Chapitre 21


Le spectre du roi fixait sa petite fille d'un regard glacial. Cela faisait des années qu'ils ne s'étaient vus. Elle était alors encore un bambin, et ne gardait que de frêles souvenirs du roi sévère qu'était son grand-père. À vrais dires, la majorité de ce qu'elle connaissait de lui, lui venait de ses parents et de ses frères.

La'ana le fixait aussi, ne sachant que dire à son défunt ancêtre, mais la main de Finn sur son épaule la fit revenir à la réalité. La jeune elfe balbutia une question :

« Grand-père, quels sont les souvenirs de votre mort ?

— Je me souviens d'une brûlure dans mes poumons, et de mettre étouffé, après avoir bu.

— Je vois. Au revoir. »

La'ana se mordit la lèvre inférieure comme à son habitude. Elle aurait souhaité maîtriser plus l'Appel pour invoquer des spectres plus fidèles à leur état vivant, et non seulement des pantins qui ne répondaient qu'aux questions.

Elle fit disparaître le spectre, et se recroquevilla. Elle sentit la masse de Finn se rapprocher d'elle, et l'enlacer. La'ana posa sa tête sur l'épaule du jeune homme silencieux, et lâcha quelques larmes.

Au bout d'un petit moment, elle se détacha de l'étreinte de son ami et le remercia d'un faible sourire. Il devait être perdu à l'instant présent, mais il respectait sa réaction en la réconfortant.

« Je pense que je te dois quelques explications, commença La'ana d'une voix pâteuse.

— Si seulement, tu en as envie, répliqua Finn.

— Après ce qui vient de se passer, tu as le droit de savoir. Comme tu l'as compris, le roi es...était mon grand-père. Et comme tu le sais sûrement, il a été assassiné, il y a quinze ans.

— Par la princesse Via'ava, épouse du prince Me'rek, souffla Finn. Enfin ! C'est ce que l'on dit ! ajouta-t-il.

— Oui, c'est ce que l'on dit. Mais c'est faux. Ma mère n'a jamais comploté contre le roi ! asséna La'ana en haussant la voix. C'est un coup monté de mon oncle, Brez'ahe. Il voulait le trône, mais il revenait à mon père. Alors, il a tué le roi, et a fait passer ma mère pour la coupable.

— Oui, en plaçant une lettre de commande de poison dans son secrétaire. C'est cette lettre qui l'a confondue, rappela Finn. De plus, les médecins ont retrouvé les traces du poison, dans le corps et dans le verre.

— Exact. Brez'ahe savait pertinemment que jamais le peuple de croirait à un parricide et régicide de la part de mon père. Il était bien trop aimé et respecté. Il a positionné ma mère comme instigatrice, manipulant son mari pour la couvrir. Ma mère ne se doutait de rien, et quand la Garde Argentée est venue fouiller ses appartements royaux, ouverts de son plein gré, le piège s'est refermé.

— La princesse fut accusée de régicide, et le prince de complicité, si je me souviens bien de ce que l'on m'a dit. Le prince Brez'ahe ne réclamait aucune clémence envers ta mère, ni envers ton père. Il la voyait comme une sorcière ayant envouté le prince, nota Finn.

— Exact, il demandait leur mort, pour haute trahison, et notre exclusion de mes frères et moi de la légitimité à revendiquer le royaume. Mais quand mes parents se sont enfuis des cachots, grâce à l'aide de gardes loyaux, ils nous ont fait chercher par notre nourrice, Shaala, et nous nous sommes enfuis vers la forêt d'Imdaal, trouver refuge chez notre parente, la reine Lii'aashe. Nous sommes restés quelques mois, puis nous sommes partis sur Terre. Peu après notre arrivée sur cette nouvelle planète, la connexion entre les mondes s'est rompue. »

La'ana déglutie. Ils avaient passé des années cachés sur Terre ne sachant si des poursuivants se trouvaient bloqués eux aussi. Ses parents espéraient que le temps passé loin de Coss, réduirait à néant les ordres des assassins, désormais sans attache avec leur commanditaire. Mais avec la reconnexion, le roi Brez'ahe devait porter de nouveau son attention sur leur existence.

La'ana se trouvait protégée par les accords de Juggar, son oncle ne pouvait exercer aucune poursuite officielle à son encontre. De plus, de par son statut de Nécromancienne, elle renonçait à tous ses droits sur le trône. Elle ne posait ainsi pas de véritables problèmes pour le régicide, contrairement à ses frères, en particulier Na'arka, aîné de la fratrie, et donc principal héritier.

« La'ana ? »

La jeune femme leva le visage en direction de son ami. Une étincelle inquiète brillait dans ses yeux gris.

« Avec ce que l'on a découvert, reprit-il, nous pourrions rétablir la vérité.

— Il faudrait bien plus que ça Finn... Nous n'avons pas l'identité du commanditaire, et je doute que mon oncle soit assez stupide pour ne passer que par une seule personne. Il a dû user tout un réseau de larbins, d'espions, de mercenaires, que sais-je encore, pour couvrir la piste qui mène à lui ! »

Le sang bouillait dans ses veines. Elle était en colère, amère et triste. Son enfance se berçait dans la version de ses parents, lui assurant qu'ils étaient innocents et qu'ils avaient été piégés. Mais petite, elle se souvenait de cette nuit, où après avoir appris l'histoire, le doute l'avait effleurée. Et si, ses parents mentaient ?

Mais la nuit chassa vite cette ridicule réflexion, et le matin même elle se tenait convaincue du discours de ses parents et de ses frères. Elle n'avait plus jamais douté, enveloppée dans les secrets, la honte et la crainte, cela ne pouvait être que vrai. Et la haine prenait peu à peu place dans son esprit d'enfant, la haine envers un oncle dont elle ne gardait aucun souvenir. L'amertume d'une vie brisée.

Les neiges de Sahar lui semblaient bien brumeuses. Dans ses rêves ressurgissaient les silhouettes de la Garde Argentée, la garde royale, tout armées d'argent, impassibles et grandes. Mais aussi le pâle dessin du labyrinthe où elle courait tant, laissant crisser ses bottines dans la neige. C'était là, dans ce dédale blanc, que tout s'accéléra.

Ce fut d'abord un corps noir, perlé de rouge au détour d'un feuillage. Un feulement qui se teinta de peur. Le touché rêche d'un sombre plumage, et la morsure du froid. Puis un cri l'appelant. Des hurlements. Des pleurs. Des armes s'entrechoquant. Des bras la saisissant. Le bruit sourd d'une course effrénée.

C'était un amas d'images floues, d'odeurs âcres mêlant sang et peur, de bruits effrayants.

« Il n'y a qu'un seul moyen d'innocenter mes parents, déclara La'ana d'une voix froide. Arracher la vérité du corps sans vie du régicide.»

La'ana ne bougea pas devant la mine stupéfaite de Finn. Et elle ne prêta pas non plus attention, à l'insidieux sentiment qui s'agrippait à son cœur.

Un chuintement sur la porte la fit se retourner avec lenteur. Elle reconnaissait ce son particulier, les serres de Nekkus grattant.

Depuis son arrivée à la Citadelle, elle maîtrisait un peu son compagnon. Et elle arrivait à lui imprimer des tâches à effectuer dans la tête. Notamment, lui apporter son courrier. Ce n'était pas beaucoup, mais elle savait qu'en progressant, elle pourrait lui dicter bien plus de choses.

La Nécromancienne se leva pour ouvrir la porte. L'animal lâcha alors au sol une fine lettre cachetée, avant de se poser en un croassement sur son épaule.

La'ana haussa les sourcils en regardant l'expéditeur, ses parents. Elle avait pourtant reçu leur lettre hebdomadaire, plus tôt dans la semaine. Inquiète, La'ana ouvrit la lettre pour y trouver l'écriture élégante de sa mère, mais dans une mise en forme chaotique.

La'ana, ton frère Na'arka est parti de la maison. Nous pensons qu'il est sur Coss. S'il te plait ma chérie, essaye de le trouver !

La Nécromancienne froissa la lettre d'un mouvement sec.

Cette journée était un cauchemar.

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Hey !!

Tadam ! Toutes les révélations sur le passé du La'ana sont faites !

Wouha, j'ai vraiment adoré écrire ce chapitre ! 

Que pensez-vous de la réaction de La'ana ? Pour vous, est-ce une réaction à chaud ? Ou, est-ce que cela cache un mal plus profond...?

Dites-moi, où pensez vous que Na'arka se trouve ? Quel est son but ?

Merci de votre lecture !!! :D

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