Chapitre 16
" Le sentiment de ne pas être aimé est la plus grande des pauvretés", Mère Térésa.
***
Les jours qui ont suivi le cours d'Elona à propos de la mort tragique de notre ancêtre se sont déroulés passablement bien. Je n'ai plus fait d'escapade à la bibliothèque abandonnée, pas que l'envie me manquait, mais depuis ce fameux « soir », je n'ai plus osé trop prendre de risque. Et en même temps, j'étais assez anxieuse, surtout concernant ce garçon, Gabin.
Je ne connais rien de lui, je ne l'ai jamais croisé dans les couloirs de l'institut, et ce n'est peut être pas une bonne idée de me retrouver seule en sa compagnie, dans cet endroit désert. Il pourrait m'arriver des tas de trucs là bas, sans que personne ne puisse venir m'aider.
- Gillian, m'appelle Elana, m'extirpant totalement de mes pensées. C'est drôle de le dire, mais ça fait pratiquement trois semaines que nous sommes arrivées ici. Au départ je trouvais étrange de me retrouver seule avec Elana. Les professeurs l'appelaient « votre majesté », et ça me rendait mal à l'aise de le faire aussi car on a le même âge.
Heureusement, elle nous dispense de cette corvée, et nous permet de l'appeler tout simplement par son prénom.
- Oui ?
- Tu m'avais promis de me prêter la robe que tu portais hier pour le dîner de ce soir.
- Ah oui, c'est vrai.
Je me lève de mon lit pour aller au dressing, et prendre le vêtement demandé. Elana reste à l'encadrement de la porte. Je le lui remets et elle me remercie d'un large sourire.
Je me repositionne sur mon matelas et retourne dans mes réflexions. Ce dîner, je l'avais complètement oublié. Il est organisé par les racines et d'après ce que nous a dit Rochelle, toutes les 30 lunes, l'une des années doit en organiser un. C'est notre premier et c'est eux qui le font.
Maintenant que j'y pense, je suis assez excitée à cette idée, car autant le dire. Depuis que je suis ici, c'est-à-dire depuis 1 mois, c'est un évènement qui nous change de l'ordinaire et si je puis dire, nous met en contact avec les autres.
Parfois j'ai l'impression que nous sommes les seules dans l'établissement. Nous sommes évitées soigneusement comme la peste. Et quand je dis ça, ça n'englobe que les filles et moi, pas Elana.
Elana n'est pas mis à l'écart car plusieurs fois je l'ai vue par la fenêtre, se faire aborder par la plus part des garous. J'ai presque envie de dire qu'ils ne nous aiment pas car nous ne sommes pas de Dom. Peut-être est-ce leur esprit de « compatriotisme », qui les mènent à se conduire de la sorte : c'est-à-dire ne prendre aucun couloir commun au nôtre, nous regarder de travers, et ô grand jamais nous parler.
Le message est on ne peut plus clair, à moins d'être débile.
*******
Ma famille me manque.
C'est la seule pensée qui me vient à l'esprit lorsque je finis de me préparer. Etrangement, plus que les autres fois jusqu'ici, je ressens ce manque.
Celui que j'ai sûrement craint avant d'arriver ici. Je me sens plus seule que jamais, et je me sens si mal.
Je veux dire on arrivera, personne ne nous parlera, la salle se fera certainement silencieuse à notre arrivée, et...
- T'as fini ?, Joyce passe sa tête par l'entrebâillement de ma porte. Je me détourne du miroir accroché à la porte de ma penderie.
- Oui, je réponds. Elle me regarde en fronçant les sourcils.
- Je croyais que tu mettrais la bleue, me dit-elle en regardant ma robe.
Je hausse les épaules. En effet j'avais décidé de porter, ma robe bustier bleu qu'avait beaucoup appréciée mon amie, mais je l'ai remplacé en dernière minute, par une orange, aux manches courtes centré sur la taille.
- J'ai changé, je réponds et Joyce fait la moue. Je finis par comprendre.
- Tu la voulais pour ce soir ?, Joyce me fait un faux sourire embarrassée car je sais qu'elle ne l'est pas. Joyce s'en fiche, tout ce qu'elle veut c'est la robe.
- Oui.
Je roule des yeux à sa voix mielleuse et va la lui chercher. Elle la prend et rentre dans ma chambre, avant de s'enfermer dans la salle de bain.
Lorsque Joyce et moi arrivons au salon, toutes les filles sont déjà là. Amber-Rose nous regarde contrariée, d'un mauvais œil, ce qui n'échappe à mon amie.
- T'as un problème ?
Danielle soupire et Stéphanie roule des yeux. Difficile de ne pas les imiter car nous revoilà partie pour un bon moment. Lors des premières semaines, ces deux là avaient l'air de ne pas s'entendre vraiment, puis il y avait eut comme un effet de sympathie qui est très vite parti, les découvrant sur leurs vrai jours. Je veux dire que Joyce et Amber-Rose font partie de ces gens qui ne s'aiment pas et qui ne s'en cachent pas. Je dirais même que c'est le contraire. Tout occasion est bonne pour se lancer des piques.
- Il n'y a aucun problème, on y va , les coupe Lau et je la remercie de tout mon cœur pour cela.
Nous sommes les premières dans la salle commune mis à part les racines. Ces derniers viennent à notre rencontre, et je suis agréablement surprise par leur «avenant accueil», pour des gens qui nous ont quand même ignorées depuis notre arrivée dans cette école. Ils nous placent à une table géante. Sans notre avis, ils nous disposent à leur bon gré, ainsi je me retrouve entre Elana et Amber-Rose.
Quelques instants plus tard, notre mentor ainsi que nos deux autres professeurs arrivent. Elona, s'arrête et parle avec certaines racines, tandis que Rochelle et Mau viennent vers nous. Nous nous levons à leur approche, et Joyce ne perd pas de temps avant de commencer à se plaindre du plan de table forcé, car elle est obligée d'être près d'Amber-Rose. Celle-ci l'ignore délibérément et sourit grandement au garçon racine qui pose une bouteille d'eau de vie en face de nous. Rochelle finit par demander à Joyce de se calmer et cette dernière se renfrogne. Elana est en grande discussion avec Gaia et Danielle, qui sont de son côté de la table, tandis que de celui de Amber-Rose, se trouve Joyce, puis Lau et enfin Stéphanie. Rochelle est assise près de Steph, Mau avec elle.
Joyce boude alors que Lau est entrain de lui parler, lui disant je ne sais trop quoi. De mon côté je ne dis rien, Amber-Rose non plus. Elle remplit sa coupe d'eau de vie avant d'en faire de même avec la mienne. Je la regarde assez surprise, elle me sourit drôlement.
- La soirée va être longue, dit-elle, puis elle prend une gorgée. Je m'apprête à en faire de même lorsque les chaises en face de nous grincent. Lorsque je lève les yeux pour voir, je manque de faire tomber mon verre.
Adam et quelques-uns de ses élèves prennent place. Parmi eux j'en reconnais deux. Mon estomac se tord à la vue de la robe blanche d'Ella. Ses yeux captent les miens et ses lèvres ensanglantées de rouge à lèvre se courbent en un sourire narquois. Puis mon regard rencontre celui de son voisin qui n'est autre que Gabin. Le garçon de la bibliothèque. Un quart de seconde je panique, tellement que je pense une minute à me cacher sous la table.
Mais cette idée absurde me quitte lorsqu'il détourne le regard.
Sûrement par orgueil, je me sens blessée par son ignorance. On a peut être pas joué au Monopoly, mais de là à m'ignorer totalement, comme si on ne s'était jamais vu avant.
Nerveuse, je bois d'une traite ma coupe.
****
- Sérieux mais on s'en fout, dit Joyce. Amber-Rose qui est à ma gauche a le corps tourné vers elle complètement tendue.
Je n'entends pas la réponse de ma voisine, mon esprit divague un peu. Au creux de mon oreille résonne une douce mélodie. Elle s'estompe puis recommence.
- C'est quoi cette musique ?, je demande la voix un peu pâteuse. Elana ne m'écoute pas vraiment car elle parle avec nos voisins d'en face.
- Elana, je l'interpelle assez fort pour que ses interlocuteurs qui ne sont autre qu'Adam et sa clique, s'arrête de parler pour me regarder.
- Qu'est ce qu'il y a Gillian ?, me demande finalement la princesse.
- C'est quoi cette musique ?
Il y a un ricanement suite à ma question.
- Tu ne sais pas ce que c'est ?, je me tourne vers Ella agacée. Appuyée négligemment sur Gabin, son voisin. Elle me regarde narquoisement. Je l'ignore, et boit d'une traite ma coupe. C'est quoi son problème ?
- Elle est émise par des louloutes. Ce sont des êtres éphémères que l'on trouve dans la forêt qui émettent un chant, me dit Elana.
- Mais on ne les voit pas ?
- Elles sont très petites. Et elles ne se voient que dans l'obscurité, me dit-elle en souriant. Je lui souris aussi, et elle retourne à sa conversation avec les autres.
Nous avons finit de manger, et pour je ne sais quelle raison, nous sommes toujours attablées. Au début il y avait assez de gêne, surtout que personne ne nous parlait. Et puis ça c'est détendu.
Enfin presque, Amber-Rose et Joyce se sont cherchées tout le long, et je crois qu'elles ont finit par se trouver, car là elles ont l'air de se disputer.
- Tu me fais chier, vocifère Joyce à propos de je ne sais quoi.
- Tu me fais pitié, rétorque Amber-Rose.
Je commence à les trouver ridicule à se disputer là, devant tout le monde, pour rien en plus. N'importe quel sujet entre ces deux là est un bon prétexte pour se battre.
Certes elles ne s'apprécient, mais je trouve que dans certaines situations, c'est assez malvenu car nous sommes liées à rester et vivre ensemble pendant une année. Ça ne fait qu'un mois, mais j'ai l'impression que ça fait bien plus.
Je remplis ma coupe lorsque Rochelle et Mau se lèvent nous signalant le départ. Les garous sont toujours là, ainsi que les racines. J'ai cru entendre dire par Adam qu'ils allaient les aider à ranger ou quelque chose comme ça.
Lorsque je suis debout, je tangue légèrement et m'accroche un peu à Elana pour ne pas tomber. Je regarde Gabin, qui a passé la soirée à m'ignorer sans pour autant fuir mon regard une seule fois lorsqu'il s'accrochait au sien.
Je me retrouve à lui sourire, geste qu'il ne me rend pas, au contraire il fronce les sourcils, puis je souris à Ella qui arque un sourcil. Adam se lève aussi pour je ne sais quelle raison. Il dit quelque chose à Elana et je ne comprends rien, je préfère me focaliser sur le ronronnement mélodieux des louloutes. Je récupère mon verre et avant qu'il n'arrive à mes lèvres, il me l'est retiré.
J'écarquille les yeux lorsque je le vois entre les doigts d'Adam.
- C'est mon verre, je geins.
- Je crois que t'en as eu assez pour ce soir, dit-il avant d'en boire le contenu.
- Tu bois mon verre, je dis plus vivement et je ne sais pas pourquoi je me sens si furieuse pour ça seulement.
- Plus maintenant.
Il sourit et j'ai envie de le gifler pour ça. Elana me prend par le bras et commence à m'emmener, nous suivons les autres. Bêtement je la suis vers la sortie, je me sens bizarre.
- Il a pris mon verre, Elana.
Cette dernière m'ignore, tandis que nous traversons maintenant le couloir. Nous pénétrons au QG dans un silence de plomb, personne ne dit rien.
- Pourquoi vous ne parlez pas ?, je demande et les filles me regardent toutes surprises. Moi-même je le suis, mais je n'arrive pas à contrôler correctement ma langue.
- Gillian tais toi, m'ordonne Elana durement. Son visage est fermé comme si elle était contrariée puis elle nous regarde toutes, vous avez vraiment été nulles ce soir. C'était un test dans le cadre du social de Dom, pour le cours de Rochelle et vous avez tout gâché, surtout vous deux, (elle pointe du doigt Joyce et Amber-Rose) . C'était l'occasion de faire accepter notre classe aux autres et maintenant c'est finit. Vraiment bravo.
Personne ne répond. Je ne sais pas ce que l'on pourrait dire après ça. Je hausse les épaules.
- Dommage, mais bonne nuit.
J'entends Elana me dire de revenir immédiatement, mais je l'ignore comme elle l'a fait tout à l'heure dans le couloir avec moi.
Je ne me déshabille même pas et me laisse tomber sur mon lit et ferme les yeux instantanément.
Gillian vient à moi.
comb?
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