Chapitre 15
PDV Jade
" On va bientôt atterrir madame " annonce une des hôtesses, celle aux cheveux blonds. J'hoche la tête et la remercie avec un sourire alors que je me retourne sur mon siège pour voir Samuel. Dès qu'on est entré dans le jet, il s'est assis au fond, a mis son casque, posé son ordinateur sur ses genoux et ne m'a ni adressé la parle, ni jeté un regard. Ne sachant pas quoi faire je me suis assise sur un des sièges à l'avant, de toute façon il n'y en a pas beaucoup. Pendant tout le voyage j'ai regardé par la petite fenêtre où j'avais délicatement posé ma tête. C'était ennuyant mais calme et apaisant.
Maintenant Samuel dort et je ne sais absolument pas comment le réveiller. Devrai-je le faire ou demander à une hôtesse de le faire? Je suis presque sûre qu'il préférera que ce soit une hôtesse. Je me retourne et m'installe sur mon siège en soufflant, prenant encore une fois conscience de la difficulté de la situation. J'ai même envie de rire ; quelle femme serait nerveuse de réveiller son mari? C'est même pas de la nervosité, ça va jusqu'à l'embarras et même la peur. Je n'ai pas peur de Samuel, seulement de ses réactions.
Une vingtaine de minutes plus tard je sens qu'on atterrit et je me tient fermement aux bras de mon siège. J'ai toujours eu peur des avions, même si celui-là est un jet privé, mais ça ne m'a pas empêché de le prendre. A vrai dire, j'ai pris l'avion que quatre fois, un aller-retour en Espagne pour des vacances en famille, et un aller-retour à Londres pour un voyage scolaire au lycée. Pour l'Espagne je me rappelle comment j'avais serré le bras de mon père au moment du décollage et de l'atterrissage ; pour Londres, c'était le bras de mon professeur d'histoire, il m'avait taquiné sur ça tout le long du voyage et même quand on était rentré. Pour tout dire, ma peur ne m'empêche pas de prendre l'avion.
Et c'est pareil pour toutes mes peurs, sauf celui de l'eau. Je n'ai jamais réussi à apprécier l'eau à la piscine ou à la mer depuis que j'ai failli me noyer quand j'avais sept ans. C'est resté gravé dans mon esprit, et même si j'en ai beaucoup envie, je ne vais plus jamais nager.
" Vous pouvez descendre madame " l'hôtesse réapparaît devant moi, me souriant.
" Merci " soufflai-je, plus parce que je suis soulagé que pour la remercier.
Elle me fait un hochement de tête et s'apprête à partir mais je la retient. " Excusez-moi " l'appelai-je, " Hum... Vous pourriez réveiller monsieur? " lui demandai-je en lui montrant d'un signe de tête Samuel.
Elle regarde un moment Samuel, puis moi, puis Samuel.
" Oui bien sûr " dit-elle, ne comprenant sûrement pas pourquoi je ne le fais pas à sa place.
Mais je n'ai pas envie de lui expliquer, et je n'en ai pas besoin ; donc je me lève de mon siège et marche jusqu'à la porte de sortie à l'avant, la lassant s'occuper de Samuel. Une fois sur les escaliers, l'air frais me frappe au visage, mais ce n'est pas le vent d'hiver presque glacial de Paris qu'on a quitté, c'est une légère brise qui souffle et qui rafraîchit. Heureusement que je savais que l'Australie n'est pas en hiver en ce moment, sinon j'aurai rempli ma valise de gros pulls alors que là j'ai choisi des vêtements légers, impeccable pour ce temps.
" Qu'est-ce que tu attends? Descends. " la voix de Samuel derrière moi me fait revenir sur Terre. Je tourne la tête pour le voir une marche derrière moi, attendant que je descende, ce que je fais sans plus attendre.
Au moment où je met un pied sur Terre, Samuel me dépasse et avec des pas rapides il se dirige vers l'intérieur de l'aéroport. Voyant que je suis seule, je le suis, ne voulant pas me perdre. A l'intérieur, un homme en costume de chauffeur nous attend. Samuel le dépasse sans dire un mot, laissant le pauvre homme perplexe, alors que je m'arrête à son niveau.
" Euhm... Hello?" ma voix sort toute petite alors qu'un sourire se dessine sur le visage du vieil homme.
" Bonjour madame Huguet, je suis Charles, votre chauffeur pour cette semaine " dit-il, un petit rire s'échappant de ses lèvres.
Oh. Il est français. Bien sûr.
" Bonjour " me corrigeai-je.
" La limousine vous attend, allez-y, je vais attendre vos valises " m'informe-t-il.
Je hoche la tête et lui souris - toujours embarrassée - avant de me diriger vers la porte qu'a emprunté Samuel. Dès que je passe la porte je vois la limousine garée juste devant, un autre homme - beaucoup plus jeune - tenant la portière ouverte. On a combien de chauffeur bon sang?
" Miss " dit-il en me faisant un signe de tête.
" Bonjour " dis-je en m'installant dans la limousine.
Je l'entend rire un peu avant qu'il ferme la portière. Mais qu'est-ce que j'ai dit encore? Pourquoi tout le monde rit de moi?
Samuel est assis sur le bord droit, moi sur le bord gauche. Ses yeux sont fermés et sa tête est renversée vers l'arrière mais je ne pourrai pas dire s'il dort ou pas. Je gigote un peu sur place, mon regard allant sur tous les recoins de la limousine avant que je vois Charles revenir, posé les valises dans le coffre, puis s'installé sur le siège du conducteur.
" Vous êtes prêts? " demande-t-il en tournant la tête. Je regarde Samuel, attendant qu'il répond. Il murmure enfin un petit " oui" et Charles ferme la petite fenêtre, nous séparant.
Je regarde par la fenêtre tout le long du trajet, éblouis par la beauté de cette ville. On passe devant une plage et je retrousse le nez, l'idée d'aller nager me venant à l'esprit. Les gens dans les rues semblent ne pas remarquer la limousine, ou peut-être qu'ils sont habitués. Ils continuent leurs routines, certains allant à la plage, leurs maillots de bain déjà mis, certains allant au travail, en costume cravate, certains courants après leurs enfants. Ils vivent quoi. Si ce n'est que la beauté du paysage, il n'y aucune autre différence avec la France. Les gens sont pareils, on est tous pareil, peut importe où nous sommes. On a tous les mêmes buts, les mêmes problèmes, la même routine. Je suis même presque sûre qu'il y a quelqu'un comme moi ici, vivant le même type de situation. Je ne parle même pas de toutes ces filles qui sont forcés à se marier à un jeune âge, la plupart du temps contre de l'argent. Mais ça c'est encore un autre cas. Eux sont soumis à leurs maris, elles doivent subirent tous ce qu'on leur fait, parce qu'elles n'ont pas le courage de se rebeller, ayant peur de donner leurs vie en retour. Moi ce n'est pas mon cas, moi je peux me rebeller, moi je ne laisserai pas Samuel ou quelqu'un d'autre me faire des choses que je ne veux pas ; et surtout moi, je n'ai pas peur de donner ma vie.
Un frisson me parcourt quand je pense à cela. Je suis maintenant la femme de Samuel, et nous sommes normalement en lune de miel. Donc... Normalement on doit... Non non non. On ne peut pas, je ne peux pas, je ne veux pas, pas maintenant, pas avec lui... Je jette un coup d'oeil à Samuel, il a maintenant le regard ancré dehors, regardant lui aussi par la fenêtre. De toute façon il ne m'aime pas et je ne l'aime pas, il n'y a aucune possibilité pour qu'il me veuille dans son lit. Non?
Oui, c'est ça. On va rien faire. Il peut pas me forcer de toute façon. Et je ne me laisserai pas faire si je ne le veux pas, même si je suis sa femme. Même si j'essaye de me faire à cette idée, je ne peux pas cacher ma nervosité par rapport à ce soir, cette nuit.
La limousine s'arrête enfin, presque une heure plus tard, et je chasse ces pensées de mon esprit, espérant ne plus y penser. Jamais.
La portière s'ouvre et je me précipite dehors, le deuxième chauffeur m'aidant à descendre. Devant nous se trouve l'immense demeure des Huguet qu'ils appellent "chalet", avec sa blancheur éblouissante. Je tourne la tête sur le côté pour regarder aux alentours et ma bouche s'ouvre légèrement quand je vois l'immense plage non loin du chalet.
Bien sûr Jade, un chalet c'est au bord de la plage.
" Tout va bien madame ?" me demande Charles, me faisant redonner l'attention au chalet.
" Oui, tout va bien " souris-je.
Il hoche la tête et m'indique l'entrée du chalet, attendant que je passe devant. Je regarde derrière moi et comme je l'avais deviné, Samuel est déjà partit.
La porte d'entré est grande ouverte, le deuxième chauffeur - dont je ne sais pas encore le nom - attendant dans le hall d'entrée, des valises à la main.
" Voudriez-vous que l'on dépose vos valises dans votre chambre madame? " demande Charles.
" Euh oui bien sûr, par contre je ne sais pas - "
" Je connais les chambres, ne vous inquiéter pas "me coupe-t-il gentillement.
Après un signe de tête à son collègue, les deux montent les escaliers, tandis que je reste debout, ne sachant pas quoi faire.
Je décide que je pourrai visiter l'intérieur jusqu'à que Charles descend au lieu de rester debout comme ça. Je dépose mon sac sur le meuble à côté de la porte et lentement je me dirige vers ce qui semble être le salon. Simple, chic, élégant, pratique, tous ce que j'avais imaginé. Un grand écran plat longe un mur, l'autre et rempli de tableaux couleur sable, un autre mur est complètement en verre, avec des portes coulissantes. Je me dirige vers celle-ci et fait coulisser une des portes en verre, sortant ainsi sur la terrasse. Je suis face à une piscine, un jardin, tous ce qu'on peut avoir sur une terrasse.
Mais pourquoi avoir une piscine si on est à côté de la plage?
Je ne cherche pas beaucoup à comprendre et retourne à l'intérieur. J'entend des voix venant de l'entrée donc je sors du salon. Samuel est en train de discuter avec les deux chauffeurs, quand ils me voient arriver ils s'arrêtent de parler. Charles est le premier à prendre la parole, " Nous avons déposé vos valises dans votre chambre madame, reposez vous aujourd'hui, si vous avez besoin de quoique ce soit nous serons devant le chalet, appelez nous " dit-il en sortant un bloc-notes de sa poche ainsi qu'un stylo. Il écrit quelque chose puis coupe une feuille du bloc et me la tend.
" Voici nos numéros "
" Merci " murmurai-je, mettant le papier dans la poche arrière de mon jean.
Après ça les deux sortent et ferment la porte derrière eux, me laissant seule avec Samuel. Celui-ci ne dit rien et disparaît vite dans le salon. Je suis encore une fois seule dans le hall. Bien.
Après un regard vers les escaliers je décide de monter à ma chambre. Je ne sais pas c'est quelle porte, et bien sûr il y en a beaucoup, donc j'essaye toutes les portes chacun leur tour. Si personne m'aide, je me débrouillerai seule.
La première porte que j'ouvre donne sur une chambre de fille, presque tout est rose et violet. Même si c'est plus une chambre de petite fille, je devine que c'est la chambre de Léna.
Après avoir refermé cette porte j'ouvre la suivante, tombant sur une chambre immense. Je referme immédiatement la chambre quand je prend conscience que c'est la chambre de " mes beaux-parents ".
La porte suivante donne sur une salle de bain, elle fait limite trois ou quatre fois ma salle de bain que j'avais dans mon appartement. Mais je dois me rappeler que dans cette famille, ils aiment tous ce qui est plus grand et plus luxueux.
Il reste encore trois portes, je ne sais pas pourquoi puisque logiquement il devait en rester plus qu'une, celle de Samuel. J'ouvre donc la porte suivante et comprend que je suis dans la bonne quand je vois les valises posés au sol. J'entre enfin à l'intérieur, jetant un coup d'oeil à la chambre. Elle n'est pas plus grande que la chambre de Samuel à Paris, mais elle est autant luxueuse pourtant simple. Je peux dire que la chambre a été réaménagé récemment, contrairement aux autres chambres, les meubles dans celle-ci sont neufs. Je remarque une porte qui donne sûrement sur une salle de bain personnelle et une fenêtre qui donne vue sur la plage.
Ma curiosité prenant le dessus, je décide d'aller voir les autres chambres. Malheureusement, la porte suivante semble fermé à clé. Je réessaye une deuxième fois pour être sûre mais je m'arrête dans ma tentative quand la voix de Samuel fait écho dans le couloir. Je n'ai même pas le temps de me retourner qu'il apparaît déjà en face de moi, poussant ma main de la poignée de la porte.
" N'ouvre pas cette porte " dit-il fermement.
" Euh... D'accord " je marmonne, ne comprenant pas son attitude.
Je recule légèrement, il me dépasse et redescend les escaliers, me laissant perplexe.
C'était quoi ça?
Me reprenant, je rentre dans ma chambre, décider à défaire ma valise. Il faut bien que je fasse quelque chose. Je cherche ma valise entre toutes celles qui sont au sol ; la grande noire, la petite rouge et le bleu. Pas de valise verte. Je regarde dans chaque recoin de la chambre mais en vain, il n'y a pas ma valise.
Tout en soufflant, je descend les escaliers et me dirige au salon. Samuel est assis sur un bord du canapé, son ordinateur sur ses genoux. Il me semble qu'il est très attaché à son ordinateur lui.
Je racle la gorge pour qu'il relève la tête. Il ne le fait pas.
"Samuel?"
" Quoi? " demande-t-il froidement, ses yeux toujours ancrés sur l'écran devant lui.
" Euh... Je ne trouve pas ma valise " dis-je, gardant ma voix douce par rapport à son ton froid.
" Et? " fut sa seule réponse.
" Et... Qu'est-ce que je fais?"
" Je sais pas " marmonne-t-il, ses sourcils se fronçant alors qu'il semble lire quelque chose.
Je suis tellement agacée par son comportement, mais surtout fatiguée.
" Merci de ton aide " je lâche froidement moi aussi, avant de tourner les talons pour sortir du salon.
Je vais à la cuisine et me serre un verre d'eau pour essayer de rester calme et réfléchir. Charles m'a donné son numéro, je pourrai l'appeler et lui demander s'il n'a pas oublié ma valise dans le coffre de la limousine. Ouais, c'est ce que je vais faire.
Je sors donc mon portable de ma poche et l'allume - l'ayant éteint avant de prendre le jet - puis je prend conscience que je ne peux pas utiliser mon portable. Je suis en Australie, mon portable ne fonctionne pas ici. Je passe une main sur mon visage tout en soufflant. Dans le pire des cas, Charles a dit qu'il serait devant le chalet, je n'ai qu'à sortir dehors.
Je pose donc mon verre d'eau dans l'évier et me dirige vers la porte d'entrée, sortant sur le palier. Je longe le petit chemin jusqu'à la grille derrière laquelle j'aperçois la limousine. Une fois avoir passé le grillage, le deuxième chauffeur descend pour venir à ma rencontre.
"Any problem miss?" me demande-t-il.
Ok, alors je parle en anglais à Charles, il est français ; je parle en français à cet homme, il est anglais - ou plutôt australien.
" Euh... I don't speak english? " ma phrase sort plus comme une question et l'homme devant moi ricane.
Heureusement Charles vient à mon secours juste à temps.
" Madame Huguet?"
" Tu peux me tutoyer " commençai-je, agacée d'entendre ce nom de famille, " et je voulais te demander d'ouvrir le coffre, vous avez oublié ma valise ".
" Je suis obligé de vous vouvoyez madame. Pour ce qui est de votre valise, on les tous laissé dans votre chambre. " explique-t-il, jetant des rapides coup d'oeil à son collègue.
" C'est pas possible, ma valise n'est pas là haut ". Je ne suis pas aveugle, il y avait bien une valise noire, une bleu et une rouge... Une rouge...
" D'accord merci Charles " conclus-je. " Ah oui " dis-je en me retournant, " votre collègue n'est pas français? "
Il lui jeta encore un coup d'oeil avant de me répondre, " Andrew est d'ici madame ".
J'hoche la tête et sans plus attendre je me retourne pour entrer à l'intérieur. Je monte directement à ma chambre, prend la valise rouge et la pose sur le lit avant de l'ouvrir. C'est bien ce que je pensai, c'est ma valise ; non pas celle que j'avais préparée pour la lune de miel, mais celle où il y a tous mes vêtements d'hiver. Je ferme les yeux et respire un coup. Je ne peux pas porter ces vêtements pendant une semaine, et je ne peux pas mettre des gros pulls non plus ; il me reste plus qu'à aller faire du shopping. Bien, merci Samuel. Samuel.
Une fois sur mes pieds, je descend les escaliers quasiment en courant, atterrissant dans le salon où Samuel est toujours installé confortablement.
" Tu es aveugle? " fut la première chose que je lui lance. D'accord je suis calme, d'accord je suis patiente, mais à un moment faut qu'il arrête, il se fout complémentent de ma gueule.
" Pardon? " dit-il en ayant la bonté de relever sa tête.
Je m'avance vers lui, déterminé, et m'arrête juste en face. Je cherche des mots... je sais pas, un peu brusque? Seulement pour le faire réagir mais je ne trouve rien et quand il se lève, sa taille dominant la mienne, je suis obligée de prendre un pas de recul, comme pas réflexe.
" Tu disais? "
" J'ai dit es-tu aveugle? Je t'avais demandé la valise verte pas la rouge " ma voix reste très douce alors que je voulais lui crier dessus. Pourquoi j'y arrive pas?
" Ah bon? Je n'ai pas remarqué " dit-il simplement, sa voix sonnant tout à fait sarcastique, un léger sourire au coin de ses lèvres.
" Oui et maintenant je n'ai que des vêtements d'hiver "
" Oh quel dommage " ricane-t-il, se laissant tombé sur le canapé, son sourire s'élargissant.
" Oui quel dommage, on va devoir aller faire un peu de shopping " dis-je sarcastiquement. J'ai marqué un point ici, son sourire doit disparaître normalement. Il ne le fait pas. Est-il un des hommes qui aime le shopping?
" Bien, Charles t'y emmènera. Problème réglé " sourit-il, reprenant son ordinateur.
Ah, ok.
Encore un point pour lui.
Je cherche encore et encore un mot à lui lancer à la figure mais malheureusement, rien ne me vient à l'esprit. Alors je fais comme d'habitude, je tourne les talons et m'éloigne.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top