j'entendis leurs cris de douleur et je compris que Cora les retenait avec le peu de force qu'il lui restait. C'est ainsi que nous sortirent de la maison des Lannister, tels des meurtriers en cavale.

Mystic et moi courrions le plus vite possible, nous éloignant le plus de cette maison. Il en valait de notre survie. Mais j'étais fière. J'avais accompli mon devoir, j'avais réussi.

Soudain, des ombres se dressèrent devant nous, menaçante. Des gens sortirent de l'ombre, l'air grave. Ils étaient nombreux, je ne pouvais les compter. Mais une chose était sûre : nous étions une nouvelle fois encerclés.

Rapidement, je vis des gardes s'avancer, fondant la foule, qui restait étrangement silencieuse. Mystic montrait les crocs tandis que je me préparais à décocher des flèches, même si je savais que je ne ferais pas le poids face à tout ce monde. Il devait y avoir plus de la moitié de la ville réunie autour de nous. Même les gardes ne pipaient mots, seuls leurs chevaux se dandinaient d'un pied sur l'autre, comme mal à l'aise.

- Est-ce vrai ? demanda enfin un villageois.

- Je... Quoi ? demandais-je, perdue.

- Tes exploits. As-tu vraiment tué de Marcheurs Blancs et la famille Lannister ? me questionna un des gardes, me dominant de toute sa hauteur.

- Oui, répondis-je en prenant mon courage à deux mains, me tenant droitement.

- Qui es-tu ? Comment te croire ? demanda à nouveau le garde.

- Je suis Luna Muponesi Bumhi, celle qui sauvera le Nord.

Le garde tourna la tête et dévisagea ses camarades, qui hochèrent la tête. Je me retins de reculer, ne voulant pas leur montrer ma peur, même si je savais que la fin était proche.

Et, dans un commun accord, presque trop synchronisé, toutes les personnes réunies baissèrent la tête en s'inclinant aussi bas que possible.

- Luna Muponesi Bumhi, nous nous inclinons devant toi, récompensant ton courage. Nous te souhaitons un règne long et paisible et te promettons de te suivre dans tes futurs exploits, Luna, nouvelle reine des 7 couronnes et du trône de Fer !

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