Chapitre 92 - Version 2


PDV Jade

Cela fait quatre jours que je n'ai pas eu de nouvelle de Samuel. Il n'a pas essayé de me rejoindre une seule fois, et quand je l'ai fait moi-même, il ne m'a pas répondu. Je m'inquiète de plus en plus. La dernière fois que nous nous sommes vu je lui avait dit que ces marques étaient le résultat d'une allergie. Et s'il ne m'a pas cru ? Et s'il a deviné ?

Je pensais aller à l'hôpital aujourd'hui, l'envie de le voir me submergeant. Mais, malheureusement, je n'en ai pas l'occasion puisque apparemment nous fêtons quelque chose. Mon frère et sa famille sont arrivés il y a de cela presque deux heures, et mon père nous a demandés de l'attendre pendant qu'il va acheter un gâteau.

A ce que je sache ce n'est l'anniversaire de personne et je ne vois pas ce que nous avons à fêter. Ni Matt, ni Eloïse ne veulent me dire quelque chose. Même Maria ne sait rien, alors que cette petite fée connaît d'habitude tous les secrets de famille.

Je commence à masser ma nuque alors que l'envie de me gratter reprend. Pendant ces quatre jours j'ai suivit le conseil du médecin de ne pas mettre de pull, ce pourquoi je n'ai pas quitté l'appartement. Mais j'étais obligée d'en mettre un aujourd'hui avec la venus de mon frère. Les crèmes que m'a prescrit le médecin semblent faire effet, je peux le voir dans le miroir, mais maintenant que j'ai une fois de plus mon pull, les fourmillements reprennent - moins qu'avant, mais ils sont là.

Je peux voir Eloïse me jeter des regards curieux. Depuis qu'elle est arrivée elle semble vouloir me parler, mais je sens que c'est la présence de mon frère qui la gêne. Et je n'ai pas pris l'initiative de rester seule pour que nous pouvons parler.

" Tata ? " Maria demande soudainement.

Je ne l'avais même pas vu entrer dans le salon. Elle devait être dans la chambre d'Annie, même si celle-ci dit ne pas aimer sa compagnie - ce qui est totalement faux.

" Qu'est-ce qu'il y a ma puce ? " je demande alors qu'elle tire légèrement mon bras.

" Tata Annie, elle pleure " elle murmure juste assez fort pour que je l'entende.

Je m'excuse rapidement auprès de mon frère et Eloïse et prends Maria dans mes bras avant de rejoindre la chambre d'Annie. Je retrouve effectivement ma soeur allongée sur son lit, étouffant ses sanglots dans son coussin.

" Annie ? " je l'appelle d'une voix inquiète alors que je m'installe au bord de son lui, essayant de la faire se retourner sur son dos.

Annie n'est pas du genre à pleurer... Il doit y avoir quelque chose de grave.

" Maria, tu peux nous laisser seules mon coeur ? " je demande en me tournant vers elle.

Elle secoue la tête négativement, et je vois ses yeux se remplirent de larmes. Sans que je puisse dire quelque chose, elle grimpe elle aussi sur le lit et s'avance jusqu'à Annie, s'allongeant à ses côtés.

" Tata ne pleures pas " elle murmure d'une voix brisée.

" Maria non... " je commence à dire mais c'est déjà trop tard, elle commence elle aussi à pleurer.

Je passe mes mains sur mon visage en soupirant, regardant les deux filles pleurer.

" Maria arrêtes de pleurer " Annie marmonne soudainement, " tu m'énerves "

" Mais moi je t'aime... " celle-ci sanglote en s'approchant encore plus de ma soeur.

J'ai presque envie de rire à la situation. Je tente une fois de plus de retourner Annie sur le dos, mais en vain, et c'est à ce moment que je remarque qu'elle tient fermement son portable dans sa main. Je la lui prend sans qu'elle ne proteste et lis le message qui est ouvert. Celui-ci vient étonnement de Samuel, rappelant Annie que son deuxième rendez-vous avec la psychologue est demain.

" Annie... Ne me dis pas que tu pleures à cause de cela " je soupire en reposant son portable sur sa table de chevet.

" Je ne veux pas y aller " elle marmonne dans son coussin, haussant les épaules.

" Redresses toi pour que nous en parlons, allez "

Elle résiste encore quelques minutes avant de se retourner et se redresser en position assise. Maria fait de même et enlace Annie par derrière, posant sa tête sur son dos.

" Lâche moi petite peste " Annie grogne en essayant d'enlever ses mains.

" Arrêtes ça, elle t'aime. " je glousse. " Bon, dis moi ce qui ne va pas " je reprend avec un peu plus de sérieux.

" Je ne veux pas y aller... " elle hausse les épaules en reniflant.

" Annie, c'est pour ton bien. Ca va être difficile au début mais... "

" S'il te plaît " elle me coupe en relevant ses yeux larmoyants sur moi, " ne m'envoie pas là-bas, je t'en supplie. "

Je la regarde en mordant ma lèvre, hésitante. Comme je lui ai dit, c'est pour son bien, pour qu'elle aille mieux. Mais elle semble si désespérée à cet instant...

Face à mon silence, elle passe ses bras autour de moi et recommence à pleurer.

" Ne m'envoie pas, s'il te plaît " elle répète.

" Ne l'envoie pas, tata " Maria ajoute de derrière nous.

Je soupire en passant mes mains dans les cheveux d'Annie, la rassurant en lui promettant de ne pas la forcer à quoique ce soit.

" Je te promet de ne pas t'envoyer là-bas si tu me promet de ne pas te renfermer et parler avec moi " je négocie finalement.

" Je te promet ! " elle s'exclame sans même hésiter.

J'embrasse son front puis essuie ses joues, voyant son sourire réapparaître.

" Moi aussi je promet ! " Maria intervient encore une fois.

Annie me regarde et nous éclatons de rire, nous retournant toutes les deux vers Maria avant de commencer à la chatouiller.

" Je t'aime petite peste " Annie rit.

*

Mon père rentre finalement à la maison avec, comme prévus, un gâteau dans ses mains. Son sourire me fait froncer les sourcils. Pourquoi est-il si content soudainement ?

" Il est temps d'annoncer la bonne nouvelle ! " il s'exclame quand nous nous regroupons tous autour de la table.

Mon regard passe de mon père à mon frère curieusement. Puis, mon père se lève, comme s'il se préparait à faire un discours. Et j'ai la forte impression que je suis la concernée de ce discours.

" Hier, j'ai été à l'entreprise. " débute mon père tout souriant, " J'ai entendu que Samuel y était aussi, donc, après avoir réglé les choses que j'avais à faire, j'ai été le voir pour avoir des nouvelles d'Edouart. Et Jade, la bonne nouvelle est que, sans le faire exprès, j'ai entendu la conversation de Samuel avec, j'ai appris plus tard, un avocat. "

Je ne vois toujours pas où il veut en venir. Je ne me suis jamais interessée à l'entreprise, ni à ses affaires ; alors ce dont Samuel à parler ne pourrait pas m'interesser plus que cela.

" Ils parlaient de votre divorce " il continue.

Un silence s'installe suite à ses mots. Tous les regards sont sur moi, alors que, de mon côté, je regarde mon père avec les yeux écarquillés.

" Pardon ? " je réussis à dire malgré la sécheresse soudaine de ma gorge.

" Tu as bien entendu " il m'assure, " c'est presque terminé Jade. Bientôt, ce cauchemar restera derrière nous. "

" Tu... Tu es sûr papa ? "

" Oui... " il répond en fronçant les sourcils face à mon manque d'enthousiasme. " Je les ai bien entendu, Samuel lui disait que tu ne serais pas contre de toute façon, et qu'il t'en parlerait dès que le dossier sera prêt. J'ai seulement pris les devants et annoncé la nouvelle avant lui. Je pensais que tu allais être contente ? " il termine sur un ton interrogatif.

Je recommence à masser ma nuque. Non, il ne peut pas avoir fait cela. Non... Je ne veux pas y croire.

" Excusez-moi " je murmure en quittant rapidement la table.

Je les entend appeler derrière moi, inquiets et surpris, mais je me prépare déjà à sortir. Mon frère me rejoint dans le hall d'entrée, me posant des questions que je n'écoute qu'à moitié, et, après avoir pris les clés de voiture de mon père, je quitte l'appartement sans répondre à qui que ce soit.

" Jade, attend ! " mon frère cri une dernière fois avant que je m'engouffre dans l'ascenseur.

Arrivée dehors, je ne perds pas de temps et m'installe dans la voiture, démarrant aussi rapidement et prenant la route de l'hôpital. Je suis sûre qu'il est là-bas.

Je suis nerveuse à l'idée de découvrir la vérité. A l'idée qu'il approuve les propos de mon père. Qu'il lui donne raison. Mes mains tremblent légèrement, mon coeur palpite, ma respiration est saccadé, comme si j'avais courru un marathon.

A l'entrée de l'hôpital, je m'arrête un instant puor reprendre mon souffle, et écris un message à Samuel en même temps, lui demandant où il est exactement. Apprenant aussitôt qu'il est à la cafétaria, je m'y rend sans perdre plus de temps.

Mes pas sont rapides, mon rythme cardiaque aussi, mais au fond je ne veux pas avancer. Je ne veux pas être face à lui et apprendre qu'il a pris cette décision.

Je l'aperçois à travers toutes les têtes présentent, et une soudaine colère me submerge à cet instant. Il doit l'avoir remarqué puisque ses sourcils se froncent quand je m'arrête à sa hauteur, quasiment fulminante.

" Tu as demandé le divorce ? " je demande directement, incrédule.

" Qui t'as dit ça ? "

" Répond moi ! Tu as demandé le divorce ?! "

" Ecoutes moi " il quémande d'un ton calme en essayant de prendre mon bras mais je le repousse.

" Alors c'est vrai ? Comment... Comment tu as pu, Samuel ? " je murmure en ne cachant pas le fait que je suis blessée. Mais ma colère ne diminue pas et dépasse ma déception, alors je rugis une fois de plus : " Tu m'avais promis que tu allais te battre ! C'est bon, tu laisses tomber ? Tu n'as pas assez de courage pour continuer ? Tu n'es qu'un putain de lâche ! Je t'ai cru merde ! J'ai vraiment pensé que tu allais changer ! "

" Jade, tout le monde nous regarde "

" Je m'en contre fiche ! Laisses les voir quel connard tu es ! "

Mon souffle est saccadé, mes yeux se remplissent de larmes malgré moi et cet idiot essaye de cacher son sourire en mordant sa lèvre.

Il vient de tout détruire... Je pensais qu'il voulait essayer, qu'il voulait me regagner pour qu'on puisse recommencer... Je pensais qu'il m'aimait assez pour se battre...

" Tu... Tu... " je commence mais les mots se bloquent dans ma gorge alors que les larmes s'échappent de mes yeux.

Je le regarde droit dans les yeux une dernière fois en secouant la tête, pour lui faire comprendre combien il m'a déçue, et finalement, ne pouvant rien dire d'autre, je fais demi-tour.

Merde comment j'ai pu le croire ?! Pourquoi suis-je autant naïve ?

A peine ais-je fait un pas en dehors de la cafétaria que Samuel me contourne et se place devant moi pour m'empêcher d'avancer.

" Laisses moi t'expliquer " il murmure en relevant ma tête à l'aide de son index.

Je repousse immédiatement sa main, me retenant pour ne pas le gifler, serrant mes poingts.

" Tu es mignonne quand tu t'énerves " il sourit.

" Mais tu te fous de ma gueule ?! " je cri une fois de plus, effaçant mes larmes d'un revers de main.

" Si tu me laissais expliquer, tu comprendrais que non " il réplique en levant les yeux au ciel.

" Expliquer quoi ? Que tu as décidé que je serrais mieux sans toi ? Que ça n'en vaut pas la peine ? Que ton amour n'est pas assez fort pour essayer ?! Tu ne m'as jamais autant déçus, Samuel. "

Son sourire s'évapore alors que sa mâchoire se tend. Il me regarde longtemps dans les yeux, puis, sans que je puisse comprendre comment, il me soulève dans ses bras.

" Qu'est-ce que tu fais ?! " je cri de surprise en m'accrochant à son cou par réflexe.

" Je n'aime pas les femmes têtue et tu commences à m'agacer. " il répond en commençant à marcher vers la sortie.

" Lâches moi tout de suite ! "

" Non, tu vas m'écouter d'abord. "

" Au secours ! On me kidnappe ! " je demande à l'aide alors que quelques personnes nous regardent sans rien faire.

" Ne vous inquiétez pas, c'est ma femme ! " Samuel cri en retour, " Elle est seulement capricieuse ! "

" Samuel... " je murmure plus calmement, " j'en peux plus, s'il te plaît lâches moi. Je ne veux pas savoir, j'accepte le divorce, je sors de ta vie. Laisses moi, s'il te plaît... " je pleure sur son épaule, les mots laissant un goût amer sur ma langue.

Il ne m'écoute pas, me demande seulement d'arrêter de pleurer, et quand nous arrivons à sa voiture, il essaye d'ouvrir la portière sans me faire tomber. Malgré mes protestations silencieuses, il réussit à me placer sur le siège passager et attache ma ceinture.

" Tu ne sortiras pas de ma vie " il murmure avant d'embrasser mon front.

Je le regarde, confuse, alors qu'il trottine jusqu'au côté conducteur et s'installe à son tour, bloquant les portes avant de démarrer.

*

Le temps du trajet, j'ai réussi à me calmer ne serait-ce qu'un petit peu et à sécher mes larmes. Mes sentiments jaugent entre la pure déception et la colère, et je ne sais lequel choisir pour confronter Samuel. Il essaye de me faire parler à quelques reprises pendant qu'il conduit, mais je ne lui réponds pas. Si je le fais, je vais dire quelque chose que je vais regretter. Et ce n'est pas ma peur du regret que je prend en compte maintenant, c'est seulement la peur de blesser Samuel. Parce que quoiqu'il dise, quoiqu'il fasse, je l'aime.

Il me déçoit un peu plus chaque jour, mais je l'aime. Tout simplement.

La voiture s'arrête finalement devant la villa que j'ai appelé mon chez moi pendant des mois. Cependant, je ne quitte pas le véhicule pendant un moment, et, surprenamment, Samuel ne me force pas non plus, attendant à l'extérieur que je le fasse par moi-même.

Je finis par sortir en lâchant un profond soupir. Je refuse de le regarder dans les yeux et rejette la main qu'il me tend. Il ne dit rien. Nous rentrons dans la maison, qui, soudainement, me semble plus froide que d'habitude.

Samuel me demande de le suivre directement dans notre ancienne chambre. Légèrement sceptique, je ne proteste tout de même pas.

" Viens là " il dit en s'arrêtant au centre de la pièce.

Je déglutis et m'avance malgré moi vers lui. Faites que ma colère ne s'évapore pas... N'aimant pas la distance que j'ai laissé entre nous, il avance d'un pas de plus lui-même, et m'attire contre lui. Mes mains se posent sur son torse comme par réflexe et mon regard est désormais dans le sien.

Puis, ses mains glissent sur mes hanches et, sans me demander l'autorisation, il commence à relever mon pull.

" Qu'est-ce que tu fais ? " je murmure en essayant de l'arrêter.

" Chut "

Plus fort que moi, il réussit, malgré mes protestations, à enlever pull, me laissant en petit débardeur. Je frissonne. Mon coeur palpite à nouveau.

Je tente de reculer, mais il me retient à nouveau, emprisonnant mes poignées d'une main. Son regard glisse plus bas que mon visage, et sa main libre traîne délicatement sur ma clavicule.

" Ca " il murmure, " c'est de ma faute. "

" Sam... "

" Chut... "

Mes yeux se referment, et soudainement, la seule chose que je sens sont ses lèvres sur ma peau, déposant un bref baiser sur mon épaule.

" Tu ne sais pas à quel point je m'en veux de t'avoir causé cela " il chuchote ensuite près de mon oreille.

Il se recule, je baisse la tête. Et voilà que ma colère s'évapore.

Il l'a donc su.

J'ai envie de lui dire que ce n'est pas de sa faute, mais aucun mot ne semble vouloir dépasser la barrière de mes lèvres.

" Ces blessures ne sont pas les seules, je le sais " il reprend face à mon silence. Je relève la tête en haussant un sourcil, et il s'explique : " Il y a en a d'autres, qui, elles, ne sont pas visibles. "

Il apporte sa main au niveau de mon coeur en me regardant droit dans les yeux avec tristesse. " Là, au fond de toi, il y a d'autres blessures. Je ne suis peut-être pas le seul à les avoir causées, mais je suis responsable de la plupart. Et je ne veux plus te faire cela. "

" Donc tu as décidé de tout lâcher ? "

" Non, pas tout. Assieds-toi, je vais t'expliquer. "

Il ne me donne pas le choix, enroulant sa main autour de mon bras et me guidant sur le lit, m'installant à ses côtés et se tournant pour être face à moi. Il caresse les paumes de mes mains avec ses pouces, sûrement pour me calmer, ou pour me dire que tout va bien alors que c'est tout le contraire.

" Tu m'avais promis que tu n'allais pas me laisser... " je murmure, essayant de ne pas avoir l'air de me plaindre, ni d'avoir envie de pleurer - à nouveau.

" Et je ne vais pas le faire " il réplique d'une voix douce, " Je vais tenir cette promesse, ais confiance en moi. "

" Je ne comprends pas... "

" Tu te souviens de la soirée de ton anniversaire ? "

" Oui ? " je réponds, incertaine sur où il veut en venir.

" Tu m'avais dit que tu ne rêvais pas de cela, d'être mariée malgré toi et de ne pas avoir eu la chance de vivre autre chose. "

" Ca ne veut pas dire que... "

" Chut, laisses moi finir " il murmure en souriant, " tu avais l'air dans un tout autre monde quand tu me parlais de tes rêves, et, même si ce n'était pas ton but, ça m'a... Comment dire... Ca m'a un peu blessé, tu vois. Parce que j'ai eu la soudaine impression que c'est moi qui t'ais enlevé tes rêves. "

J'ouvre une fois de plus ma bouche pour le contredire mais il pose son idex sur mes lèvres, m'interrompant.

" Laisses moi finir, s'il te plaît. Donc, comme je te disais, je t'ai écouté parler de tes rêves, et j'ai sourit tout le long malgré ma soudaine réalisation. Mais après tu t'es arrêtée, comme si tu venais de te rendre compte de quelque chose, et tu as pleuré le restant de la nuit. Ca m'a fait comme l'effet d'une claque. "

Je veux lui dire que je n'ai pas pleuré à cause de cela mais seulement parce que j'avais pensé à toutes les autres filles qui étaient dans de pires situations que moi, mais il ne m'en laisse pas l'occasion, gardant son doigt sur mes lèvres et y faisant une legère pression à chaque fois que je tente de parler.

" Je veux te donner la chance de vivre tes rêves, Jade. Et je sais qu'en restant lié à moi de cette façon, cela ne sera pas possible. Je t'ai fait du mal et je m'en veux, mais je veux réparer mes erreurs. J'ai bien réfléchis, et, tu avais raison. Quoique je fasse, quoique je dise, si je n'arrive pas à passer au-delà de mon passé, je ne te saurais d'aucun bien. Je vais me reconstruire, pour toi, et à ce moment, nous pourrons reprendre là où nous avions laissés. A ce moment seulement je pourrais essayer de te regagner et être sûr que ces blessures, " il pointe ma clavicule, " ne se reproduisent plus jamais, ni sur ta peau, ni dans ton coeur. "

Je me rends compte que maintenant des larmes coulant sur mes joues, mais je ne m'en préoccupe pas. Je hoche lentement la tête en signe de compréhension, et Samuel m'offre un léger sourire tout en me regardant avec cette tristesse dans ses yeux.

Je me suis longtemps demandé comment ais-je fait pour tomber amoureuse d'un homme comme lui. Maintenant, je me demande comment ne pas le faire. Il est merveilleux, il a un énorme coeur, mais a eu la mauvaise expérience d'être blessé plus d'une fois par les personnes qui comptaient le plus pour lui.

" On va faire un compromis. D'accord ? " il demande après avoir essuyé mes joues.

J'essaye de lui sourire en acquieçant, faire comme lui et cacher ma peine mais comme il me l'avait dit, il est un très bon acteur, pas moi.

" Nous allons divorcer " il commence par dire, me faisant haleter malgré moi. " Ensuite je vais m'en aller " il continue et j'ouvre mes yeux en grand mais il ne me laisse pas le temps de répliquer et reprend : " Je vais reprendre ma vie en main, je vais me reconstruire et je serais bien mieux que ce que je suis aujourd'hui. Pendant ce temps, je veux que tu me promette que tu vas faire tout ce qui te plaît, que tu vas combrattre tes peurs et angoisses et que, malgré tout, tu vas rester debout. Promis ? "

" Mais après ? "

" Je vais revenir. Comme je te l'ai dit, je ne peux pas essayer de te regagner dans cet état, Jade. Je m'en veux encore tout les jours et l'image que j'ai de moi-même n'a pas changé. Dès que cela arrivera, je serais à tes côtés, et là, crois-moi, je ne cesserai de me battre pour nous. Maintenant, tu me promet de faire ce que je t'ai dit ? "

" Promis... " je réussis à dire à travers la boule dans ma gorge, " Promet moi que tu vas revenir "

" Je te le promet " il répond sans une once d'hésitation.

Je me retrouve dans ses bras la seconde suivante, pleurant à chaudes larmes une dernière fois, inhalant son odeur alors qu'il me serre fermement contre lui.

Les minutes se transforment en heures, nous éteignons nos portables, et nous nous retrouvons sous les couvertures, serrés l'un contre l'autre, une dernière fois. Mes doigts glissent sur son torse dénudé une dernière fois, les siennes sont dans mes cheveux une dernière fois. Mes lèvres déposent de brefs baisers le long de sa mâchoire et son cou, une dernière fois. Et je m'endors tout contre lui, une dernière fois.

Non, je ne m'endors pas, en fait. J'écoute les battements de son coeur contre mon oreille, j'écoute sa respiration qui soulève légèrement ma tête à chaque inspiration, et j'essaye de me dire que ce ne sera pas la dernière fois, que toutes ces choses ne seront pas des dernières fois.

Il m'a promit qu'il va revenir, de toute façon.

" Sam ? "

" Mhh ? "

" Tu veux bien me jouer du piano ? "

Je le sens se tendre sous moi, mais dès que je glisse ma main sur son visage en me relevant légèrement, il lâche un souffle et finit par acquieçer.

" Bien sûr " il chuchote après avoir inspirer profondément.

Il embrasse mon front avant que nous nous relevons, puis il prend ma main et nous guide dans la salle de musique. Sa main ne tremble plus quand il tourne la clé dans la serrure, et il a l'air plus sûr de lui quand il entre dans la pièce.

Je le laisse s'installer devant le piano alors que je me place de l'autre côté, voulant être en face de lui pour l'observer se perdre dans son monde encore une fois.

" Que veux-tu que je te joue ? " il demande en étirant ses doigts.

" N'importe... " je hausse les épaules.

Il réfléchit un instant avant de se relever, cherchant des feuilles dans un tiroir au coin de la salle avant de revenir avec ce qui me semble être une partition.

" Hum... C'est... C'est moi qui l'ai écrite " il marmonne en passant sa main sur sa nuque.

" Vraiment ? " je m'exclame, soudainement excitée.

" Ouais... Enfin, c'est un brouillon mais... Voilà "

" Je suis sûre que c'est parfait " je lui offre un grand sourire réassurant.

Son sourire à lui est nerveux - et adorable. Il s'étire les doigts encore un instant avant de se positionner correctement et de fermer les yeux.

Puis la mélodie débute et je lâche un soupir de plaisir malgré moi. J'étudie le visage de Samuel, prenant en compte que je ne vais bientôt plus le voir. C'est ironique parce que tout ce que je voulais au début, c'était m'éloigner de lui, mais maintenant l'idée m'amène au bord des larmes. Comme si je le perdais à jamais.

Soudain, la mélodie s'accompagne de la voix de Samuel. Il récite un poème :

" Quand une larme s'écoule sur ta joue,

Quand elle blesse ton visage si doux,

De terreur les frissons emprisonnent ta peau,

Et dans le silence ton coeur se brise en mille morceaux.

Alors le calme domine ton corps entier,

Et dans l'obscurité tes espoirs meurent,

Tu n'as plus le courage de continuer,

Et tu cherches dans l'angoisse la vraie réalité.

Se poser des questions, elles sont toutes sans réponses,

Et se perd ton regard dans le brouillard dense,

Les paupières de tes yeux se referment malgré toi,

Et tu réalises que tu ne peux plus entendre le monde.

Alors le vent emmène le reste de tes cendres,

Et je me souviens de ce baiser si tendre,

Et je me souviens de ce doux dernier baiser. "

La dernière note se termine et un silence si calme, si confortable et si tendre, s'installe. Je reste un moment à observer Samuel alors qu'il a la tête baissée et ses épaules complétement relâchées.

Puis, je le rejoins, et il se recule légèrement pour me permettre de m'asseoir sur ses genoux.

Je prend son visage entre mes mains. Nos regards ne se quittent plus. Je glisse mes indexs sur ses joues, approche mon visage encore plus du sien, inspire son odeur.

" Ne pleures pas " il murmure en remarquant mon état.

J'essaye d'avaler la boule dans ma gorge en hochant la tête. Puis, je pose mon front contre le sien, continuant à caresser ses joues.

" Promet moi que ce ne sera pas notre dernier baiser " je réussis à dire malgré ma volonté de pleurer.

Chaque seconde de son silence me détruit, mais il finit par parler :

" Je te le promet. "

" Je t'aime tellement... " je chuchote près de ses lèvres, avant de placer les miennes dessus.

Nous partageons un baiser doux et lent. Il se détache, je reconnecte nos lèvres. Je ne veux pas que notre histoire se termine comme ce poème. Je ne veux pas que ce baiser soit notre dernier.

Une larme finit par s'échapper malgré mes efforts, mais Samuel l'efface presque immédiatement avec son pouce.

" Je suis terriblement amoureux de toi " il chuchote en retour, un léger sourire sur ses lèvres.

Un son qui ressemble à un rire s'échappe de ma bouche, mais je ne saurais le qualifier de telle. Nous avons fait des efforts pour en arriver là, mais ce n'est pas assez. La vie nous en demande encore, et encore, et encore.

Je ne veux pas le laisser partir. Je veux pouvoir croire qu'il peut se reprendre ici, prêt de moi, et peut-être même avec mon aide. Ce n'est pas si impensable, n'est-ce pas ?

Mais une voix au fond de mon esprit me dit de voir les choses en face, de ne pas essayer de cacher ou d'atténuer la réalité.

De retour dans notre chambre, dans notre lit, l'un dans les bras de l'autre. Mes larmes ont cessés de couler et un calme, une sérénité étrangére m'ont enveloppés.

Je me délecte de pouvoir le sentir contre moi encore une fois, de pouvoir le toucher, de porvoir sentir son odeur. Je voudrais que le temps s'arrête et que cette nuit soit sans fin. Je pourrais rester encore longtemps dans cette position, mes bras autour de lui, à regarder le plafond ou son visage.

D'ailleurs, c'est en regardant celui-ci que je remarque qu'il commence à s'assoupir. Sûrement est-il fatigué après ces derniers jours passés à l'hôpital et nos histoires de coeurs.

Je dépose un bref baiser sur ses lèvres avant de me dire que je devrais le laisser se reposer - même si j'aurai préféré qu'il reste éveillé tout le reste de la nuit pour que nous puissions parler encore et encore, me permettant d'avoir plus de souvenirs de nous.

Des souvenirs. En y repensant, un léger sourire se dessine sur mes lèvres. Je relève la tête de son torse et le regarde. Ses yeux sont mi-ouverts mi-fermés alors qu'il me questionne du regard, ses doigts glissant toujours dans mes cheveux.

" Tu te souviens, tu m'avais demandé quelle est la chose la plus folle que j'avais fait de toute ma vie ? " je demande dans un chuchotement.

" Mhh " il marmonne avec un sourire amusé.

" Eh bien... Je pense que c'était, et ça sera toujours, le fait de tomber amoureuse de toi. "

Ses bras se resserrent autour de mon corps, ses lèvres se retrouvent une fois de plus sur mon front, avant qu'il n'ajoute dans un murmure sur un ton à demi-amusé : " Ma petite délinquante. "

" Je ne suis pas petite. "

" Tu l'es. Ton pied arrive au niveau de mon genoux. "

" Tu exagères. "

" Pas du tout. Je le sens, et en plus il est gêlé. "

" Tes mains aussi sont gêlées, est-ce que je m'en plains ? "

" Je n'ai jamais dit que je m'en plaignais, petite. "

Je relève la tête une fois de plus et le regarde en faisant la moue. Il sourit, ce sourire moqueur mais magnifique, et il glisse une mèche de cheveux derrière mon oreille.

" Je t'aime, petite. "

" T'es agaçant "

" Mais tu m'aimes. "

" Malheureusement, oui. " je lève les yeux au ciel, mais une soudaine panique me submerge, alors je reprends " oublie ce que je viens de dire. Je t'aime énormément, et je ne changerais rien à cela. "

Je ne veux pas que mon dernier ' je t'aime ' soit accompagné du mot ' malheureusement '.

" Allez, endors toi " il chuchote d'un ton plus sérieux, " une nouvelle vie nous attends dès demain. "












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