Chapitre 35
« Il y a certaines vérités qu'il vaut mieux ne pas dire », Auteur inconnu
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Un jour ma mère m'a dit que c'était les choix que nous faisions qui définissait la personne que nous étions ou que nous allions devenir. Les choix que j'ai fais ces deniers temps n'ont rien de bien glorieux.
Après mûre réflexion, une fois sortie du bureau d'Elona, j'ai choisi d'aller courir et d'éviter les autres pour le moment. Je crois d'ailleurs que c'est la meilleure action que j'ai accomplie depuis le début de cette semaine.
La raison me dit que c'est de notre faute à toutes si nous nous retrouvons dans cette galère, mais mon cœur saignant lui hurle toutes sortes d'obscénités. Au-delà de ma peine de ne pas rentrer chez moi pour les congés de Noël, je suis furieuse tout particulièrement contre la voix.
Si elle n'était pas intervenue ce soir-là, j'aurais pu m'interposer avec Gaia contre cette idée, nous serons rentrées au QG, tout raconté et rien de tout ça ne serait jamais arrivé.
Nous n'aurions jamais su quelle genre de choses pouvaient se trouver de l'autre côté de la forêt et je serais restée sur ma faim concernant ma curiosité. Dieu seul sait à quel point j'aimerais retourner en arrière et tout effacer pour de bon.
Quand j'arrive sur le terrain de sport, c'est avec mécontentement que je vois qu'Adam et sa classe occupent une partie du terrain. Dans un soupir je vérifie l'heure sur ma montre et ce n'est définitivement pas son heure.
Après Ella, je pense bien que c'est Adam que j'apprécie le moins. Arrogant, malhonnête, fourbe et malpoli, voici les quatre mots qui le caractérisent à mes yeux.
Je ne sais toujours pas pourquoi il a assisté à notre entretien avec Elona, cependant je suis presque sûre qu'il a dû lui raconter notre petite entrevue à l'entrée de la forêt. J'ai les nerfs à vifs et je lâche tout lorsque ce dernier se tourne dans ma direction avant de m'adresser un signe de la main.
J'ai un haut le cœur et une bouffée de colère s'accapare de moi.
D'un pas furieux je me dirige vers lui alors qu'il s'est retourné pour parler à ses élèves. Cependant mon ardeur redescend un peu quand je repère Gabin parmi l'assemblée d'étudiants. Comme s'il l'avait deviné, lui aussi se tourne dans ma direction, mais je n'ose pas le fixer dans les yeux.
Lorsque j'atteins Adam qui est dos à moi, certains des garçons ont cessé leurs étirements et me regardent d'un air curieux et je leur donne bien raison. Il n'est pas courant que nous autres joueuses, osons venir vers eux et de surcroît toute seule.
- Gillian, m'interpelle-t-il toujours dos à moi et dans sa voix je perçois son sourire de con. Ce qui m'agace encore plus que je le suis.
- Je voudrais te parler seule deux minutes, dis-je sèchement. Il se tourne alors vers moi, son regard ardent me fixant d'une façon lubrique qui me met mal à l'aise.
- Tu peux bien même me parler toute la nuit si tu veux, susurre-t-il et son assemblée de crétins éclate de rire et moi la seule chose que j'ai envie d'éclater est son visage.
Je suis plus que révoltée par ses propos, cependant lui a l'air de bien s'amuser et ne se cache pas pour rigoler.
Je regarde les élèves derrière lui qui continuent de se marrer et je rencontre le regard de Gabin qui lui ne rit pas du tout.
- Pourquoi t'étais à notre entretien avec Elona ? Tu t'es éclaté à nous voir nous faire démonter ?, crié-je malgré moi exaspérée. Tous les autres cessent immédiatement de rigoler et l'expression d'Adam passe de l'amusement à une sorte d'impassibilité.
- Ok toi tu ..., commence-t-il en essayant de m'agripper le bras et je m'éloigne de lui encore plus furieuse.
- Je t'ai déjà dit de ne plus me toucher ! Qu'est ce qui ne va pas chez toi ?! , vociféré-je.
Je sais qu'il veut qu'on s'éloigne du groupe, et c'est ce que je fais, mais je suis malade rien qu'en pensant à sa peau contre la mienne.
- 100 pompes avant que je ne revienne, ordonne ce dernier à ses élèves avant de venir me rejoindre.
Lorsqu'il arrive à ma hauteur il adopte un air contrit qui étrangement me fait jubiler.
- Bien Gillian d'abord je souhaiterais que toi et moi établissions des règles, commence-t-il avant de se baisser vers moi et si près de mon visage que son souffle s'abat sur mon visage. Je me crispe tant je suis gênée par cette position, il a d'ailleurs l'air de s'en rendre compte et esquisse un sourire en coin avant de poursuivre, plus jamais tu ne hausses le ton sur moi.
Mes yeux s'écarquillent quand je le vois se rapprocher encore plus de mon visage et à l'entente de ses propos.
Furieuse, je le repousse brutalement. Il ne bouge que de quelques centimètres, et regarde par-dessus mon épaule avant de se redresser en toute tranquillité mais sans bouger. C'est moi qui me recule avant de le regarder de haut en bas. Il ya une mini joute qui se fait dans ma tête entre m'adresser à lui en disant « tu » et « vous » tant je suis hors de moi. Je choisis « vous », ça mettra plus que de la distance physique entre nous
- La seule chose que devriez penser à rétablir est votre respect. Ne me parlez plus jamais comme vous venez de le faire
Il ricane.
- Nous sommes au « vous » maintenant ?
- En tant que professeur et mentor vous devriez montrer l'exemple et arrêter de dire des conneries, dis-je en ignorant sa remarque précédente. La fausse moue attendrie qu'il m'adresse me met hors de moi et je réplique plus vivement, vous faisiez quoi dans l'amphithéâtre avec Elona ?! Qu'est ce que vous lui avez dit ?
- Oh Gillian je t'en prie je n'ai rien dit à Elona qui aurait conduit à la sanction qu'elle vous a donnée, dit-il de façon nonchalante avant de fourrer ses mains dans ses poches. Cette attitude, ainsi que ma colère et mes nerfs en ébullition me font monter les larmes aux yeux. Dans ma vision embuée de larmes je discerne un Adam plus aussi sûr de lui.
- Je suis vraiment désolé pour tes copines et toi, dit-il avec une sincérité qui me surprend, mais ça ne suffit pas pour me calmer. Ça m'énerve encore plus d'ailleurs.
Je renifle et ravale mes larmes.
- Ouai bien sûr, vous êtes désolé, dis-je sarcastiquement sur un ton cassant et il arque les sourcils et je continue, non mais ce n'est pas croyable ! Ca ne vous suffit pas de rendre notre séjour un véritable enfer ?! Dés que vous en avez l'occasion, vous nous rappelez à quel point les « garous » sont au dessus de tout ! Ne me dîtes pas que vous êtes désolé parce que vous ne l'êtes pas ! C'est tellement hypocrite de votre part de me dire ça maintenant ! Quand vos élèves se comportent comme des animaux sauvages et nous agressent, là vous n'êtes pas désolé ! Vous n'intervenez pas ! Vous ne réagissez pas ! Vous ne faites rien !
Vous n'avez pas pu la fermer ?! , crié-je. Surpris ses yeux s'écarquillent et je crie encore plus fort, vous avez dit quoi Elona ? Vous lui avez dit quoi ?
- Je n'ai rien dit, dit-il froidement et j'explose.
- Evidemment que vous lui avez dit quelque chose ! Pourquoi tu mens ?!, hurlé-je hors de moi.
- Et bien je mens de la même manière que vous avez menti à Dame Elona.
Je m'étouffe avec ma propre salive et je ne réponds plus de rien.
Comment ose-t-il ? Enragée, je prends mon élan et avant que ma main ne percute sa joue, elle est interceptée par derrière, et d'un mouvement brusque on me fait valser en arrière. Je me retrouve alors face à Gabin qui lâche doucement mon poignet.
- Gillian, m'appelle une voix que je reconnais comme étant celle d'AR mais je suis incapable de répondre, totalement sous l'emprise du regard de Gabin.
- Ça suffit, dit-il dans un murmure. Ses pupilles sont sombres et dilatées. Les traits de son visage sont aussi beaux que la dernière que fois je les ai vus.
J'ai envie de lui dire ma manière de penser sur son comportement comme je viens de le faire à Adam, mais tout mon courage et mon peps semblent s'être envolés d'un coup. Tous les autres nous regardent et je me dégage de son emprise.
- Allez tous vous faire voir, craché-je avant de contourner Adam et de partir vers le bâtiment des dortoirs, dépassant une AR effarée.
Je l'entends marcher derrière moi, mais mon esprit reste focalisé sur Adam. J'étais à deux doigts de le frapper, et évidement il a fallut que Gabin s'interpose. Pourtant Dieu seul sait à quel point ça m'aurait soulagé.
- Gillian, finit par m'interpeller AR en m'agrippant le bras pour que je me retourne. Je souffle profondément avant de m'exécuter.
- Gillian est ce que ça va ? , me demande-t-elle d'un air inquiet qui aurait pu me radoucir, mais je suis de trop bien mauvaise humeur pour que ça arrive.
- Qu'est ce que tu fais ici Amber-Rose ?, la questionné-je en retour en prenant un air ennuyé.
- Je te cherchais. Elona est passée au QG et nous a informées de votre punition.
Je soupire et l'émotion me serre la poitrine.
Je gardais à l'esprit que j'étais punie, et que j'allais restée ici pendant deux semaines au lieu de les passer avec ma famille, mais l'entendre être dit par quelqu'un d'autre qui n'est ni Elona, ni Lau, ni Joyce et ni Gaia me percute en plein fouet. Ça le concrétise.
Tout ça est bien réel, tout ce qu'on a pu faire et qui nous a conduit à ça c'est vraiment passé.
- Gillian, ça va ? Tu es toute blanche, me fait-elle remarquer en posant une main sur mon épaule.
Je ferme les yeux et déglutis difficilement avant de les ré-ouvrir.
- Je sais que c'est dur tu sais?, me dit elle doucement et j'ai envie de hurler.
Non ! bien sûr qu'elle ne sait pas ! Ce n'est pas juste le fait d'être privé de mes vacances ! En restant ici, je suis continuellement dans ce cercle vicieux de mensonges et de voix insipides qui me susurrent à l'oreille. J'ai vécu mon cauchemar de cet-après midi et je suis morte de trouille d'en revivre un autre.
Je fais des rêves plus que bizarres et je ne sais pas si je dois leur accorder du crédit ou non.
- J'aurais juste voulu quitter cet endroit, ne serait-ce qu'une journée, déclaré-je la gorge nouée et AR me regarde comme si elle me voyait pour la première fois. Elle fronce les sourcils et s'approche de moi.
- Tu as le droit d'être dégoûtée tu sais ?, me dit-elle et je ne fais qu'acquiescer.
- Je sais que ça fait juste quatre mois qu'on est là, mais j'en ai tellement marre, je lève les yeux au ciel avant de regarder de nouveau AR, je me sens tellement seule. Je sais que vous êtes là et qu'on est toutes ensemble, mais c'est difficile de se sentir bien quand la plus part des gens vous montrent que vous n'en avez pas le droit
- On s'en fout d'eux, dit AR sans aucune conviction ou du moins avec très peu dans la voix.
- Non on ne s'en fout pas et tu le sais. On n'est pas chez nous ici et ils nous mentent depuis notre arrivée. On ne sera jamais accepté et traité comme ils traitent Elana.
Son expression se durcit et je me rappelle alors que depuis ce qui est arrivé au camping, AR ne porte plus vraiment Elana dans son cœur.
- Je sais, soupire-t-elle, on est obligées de rester un an, c'est dans le contrat, termine-t-elle et je fronce les sourcils.
- Le contrat ? Mais quel contrat ?
C'est autour d'AR de froncer les sourcils.
- Comment ça quel contrat ?, répète-telle agacée, mais celui qu'on a signé avant de venir ! Et je continue à dire que nous obliger à porter des gilets n'y était pas.
Enterrer des gens aussi
Ce que je me garde bien de dire...
- Je n'ai rien signé moi, dis-je perdue
- Tes parents ont dû le faire alors, c'était obligatoire.
Pourquoi diable mes parents auraient-ils fait ça sans m'en parler. Je doute fort qu'AR soit en train de mentir, donc mes soupçons avant de venir à Dom me reviennent. J'étais sûre qu'ils me cachaient quelque chose. Mais quoi ? Je ne sais pas. Cependant AR sans le savoir vient de me donner une piste.
Le rêve que j'ai fait sur mon père et Rochelle me revient alors à l'esprit.
Que s'est-il vraiment passé ?
- Et le contrat disait quoi ? , demandé-je et AR hausse les épaules.
- Je ne sais plus vraiment, c'est toute une liste de règles à suivre. Je crois l'avoir encore.
- Vraiment ? Tu pourrais me le donner ?, demandé-je vivement et AR ricane.
- Oui bien sûr. A condition que je le retrouve.
J'acquiesce.
- Tu sais Gillian, quand je suis allée parler avec les autres de leur punition, elles n'ont pas réagi comme toi. A mon avis tu es la plus honnête de vous quatre, dit-elle et je fronce les sourcils. Comment suis-je censée le prendre ? Qu'est-ce qu'elle veut dire ?
Détectant mon incompréhension sans doute, elle rajoute,
- Ce que je veux dire, c'est que apparemment vous avez fait la même bêtise n'est ce pas ?, j'acquiesce. Pour cela il fallait qu'il y ait un intérêt commun non ?, j'acquiesce de nouveau très intéressée par la tournure qu'elle essaie d'emprunter. Justement je suis sûre que votre intérêt commun est bidon. Si vous avez fait ce que vous avez fait c'est que chacune de vous le faisait pour une raison bien précise et vous n'avez certainement pas la même toutes les quatre.
- Pourquoi tu dis ça ? , demandé-je, frustrée par cette observation car après tout AR ne sait pas ce que nous avons fait comme « bêtise » et si les autres ont fait ce qu'elles ont fait outre parce qu'elles avaient peur, je crois qu'il y a un problème.
Pour ma part, si la voix n'était pas intervenue je n'aurais jamais enterrée cette pauvre fille.
- Quand Elona est partie après nous avoir fait l'annonce à toutes, tu aurais dû les voir. C'est vrai que Lau n'avait pas l'air bien du tout mais elle n'a rien dit. Pourquoi ? Est-ce qu'elle s'en veut ? Tu t'en veux toi ? , me demande-t-elle et j'ai envie de lui hurler « oui ». Bien sûr que je m'en veux. A chaque fois que le souvenir de la forêt me vient, j'ai la nausée qui monte ainsi que le regret qui me broie les tripes.
- Et Joyce, poursuit-elle, Joyce a parlé, mais pas une seule fois elle n'a évoqué ses parents ou le Noël qu'elle rate. Non, elle a passé tout son temps à dire que ce n'était pas juste, qu'Elona ne savait même pas la vérité que sinon la sanction serait pire.
- Joyce a dit ça ? , répété-je blasée et elle acquiesce.
- Pourquoi faire semblant d'être en colère en inventant un faux prétexte ? Parce que je l'ai tout de suite captée Gillian et tu sais pourquoi ? Je la regarde attentivement en faisant non de la tête, parce pendant des semaines je l'entendais te dire à quel point elle avait hâte de rentrer. Qu'elle en serait malade si ce n'était pas le cas. Et là elle veut une punition plus dure que celle que vous allez subir ?
AR ricane, et je me rends compte à quel point son analyse est juste.
- Joyce fait semblant, je ne sais pas pourquoi mais elle a adopté une attitude complètement contradictoire à la situation, mais elle a fait semblant. Lau quant à elle s'est contenu et quant à Gaia , AR ricane, elle je ne sais pas si elle est débile ou quelque chose dans le genre mais elle n'a pas réagit. Ça ne lui a fait ni chaud ni froid, elle aurait réagit pareil si on lui avait dit que les oiseaux savaient voler.
Donc d'après toi que traduisent ces comportements : feindre la colère, se renfermer sur soi et feindre l'ignorance ?
- Le mensonge, dis-je doucement n'y croyant pas moi-même.
AR me fait un large sourire.
- Evidemment qu'elles mentent, pourtant toi quand je te parle je te sens honnête, tu ne triches pas.
Je déglutis difficilement et quelques fragments de cette nuit là me reviennent en tête
« Et on fait quoi du corps ? », avait demandé Joyce
« On va l'enterrer », avait répondu Lau.
Gaia a protesté alors que Joyce et moi avons suivit. Moi à cause de la voix mais elle, Joyce, pourquoi l'a-t-elle fait ?
Je soupire car je ne sais pas quoi répondre à AR. Cette dernière s'en rend compte et presse une de mes épaules avec sa main. Elle fronce les sourcils, puis les défronce.
- Qu'est ce que vous avez fais de si grave ? , me demande-t-elle sur un ton léger qui me fait craquer. Les larmes me montent aux yeux et je secoue la tête.
- Je me sens sale et horrible, dis-je avec difficulté la gorge très sèche, c'est quelque chose que je ne peux pas dire.
Elle acquiesce d'un air compréhensif.
- On a tous nos vilains secrets, dit-elle sur un ton bas comme si elle avait peur que l'on nous entende, sauf qu'en général il faut évitez de les partager avec des menteuses.
Je ne sais pas quoi répondre, donc j'acquiesce aussi.
Je me sens tout à coup nerveuse quand AR me regarde droit dans les yeux avant de me dire d'une vox déterminée
- Aide-moi à trouver à l'imposteur.
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