Chapitre 12


« Derrière chaque peur se cache un désir », Auteur inconnu.

*~

Je tombe lourdement à quatre pattes et mes yeux s'écarquillent sous le choc. Les effets de l'eau de vie semblent avoir disparus, car promptement je me retourne pour regarder le couloir qui est de l'autre côté

- Putain, marmonné-je légèrement confuse quoi qu'au fond, je ne devrais pas être surprise. Tournant sur moi-même, j'examine les lieux.

La pièce est très grande et a l'air ancienne. A vue d'œil, on dirait une bibliothèque, plus précisément une vieille bibliothèque. Un peu devant, à ma droite, il y a un bureau comme celui derrière lequel les documentalistes travaillent. Je me relève, et mon souffle reste coincé dans ma gorge. Tout comme la porte, il y a le même effet de miroir au plafond qui laisse voir directement le ciel et c'est magnifique.

C'est sombre et si profond que je me laisse me perdre dans la contemplation : la lune et les étoiles ont l'air insignifiant dans cette mare d'obscurité. Au bout d'un moment je suis obligée de baisser la tête car mon cou commence à me faire souffrir.

Subjuguée, j'arpente la pièce, en continuant d'observer autour de moi. Il y a de nombreuses étagères pleines de livres et vu la couche de poussière qui jouit sur le parquet, il est clair que ça fait une éternité que personne n'est venu ici.

Au bout de la pièce, je débouche sur un escalier. C'est alors que je remarque les remparts justes au-dessus de ma tête. Pendant un quart de secondes, je réfléchis me demandant si je dois monter ou non . Je pèse le pour et le contre, si par malheur je tombe ici, il n'y a aucune chance que l'on vienne m'aider. Cette pièce est cachée et ressemble beaucoup à un piège.

Ma réflexion me fait froncer le nez, puis la curiosité prenant le dessus, je commence à gravir les marches.

L'air à l'étage change. Il est un peu lourd mais à la fois léger. Ici il n'y a pas de livres mais que des tableaux et des statues.

Je me mets à arpenter l'espace et à examiner les œuvres d'arts. Intriguée par une toile en particulier, je me poste devant cette dernière pour l'étudier. Contrairement aux autres qui ne représentaient que des paysages, sur celle-ci se trouve quatre jeunes filles qui ont le sourire aux lèvres, le regard malicieux et les cheveux au vent. Elles se tiennent toutes par la main.

Par contre leur accoutrement me refroidit. Il y a un minimum de clarté qui me permet de bien les discerner lorsque je m'approche suffisamment. L'une d'entre elles, brune aux traits fins, porte une robe bleue nuit, celle à sa gauche, brune aussi, a une robe rose pâle, près de cette dernière, une blonde aux yeux bleus, en a une rouge écarlate, la dernière porte une robe de couleur beige, ses cheveux eux sont presque noirs.

La gorge nouée, je passe à l'œuvre suivante qui est une statue. Elle fait très réaliste car cette dernière est posée à même le sol. C'est un jeune homme, quelque peu plus grand que moi. On dirait bien qu'il a mon âge et contrairement aux autres sculptures, celle-ci à l'air récente.

Son costume est bleu nuit, j'en déduis donc que c'est la représentation d'un garou. Il me fait penser aux joueurs de foot qui sont en défense, un peu baraqué, néanmoins il est svelte. Pour une sculpture, la couleur est hâlée, un peu foncée. Le regard est très bien réussi, car il n'est pas vitreux du tout. Deux orbites, que je dirais noisettes, mais étant dans l'obscurité elles sont noires et les cheveux sont en bataille.

J'aimerais me détourner mais je suis trop subjuguée, jamais de ma vie je n'ai vu quelque chose d'aussi réussi. A Chealsea, ma mère aimait bien aller voir les expositions, néanmoins c'est bien la première fois que j'en vois d'aussi bien fait.

Intriguée, j'approche ma main de la chevelure en pierre en quête de plus de compréhension mais quelque chose d'improbable arrive : lorsque mes doigts rentrent en contact avec, c'est doux sous mes doigts.

Mon regard rencontre celui de la statue, et cette dernière cligne des yeux. Mon cœur rate un battement, mes yeux s'écarquillent alors que je me recule, incapable d'émettre le moindre son. La statue s'anime, et plaque sa main sur ma bouche, me retenant fermement par le poignet.

Je me débats, mais le garçon me fait reculer jusqu'à ce que mon dos touche la rambarde derrière. Je commence à réellement paniquer lorsqu'il me fait me pencher vers l'arrière et que je sens mes cheveux pendouiller dans le vide.

Ma main agrippant la sienne qui est sur ma bouche se resserre. Il reste dans cette position et me regarde dans le blanc des yeux.

Mon cœur bat à tout rompre : un seul mouvement de sa part et je bascule de l'autre côté.

Son regard toujours planté dans le mien, je discerne par notre proximité la couleur de ses iris : noisette.

La constatation de ce détail est absurde compte tenu de la situation. Je sens les larmes monter lorsque je réalise qu'il pourrait très bien me lâcher là maintenant. Je m'écraserai au sol et Dieu seul sait combien de temps on prendrait à retrouver mon corps si ça arrive.

Un frisson me parcours l'échine et mon estomac se noue. C'est alors que mon agresseur se rapproche encore plus. Les battements de mon cœur redoublent. Son corps frôle le mien, mes pupilles se dilatent. Terrifiée mais à la fois mal à l'aise, je tente de me dégager mais sans succès. C'est alors que l'inconnu penche son corps sur le mien. J'arrête de respirer car ses hanches touchent les miennes, je ferme fortement les paupières.

S'il me viole qu'est ce que je pourrais faire ? Je ne bouge plus et lui non plus.

Puis il me renifle. J'ouvre les yeux abasourdie, mais lui ne me voit pas. Il retient toujours mes poignets d'une main et de l'autre ma bouche. Son nez vagabonde sur la peau de mon cou. Je suis totalement crispée. Il relève la tête, les sourcils froncés.

Il me renifle de nouveau, et ce à quoi j'aspire depuis plusieurs minutes déjà arrive, il me lâche. Doucement, heureusement, sinon j'aurais pu glisser et basculer. Progressivement il s'éloigne de moi jusqu'à enfin retirer sa main de ma bouche. Il recule en arrière et moi je fais des pas de côtés m'éloignant de lui. Il me regarde de bas en haut toujours les sourcils froncés.

- Joueuse, murmure-t-il presque. Mes mains deviennent subitement moites. Je les sens légèrement trembler, et dans un effort vain, je tente de serrer les pans de ma robe avec mais sans succès. Mes bras sont tout mous.

- Garou, dis-je à mon tour. J'ai cessé de faire mes pas de côtés. Je suis assez loin de lui, mais proche des escaliers. Je n'attends que le bon moment pour m'en aller.

- Comment tu es venue ici ?, demande-t-il et je hausse les épaules.

- Je crois que je vais y aller, dis-je d'une voix étranglée par l'émotion. Il hoche la tête et place ses mains dans les poches avant de son costume.

- Ce serait mieux, répond-il alors que j'ai le dos tourné.

Je n'ose pas lui faire face et je me dépêche donc de descendre les marches. Je reprends le chemin emprunté pour venir jusqu'ici et atterri de nouveau devant la glace. L'autre côté du couloir est toujours aussi vide. Dans un élan de courage je me retourne et regarde vers le haut. Ma respiration se coupe lorsque je vois qu'il est toujours là debout, à la même place m'observant : aucune n'ombre sur le visage, les mains dans les poches.

Je me détourne promptement et passe de l'autre côté sans réfléchir.

******~

J'ai entendu les filles rentrer, je dirais à peu près deux heures après que je l'ai fait moi-même. Je ne sais pas quelle heure il est mais étant donné que je suis la première debout, je prépare le petit déjeuner. Je mets la table et pose tout ce qu'il faut avant de prendre place pour attendre que les autres viennent.

A mon réveil, accroché dans ma penderie, j'ai été surprise d'y trouver un long gilet, rouge écarlate à manches trois quarts avec mon nom écrit au dos.

« Gillian la joueuse ».

Puis je me suis rappelée de ce qu'avait dit Rochelle concernant nos « uniformes », et j'imagine que c'est de ça qu'elle parlait.

- Bonjour, fait une voix derrière moi. L'instant d'après Gaia apparait dans mon champ de vision. Elle porte aussi le gilet.

- Bonjour, répondé-je tandis qu'elle prend place. Elle se sert un verre de lait avant de ma passer la carafe.

- T'es matinale aujourd'hui ?

- Je suis rentrée la première.

Elle hoche doucement la tête puis plisse les yeux.

- C'est vrai, commence-t-elle d'un ton est un peu vague, puis d'un air intrigué elle continue, « tu ne te sens pas un peu dans les vapes ? »

- Quoi à cause de l'eau de vie d'hier ?, demandé-je et elle acquiesce. Je pince alors les lèvres. Oui, j'étais dans les vapes, bien avant ma rencontre avec le garou dans l'autre espèce de bibliothèque. Mais après, on pourrait dire que j'ai complètement dessoûlé.

- Non ça va, lui répondé-je en mentant ouvertement. Durant une fraction de secondes, je me sens mal de 'mentir', mais est ce que je devrais dire à quelqu'un ma découverte d'hier soir ?

- Tu as de la chance, bougonne-t-elle. Elle prend une gorgée de sa tasse. Je ne peux m'empêcher de sourire. Puis je repense à notre première rencontre il y a à peine trois jours.

- C'est dingue. La première fois qu'on s'est vu, si j'avais pu, je t'aurais giflé, lui avoué-je et Gaia rigole.

- Sérieusement ?, me demande-t-elle le sourire aux lèvres.

- Je te jure ! Je n'arrivais pas à te comprendre, j'ai bien cru un moment que Rochelle t'avait payé.

Elle a toujours son sourire aux lèvres, mais il n'atteint plus ses yeux. Je me demande aussitôt si je n'ai pas dis quelques chose de déplacé.

Un silence malaisé s'installe suite à ça, mais il est de courte durée, car la porte de la cuisine s'ouvre, laissant apparaître à sa suite, les filles.

Un méli-mélo de bonjour s'enchaîne. Elles s'installent et c'est là que je la remarque. La fille d'hier, celle du roi.

Les filles discutent sans prêter attention et j'hésite à me présenter. Les mots restent en travers de ma gorge. Mais lorsque nos regards se croisent mon anxiété disparaît. La fille me sourit.

- Je suis Elana, se présente-t-elle d'une voix posée et ferme. Elle se tient droite, les cheveux ramenés en chignon, un visage gracieux.

- Gillian.

Elle hoche la tête et Amber-Rose qui est à ses côtés l'intercepte, pour lui parler de je ne sais quoi.

- Tu es rentrée tôt hier, me glisse Joyce. Je me tourne vers elle.

- Oui, je me sentais... dépassée, avoué-je. Elle acquiesce.

- C'est vrai que c'était bizarre, dit elle en regardant Elana, « tu te rends compte, ils en sont encore au système de moyen âge »

- Je ne crois pas que ça soit ça, réponde-je sans vraiment réfléchir, « c'est peut-être plus complexe »

- Comme quoi ?

- Je ne sais pas, dis-je en haussant les épaules, puis parle plus bas, « mais le roi est quand même un garou »

- Et sa fille une joueuse, complète-t-elle et j'acquiesce.

- Ça n'a pas de sens.

Joyce croise ses bras sur sa poitrine.

- De toute façon nous avons cours avec Elona tout de suite. C'est elle qui enseigne l'histoire de Dom, on lui posera la question.

Nos discussions sont coupées par la sonnerie, la même qui a retenti hier et nous nous levons, débarrassant rapidement.

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