Chapitre Trente-Sept
Alyssa
Le monde me paraît si petit. D'ici là, je prend réellement conscience du fait que nous ne sommes qu'une vulgaire poussière dans l'immensité de ce monde. Toutefois, nous ne pouvons dire que la douleur ressentie par chaque être ne peut en être de même. Elle est parfois puissante, destructrice. Tout comme celle que je ressens constamment depuis de nombreuses heures désormais.
J'ignore depuis combien de temps je suis là à survoler le ciel. Ma colère semble s'être apaisée et ce sont désormais mes ailes qui me guident selon leur instinct. Pour ma part, je suis bien trop focalisée sur cette nature environnante. Il fait noir et pourtant je ne rate pas une seule seconde de ce fabuleux spectacle. D'ici, j'ai l'impression que mon âme et mon corps ne sont plus une seule et même entité. Mon âme est enfermée dans un recoin de mon être, laissant simplement place à cette enveloppe charnelle vide.
Mon corps s'épuise progressivement. Je sens mes paupières s'alourdir et me piquer. Mes nombreux sanglots et sautes d'humeurs ont dû causer cette fatigue accablante. Plutôt que de poursuivre le chemin de manière irresponsable et dangereuse, je me décide à passer la nuit dans un motel sur la route. Il me semble avoir prit quelques économies avec moi. Lentement, je m'abaisse vers la terre ferme avant que mes pieds ne heurtent le sol. L'équilibre est complexe à retrouver. Après toutes ces heures de vol, il m'est assez difficile de retrouver un semblant de gravité. Lentement, je m'élance en direction de la bâtisse éclairée au bord de la route.
«Une chambre s'il vous plaît.» Soufflais-je au réceptionniste.
L'homme me dévisage quelques secondes. L'état dans lequel je me retrouve doit sûrement l'interpeller. Il faut dire que je ressemblerais presque à une sauvageonne avec mes cheveux en batailles et toutes les blessures que je porte sur mon corps frêle. Toutefois, il se passe de tout commentaire et exécute ma demande. De toute évidence, je ne lui aurais pas répondu. Chacun ses affaires. C'est bien mieux ainsi. Inspectant la monnaie que je viens de déposer sur le comptoir, il prend une clé et me la tend.
«Chambre vingt-et-un à droite. Bonne soirée mademoiselle.»
«Merci.» Répondis-je simplement.
J'acquiesce d'un simple mouvement de tête avant de me saisir de la clé et déguerpir en direction du couloir. Sans grand mal, je parviens jusqu'à ma chambre et y pénètre. Ceci fait, je m'empresse de refermer la porte et tout ces verrous derrière moi. Simple précaution. J'ignore pourquoi mais une pression m'envahit. Je suis bien consciente que personne ne me suit mais je redoute que l'Académie ait décidé de partir à ma recherche. Et dans ce cas-là, je ne donne pas cher de ma peau. Ils pourraient très bien me tomber dessus à tout moment.
Ces pensées s'évadent rapidement de mon esprit tandis que je me laisse submerger par cette vague d'eau chaude qui s'abat sur mon corps. Les yeux clos, je passe ma main dans mes cheveux en lâchant un long soupire. J'ouvre à nouveau mes paupières afin de faire un bref état des lieux sur mon corps. Griffures, écorchures et autres plaies trônent sur l'ensemble de ma peau. Le résultat est loin d'en être magnifique. Si bien qu'une grimace m'en échappe. Ces marques prouvent bien à quel point j'ai dû surmonter des choses ce soir pour en arriver là. Je décide de ne pas y prêter d'avantage d'attention et me rabat rapidement sur ma douche.
Bien trop accablée par la fatigue, je sors rapidement de ce sauna vivant. J'enfile un simple t-shirt puis me glisse sous les draps. Il faut que je récupère des forces. Demain, à l'aube, je prendrais le bus pour me rendre là-bas. Il est temps d'y retourner. Des explications s'imposent.
. . .
La nuit n'a pas été bien longue mais assez suffisante pour que je puisse reprendre un minimum de forces. Le front écrasé contre la vitre, j'observe les paysages défilés sous mes yeux fatigués. La musique quant à elle passe dans mes oreilles et me transportent dans un tout autre monde.
Comme prévu la veille, j'ai pris le premier bus ce matin menant vers chez moi. Il le fallait. Je devais y être au plus tôt. Et vue toute la route qu'il me restait à faire pour parvenir jusque là-bas, j'avais bien fait d'envisager ce plan. En toute sincérité, j'ignorais ce qui m'attendait là-bas. Toujours est-il que je devais y aller. Obligatoirement.
Mes mains s'enfouissent d'avantage dans les poches de mon sweat. Vêtue d'une manière un peu garçonne, j'ai préféré me couvrir le plus possible pour que l'on ne me reconnaisse pas. Ne sait-on jamais. Bâillant discrètement, je ferme les yeux avant de plonger à nouveau dans un profond sommeil.
. . .
Le ciel est noir. Je n'y vois rien. J'ai l'impression de devenir aveugle. Bizarrement, mes pieds sont nus et j'ai l'impression de ne rien avoir sur moi. Seul le poids de mes ailes dans mon dos s'en distingue. Que se passe-t-il ? Je l'ignore. Je suis perdue dans cette obscurité. Soudainement, un halo de lumière se distingue au loin. Irrémédiablement attirée, je la regarde durant de longues secondes. Prudente, je m'avance finalement à tâtons. Une voix. D'où vient-elle ? Au fur et à mesure que je m'approche, mon cœur s'alourdit. C'est étrange. Pourquoi ais-je cet étrange sentiment familier ?
Mes pieds se stoppent face à cette lumière éblouissante. J'ignore ce que je dois faire exactement. Étrangement, je suis tentée par l'idée de la traverser mais d'un autre, je ressens le besoin de m'en éloigner. C'est avec une conviction assez incertaine que je décide d'affronter ce mystère.
Je m'y avance d'une démarche lente et silencieuse. Un frisson me parcoure l'échine au moment où je traverse finalement la lumière.
«Alyssa...» Susurre quelqu'un.
Cette voix m'est familière. Une soudaine bouffée de chaleur m'envahit. Tendre, protectrice et familière. J'ai la vague impression de l'avoir déjà entendu mais je n'arrive pas à afficher de visage sur celle-ci. Ce détail m'échappe et m'agace au passage.
«Qui est là ?» Soufflais-je du bout des lèvres en avançant.
«Alyssa...» Répète de nouveau la voix.
C'est à ne rien y comprendre. Je l'entends. Je la connais. Et pourtant, je n'y arrive pas. Je n'arrive pas à trouver qui est l'inconnu caché derrière. Mes ailes sont repliées dans mon dos, faisant office de barrage autour de mon corps. Seul l'écho de nos voix se fait entendre. Le décor est simple et lumineux. J'ai l'impression d'être enfermée dans une pièce aux allures infinies. Perturbée, je mords ma lèvre.
«Répondez-moi. Qui êtes-vous ?»
«Alyssa... Fais attention à toi...»
Soudainement, tout devient plus sombre. Une tâche noire vient à dégarnir le mur avant d'envahir toute la pièce qui m'entoure. Prise d'un mouvement de panique, je me met à regarder tout autour de moi en tentant de trouver une quelconque issue.
«Fuis ! Dépêches-toi !»
Sans comprendre, mes pieds s'avancent d'eux-même pour m'entraîner dans une course effrénée. J'ignore vers où je me dirige. Toujours est-il que mon corps agit selon son bon sens. Ma respiration s'accélère. Je halète. Mais vers où vais-je ?
. . .
A mon plus grand désarroi, je me hisse hors de mon rêve dans un grognement non dissimulé. Dans un premier temps perdue, je me frotte les paupières avant de diriger mon attention vers la fenêtre sur laquelle je me suis assoupie. Ma respiration se coupe quelques secondes. Blanc. Virevoltant au gré du vent. Plusieurs flocons s'écrasent contre la vitre. Ma main s'y accole tandis que j'observe d'un air stupéfait ce spectacle. Étrangement, une certaine nostalgie m'envahit. Je repense alors à ce mystérieux rêve. Que s'est-il donc passé ? Je l'ignore...
«Mesdames et messieurs, nous arrivons au prochain arrêt. Préparez-vous à descendre.» Annonce le conducteur du bus.
Je lève mes yeux vers le tableau d'affichage et remarque avec étonnement que nous sommes déjà arrivés à mon arrêt. Ai-je dormi aussi longtemps ? Le temps m'a pourtant paru si court dans mon sommeil...
Enfournant mon sac sur mon épaule, je me relève et me dirige vers la porte de sortie. Je n'adresse aucun regard aux autres passagers et descend à la hâte. A nouveau un profond sentiment de nostalgie m'envahit. Jamais je n'aurais pensé revenir ici. Même dans mes rêves les plus fous. Et pourtant, m'y revoilà. Sans hésiter, je laisse mes pas me guider jusqu'à cette maison dans laquelle j'ai vécu depuis si longtemps.
La route n'est pas bien longue. Je m'en souviens comme dans mes plus profonds souvenirs. Je ne peux m'empêcher d'observer chaque chose autour de moi. Comme si je voulais m'en imprégner à tout jamais. Cette ville. Mon chez-moi. Le corps tremblant, j'avance dans ma rue. Il semblerait que l'hiver ait décidé d'en faire des siennes jusqu'au bout. Mon corps est crispé sous le froid qui s'abat sur moi. Bien évidement, mes blessures que j'ai vainement tenté d'arranger en prennent également un coup...
Ma gorge se noue. Bizarrement, je suis anxieuse. J'ai peur que quelque chose ne leur soit arrivé. Après tout, je crains que mon départ ait pu causé quelques soucis... Pourtant, je suis assez vite rassurée en voyant la voiture à son emplacement habituel. Ils sont là. Une autre voiture est également présente. Je ne la reconnais pas. Qui est-ce ?
Je m'approche de la porte doucement et me décide à y frapper. Aucune réponse. N'ai-je pas frappée assez fort ?
Anxieuse, je m'approche de la fenêtre afin de voir ce qui se passe dans le salon. Ce que je vois me fige sur place. Ma mère et mon frère sont entrain de rire joyeusement tous ensemble avec des gens qu'il ne me semble pas connaître. Immédiatement, une douleur me prend au cœur. Pourquoi semblent-ils tous aussi heureux alors que je ne suis pas là ? Sont-ils mieux ainsi ? Je racle difficilement ma gorge afin de ravaler de nouveaux sanglots. Mes pieds reculent jusqu'à ce que je ne trébuche dans la neige froide.
Ce contact m'électrise. Sans chercher à vouloir rester ici une seconde plus, je m'élance en direction du seul autre endroit où je pourrais me recueillir. Mes pas ne tardent pas à la retrouver. Cette maison, mon second chez-moi. Elle est seule. La voiture de ses parents ne sont pas là. Je m'approche, le corps tremblant avant de sonner. Quelques secondes ne passent avant que la porte ne s'ouvre sur elle. Son visage reflète tout l'incompréhension du monde.
«Alyssa ?...» Souffle-t-elle du bout des lèvres, estomaquée.
«Vanessa...»
Puis, soudain, c'est le trou noir. Je me sens lourde. Mon corps s'écroule avant que tout ne devienne subitement noir autour de moi...
. . .
Chaud. Quelque chose de chaud et humide vient à s'abattre sur mon front. Mes sourcils se froncent avant que mes yeux ne commencent à s'ouvrir lentement. Je suis perdue. Que s'est-il passé ? J'observe vaguement autour de moi avant de croiser son regard. Elle est assise là, au bord du lit à me regarder silencieusement. Je me souviens. C'est vrai. Je suis allée chez elle après avoir trouvé ma mère et mon frère entrain de rire ensemble comme si je n'avais jamais existé. Ce souvenir me laisse un goût amer en bouche.
«Vanessa...» Articulais-je difficilement en tentant de me relever.
«Ne te relèves pas. Tu t'es évanouie devant chez moi. Ton corps manque cruellement de force apparemment.»
Mes yeux clignent plusieurs fois. Son ton semble neutre. Presque glacial. Je suis surprise d'un tel comportement de sa part. N'est-elle plus la petite fille joyeuse et pleine d'entrain que j'ai toujours connu ? J'opère malgré tout et me résigne à bouger d'avantage. Ma main se porte à mon front où je retire un gant humide. C'est cela qui m'a réveillé.
Le reposant sur la table de nuit, je déporte à nouveau mon attention sur ma meilleure amie. Ses cheveux sont détachés. Blonds comme les rayons du soleil tandis que ses grands yeux bleus m'observent comme la glace. Je suis mal à l'aise par un tel silence. N'est-elle pas heureuse de me revoir ici ? Belle illusion.
«Que fais-tu ici ? Je croyais que tu étais partie ?» Me demande-t-elle finalement, les bras croisés contre sa poitrine.
«Il semblerait que je sois de retour dans ce cas... Surprise ?» Fis-je d'un air mal assuré avec un sourire feignant l'idiotie.
«Alyssa, je ne suis pas d'humeur à rire.» Souffle-t-elle.
«Tu peux me dire ce qui t'arrive à la fin ? J'ai l'impression que tu n'as pas l'air vraiment ravie de me revoir... Je croyais qu'on était meilleures amies pourtant.»
Un rire s'échappe de ses lèvres. Un rire bruyant voir effrayant. C'est à ne plus rien y comprendre. Incrédule, je la fixe telle une vraie imbécile. Ma bouche s'est légèrement entrouverte tandis que mes yeux se sont agrandis comme deux grosses soucoupes. Bon sang. Ce n'est pas elle. Ce n'est pas la Vanessa que je connais habituellement. Cessant de rire, elle passe une main songeuse dans ses cheveux en soupirant. Ses yeux se redressent vers moi et me glacent le sang.
«Ravie de te revoir ? Allons bon Alyssa... Tu es partie du jour au lendemain. Sans au revoir. Ah si ! Excuses-moi. Tu m'as simplement laissé une vulgaire lettre complètement folle. Je sais bien que tu es consciente du fait que j'ai toujours apprécié les histoires de ce style mais je m'attendais à mieux comme lettre d'au revoir. Il faut parfois être un minimum sérieuse ! Tu n'as même pas pensé à ce que je pourrais ressentir en apprenant que ma meilleure amie s'en irait je ne sais où sans me prévenir directement ?! Et voilà que maintenant tu te pointes chez moi comme une fleur et dans un état plus que déplorable. Sur le coup je me suis même demandé si tu n'avais pas commis quelque chose de grave. Bon sang, qu'est-ce qui ne tournes pas rond chez toi ?»
Je reste silencieuse face à ses mots. Je n'ai rien à lui répondre. Après tout, elle a tout à fait raison. J'ai préféré fuir afin de ne pas l'affronter. Je savais d'avance que les au revoir et les explications auraient été bien trop compliqués. Mais voilà que toute cette réalité me revient en pleine face maintenant. Comme si je n'avais pas déjà assez à gérer sur mes épaules en ce moment.Toutefois, je décide de ne pas m'énerver. Vanessa a raison. Tout est entièrement de ma faute et je dois l'assumer.
Pinçant ma lèvre entre mes dents, je ravale une larme qui menace de m'échapper à tout moment. J'inspire profondément avant de relever mes yeux vers elle. Je me redresse au passage, bien qu'elle me l'ait interdit plus tôt.
«Je sais que j'ai eu un comportement complètement idiot avec toi. Je suis désolée Vanessa. Vraiment. Et je sais que mes paroles ne te suffiront certainement pas mais je tiens quand même à m'excuser. J'aurais dû te tenir au courant. Pas seulement parce que tu es ma meilleure amie mais aussi parce que je t'aime et que j'ai assez de respect pour toi pour ne pas vouloir te mentir. Ce que je t'ai dis dans cette lettre, tout est vrai. J'aurais dû te le dire en face mais j'ai pris peur. Peur que tu ne me crois pas.»
«Allons bon... Tu t'es frappée la tête ou quelque chose du genre ? Je veux bien rêver sur ce genre de chose quelques secondes mais c'est complètement insensé. Je veux savoir la vérité sur ton départ, ton retour et toutes ces blessures.»
«Les raisons de mon départ ont été dites dans ma lettre...»
«S'il te plaît Alyssa. Je n'ai nullement l'envie de tourner autour du pot. Si tu m'aimes assez comme tu le dis, dis-moi la vérité !»
«Tout ce qui a été écrit dans cette lettre est l'entière vérité. Tout. Absolument tout. Je me souviens encore de chaque mot. Je pourrais te la redire là, ici même, tant j'ai réfléchi à chacun de mes mots pour te l'annoncer.»
Mes muscles me font souffrir. Il est assez difficile pour moi de rester assise comme ça. Pourtant, je résiste. Il faut que je m'explique avec Vanessa avant tout. J'ai vraiment besoin d'elle dans cette phase de ma vie. Et si elle-même n'est pas là pour me soutenir, je ne m'en relèverais pas. La lèvre tremblante, j'inspire lourdement avant de relever mes yeux vers elle.
«Hey Vanessa.
Tu dois trouver cela étrange que je te laisse ce genre de lettre, pas vrai ? Toi et moi, nous n'avons jamais eu pour habitude d'échanger ce genre de mot. Entre nous, les paroles sont bien plus éloquentes. Et pourtant, aujourd'hui, je suis obligée de te dire tout par papier. Tout ça parce que j'ai peur. Oui, je l'avoue j'ai peur de ta réaction. Je ne vais pas te demander de m'aimer encore ou autre après ça car je sais d'avance que tu m'en voudras. Tout ce que je te demande c'est que tu m'accordes le semblant de confiance qu'il te restera après avoir lu cette lettre pour croire en mes mots.
Je m'en vais. Oui. Je pars. Loin d'ici. Loin de vous tous. Loin de toi. Ne cherches pas à me retrouver. Tu ne pourras pas. Là où je vais, les choses sont bien plus différentes que celles de notre monde. Tu te souviens quand je te disais que toutes tes histoires de surnaturel étaient fausses ? Je regrette aujourd'hui d'avoir pu dire de telles choses si tu savais... Je sais tout cela va te paraître dingue mais j'y crois. Vraiment. Et tu sais pourquoi ? Parce que je fais moi aussi partie de ce monde si particuliers. Je suis un Ange. Tu te rends compte ? Drôle de chose quand on voit mon caractère, hein ?Je me doute qu'actuellement tu dois certainement me prendre pour une folle mais à vrai dire je m'en fiche. Si je suis partie c'est uniquement pour vous protéger. Toi, maman et Steve. Vous êtes en danger si je reste. Et pour vous sauver, je vais partir. Je ne sais pas si je reviendrais un jour mais dis-toi que je serais toujours là. Comme l'éternel ange gardien que tu as été pour moi depuis notre rencontre. Je prendrais aujourd'hui ce rôle.
Aimes-moi ou détestes-moi. Je comprendrais. Je tenais juste à te dire que, je t'aime.
Merci pour tout.»
Je prends quelques instants pour reprendre mon souffle. Chaque mot. Chaque lettre. Tout est gravé dans mon esprit. Si bien que je n'ai eu aucun mal à la lui raconter à nouveau. Mes joues sont humides. Je n'avais même pas compris que je pleurais. Immédiatement, j'essuie mes larmes d'un mouvement de bras furtif. Je n'ai pas le droit de me montrer faible alors qu'elle a dû sûrement plus souffrir que moi. Je suis bien trop égoïste en vérité et j'en prends bien conscience maintenant.
Mes yeux la fixent silencieusement. Le bleu de ses yeux se brouille. J'ai l'impression de croiser une tempête. Les vagues s'y acharnent et dévalent le long de ses joues. Et le simple fait de la voir pleurer suffit à m'abattre en plein cœur. Je décide néanmoins de prendre la parole avant elle.
«Je sais que tu ne m'as pas cru une seule seconde avec cette histoire d'Ange mais pourtant tout est la vérité. Et je peux te le prouver...»
Difficilement, j'inspire. Malgré le peu de force qu'il me reste, je dois le faire. Si cela peut l'aider à me comprendre, alors je le ferais. J'ignore réellement si nous avons le droit à de tels actes mais une fois de plus, ce détail m'importe peu. Vanessa me regarde d'un air intrigué, des perles au coin de yeux.
Mes paupières se ferment lentement. Je concentre toute mon énergie pour accomplir mon geste. Ma technique n'est pas toujours bien efficace lorsque je ne l'utilise pas sous le coup de la colère mais je veux y arriver. Pour elle. Pour qu'elle puisse me croire. Je suis finalement soulagée en sentant un poids se faire dans mon dos. Je les sens. Elles se déploient hors de mon tatouage avant de se déplier. Je me doute bien qu'elles doivent être imposantes. Mes yeux se rouvrent à l'entente d'un cris de la part de mon amie.
«Bordel mais qu'est-ce que...» S'exclame-t-elle avant que je ne l'interrompe.
«Chut. Calmes-toi, je ne te ferais rien. Alors ne cris pas, d'accord ?» Murmurais-je en déposant ma main sur sa bouche.
Nos regards se croisent pendant de longues secondes avant qu'elle ne daigne enfin à hocher son visage dans un mouvement positif. Rassurée, je retire ma main en lâchant un léger soupire. La blonde me fixe avec attention, appréhension et admiration. Un mélange assez complexe. Je me raidis légèrement en sentant sa main contre l'une de mes ailes. C'est bien la première fois que quelqu'un se permet de me les toucher. Pourtant, avec elle, je ne dis rien. Elle en a tout les droits.
«Elles sont vraies ?...»
«Disons que elles sont solidement fixées alors n'essaye pas de me les arracher ou de tirer dessus.» Tentais-je pour plaisanter faiblement.
«C'est juste incroyable. Mais... Comment ? Enfin je veux dire, c'est impossible...» Murmure-t-elle d'une voix complètement ébahie.
«Je dois t'avouer que j'ai eu aussi du mal à m'y faire la première fois que je l'ai appris. Jusqu'au jour où j'ai vu Keith sortir ses ailes de son dos tandis que ma mère et Steve se faisaient attaquer par un vampire.»
«Alors eux aussi ce sont-»
«Oui. Ce sont des êtres surnaturels comme moi. Lindsay est une Naïade et Keith un Sylphe. Deux élémentaires si tu préfères. Il faut croire que tu n'étais pas si folle que ça au final de croire à toutes ces choses.»
«A bien y réfléchir maintenant... C'est vrai qu'ils ont une description qui collent bien à ce genre de personnage. Je croyais que toutes ces histoires n'étaient que légendes bien que j'ai toujours voulu que ça arrive. Et voilà que j'apprends que tout est vraie et qu'en plus de ça ma meilleure amie en fait partie.»
Le regard de Vanessa semble être complètement attiré par les ailes qui trônent dans mon dos. Sa main ne cesse de toucher le plumes qui l'ornent et je dois dire que ce contact m'apaise. J'appréhendais assez à l'idée de lui montrer ma véritable nature mais il semblerait que sa réaction soit moins excessive que je ne le croyais. Encore une chance qu'elle soit assez décalée sur les bords. Je hausse finalement un sourcil en la voyant ôter sa main.
«Il est vrai que sur ce coup-là je veux bien admettre que tu avais raison sur ton identité mais cela ne m'explique toujours pas en quoi tu es partie soudainement.»
«Je te l'ai dis. Certaines personnes en avaient après moi et je devais partir pour qu'ils puissent vous laisser tranquille. Je suis allée dans une Académie spécialisée rassemblant toutes sortes de créatures surnaturelles dans le but de les faire cohabiter et de les faire progresser. La règle là-bas impose que les familles et proches des élèves soient en sécurité de tout conflit.»
«Et pourquoi es-tu revenue dans ce cas ? Dans un tel état qui plus est.»
Ma gorge se noue à l'entente de ces mots. Je ne voulais pas en parler. Mes yeux fixent un point imaginaire tandis que je serre mes mains entre elles, tremblant légèrement. Vanessa semble avoir remarqué mon trouble puisqu'elle hausse un sourcil en reprenant place sur sa chaise. Mes ailes disparaissent pour que je les laisse se loger à la place de mon tatouage. D'une voix mal assurée, je lui réponds :
«Je me suis enfuie.»
«Enfuie ? Comment ça ? Ils t'ont fait du mal ? Ce sont eux qui t'ont fait toutes ces blessures ?!»
«Non. Ils ont fait des recherches sur mon père. J'ai appris quelque chose que je n'aurais pas dû savoir. Et j'ai préféré m'enfuir. Ces blessures ne sont là que par ma faute. J'ai assez mal supporté les courses à répétitions ainsi que le trajet pour parvenir jusqu'ici...»
«Des recherches sur ton père ? Comment ça ? Pourquoi feraient-ils une telle chose ? Il est mort après tout. Cela n'a aucun sens.»
«Il faut croire que ces recherches avaient finalement leur importance au vue de ce qu'ils ont pu apprendre hier soir...»
Je peine à respirer. Mon corps est prit de légers tremblements. Je n'aime pas me souvenir de ce qui a pu se passer la veille. Mon cœur a encore du mal à s'en remettre tout comme le reste de mon être. Jamais. Jamais je n'aurais dû apprendre une telle chose. Je regrette.
«Que s'est-il passé Alyssa ?» Demande-t-elle d'un air soucieux, les sourcils froncés.
La main chaude de Vanessa se dépose sur les miennes. Ce contact ne fait qu'augmenter mes tremblements. Je persiste toutefois à ne pas craquer. Pas encore. Je ne supporte plus le fait de pleurer pour tout cela. C'est bien trop dur.
C'est avec une grande difficulté que je me décide à relever mon regard en sa direction. Ma mâchoire tremble.
«Ma mère, un Ange, est tombée amoureuse de mon père. Il était supposé être un humain aux yeux de tous mais... J'ai appris qu'il n'en était rien de tout cela. Il n'a jamais été l'homme exemplaire que tout le monde pensait. C'était un Démon. Je suis la fille de l'union interdite d'un Ange et d'un Démon Vanessa... Tout, tout n'était que mensonge depuis le début. Mon monde est entrain de s'écrouler.»
Prononcer cette vérité à voix haute est bien plus difficile que je ne l'aurais cru. Mes yeux s'humidifient une fois de plus. Je n'ai même plus les forces de me battre et de paraître forte comme avant. J'abaisse les armes.
Visiblement marquée par ma faiblesse, je me sens soudainement enveloppée par une douce chaleur. Son parfum me parvient jusqu'aux narines tandis que sa main trace de petits allers et retours dans mon dos. J'ai l'impression de pleurer comme une gamine de cinq ans qui aurait perdu son doudou à l'instant même.
«Chut... Ne pleures pas...» Murmure-t-elle en continuant ses caresses.
«Je ne peux pas Vanessa. Tu ne comprends pas. C'est trop dur...» Sanglotais-je à nouveau.
«D'accord. Je ne peux pas comprendre. Après tout je ne fais pas partie de ce monde. Mais au fond, qu'est-ce que ça change que tu sois Ange ou Démon ou bien le mélange des deux hein ? Pour moi, tu restes toujours la même fille avec qui j'ai partagé plusieurs années de ma vie. Je sais que c'est dur pour toi de te dire qu'une grande partie de tes appuis dans la vie n'étaient que mensonges mais c'est comme ça. Arrête de te lamenter sur ton sort. La Alyssa que je connais n'est pas comme ça. Tu t'en remettras. Cela prendra le temps qu'il faudra mais tu t'en remettras.»
Mes yeux se redressent lentement de son t-shirt désormais inondé de larmes. Son regard se fait légèrement attristé tandis qu'elle passe désormais une main dans mes cheveux pour les caresser doucement.
«En attendant que les choses te passent, je vais rester avec toi. Malgré tout, tu restes ma meilleure amie. Alors pleures, pleures autant qu'il le faudra. Je suis là.»
Il ne me fallu pas plus de temps pour m'exécuter et me perdre à nouveau dans ses bras afin d'évacuer toute cette peine.
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Tadam voilà le chapitre Trente-Sept ! Notre chère Alyssa est de retour dans le monde extérieur, enfin ! Il semblerait que, malheureusement pour elle, les retrouvailles avec son entourage ne se passent pas forcément comme prévu. Bien heureusement, Vanessa semble restée la même au fond. Je suis contente de la retrouver dans ce chapitre personnellement huhu. Et vous, qu'en avez-vous pensé ? Je sais qu'après l'action du chapitre précédent, beaucoup attendaient la suite alors j'espère qu'elle vous conviendra.
D'ailleurs, merci à tout vos gentils messages de soutient. Je dois dire que voir tout vos messages m'arrachent à chaque fois un large sourire. Si je le pouvais, je vous prendrais tous dans mes bras pour vous remercier ! Au passage, j'aimerais faire un petit coup de pub pour cette demoiselle Engrenage. Elle m'a demandé d'aller jeter un coup d'oeil à son histoire Le Labyrinthe : Une fille, pas de sortie, un tas d'ennuis. Alors si l'envie vous prend n'hésitez pas à aller la soutenir !
Voilà voilà. Je vous fais d'énormes bisous. Encore un bon courage à tout ceux qui travaillent encore. On se retrouve samedi pour le prochain chapitre ! ♥
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