~~ Chapitre 15 ~~
Bonsoir à tous ! Me voici pour le chapitre quinze :) Suite au problème de mots collés dans mes précédents chapitres, il serait préférable que vous rafraîchissiez la page avant de me lire pour qu'elle enregistre les corrections que j'apporte une fois le chapitre posté :) Je vous souhaite une bonne lecture ! :)
Lorsque Julianne ouvrit l'adresse e-mail de l'Ambassade et qu'elle aperçut qu'ils avaient reçu plus de trente mails ces deux derniers jours en vue du prochain Colloque International France-Corée, elle entreprit de répondre à toutes les questions posées. Les expéditeurs étaient multiples: des français qui s'intéressaient à la culture, des coréens qui souhaitaient découvrir l'amitié qui liait leur pays d'origine à leur terre d'accueil ou encore des boutiques coréennes qui désiraient montrer l'impact de la vague Hallyu en France, et proposer d'autres moyens pour faire connaître la langue et la culture coréenne en France, dans un des ateliers proposés par l'Ambassade. Ensuite, elle s'attela à trier le courrier qu'elle alla déposer sur le bureau de sa supérieur, pour le récupérer une heure plus tard avec des éléments de réponse. Elle répondit à chacun au nom de sa cheffe, en y insérant les consignes voulues, puis alla de nouveau le déposer sur son bureau pour qu'elle y appose sa signature.
Quand la porte fut refermée, elle souffla deux fois en s'adossant à la porte en bois. Elle posa sa tête contre la matière froide et s'insuffla du courage en dose importante. Tous les discours et les explications qu'elle avait répété maintes fois dans sa têtes'emmêlaient dorénavant. Cela formait un nœud indénouable. Elle entreprit de se calmer en se disant que de toute manière ces explications et les scènes imaginées ne se réalisaient jamais. La situation s'avérait toujours différente de ce que l'on imaginait.
Son cœur s'accéléra, tant le moment souhaité et redouté était proche. Elle posa sa main sur sa poitrine avec l'espoir que la douleur disparaisse. L'angoisse la tenaillait depuis Dimanche tandis que son estomac se tordait depuis au moins une heure. Les mains moites et la bouche pâteuse, prisonnière de son mal, elle revécut de nouveau les scénarios dans lesquels Tae Kim ne souhaitait plus maintenir la relation qu'ils avaient eu. Elle ne l'avait connu que taquin et souriant, n'ayant jamais eu affaire à sa tristesse et à sa colère. Elle ne savait donc pas à quoi s'attendre face à ce Tae Kim blessé.
Elle se redressa et se mit à traverser le couloir. Ses pieds avançaient tout seuls, chaque pas rejoignant de lui-même l'autre.
Plusieurs suites s'offraient à elle, certaines où elle tentait de lui expliquer son refus et où il la comprenait et acceptait et d'autres où il l'accusait de l'avoir nourri de faux espoirs. A cette dernière pensée, son ventre se tordit douloureusement et ses yeux s'humidifièrent. Pour rien au monde, Julianne aurait fait naître de faux espoirs chez une personne, et encore moins chez cet ami précieux. Elle avait du mal à lire et à interpréter le comportement ainsi que le regard des autres. Isaac Evans était la preuve vivante de cette incapacité.
De plus, son expérience amoureuse ne se résumant qu'à deux garçons ne l'aidait pas plus que cela pour comprendre le comportement masculin. Un qu'elle avait rencontré au collège, en quatrième, un dénommé Charles et le deuxième qu'elle avait eu au lycée. La première histoire était toute simple, elle plaisait à Charles et elle avait accepté avec la volonté de découvrir ce qu'était un couple. En ce qui concernait le second, elle n'était jamais parvenue à comprendre ce qu'il lui était arrivé pour finir par aimer Isaac aussi rudement et douloureusement. La haine et la douleur s'étaient entremêlés pour mettre au monde un étrange sentiment positif qu'elle regrettait aujourd'hui d'avoir éprouvé.
Les portes argentées de l'ascenseur s'ouvrirent devant elle et elle se retrouva face à sa voisine de palier qui revenait avec son panier repas. Elle lut sur ses lèvres des mots, des paroles dont elle n'entendit pas le contenu. Elle esquissa un maigre sourire et la contourna pour continuer son chemin.
La porte noire avec la plaquette dorée où était gravé le nom Tae Kim se rapprochait de plus en plus, malgré la lenteur à laquelle elle avançait, rasant les murs.
Elle allait, elle devait lui expliquer la raison de ce refus et son passé avec cet Isaac Evans que Tae Kim soupçonnait d'être la cause. Malgré la tristesse qui lui broyait le cœur, la colère menaça de sa présence.
A quelques mètre de la pièce qui semblait l'appeler, l'idée qui avait germé dans son esprit refit surface. Comment pouvait-elle mesure l'ampleur des sentiments de Tae Kim ? Lui plaisait-elle un peu ou lui plaisait-elle énormément ? Était-ce de l'attirance physique ou des sentiments plus forts? Connaissant son ami depuis plus d'un an, elle était tentée de croire que c'était plus que de l'attirance physique, sinon pourquoi aurait-il attendu aussi longtemps pour lui en faire part ? Et puis, il n'était pas homme à seulement s'intéresser au physique de la gent féminine. Il lui restait donc la seconde option. Assistait-elle à un amour naissant ? Plus elle avançait et plus craignait que le pardon ne vienne jamais.
L'inexpérience la forçait à se creuser les méninges pour comprendre et anticiper une réaction masculine.
Elle secoua la tête, tandis que ses mains venaient torturer le tissu de sa robe. Elle se perdait dans les remous de ses réflexions qui la broyaient littéralement, tant elle redoutait la décision de Tae Kim. Elle franchit les derniers pas qui la séparaient de ce bureau en s'insufflant le courage qui lui manquait grandement. Elle interpréterait lorsqu'elle franchirait le pas de la porte et lorsqu'elle assisterait à sa conclusion.
Elle ferma les yeux et inspira une grande goulée d'air. Lorsqu'elle les rouvrit, un semblant de chaleur parcourut ses veines et l'encouragea à poser une main tout de même peu avenante sur la poignée.
Aussitôt cette dernière fut tournée et la porte s'ouvrit, laissant entrevoir un Tae Kim sur le point de quitter les lieux. Julianne se figea sur le champ, la main suspendu dans l'air. Son regard choqué croisa celui surpris de son collègue et elle déglutit, la bouche sèche comme jamais. Elle secoua la tête et tenta de se reprendre lorsque la voix masculine brisa le silence gênant.
« - Julianne ? »
Elle n'était pas préparée à le voir d'aussi près aussi subitement. Elle écarquilla les yeux lorsqu'il l'apostropha. Il fallait qu'elle parle et vite, avant que la situation ne dégénère et qu'elle perde tout contrôle.
Elle prit son courage à deux mains et se lança.
« - Tae Kim, fit-elle d'une voix d'apparence sûre. Je voudrais te parler deux minutes. Est-ce que c'est possible ? demanda-t-elle en le regardant droit dans les yeux. »
Auparavant, elle ne lui avait jamais demandé l'autorisation pour lui parler, débarquant dans son bureau tel un ouragan. Mais aujourd'hui, les circonstances étaient différentes. L'amitié les liant était en train de s'effriter. A sa plus grande surprise, il resta calme. Il paraissait réceptif et à l'écoute de ce qu'elle avait à lui dire. Ce silence la motiva réellement.
« - Merci, remercia-t-elle face à l'occasion qu'il lui accordait. Je ne serais pas longue, je te rassure, s'empressa-t-elle de dire aussitôt. Je voudrais d'abord te dire que je suis vraiment ...
- Julianne, avant que tu commences, je voudrais te dire que je suis désolé !
- ... Désolée, Tae Kim ... »
La jeune fille se stoppa nette et ravala ses excuses. Figée par ce qu'elle venait d'entendre, son cerveau se remit lentement en marche. Les mots tournaient en boucle dans sa boîte crânienne, lui procurant de l'espoir malgré le doute persistant, car elle croyait tout de même avoir mal entendu. N'aurait-il pas pu attendre qu'elle finisse sa phrase ?
Elle détailla son visage et vit à son plus grand désarroi, qu'il était aussi, voire plus si cela était encore possible, perturbé qu'elle.
Une ride soucieuse s'était logée sur le front du jeune homme, lui faisant gagner quelques années avant l'heure. Les yeux bridés tourmentés semblaient sonder ceux de la jeune fille et elle crut y lire une peine différente de celle de vendredi.
Le cerveau remit en route, des mots se formèrent sur sa langue.
« - Hein ! Qu-quoi ? Bégaya-t-elle en plissant les yeux.»
Il brisa la distance qui les séparait, lui prit la main et la rapprocha de lui, en fermant la porte derrière elle. Il ancra son regard dans celui de Julianne et posa une main tendre sur sa joue. Complètement perdue par la tournure des choses, elle se laissa faire telle une poupée.
« - Je suis désolé, Juli. Vraiment, s'excusa-t-il en secouant la tête. Je n'aurais pas dû ... »
Éberluée par les excuses de Tae Kim, elle fit un pas en arrière. Elle ne comprenait plus rien à la situation. Qu'est-ce qui lui prenait ? Pourquoi s'excusait-il ? Qu'avait-il fait de mal,après tout ?
« - Qu'est-ce que tu racontes ? S'aventura-t-elle doucement.
- Bon sang, Juli ! Si tu savais à quel point je regrette d'être parti comme ça et de t'avoir parlé de la sorte. Tu n'y es pour rien si tu n'as pas remarqué mes sentiments et rien, rien au monde ma Juli, ne t'oblige à répondre aux miens. »
Les mots du jeune homme la secouèrent. Il la bouleversa entièrement, de la tête aux pieds. Quel type d'homme était ce Tae Kim ? De quelle terre et de quel souffle, Dieu l'avait-il créé ? La où les autres auraient tourné le dos, Tae Kim revenait avec des excuses et l'espoir d'une reprise.
Chamboulée et admirative, elle laissa ses paroles penser la énième blessure qui sévissait dans son cœur. Ce dernier, gonflé d'espoir et de reconnaissance se remit à battre avec soulagement. Le baume qui coula dans ses veines la débarrassa de la peine et de l'étau qui resserrait son organe vital. Ses poumons se remplirent d'un air nouveau et elle put respirer normalement après avoir passé tout un week-end étouffant.
Pendant que son cœur et son cerveau se broyaient avec toutes les pensées négatives qui fusaient en elle, Tae Kim était à des années lumières de ce qu'elle pensait et craignait.
« - Tu ne m'en veux pas ? Confirma-t-elle en sondant ses beaux yeux. Vraiment pas ? Répéta-t-elle pour en avoir la certitude.»
En deux pas, il fut sur elle et la prit dans ses bras. Automatiquement, les bras de la jeune fille se resserrèrent autour du dos du jeune homme. Son corps se détendit et elle retrouva avec félicité la chaleur qu'il dégageait.
« - Je ne t'en veux pas, Julianne, souffla-t-il dans ses cheveux. Je ne t'en veux pas du tout. »
La prise de la brune se fit plus forte tandis qu'un sanglot s'échappait de ses lèvres. Elle enfouit son visage dans le col noir de la chemise et laissa des larmes de gratitude, couler. Elle qui avait eu si peur de le faire fuir et de le perdre définitivement, respira aisément.
« - Comme je te l'ai dit, commença-t-il en lui caressant les cheveux, je n'ai aucune raison de t'en vouloir. Notre relation pouvait être ambiguë de mon point de vue, et ne pas l'être du tien. Je me suis comporté comme un idiot et je le regrette. Dieu Merci, maman m'a ouvert les yeux ce week-end ...»
A la mention de Madame Eun-Jung Kim, la jeune fille recula pour croiser les pupilles noires, les bras toujours autour de son dos.
« - Maman ? »
Il acquiesça en l'emmenant vers la chaise pour qu'elle s'y assoit et s'assit à son tour sur la seconde.
« - Oui, maman. Elle m'a fait réalisé que ce qu'il y avait de plus important et de plus beau entre nous, c'était l'amitié qui nous liait et non le futur que j'envisageais. »
Il lui prit la main et la serra dans la sienne, lui transmettant ainsi la preuve de ses paroles.
« - Ton amitié est un précieux cadeau, Julianne Davis. Et je ne souhaite pas m'en séparer de sitôt, révéla-t-il avec un début de sourire qui illumina ses traits tendus. »
Cette esquisse réchauffa le cœur de la jeune fille, tandis qu'une larme coulait sur sa joue. Il ne lui en voulait nullement et au contraire, il s'en voulait à lui-même. Elle ne comprenait pas sa réaction, ce retournement de situation, mais elle lui en était infiniment reconnaissante. Là où toute personne en aurait voulu à Julianne, Tae Kim revenait vers elle. Son cœur se gonfla de fierté et d'admiration. C'était un homme et un ami en or. Il prenait sur lui pour sauver leur amitié. Elle représentait pour lui l'amie qu'il était pour elle. Elle pressa à son tour sa main.
« - Tu es un être en or, Tae Kim. Je suis vraiment soulagée,heureuse et reconnaissante, avoua-t-elle en plongeant dans l'océan calme de ses iris. Je sais pas quoi dire d'autre, à part que je te remercie et que je te présente mes excuses. »
Il acquiesça tandis qu'elle se préparait à partager avec lui, la cause de son refus.
« - Mais je voudrais quand même que tu saches quelque chose. »
Il accueillit sa demande et elle se lança. Elle lui raconta sa rencontre avec Isaac, la manière dont tout avait commencé entre eux. Les altercations, l'orage constamment présent. Le renversement de situation lorsque l'amour annonçait sa présence et la descente aux enfers qui s'entamait. Elle lui fit part de chaque changement de comportement chez Isaac et lui décrivit la façon dont il jouait avec elle, la faisant tantôt voguer sur une mer calme, tantôt sur une mer agitée. Elle omit volontairement la gifle, n'ayant pas le courage et le cœur à aborder de nouveau ce sujet.
Au fur et à mesure qu'elle le mettait au courant des fondements de sa relation avec Isaac, elle pouvait voir le visage de son collègue passer d'une expression à une autre. Du sourire au rire, puis du choc à l'énervement. Elle fit naître en lui ce qu'Isaac lui faisait subir. Si la narration même faisait valser l'auditeur, cela ne mettait-il pas en exergue l'évidence même du jeu auquel jouait Isaac à l'époque et aujourd'hui ? Cela ne soulignait-il pas le tourment émotionnel qu'il avait fait subir à Julianne ?
Tout au long du récit, il ne lâcha pas sa main, la motivant du mieux qu'il le pouvait. Lorsqu'elle eut terminé d'expliquer, il finit par prendre la parole.
« - C'est ..., commença-t-il en cherchant sans doute le terme qui convenait le mieux à leur relation, fou. La manière dont votre relation est née, la manière dont elle a évolué et la façon dont elle continue. Isaac n'a pas changé. Il n'a ni grandi, ni mûri.Il peut se comporter en véritable homme devant la terre entière,mais devant toi, Juli, il devient un gamin. »
Il marqua un temps de pause et reprit la parole.
« - Ça me tue de l'admettre, mais je comprends ton attirance pour lui. Malgré le peu d'amitié que je lui porte, je reconnais qu'il a un visage fait pour plaire aux femmes. Ceci étant dit, derrière ce visage , se cache un gars prétentieux et joueur. Donc, je partage ta colère et c'est pourquoi ta vengeance qui devrait me surprend revenant de toi, ne m'étonne plus vraiment. Et je pourrais même te dire que je t'encourage pour embêter Evans. Sème le trouble dans sa vie tout comme il s'amuse à troubler la tienne. Il le mérite. »
La jeune fille hocha la tête, persuadée qu'elle avait raison.L'idée que Tae Kim l'encourage lui mit du baume au cœur et la motiva d'autant plus. Le fait qu'il comprenne sa peine, qu'il comprenne son vécu et sa volonté de rétablir un équilibre ou une supériorité confortait Julianne dans sa position. Elle devait malmener Evans pour lui donner une bonne leçon. Il ne pouvait pas indéfiniment avoir le dessus sur elle et jouer avec elle comme si elle n'était qu'une vulgaire poupée de chiffon. Elle avait espéré qu'il comprendrait sa volonté, ayant besoin de l'appui de Célia et de Tae Kim.
« - Je suis contente que tu me soutiennes, Tae Kim, fit-elle en se levant de sa chaise. Je t'avoue que je n'aurais pas supporté que tu me dises que j'ai tort d'agir ainsi, déclara-t-elle en se plaçant face à son ami qui s'était également relevé et adossé au bureau. Et j'espère bien le faire enrager. »
Il soutint son regard et parut mesurer l'ampleur des mots. Il lui sembla qu'il comprenait mieux l'intensité de sa colère et de son degré de détermination. Elle espérait qu'il n'oublierait jamais ce qu'elle comptait faire.
« - Je ne suis pas un adepte la vengeance, je préfère me retire ret oublier, mais dans ton cas et suite à ma rencontre avec Evans, ce samedi ...»
Julianne fronça les sourcils et questionna Tae Kim, surprise.
« - Vous vous êtes vus ? »
Il acquiesça.
« - Et devine où ? lança-t-il en croisant ses bras sur son torse. »
Elle sonda son regard et le début de sourire qui embellissait ses traits.
« - Saint-Lazare, lui apprit-il. Il avait l'air heureux et insouciant de tout ce qui se trame autour de lui. Tu marques des points, Juli. Il ne s'y attend vraiment pas et le voir perturbé sera déjà une victoire en soi. »
Julianne sourit, rejoignant ses propos.
« - Comment est-ce qu'il s'est comporté ? Est-ce que cette grosse brute t'as agressé ? »
Tae Kim pouffa de rire et secoua la tête.
« - Je pense qu'il est parvenu à contenir la flamme qui l'anime,dévoila-t-il en riant. Il me tient pas dans son cœur. Et c'est mutuel. »
La jeune brune se permit un sourire face à la réciprocité qui liait ces deux hommes.
« - Pour tout te dire, c'est lui qui m'as interpellé. Il était accompagné d'un grand brun, un certain Thomas, je crois...»
Thomas!
Une éternité qu'elle n'avait pas entendu parler de lui. Elle venait donc d'apprendre que l'amitié qui les liait avait perduré au-delà du lycée. Elle se demanda si elle devait en pleurer ou s'en réjouir ? Elle n'en savait rien ...
« - ... Il était aussi prétentieux que pendant notre première rencontre. Tout aurait pu rester cordial s'il ne t'avait pas manqué de respect...»
Là où Julianne aurait dû bondir comme un chat parce qu'Isaac la mentionnait elle ne tiqua même pas, habituée à ce type d'intervention.
« - Il parlait de toi comme si tu étais un jouet. Son jouet.»
Et voilà. Ils y étaient. Il réussissait à rallumer la flamme dès qu'elle s'éteignait. Jouet un jour. Jouet toujours.
«- Et ça m'a énervé, Juli. Il n'a pas à parler de toi comme ça en déclarant que tu le rattacherais quoi qu'il arrive à chaque étape de ta vie, que tu le veuilles ou non. Il insinuait que son emprise sur toi était telle que tu ne parviendrais jamais à t'en défaire. Ce gars est fou. »
Julianne fut secouée par les propos rapportés, même si elle ne montra pas l'étendue de son trouble, le masquant du mieux qu'elle le pouvait. Elle était choquée de voir que ce qu'elle avait toujours pensé tout bas, Isaac le pensait également et avait eu le culot de l'affirmer haut et fort. Qui plus était devant des personnes pas du tout concernées par les problèmes qui les concernaient qu'eux.
« - Isaac est ainsi. Horrible de la tête aux pieds. Transpirant la fierté...
- ... Transpirant la suffisance et assoiffé de domination quand ça te concerne. Tu dois le rendre dingue. »
Julianne haussa les épaules.
« - D'ailleurs, je pensais pas qu'un homme sain d'esprit pouvait boire les paroles d'Evans, partagea Tae Kim en suivant Julianne qui se dirigeait vers la porte.
- Tu parles de Thomas, j'imagine, nomma-t-elle en traversant l'embrasure de la porte. Il a toujours été ainsi. Suivant Isaac comme son ombre, et le protégeant comme un frère.
- J'ai eu un aperçu de sa force, la mit-elle au courant en portant instinctivement sa main à son épaule. Il m'a broyé le bras pour m'empêcher d'approcher d'Evans.
- Tu as eu mal ? Demanda-t-elle en croisant son regard et en le voyant secouer la tête. Ça ne m'étonne pas de lui, expliqua Julianne, pas le moins du monde surprise par l'initiative de Thomas. Le bon et fidèle bras droit du capitaine ! D'aussi loin que je le connaisse, ils ont toujours été amis, même si je ne comprends pas ce qui peut les relier. Mais, je pense que certaines amitiés ne s'expliquent pas, elles se vivent tout simplement. Et c'est le cas de celle de Thomas et Isaac, conclut-elle. »
Ils atteignirent le bout du couloir et attendirent l'ascenseur qui était au sous-sol.
« - Tu penses vraiment qu'ils sont si différents que ça,Julianne ?
- Je pense qu'ils le sont. Thomas a toujours été plus calme et plus posé qu'Isaac et moins « m'as-tu vu » qu'Isaac avec son physique musclé et son air prétentieux collé vingt-quatre heures sur vingt-quatre au visage.
- Pourtant, il avait l'air d'être au courant des petits jeux de son ami et il l'a pas non plus retenu. D'ailleurs, ça m'étonnerait qu'il l'ait fait au lycée, Juli. J'ai plus l'impression qu'il va suivre aveuglément Isaac dans chacune de ses manœuvres, et ne jamais le contredire. Il a prétendu qu'ils étaient doux avec toi, rapporta-t-il tandis que les portes grises de l'ascenseur se refermaient sur eux, les enfermant dans une cage en velours bleu marine. »
La jeune fille laissa les paroles du jeune homme glisser sur elle,telles des gouttes de pluie. Elle ne savait plus quoi penser d'Isaac et à ce problème venait s'ajouter Thomas Guerrin. Le même Thomas qu'elle considérait comme un bon camarade de classe de portugais et presque un ami, qui s'avérait être aujourd'hui selon les dires deTae Kim, comme Isaac. Le Thomas calme, bienveillant et taquin avait-il disparu, empoisonné jusqu'à la moelle par son meilleur ami ? Isaac avait-il détruit toute la gentillesse et l'humanité qui le caractérisait ? Elle espérait que non. Elle portait à croire que ce Thomas persistait et que son collègue se trompait en pensant qu'il était de la même trempe que son ex-capitaine. Enreplongeant dans le passé, elle se souvenait des quelques moments passés avec lui durant les années de classe préparatoires, avant et pendant son histoire avec Isaac. Le fait de sortir avec son meilleur ami n'avait rien changé à leur rapports. Thomas s'était toujours tenu éloigné des disputes et de leur « couple ».Absent pendant les jours ensoleillés tout comme pendant les orages.
Elle ne s'était jamais confiée au brun lorsqu'elle allait mal,lorsque son cœur se déchirait face au roc qu'elle avait en face d'elle, par peur de l'ennuyer.
De son côté, lui non plus n'avait jamais fait le moindre pas pour réconforter Julianne ou lui expliquer les agissements de son meilleur ami. Peut-être était-ce de l'indifférence, du désintérêt ou une distance vis-à-vis d'Isaac. Elle ne l'avait jamais su et ne le saurait sans doute jamais, toutefois cela ne l'importait pas en vérité, parce qu'elle retenait qu'il avait été un ami dont elle gardait de bons souvenirs. Mais, ces derniers venaient brutalement confronter les paroles de Tae Kim. Son comportement du week-end était en désaccord avec l'image qu'il lui avait laissée. Ce nouveau Thomas était-il celui qui avait été transformé par la présence d'Evans ? Ou bien le vrai Thomas que Julianne n'avait jamais connu ce dernier lui ayant toujours montré une facette plaisante durant les quatre années où ils s'étaient côtoyés.
Toutes ces questions lui donnèrent une migraine. Elle ne savait plus quoi penser, effrayée à l'idée d'avoir été bernée et trompée par celui qu'elle avait considéré être un ami.
Si il s'amusait lors de cette petite entrevue de Samedi, cela devait sans doute signifier qu'il prenait part aux plaisanteries d'Isaac depuis le début et peut-être même l'encourageait-il à continuer de jouer avec le jouet attitré du diable. A cette pensée, son estomac se retourna. Elle eut envie de se laisser aller contre le velours qui semblait accueillant pour les âmes en peine.
Tae Kim se rendit compte de son état et il posa une main sur sa joue, la sortant de ses pensées épineuses.
« - Juli, n'y pense plus, conseilla-t-il en lui caressant tendrement la joue. Je n'aurais peut-être pas dû t'en parler, finalement.
- Si, acquiesça-t-elle, tu as bien fait de m'en parler. C'est certes un peu dur de le digérer parce qu'il s'agit de Thomas, mais si c'est la vérité, alors je dois me rendre à l'évidence et surtout te remercier de m'avoir ouvert les yeux, Tae Kim. Merci. »
Lorsqu'elle pénétra à la fin de cette rude journée, dans sa chambre aux allures de petit chalet couleur acajou et aux grosses poutres en bois qui formaient un petit toit, elle s' affaissa dans son lit, éreintée. Ce dernier accueillit Julianne et recueillit sa fatigue et ses doutes. Elle prit le petit ours en peluche qui reposait à la tête de son lit. Elle avait pris cette habitude depuis l'année de terminale, décorant son lit de deux ou trois peluches qui l'attendraient jusqu'au soir. Julianne et Célia avaient eu cette idée en même temps. Elle le serra contre sa poitrine, espérant qu'il parviendrait à aspirer la déception qui s'y était logée.
Malgré tous les événements, elle était soulagée de voir que le problème avec Tae Kim était réglé, et Dieu soit loué, il ne lui en voulait pas alors qu'il aurait pu être en froid avec elle. Plus encore, il lui avait assuré ne plus lui parler de ce qui s'était passé et des sentiments qu'il éprouvait. De prime abord, elle avait été triste et tellement touchée par son initiative. Il gardait pour lui et enfouissait son ressenti au profit de leur amitié. Puis, elle avait été contrainte de reconnaître que c'était la meilleure décision à prendre pour ne pas leur rappeler à tous les deux cette période trouble.
En ce qui concernait Isaac, force était d'admettre qu'elle en venait à cette même conclusion : Isaac Evans était une personne formidablement exécrable et elle le haïssait. Oh oui qu'elle le haïssait!
Elle était honteuse d'avoir pu se laisser aller à songer durant le week-end et pendant la matinée qu'il avait entamé un minime changement avec l'apparition de tendresse et un début de regret.Elle devait se rendre à l'évidence : il était le même.
Malgré les « excuses » qu'il lui avait présentée le vendredi, illui rappelait à peine deux jours plus tard sa vraie nature, celle de l'homme profondément mauvais qu'il était, balayant ainsi toutes les interrogations de la jeune fille.
Si elle allait jusqu'au bout de la sa pensée et de son ressenti,elle devait s'avouer qu'elle avait eu envie de voir jusqu'où irait ce nouvel Isaac et ce qu'il avait à lui dire ou à lui montrer,après toutes ces années de jeu. Elle voulait savoir quelle gentillesse et quelle tendresse il cachait au fond de lui et quelle était la profondeur des regrets qu'il avait laissé entrevoir volontairement ou par mégarde. Elle avait espéré voir si les remords allaient durer et si tel était le cas, où allaient-ils conduire ces deux ennemis ? Sa relation avec Isaac n'allait nullement changé, ne pouvant aucunement tendre vers une amélioration ou vers un début début d'amitié qui effacerait les années anciennes emplies de rancunes encore vives ; mais ils auraient pu débarrasser Julianne de ce poids qui l'étouffait encore aujourd'hui. Ces regrets n'auraient pu retirer au passé son odeur de raté et son goût de larmes, mais ils auraient changé le présent.
Si de ces petites et légères excuses avait abouti une véritable demande de pardon concernant les mots, les insultes et cette gifle ; Julianne aurait pu abandonner cette démarche de vengeance déjà entamée si Isaac lui avait prouvé qu'il regrettait son comportement de gamin puéril, d'adolescent entêté et violent et de jeune homme obsédé par le jeu.
C'était une très grosse décision qu'elle aurait prise en lui offrant un futur de paix, en se retirant, alors qu'il avait tourmenté son passé. Elle lui aurait pardonné ; elle aurait oublié pour avancer, effaçant elle-même ses larmes, ses plaies et la marque de cette gifle. Elle se serait forcée durement parce que la tâche était dure, ardue, frôlant peut-être les contours de l'impossible,mais elle se serait donné les moyens pour y parvenir peu importe le temps que cela aurait pris.
Car finalement, ce dont elle avait toujours eu besoin ce n'étaient que des excuses et une reconnaissance de la part d'Isaac de ses faits et agissements blessants. Une reconnaissance de son comportement agressif et vexant lorsqu'elle n'attendait que de l'attention de la part de celui qu'elle aimait.
Elle s'assit en tailleur, les jambes recouvertes par la couette.Elle releva la tête pour croiser deux yeux mordorés brillants qui la dévisageaient dans l'obscurité de la pièce, seulement éclairée par les maigres filets de lumière qui émanaient du noble astre lunaire. Elle soutint le regard que lui renvoyait le miroir de son armoire en bois ancien, fièrement dressée en face de son lit.L'éclat farouche de la détermination refaisait surface. La fatigue, physique et mentale, laissa place à des traits durs desquels émanaient le courage et la ferme intention de changer l'ordre des choses.
Vu les précédents événements, Isaac Evans lui avait sauvagement expliqué qu'il ne comptait pas changer mais plutôt perpétuer le passé. Il voulait s'amuser avec la vie de Julianne pour apporter une touche de piment dans la sienne monotone. Si telle était sa décision, elle allait reprendre les agissements qu'elle avait mis en pause.
Lors de leur dernière entrevue, il avait parlé du fameux stade du lycée qui était et qui serait toujours leur terrain d'affrontement.Il lui avait conseillé de méditer sur ses propos avant de la quitter aussi brutalement qu'il l'avait dérangée. Elle comprenait désormais le sens de ses paroles. Il lui faisait comprendre que rien n'avait changé depuis qu'ils s'étaient séparés et que leur relation était au même point mort, quoi qu'ils fassent, quoi qu'ils souhaitent, revenus à l'antériorité de leur couple. Ils étaient encore ces deux lycéens qui ne perdaient nullement une occasion de rabaisser l'autre sur fond de regards noirs et paroles d'une douceur venimeuse. Ces deux lycéens animés par cette flamme d'amusement et de colère, ces deux lycéens qui ressentaient le besoin d'aller vers l'autre et de se prouver qu'ils dominaient ces confrontations aux règles tacites. Ces deux jeunes qui ne se souciaient guère des conséquences sur l'autre, les autres et eux-même, seulement obnubilés par cette soif de pouvoir sur celui qui ne voulait se soumettre, alors que l'autre le désirait tant.
Elle avait une très brûlante envie de lui rappeler qu'il y était pour beaucoup dans ce retour en arrière alors qu'elle aurait pu passer sa vie à l'ignorer. Il souhaitait la maintenir sous son contrôle tout en ayant la persuasion qu'elle serait manipulable à souhait. Parce que Julianne Davis était le jouet d'Isaac Evans.Parce que Julianne Davis ne pouvait échapper à l'emprise d'Isaac Evans, malgré l'animosité qui les liait, malgré les épreuves qu'ils traversaient et enfin malgré l'écoulement du temps.
Clamant son retour, clamant sa force face à elle et aux yeux du monde, il la forçait à répondre à ce jeu qui n'avait pas cessé.Ainsi, n'ayant pas l'intention de reculer, elle répondrait, mais la nouveauté résiderait dans le fait qu'elle imposerait ses règles et jouerait de manière déloyale. Pourquoi avoir besoin de loyauté lorsque la personne en face se moquait de l'équité? Pendant que lui essayerait de s'amuser avec ses nerfs, Julianne lui ôterait tout contrôle et jouerait avec sa fierté en balayant de nouveau la paisible existence d'Isaac Evans avec l'espoir qu'il n'oublierait jamais cette bonne leçon qu'elle s'apprêtait à lui donner.
J'espère que ce petit chapitre vous aura plu mes chères et adorables lectrices ! Il était assez difficile pour moi parce que je voulais bien décrire la peur et les sentiments de Julianne vis-à-vis de ce qu'il se passait avec TK. C'était assez compliqué mais j'espère qu'il vous aura plu un minimum.
Je tenais à vous dire Merci ! Vous remercier de tout mon cœur parce que Ne te mens pas à toi-même a atteint les 10 000 vues et 1K de votes !!! Je suis vraiment vraiment contente et tellement touchée par tous ces votes, par toutes celles qui me suivent depuis le début ( elles se reconnaîtront <3 <3 ) et toutes celles qui ont commencé la lecture durant les vacances. Vous ne pouvez savoir à quel point vos votes, vos commentaires, vos encouragements, vos critiques qui me disent ce qui va et ce qui ne va pas sont importantes pour moi. Chaque nouveau lecteur et chaque nouveau vote et commentaires me réchauffent le coeur, me donnent envie de continuer ! Tout ça c'est aussi bon qu'une bonne grosse tablette de Crunch !! <3
J'aurais jamais pensé que cette histoire plairait sur Watty, j'aurais jamais pensé que mon histoire aurait des lecteurs et des lecteurs fidèles qui m'aident à progresser. Il y a tellement de belles histoires sur cette plateforme et le fait qu'on me porte de l'attention et qu'on attende mes chapitres, c'est juste énorme et diiiiingue pour moi, vraiment ! Avant, seules mes soeurs lisaient cette histoire et aujourd'hui j'ai des lecteurs éparpillés en France et certaines à l'étranger. C'est fou !
D'ailleurs, tout au début ( et encore maintenant ) je craignais qu'on trouve cette histoire nulle et qu'on pense qu' Isaac et Julianne n'étaient que des gamins, parce qu'avouons-le ils le sont réellement. Mais à mes yeux il y plus que ça, il y a des non-dits, des regrets, de la douleur, de la complexité dans chaque relation présentée . J'essaye de présenter tout ça, de le sous-entendre, de l'expliquer. Je ne sais pas j'y arrive bien, mais j'essaye en tout cas :)
Je suis toujours stressée à chaque post malgré le feu vert de mes bêtas-lectrices que je remercie encore une fois <3 et je le suis aussi pour celui-ci. Ce stress ne me quittera jamais je crois, mais bon tant pis ^^
Je vous embrasse fort, sur les deux joues chères lectrices !
Fidèlement vôtre,
Miss-Key.
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