Dix secondes.
Dix misérables petites secondes avaient réussi à prendre ta vie. Tout avait si bien commencé pourtant. La journée venait de s'achever et le soleil qui se couchait faisait baigner les rues d'une lumière orangée, chaude. Les ombres des lampadaires qui bordaient ta rue étaient projetées contre les murs. Le crépuscule était ta partie préférée de la journée.

Était.
Elle l'était.

Tu étais montée dans la voiture de ton petit-ami. Il représente tout ton monde, n'est-ce-pas ?

Oui.

Vous aviez pris la route pour rentrer chez lui, il te faisait des blagues et tu riais.
Il t'a toujours fait rire.
Mais il allait trop vite. Tu t'en es rendue compte en voyant le paysage défiler sous tes yeux. Tu te souviens lui avoir hurlé dessus, avoir paniqué en voyant qu'il s'apprêtait à prendre un virage.

Et tu te souviens de lui, à la fois l'air détendu et le pied enfoncé sur le frein.

Puis tu ne te souviens plus.
Juste de lui.
Le réveil fût compliqué et vide. Où étais-tu au juste ? La brume était épaisse mais de toute évidence tu étais seule.
Pourquoi n'était-il pas avec toi ? Allait-il bien ? Et la voiture ? Où étaient tes blessures ?
Il ne restait qu'un vide immense et douloureux. Si tu souffrais, alors tu ne pouvais que être en vie, non ?

- Caleb ? Il n'y eut qu'un vague écho. Alors tu hurlas son prénom à t'en exploser les cordes vocales.

Personne.
C'était un enfer. Un véritable enfer. Et tu ne te doutais pas un instant que tu t'y trouvais pour de vrai.

Pas pour le moment.
Cet éclat de vie en toi, cet amour pour la vie que tu portes en toi, rien ne semblait pouvoir l'affecter au point de te faire douter.
Pourtant, il te faut t'en rendre compte.

Esmee. Pauvre petite chose. Tu es morte, bien morte, et t'accrocher à la vie -à ce mensonge- ne fait que repousser l'inévitable.

Esmee.
Il ne sert plus à rien de refuser ce qui semble évident.
La mort.
Tu continues de la fuire alors même qu'elle te colle à la peau, à l'âme.