Chapitre 30 - Nous 1/2
Je dépassai l'endroit où les hommes dormaient, pris deux couloirs, et débouchai sur l'un contenant deux portes. Je toquai à la première et me permis d'entrer. Je ne pus m'empêcher d'éclater de rire :
« Ça va ? Bien installé ? »
Malaury leva les yeux au ciel depuis la bassine d'eau beaucoup trop étroite pour lui : il devait garder les jambes serrées contre son torse. Je m'avançai et refermai derrière moi. La cabine de mon second était plus petite que la mienne, constituée d'une commode en bois sombre, d'un hamac suspendu, et d'un coin où il entreposait ses armes. Un matelas avec un oreiller avait été rajouté, perpendiculaire à l'entrée.
« Merci pour mes affaires. Tu étais au courant que l'équipage m'avait préparé cette bassine ? Et cette couche ?
— Du tout. Au moins, tu pourras bien dormir, ce soir, souris-je en m'installant sur le matelas. »
Je ne pus m'empêcher de remarquer qu'il était assez large pour qu'on y tienne à deux...
« Et mon baiser ? quémanda-t-il, tête humide tournée vers moi.
— Finis de te laver et on en reparle.
— Charmant... je sens que je ne vais jamais l'avoir, soupira-t-il en commençant à se savonner.
— Sois patient... »
Il me lança un regard qui signifiait « comme si je n'avais pas déjà assez patienté ». Dix minutes plus tard, il s'entoura d'une grande serviette et sortit prudemment.
« Alors, mon...
— Je peux me laver aussi ? J'en ai besoin, soupirai-je en touchant mes cheveux gras. »
Il fit une révérence en présentant la bassine :
« Tout est à toi. »
Je délaissai mes vêtements et bandages et m'installai à mon tour. Je regardai derrière moi : mon second s'était tourné vers le mur. On s'était pourtant déjà vus – et même plus – nus...
« C'est bon, je suis dans la bassine. Je rentre totalement dedans, moi. »
Il éclata de rire en se tournant :
« Merci de me rappeler que je suis beaucoup trop grand. »
Je plongeai ma tête sous l'eau pour humidifier mes cheveux, puis me redressai.
« Tête de linotte, tu as oublié de récupérer de quoi bander tes plaies... je vais en chercher avec de quoi désinfecter. »
Heureusement qu'il était là. Ce dernier sortit et prit soin de fermer à clef derrière lui.
J'étendis mes jambes et mes bras dans l'eau fraîche. Malgré la température ambiante, j'étais dans un petit baume de bonheur, je me sentais détendue. Soulagée. Apaisée. Malaury était enfin de retour et je m'assurerais que nous ne soyons plus jamais séparés.
La porte s'ouvrit quelques instants plus tard. Malaury posa de quoi me soigner, puis s'installa sur le sol, près de moi. Il touchait délicatement mes cheveux, les yeux concentrés :
« C'est moi ou il y a moins de nœuds ?
— Mora est passée par là, ronchonnai-je. Elle a tenu à démêler mes cheveux un soir, c'était long... d'autant plus long que je ne le fais presque jamais, alors quelle torture... »
Il éclata de rire :
« En tout cas, ça te va bien. »
Il glissa un baiser sur ma joue, le regard tendre.
Des papillons.
« Tu veux que je le fasse plus souvent ?
— Tu fais comme tu veux. Tu sais que je t'aime même les jours où tu ne ressembles à rien ?
— Tu as déjà été plus fin dans tes compliments, gloussai-je.
— Tu m'as compris, sourit-il en m'enlaçant au niveau des épaules.
— Non, non, jouai-je.
— Je voulais dire que... »
Il se rapprocha de mon visage, collant son front contre le mien.
« Je suis tombé amoureux de qui tu es, pas d'à quoi tu ressembles. Bien sûr, quand tu fais attention à toi, tu es rayonnante, et je te trouve encore plus belle... mais c'est loin d'être le plus important, ma chérie.
— Tu sais comment me parler, soufflai-je, sur le point de l'embrasser. »
Je m'écartai à contrecœur de la chaleur de ses lèvres et Malaury fronça les sourcils :
« Et mon baiser, au juste ?
— Tu es bien impatient, souris-je. »
Je me doutais qu'il finirait par se jeter sur moi. Je n'en étais pas loin non plus. Il soupira, à la fois dépité et amusé, et se contenta de doucement embrasser mon épaule et mon cou, avec quelques caresses le long de ma nuque.
« Tu sais que je t'aime ? ronronnai-je.
— Je t'aime aussi. »
Il termina par un baiser sur ma joue, puis me laissa me nettoyer et me rincer. Je me nichai ensuite dans la serviette grande ouverte que Malaury tenait et je me fis enlacer, réchauffée par les mouvements de ses mains.
« Installe-toi, je m'occupe de tes blessures. »
Il désinfecta mes plaies une par une et les banda soigneusement, attentif à mes réactions, mais il avait été doux. Je me levai pour récupérer les vêtements de rechange que je laissais habituellement sur le sol, mais je m'arrêtai : je n'avais rien prévu. Je me tournai vers mon second :
« Tu as un truc à me prêter ? Je ne pensais pas me laver...
— Une chemise que porte actuellement un très grand homme conviendrait ? »
J'acquiesçai avec un sourire. J'enfilai le vêtement chaud qui portait déjà son odeur de mer. Cette chemise était plus longue encore que la première, elle descendait jusqu'à mes genoux. Malaury m'observait, les yeux curieux, un sourire naviguant sur des eaux calmes.
« Tu es belle, tu sais ?
— Je n'ai pas grand-chose sur la peau, surtout, m'esclaffai-je en m'asseyant à ses côtés. »
Il glissa un bras autour de ma taille pour m'attirer contre lui.
« Comme si j'étais d'humeur à m'amuser, ce soir... »
Il accompagna ces mots d'un bâillement.
« Je suis trop fatiguée aussi, acquiesçai-je en l'enlaçant. »
Il se tourna finalement vers moi et s'approcha de mon visage, déterminé à retrouver mes lèvres. Je me laissai tomber sur le matelas. Une lueur joueuse parcourut ses yeux. À califourchon sur mes cuisses, il m'avait attrapé les poignets avec douceur et les avait plaqués à côté de ma tête. Je lui intimai de s'avancer, le défiant du regard.
Il tenta vainement de m'embrasser, j'avais tourné la tête pour éviter sa bouche.
« Je vais finir par t'avoir ! »
Il gagnait du terrain sur ma joue.
« Parce que tu crois que je vais te laisser m'embrasser comme ça ?
— Si je t'embrasse, alors j'aurais eu mon baiser.
— Mais de toi, pas de moi...
— Mais... »
Il éclata de rire :
« C'est ridicule, cette logique... allez, embrasse-moi juste. »
Sa voix grave, tendre, ses doux baisers, son corps chaud contre le mien, tout le manque qui m'avait dévorée, avaient fini par avoir raison de moi. Je glissai délicatement mes doigts entre les siens, tournai mon visage et fermai l'œil en m'avançant vers lui. Nos lèvres se rencontrèrent dans la douceur et la chaleur.
J'attrapai sa tête, passant ma main dans ses cheveux, le retenant contre ma bouche en entrouvrant les lèvres pour laisser ma langue retrouver la sienne. Étalé contre moi, je retins un soupir lorsqu'il bougea ses hanches contre mon bassin dans un mouvement involontaire. Si j'avais dit être fatiguée, mon bas-ventre ne l'entendait plus de cette oreille.
Une jambe entourant ses hanches, je me pressais contre lui sans cesser de l'embrasser, embrasant mon entrejambe à chaque mouvement. Mon souffle accélérait tandis que mes mains s'abandonnaient à son dos et son torse musclé contre lequel j'étais enserrée.
« A-Attends... souffla Malaury en relâchant mes lèvres. Je... »
Il me fixa avec un peu de peine :
« Je n'ai pas très envie... »
Il écarquilla les yeux face à ma mine déçue que je n'étais pas parvenue pas à dissimuler :
« Enfin, si on continue, peut-être que... »
Je levai l'œil au ciel en posant mes mains sur ses joues :
« Non, non, non ! Idiot ! Je ne vais pas te forcer si tu n'as pas envie.
— Mais...
— Tu n'aimerais pas que je me force si tu en avais envie et pas moi, non ? Eh bien, moi non plus, je ne veux pas que tu te forces pour moi. On aura d'autres occasions. »
Son regard s'adoucit :
« Tu as raison. Je ne veux pas que tu te forces de quoi que ce soit avec moi, d'accord ? Tu es libre. Ne crois pas que tu es enchaînée à moi et mes envies parce que nous sommes ensemble. »
Le regard amoureux, je souris et acquiesçai. Malaury se laissa tomber à côté de moi et ouvrit ses bras. Je m'y nichai. La tête contre son torse qui se soulevait lentement, je me laissais enlacer, caressant sa peau chaude du bout des doigts.
« Je t'aime, Malo, murmurai-je avant de laisser un baiser au niveau de sa clavicule.
— Je t'aime aussi, ma Neven. Plus que tout. »
Il caressa longuement ma tête, glissant ses doigts entre mes cheveux, l'autre main me retenant contre lui, l'air apaisé et attendri. Je me détendais. Je l'avais enfin près de moi. Malaury se redressa, me reposant en douceur, et il tira une couverture de son hamac.
« Tu veux me retenir ici ?
— Je serais vraiment heureux si tu passais la nuit dans mes bras. Tu m'as manquée. Et puis, j'ai envie de me réveiller à tes côtés dans la tendresse, sans précipitation, pas comme la dernière fois... je veux que ça se passe bien.
— L'idée me tente bien, alors, souris-je. »
Il prit soin de remonter la couverture jusqu'à mon menton. J'éclatai de rire en remarquant que ses pieds en dépassaient :
« Tu es trop grand !
— Je sais, soupira-t-il avec un sourire amusé.
— Pourquoi tu ne me l'as pas dit ? J'aurais fait chercher des couvertures à ta taille, idiot. »
Je me redressai et m'avançai vers sa commode :
« C'est là-dedans, tes autres couvertures ? Que tu n'aies pas froid aux...
— Non, laisse-moi faire ! »
Il se leva et me rattrapa au niveau de la taille.
« Malo, soupirai-je en levant l'œil au ciel, c'est à deux pas, c'est bon. »
Il fronçait les sourcils, inquiet. Quelque chose n'allait pas. Méfiante, je murmurai :
« Qu'est-ce que tu me caches ? »
Silence.
« C'est grave ?
— Non, du tout... mais... c'est une sorte de surprise pour toi. »
Je me crispai encore plus :
« Une surprise ? Malo, tu m'inquiètes à ton visage, là. On dirait que c'est plus grave qu'une surprise. »
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