14. This Feeling (c)
Nathan
C'est bien la première fois qu'un garçon m'embrasse et que je suis le mouvement avec autant de facilité. Je dois avouer aimer ça, même si c'est mal. Seulement, je n'ai jamais senti mon cœur battre aussi vite et ma peau vibrer aussi fort. Pas une seule fois, je n'ai ressenti cette bouffée d'air frais qui m'envahit lorsque les lèvres de Ashford bougent contre les miennes.
Le moment prend bientôt fin. C'est Ashford qui arrête tout mouvement, avant de relever ses yeux vers moi, avec crainte. Je fronce les sourcils, avant de revenir sur la terre ferme.
Nous venons à l'instant de nous embrasser, Ash et moi, comme deux personnes attirées l'une vers l'autre le feraient ou comme deux personnes amoureuses.
Tout d'un coup, les paroles de Matt, ce foutu pari, me reviennent en tête. Je dois avoir changé de couleur, parce que Ash prend de la distance, se mettant presque au bord de son lit. Je lis de la confusion dans son regard.
— Excuse-moi.
Ces mots finissent de briser le moment. Je prends réellement conscience de ce qui vient de se passer. Un frisson découle le long de ma colonne vertébrale. Je déteste cette sensation.
— Je comprendrais que tu veuilles que je te laisse tranquille dans ma chambre, pendant que je dors sur le canapé en bas.
— Non, reste.
Les mots sont sortis tous seuls. Je me sens légèrement rougir. Un détail important : je ne rougis jamais.
— Ta mère se rendrait compte d'un truc. Reste. On est pas des putains de débiles. On sait très bien faire la différence entre les vraies choses et celles qui ne valent rien.
Je l'ai dit, c'est bon. Pour nous deux, mettre ce baiser dans les choses qui ne valent rien, c'est comme une protection pour les jours à venir. Pour l'année à terminer.
Ash ne répond pas, mais il secoue la tête positivement.
— Bonne nuit.
Il me regarde pendant un petit moment, avant de se retourner. J'observe ses omoplates et son dos musclé tendre son haut.
— Bonne nuit.
Je ne peux pas bouger, ni me retourner et faire comme si rien de s'était passé. D'accord, je viens à l'instant de lui dire qu'on était adulte et qu'on pouvait faire la part des choses. Des vraies choses. Celles qui comptent. Mais tout compte fait ce sentiment qui m'inonde à cet instant même et sur lequel je ne peux pas mettre de mot, me démange.
Non, il me dévore.
J'entends les longues inspirations et expirations que prend Ashford. Est-ce que c'est pareil pour lui ? Est-ce qu'il ressent ce truc qui nous empêche tous les deux de respirer normalement ? J'aimerais l'atteindre, le toucher, pour une raison ou pour une autre, j'en sais rien. Malheureusement, je n'y arrive pas. Pourtant, ça serait si facile, il est si près. J'ai juste à tendre le bras et laisser mes doigts l'effleurer juste pendant un instant.
Mais en faisant une telle chose, j'ai l'impression que le geste est mal.
Depuis quand un garçon n'a plus le droit d'en toucher un autre ? Depuis quand la peur qui paralyse un être peut contrôler tout son corps ?
Je déteste ce qui se passe.
— Tu ne me déteste pas ?
Sa voix n'est qu'un murmure dans cette pénombre.
Est-ce que je le déteste ? Non. Et puis, pourquoi je le détesterai ? Parce qu'il m'a embrassé ? Nous sommes des adolescents et contrairement à mon père qui juge à tout va et qui n'aime presque personne à par lui-même, j'ai appris à avoir l'esprit ouvert. Je ne dis pas que quelques plaisanteries de mauvais goût ne peuvent pas franchir mes lèvres, non. Seulement, je n'ai rien contre ces gens qui aiment. Parce que c'est ce qu'ils font. Ils aiment c'est tout putain.
— Moi... je te détestais au début.
Je reste silencieux.
— Je t'ai vu arriver, décontracté et dans la tenue de ton choix. Tu paraissais sûr de toi et cool. Ton attitude mystérieuse et un brin audacieuse m'a fait peur en fait. Et puis je t'ai jalousé parce que tu pouvais être qui tu voulais.
Je fronce les sourcils, ne comprenant pas forcément tout ce qu'il est en train de me dire.
— Être qui je veux ?
Ashford se retourne vers moi, et cloue ses yeux aux miens. Lorsque je le regarde réellement, j'ai comme l'impression qu'il porte le monde entier sur ses épaules.
— Je suis riche, Nathan.
Je ris.
— Ouais, ça j'avais bien compris.
Il me sert un sourire embarrassé.
— Eh bien, mon père qui est responsable d'un grosse boîte sur l'automobile à New York, veut que je récupère la tête un jour avec mon frère Pierre, et c'est beaucoup de responsabilités. Par forcément celles dont j'avais rêvé.
Il prend une grande inspiration.
— Naître dans une famille riche n'a pas que des avantages. En fait, mon chemin est tout tracé. L'année prochaine j'irai faire mes études à Chicago et puis entre temps peut-être que mes parents m'auront trouvé une ravissante fiancée. Riche, elle aussi.
Je grimace.
— Je n'arrête pas de répéter à mon frère qu'il a eu de la chance d'épouser celle qu'il aime. Je sais que moi je n'aurais pas cette chance. En tout cas, j'espère que ma petite soeur n'aura pas à suivre nos pas. Je sens qu'elle sera malheureuse si c'est le cas, parce qu'elle est beaucoup trop artiste.
Au fur à mesure qu'il parle, qu'il m'explique, je commence à comprendre. Ses portes sur le futur sont fermées et ça fait mal.
— Tu es arrivé au lycée et je savais au fond que toi, tu n'avais pas ces problèmes.
Je fronce les sourcils, en lui envoyant un regard chargé de contradictions.
— Mais tu en as d'autres.
— Ouais, mon père est un problème. Un problème que j'ai depuis tout petit.
Sa main qui était posée sur le drap vient chercher la mienne sous la couverture, comme pour me réconforter.
— Je ne te déteste pas Ashford.
Il se mord la lèvre inférieure.
— Oui, mais... je t'ai...
Il déglutit. Les mots ne veulent pas sortir de sa bouche.
— Oui, tu m'as embrassé. Tu en avais envie je suppose et je ne t'ai pas repoussé. Donc on en fait pas toute une histoire.
Il secoue positivement la tête, comme un automate. Je l'observe s'humidifier les lèvres. Bizarrement, je ressens de l'excitation dans le bas ventre.
— Personne ne doit savoir.
Elle disparaît automatiquement lorsque ces mots franchissent le pas de ses — si belles — lèvres.
— Ouais, tu as raison.
Ses doigts se resserrent sur les miens. Ashford se rapproche enfin de moi, et c'est comme si j'avais moins de mal à respirer. Depuis tout à l'heure, j'ai la sensation de suffoquer. De garder continuellement la tête au-dessus de la surface, sans cesser de me débattre. Maintenant, l'eau m'arrive aux épaules au lieu de mon menton.
— Qu'est-ce que ça t'a fait ?
— Quoi ?
Ashford se rapproche encore.
— Les gens ont fait des paris sur l'aboutissement de notre relation. Je suis sûr qu'il y a plus de monde qui ont dit qu'on finirait par baiser toi et moi, que se foutre sur la gueule.
Je ris jaune.
— Alors, je te le demande sincèrement, qu'est-ce que tu as ressenti ?
J'ai du mal à saisir ce qu'il me demande sincèrement. Comme pour m'éclairer, les lèvres de Ashford effleurent les miennes.
— Tu veux dire, qu'est-ce que j'ai ressenti quand tu m'as embrassé ?
Ma voix est lourde. Ashford opine de la tête.
— Ash ?
— Ouais ?
Nos mains sont toujours jointes en dessous les couvertures. Son pouce caresse même ma peau dans une chaleur agréable.
— Je te fais confiance.
Un silence suit mes paroles. Il dure quelques minutes, avant que Ashford y mette fin.
— Moi aussi, je te fais confiance.
— J'espère seulement que lorsque tu m'as dit de faire gaffe à mon entourage, tu ne parlais pas de toi.
Il recule un peu comme si je l'avais frappé en pleine poitrine.
— Je sais comment ça se passe et je sais aussi que les gens sont très manipulateurs, mais j'ai confiance en toi. Ne me demande pas pourquoi.
— Alors, toi non plus.
Je secoue la tête.
— J'ai aimé.
Ses yeux s'écarquillent.
— J'ai aimé que tu m'embrasses, Ashford. Seulement je ne peux et je ne veux pas mettre de mots dessus.
Un sourire timide fleurit sur ses lèvres pleines.
— Je comprends. Moi aussi, j'ai aimé. Mais c'est pas parce que j'ai aimé t'embrasser et que je vais encore aimer, qu'on est gay, hein ? On peut aimer embrasser un garçon sans être homo ?
Ne sachant pas quoi répondre, je lance simplement :
— Non, on est pas gays, toi et moi.
Comme si c'était les bons mots, ceux qui libèrent une personne mal à l'aise ou bloquée sur un sujet, Ashford fond sur moi. Ses lèvres viennent se mêler aux miennes. Bientôt sa langue casse mes barrières et vient se frayer un chemin à l'intérieur de ma bouche pour venir caresser ma langue. C'est comme si tout explosait en moi. Mon coeur bat si fort que j'ai l'impression qu'il va sortir de ma poitrine.
La main de Ashford qui tenait la mienne sous la couverture, vient s'aventurer sur mon t-shirt, et effleure mes côtes. Par réflexe, je frissonne.
— Fais attention, je pourrai y prendre goût, je chuchote.
Ashford me sourit comme un enfant devant une grosse sucette. Ses pieds viennent toucher les miens sous la couverture puis vient le tour de nos jambes, qui s'accrochent. Légèrement perturbé par ce si grand rapprochement avec lui, je me place sur le dos, à regarder le plafond.
Quelques minutes après, Ash adopte la même posture que moi. Il croise ses bras derrière sa tête. Je n'avais pas remarqué jusqu'alors, mais des tonnes d'étoiles trônent sur son plafond, éclairant doucement la pièce.
— J'aime les étoiles.
Il soupire.
— En fait, je les adore.
Je souris simplement.
— Je suis surpris qu'aucun télescope ne se cache dans cette pièce. A moins que j'ai mal vu.
— Non, j'en ai pas.
Je reste silencieux, sentant qu'une suite de parole va arriver.
— Petit, j'ai dit à mon père que j'adorais les étoiles et il m'a dit qu'elles n'étaient que éphémères. Que ce n'étaient pas elles qui feraient mon futur. Ma mère, elle, s'en fichait. Heureusement, mon frère Pierre, était là. Il a entendu et un jour il est allé m'acheter avec son argent de poche, des tas d'étoiles qui faisaient veilleuses, à accrocher au plafond. J'étais tellement heureux.
Je reste là à observer ces jolies étoiles et je commence à comprendre pourquoi il les aime tant. Je trouve qu'elles sont rassurantes.
— Au moins, en dessous de ce ciel étoilé artificiel, je peux rêver et être qui je veux réellement.
— Et tu voudrais être qui réellement ?
— Je ne sais pas vraiment, mais une chose est sûre, je voudrais être plus libre de mes choix d'avenir.
Je le sens grimacer à côté de moi.
— Mais ça, ça sera toujours un rêve.
Transporté par l'émotion qui envahit la pièce, j'attrape une de ses mains, qu'il a fini par laisser choir près de son corps. Nous n'échangeons pas à un regard et le silence règne dans la pièce maintenant.
Mais de cette façon, en joignant nos mains ensemble, c'est comme une promesse. Une promesse qu'on se fait tous les deux. Celle de ne jamais abandonner et de ne jamais s'abandonner.
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Bonjour tout le monde ! Comment vous allez ?
J'espère que vous avez aimé ce chapitre ! J'attends vos retours et vos commentaires, avec impatience. Que pensez-vous de ce rapprochement intime entre nos deux protagonistes, Nathan et Ashford ? (Mes bébés...)
Rendez-vous au prochain chapitre !
Bises.
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