chapitre quatre
Améthyste ne décroche pas son téléphone durant les jours suivants, elle l'éteint même pour ne pas avoir affaires aux appels incessants de sa petite sœur. Elle se terre dans son canapé en zappant les chaînes de la télévision à longueur de journées. Parfois, elle s'arrête sur les journaux télévisés au niveau des premières chaînes. Ame ne regarde presque pas les informations, n'ayant pas le temps d'assimiler les paroles des présentateurs, elle se contente de lire, non sans difficulté, les barres de flashs news s'affichant en bas de l'écran :
NICE : UNE CONDUCTRICE DE 44 ANS PREND L'AUTOROUTE A8 À CONTRESENS, DEUX MORTS.
Améthyste se lève aussitôt du canapé, attrape sa veste pour sortir de son appartement. Elle marche de longues minutes en restant sans voix face aux souvenirs de cette nuit glaciale de décembre où elle est restée dans la voiture, serrant son lapin violet dans ses bras. Il baignait dans le sang alors qu'elle hurlait désespérément à sa mère de l'aider à soigner son nounours. Cette dernière avait la tête éclatée dans le volant, l'airbag avant ne s'était pas déclenché.
Si la voiture avait passé le contrôle technique, si son père ne s'était pas barré la veille sans laisser de mot, si sa mère n'avait pas été sous l'emprise de trois grammes d'alcool, peut-être qu'elle aurait pris l'autoroute dans le bon sens et peut-être qu'Améthyste n'aurait pas vu son corps être extirpé de la voiture sur un brancard.
Et peut-être que son lapin violet n'aurait pas eu une oreille déchirée.
C'était ça de prendre l'autoroute A6 à contre sens à trois heures trente cinq du matin, d'attendre l'arrivée du service d'aide médicale d'urgence, appelé SAMU pour une voiture encastrée dans le terre-plein central. Améthyste se souvient des lumières bleues éclairant la nuit, les urgentistes s'activant autour d'elle et de sa sœur pour tenter de les extirper de cet enfer, d'expliquer que la tâche rouge sur les poils du lapin est du sang.
À quelques kilomètres de là, une femme de l'APR, association prévention routière, a simplement bloqué l'autoroute en indiquant une déviation, sur une barrière métallique tandis que les vies de deux pierres précieuses basculaient dans une tout autre dimension.
Elle frappe à son appartement, le teint un peu blafard, le cœur au bord de l'explosion durant l'attente de son arrivée. Sa tête apparaît dans l'encadrement de la porte, il sourit doucement en voyant la jeune femme lui demander :
- J'te dérange ?
Charles secoue la tête en ouvrant un peu plus la porte pour la laisser entrer dans son appartement. Il se retient d'ajouter qu'elle ne le dérange jamais mais il voit son air patraque quand elle le suit à travers le salon jusqu'à sa chambre.
Améthyste l'observe terminer sa valise en s'asseyant sur le lit, il ajoute des piles de vêtements, des chaussures et des affaires à l'effigie de la Scuderia Ferrari.
- Tu pars combien de temps ?
- Je reviens pas avant le vingt juin, après le Canada.
- Ça fait dix-neuf jours, constate-t-elle.
- Ouais, je dois faire du simulateur avant Bakou, murmure-t-il d'un air détaché.
Charles voit bien que quelque chose cloche depuis qu'elle est arrivée, elle ne fait que jouer nerveusement avec son collier qu'elle entortille entre ses doigts. Il sait comment s'y prendre pour qu'elle parle, il ne doit pas être préoccupé par son état, c'est à elle de quémander l'attention et seulement quand elle commencera à parler, Charles l'écoutera.
- Je me suis disputée avec Ambre.
- C'est rien, tu sais comment elle peut être, rassure le monégasque.
- C'est peut-être moi qui est bizarre, souffle-t-elle.
Charles ne répond rien et lui fait un signe pour qu'elle puisse lui passer une pile préparée de vêtements sur le lit qu'il enfourne dans sa valise. Il conclut doucement en s'asseyant à côté d'elle :
- Tu réfléchis trop, Améthyste.
Elle se laisse tomber sur le dos, contre le lit du brun, fixant le plafond, perdue dans ses pensées. Irritée par le comportement de sa petite sœur.
- Tu pars quand ?
- Demain matin, souffle-t-il en se laissant à son tour tomber aux côtés de la métisse.
Leurs épaules et leurs bras se touchent, Charles tourne la tête à gauche et aperçoit qu'Améthyste l'observe également de ses yeux noisette. Et comme à chaque fois qu'elle vient, Charles cède et ne peut refuser le contact de ses lèvres contre les siennes. Et comme à chaque fois que le soleil se couche sur la principauté, il la laisse prendre le contrôle.
Et comme à chaque fois, Charles se réveille seul, un collier de pierre au creux de la main, la seule partie qu'elle a bien voulu lui laisser voir au réveil.
Et Charles aimerait tellement dire qu'elle ne doit pas devenir son propre fantôme. Il resserre simplement ses doigts sur son collier craignant que l'oubli ne vienne pas de lui mais d'Améthyste et son cœur vide.
Et comme à chaque fois, il attend ce même sentiment de vide dans son cœur qui ne vient pas. Charles sait que l'amour vient lentement et qu'il aura du mal à partir si vite face à Améthyste.
Améthyste et ses yeux noisettes, Améthyste et son air morose, Améthyste et ses chaussures mauves qui ont fait chavirer son cœur.
petit chapitre avant ce grand prix et pour vous souhaiter un bon dimanche 🫶🏼
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