Chapitre Trente-Cinq
Alyssa
L'oreille tendue vers la porte, je tentais tant bien que mal de discerner les paroles que s'échangeaient les deux hommes. Que se passait-il donc ? J'étais bel et bien consciente de la gravité de mes actes mais, intérieurement, quelque chose m'intimait l'ordre de rester là pour écouter. Je dissimulais ainsi au mieux ma présence et glissais mon œil par delà l'ouverture de la porte. Les couloirs étaient sombres à cette heure-là. Avec un peu de chance, on ne m'y verrait pas encore.
«Je peux savoir en quel honneur vous m'avez convoqué ici jeune homme ? Il y a bien longtemps qu'on ne m'avait pas convoqué dans un tel endroit alors je me demande bien ce qui a pu vous pousser à me faire venir.» S'interrogea Martin.
«Nous avons besoin de renseignements.» Répondit Lucas en s'installant à son bureau, fixant l'homme calmement.
«De renseignements ? Vous avez besoin que je fasse des recherches pour vous au sein de la bibliothèque c'est ça ?»
«Non, pas exactement.»
«Vous souhaitez que j'aille chercher dans nos anciennes archives dans ce cas ? Je ne vous assure pas un résultat entièrement positif vous savez. Ces veilles caves remplies de livres sont un véritable labyrinthe.»
Tandis que Martin parlait, je distinguais discrètement Lucas passer une main contre son menton. Pensif, il croisait ses mains avant de déposer son visage contre celui-ci. Keith et Lindsay étaient un peu plus en retrait. Ils devaient sûrement faire simplement acte de présence comme la plupart du temps.
«Il s'agit d'autre chose. Quelque chose que seul vous pouvez m'informer.» Reprit le délégué d'une voix tout à fait sérieuse.
Cette remarque du jeune homme sembla piquer la curiosité du vieux bibliothécaire .Prenant ainsi place sur le siège face au bureau, il montrait de par sa position qu'il était prêt à entendre la requête de son cadet. Qu'avait-il de si secret à lui dévoiler ?
«Je vous écoute dans ce cas jeune homme.»
«Je suppose que vous n'êtes pas sans savoir qu'une élève a fait son entrée il y a de ça quelques mois au sein de notre Académie. Alyssa Taylor. Son nom doit sûrement vous dire quelque chose puisque l'on m'a rapporté que vous vous étiez déjà parlés.»
«Oui c'est exact. Une brave petite en effet.» Acquiesça l'homme.
«Depuis quelques temps, nous cherchons à mener l'enquête à son sujet. Non qu'elle puisse nous paraître suspecte malgré son attitude plutôt décalée mais il y a des points d'ombres dans son dossier que nous n'arrivons à résoudre.»
«Des points d'ombre ?»
«C'est exact. Nous avons remarqué que l'identité de son père restait encore bien trop floue. Il est vrai qu'il est reconnu comme mort dans nos documents mais on ne sait rien de son passé. Beaucoup de choses restent évasives à son sujet.»
Écoutant la conversation entre les deux hommes, je ne pus m'empêcher de froncer les sourcils tout en tendant d'avantage l'oreille. Pourquoi ? Dans quel but cherchaient-ils à en apprendre sur mon père ? Il n'était plus de ce monde. N'était-ce pas une raison suffisante pour le laisser en paix ? Frustrée intérieurement par la tournure des événements, je serrais les poings en ne quittant pas la pièce du regard.
«Et puis-je savoir en quoi ma présence en ces lieux pourra-t-elle vous apporter plus de renseignements à ce propos ?»
«Il s'avère que nous avons appris dernièrement que vous aviez fait la rencontre de Emilie, la mère de Alyssa, par le passé. Elle aurait été de passage dans cette Académie et vous aurait porter aide. Vous auriez ainsi sympathisé avant qu'elle ne vous révèle certaines choses, je me trompe ?»
«J'oubliais à quel point les Anges avaient ce pouvoir de divination sur les humains. Vous êtes bien renseigné à ce que je vois. Moi qui pensait qu'un vieil homme comme moi passerait ses vieux jours inaperçu.» Plaisanta-t-il d'un ton ironique.
«Nous aurions besoin de ces renseignements. Réellement. Pourriez-vous me dire ce que vous savez à propos de ses parents ?»
Mon cœur battait à une allure folle dans ma cage thoracique. Bien que j'essayais de rester le plus silencieuse possible, je ne pouvais empêcher mon souffle de se faire plus fort. La gorge sèche, je la grattais nerveusement en avalant un semblant de salive. Mes paumes étaient moites et mes phalanges blanchissaient à vue d'œil.
Allais-je à mon tour découvrir la vérité ? Je l'aurais espéré dans de meilleures conditions et de manière plus intime mais je n'en avais pas vraiment le choix... J'étais moi-même en infraction pour découvrir cette vérité qui m'impliquait plus que quiconque.
Semblant hésiter dans sa réponse, je vis le vieil homme passer une main songeuse sur ses cheveux grisés. Pourquoi hésitait-il ainsi ? Ma famille avait-elle tant à cacher ? La nervosité me gagnait d'avantage et les questions me faisaient tourner la tête.
«Si je vous le dis, promettez moi une seule chose. La petite ne devra jamais le savoir. Vous devez la protéger coûte que coûte de ce que je vais vous dire.»
«Nous ne pouvons pas vous promettre une telle chose et vous le savez malheureusement. Tout dépend de ce qu'il en adviendra suite à vos révélations. Certaines personnes sont sûrement entrain de faire également leurs recherches à son sujet.»
«Je suis sérieux mon enfant. Conservez la de cette vérité. Elle ne doit pas savoir tout comme vous devez faire en sorte de ne pas la juger. Malheureusement, nous n'avons pas le choix sur ce que nous devenons en naissant.»
C'est avec attention que je discernais un air suspicieux sur le visage de Lucas. Les mots de Martin l'avaient visiblement intrigué plus qu'ils ne l'auraient dû. Je remarquais par la même occasion que les deux élémentaires restaient suspendus à chacune des paroles de l'homme. Il les tenait tous en haleine. Moi avec.
Quel était ce mystérieux secret à la fin ?!...
«Bien, je vous le promet.»
«Jurez-le je vous pris. Au nom de votre propre sang et de celui de tout ceux que vous aimez. Jurez-le au nom de la loi des Anges.» Renchérit le bibliothécaire.
«Je vois que vous avez pris soin de bien assimilé nos règles au cours du temps. Soit. Je le jure au nom de mon sang et de la loi des Anges. Que les vents m'emportent aussi loin que possible si je feins à mon engagement.»
Semblant satisfait de cet accord, Martin hochait faiblement son visage. Un air soudainement plus pensif se vit naître à son visage. Les souvenirs semblaient revenir peu à peu en son esprit et un air plus nostalgique et attristé à son visage apparu. Il joignit ses mains entre elles et posa les bras contre ses cuisses. Ses yeux fixaient un point sur le sol tandis qu'il commençait son récit.
«La première fois que je l'ai rencontré, elle était encore bien jeune. Elle devait avoir une vingtaine d'année tout au plus. C'était il y a peut-être dix-huit ans si mes souvenirs sont exacts. Je ne me souviens plus exactement, mais elle avait été envoyé dans cette Académie afin de venir voir votre oncle pour lui apporter des nouvelles. Je suppose qu'il ne vous en a jamais parlé. Toujours est-il que nous nous sommes rencontrés alors qu'elle parcourait la bibliothèque à la recherche d'un livre. Vous savez, je la revois encore à travers sa fille parfois. Ce même sourire et cet soif de connaissance et de découverte. Bien que le physique n'en soit pas exactement identique. Elles sont presque les mêmes au fond. Bien qu'Emilie avait tendance à être plus obéissante que Alyssa bien sûr. Elle venait de descendre sur Terre et était chargée d'une mission. Pour tout vous dire, elle ne m'en a jamais parlé dans les détails. C'était une affaire privée que seule une faible minorité dans ce Monde en avait connaissance.»
Restant complètement suspendue à ses lèvres, je buvais chacune des paroles de Martin. Ainsi, ma mère était venue ici assez jeune. Et de ce que j'avais pu comprendre, elle avait toujours vécu dans les Cieux avant cette époque. Mais alors, pourquoi était-elle descendue ici ? Une mission ? Qu'avait-elle de si important pour que si peu de personne, pas même Martin, n'en soit au courant ?
«Nous nous sommes directement entendus. C'était une jeune fille tout à fait charmante. Ma femme et moi l'aimions comme si elle était notre propre fille. Malgré l'importance de sa mission et de son emploi du temps, elle ne manquait jamais une occasion de nous rendre visite afin de nous aider dans la bibliothèque ou encore de prendre de nos nouvelles. C'était une jeune fille serviable et aimante.»
«Pourtant, sa réputation n'est pas la plus claire qu'il existe au sein de cette Académie.» L'interrompit Lucas d'une voix suspicieuse. Il écoutait tout aussi attentivement l'homme.
«En effet, certaines choses ont fait que sa réputation ait été ternie. Et je pense, que vous avez eu vent d'une partie de l'histoire mais je doute que vous ne la connaissiez tous entièrement.»
«Et je suppose que vous avez les réponses à ce point d'interrogation qui s'interpose.»
«Disons que je peux contribuer à sa compréhension.»
Tandis que je restais tapie dans l'ombre, je ne remarquais point qu'une présence s'était interposée derrière moi. Ce ne fut que lorsque je sentis un corps étranger effleuré le mien que je retenais un sursaut mélangé à un cris. Bien heureusement, je me contenais de mon mieux. Instantanément, je priais pour qu'il ne s'agisse pas d'un garde. Pitié, pas maintenant. Je devais découvrir la suite. Ce n'était pas assez.
«Qu'est-ce que tu fais ?» Murmura une voix presque inaudible.
Lentement, je me retournais et ouvrit grossièrement les yeux en percevant la silhouette et le visage de Maxence. Que fabriquait-il ici ? Comment avait-il réussi à s'introduire dans notre bâtiment sans se faire repérer ? Prise entre la peur, l'angoisse et la curiosité, je me contentais de lui faire signe de se taire en pointant la porte.
Mon manque de réponse sembla le surprendre mais il se plia à ma volonté sans rechigner. Je n'avais pas envie d'être dérangée. Pas maintenant. Sans lui prêter d'avantage d'attention, je me replongeais dans mon écoute. Maxence sembla se décider à en faire de même puisqu'il se glissa derrière-moi pour écouter à son tour. En découvrant la vérité, peut-être irait-il me lâcher enfin ? Je l'espérais. Sa présence commençait réellement à en devenir pesante.
«Un jour, je l'ai surpris dans un coin de l'Académie. Il faisait froid. C'était en hiver. Elle revenait d'une mission. J'avais immédiatement supposé qu'il s'agissait de quelque chose en rapport à ce qui l'avait amené ici, sur Terre. Toutefois, elle n'était pas comme d'habitude. Ce n'était plus la même femme que j'avais connu. Je m'en souviendrais toujours. Cet air accablée sur son visage, ses yeux rougis, ses joues baignées de larmes et ses lèvres tremblantes. Elle pleurait comme jamais je n'avais vu un ange pleurer dans ma longue vie.»
A ces mots, mon cœur se comprima dans ma poitrine. Ma mère avait pleuré après une mission. Pourquoi ? Qu'avait-il pu se passer pour qu'elle se retrouve dans un tel état ? Le cœur lourd d'appréhension, je ne faisais même pas attention à la présence du Démon derrière moi. Il écoutait tout aussi silencieusement à ma plus grande surprise.
«Que s'était-il passé ?» S'interrogea le brun.
«Elle avait commis un péché. Un péché que les Hautes Sphères ne lui pardonneraient jamais. Et elle en était accablée.»
«Un péché dites-vous ?»
«Oui, un péché qui lui coûterait bien plus qu'elle ne l'aurait voulu. Je suppose que vous avez déjà vos suppositions et vos hypothèses à ce sujet. Elles concernent son père pour tout vous avouer.»
De grosses gouttes de sueurs froides glissaient le long de mon dos. Le corps tremblant, je devenais de plus en plus nerveuse. Le temps me paraissait extrêmement long. Et je n'avais qu'une hâte : découvrir enfin une partie de la vérité. Et ce, bien que je savais d'avance que cette vérité risquait sans aucun doute de m'anéantir.
Un air pensif au visage, je vis l'Ange glisser un doigt entre ses dents afin de le mordiller légèrement. Une expression mal à l'aise émanait doucement de son visage. Il sembla soudainement torturé de l'intérieur.
«En effet, nous avons mené l'enquête et imposé quelques hypothèses mais je redoute qu'elles ne soient vraies.»
«Il arrive pourtant que certaines hypothèses s'avèrent être réelles malheureusement vous savez...»
Un long silence plana dans la salle tandis que les deux hommes s'échangeaient un regard empli de sous-entendus. La tension était palpable. On ne sentait que ça. S'amusaient-ils avec mes nerfs à faire durer le suspens jusqu'à me tuer ? Si tout cela continuait, je ne répondrais bientôt plus de moi. Intérieurement, je leur intimais l'ordre d'accélérer la cadence. Fait bien pathétique car ils ne m'entendraient certainement pas.
«Les humains ne savent pas lire dans les pensées pourtant. Comment pouvez-vous savoir que certaines de nos hypothèses pourraient s'avérer être vraies ?»
«Certes mais nous possédais une chose qui s'y apparente : l'intuition. Et croyez-moi, celle-ci peut s'avérer être un précieux outil...»
«Je n'en doute pas un seul instant croyez-moi. Vous avez toujours été des êtres impliquant la fascination et l'admiration de nos peuples.»
«Je vous remercie de ce commentaire. Enfin, toujours est-il que je suppose que vous savez d'avance de quoi je veux parler. Vous trois, vous savez très bien de quoi je veux parler mais vous tentez de feindre la vérité, n'est-ce pas ?» Fit Martin en promenant son regard sur les trois figures présentes.
Aucune réponse. Je discernais un petit air amusé sur les lèvres du vieil homme avant qu'une expression bien plus sombre et désolée n'orne son visage. Si toute cette mascarade continuait, je finirais par m'arracher les cheveux.
«Je pense juste que mon hypothèse est impossible. Une telle chose ne peut s'avérer être vraie. Autrement, les choses ne se seraient pas passées pas ainsi. Non.» S'assura l'homme comme s'il se parlait à lui-même.
«Mon enfant... Calmez-vous. Vous saurez tout dans quelques instants.»
Relevant ses yeux en direction du vieillard, Lucas se contenta d'hocher faiblement son visage tout en se ressaisissant. Son attention se plongeait de nouveau sur cet homme. Il détenait le monopole de notre attention. A nous tous.
«J'ai eu beaucoup de mal à la faire parler. Il faut avouer que le sujet de sa venue en notre Monde avait toujours été un sujet tabou. Les Hautes Sphères gardaient constamment un œil sur elle et ses compagnons. Pourtant, face à un tel désarroi de sa part, je l'ai plus ou moins incité à m'en dire plus. Je n'avais pas pour intention de la forcer mais parler est souvent un moyen libérateur pour apaiser un cœur meurtri. C'était ce que je m'étais dis ce jour-là.»
«Vous en a-t-elle dit d'avantage ? A-t-elle expliqué la faute qu'elle avait commise ?»
«Oui... Et malheureusement, même si je n'étais qu'un simple humain, j'avais bel et bien conscience que son geste ne passerait pas inaperçu. La gravité était telle que j'aurais voulu la protéger de tout mon possible. Elle ne méritait pas une telle punition si ce n'est l'exil, la déchéance.»
L'homme sembla se gratter la gorge. Son âge ne l'aidait sûrement pas à tenir autant de temps à parler. Semblant remarquer ce détail, je remarquais du coin de l'œil que Lindsay venait de remplir un verre d'eau pour le lui tendre. La remerciant d'un sourire, il prit soigneusement le verre entre ses doigts pour en boire une gorgée. Cette sensation sembla immédiatement l'apaiser puisqu'il émit un faible soupire satisfait.
«Vous connaissez tous la règle des Anges et des Démons. Vos deux peuples ont toujours été ennemis. Et par conséquent, vous avez toujours cherché à nuire à l'autre. Ce jour-là, lorsque nous nous sommes parlés, elle m'a révélé que des Démons avaient été envoyés pour poursuivre leur mission à leur tour. Jusque là, Emilie n'avait encore jamais fait leur connaissance. Du moins, c'est ce qu'elle avait fait croire à ses camarades. En vérité, les choses en étaient toutes autres.»
«Que voulez-vous dire par-là ?»
Pour la première fois depuis le début de la conversation, Keith venait de prendre la parole. Instinctivement, je tournais mes yeux vers lui afin de l'observer. Longuement et attentivement. Un air profondément perturbé se lisait sur son visage. L'histoire de ma famille semblait porter un grand intérêt à sa personne. Le fixant à son tour, Martin le regarda quelques longues secondes. Il prenait à nouveau une longue inspiration. Les choses sérieuses allaient enfin commencer. Et au fond de moi, je redoutais plus que tout ce moment.
«Elle a fait la rencontre d'un Démon. Du même âge qu'elle physiquement selon ses dires. Comme vous les connaissez si bien, les Démons ont ce tempérament agressif et joueur à l'égard de leurs ennemis. Cet homme en faisait parti. Ils se sont rencontrés une première fois. Un combat s'est livré entre eux. J'ignore quelle en a été l'issue car elle n'a jamais voulu m'en parler mais j'en ai fais mes propres déductions au cours du temps. Je me souviens qu'un jour elle avait été amené d'urgence auprès des Nymphéas de l'Académie pour des soins intensifs. Elle semblait amochée de partout. Les raisons de telles blessures étaient restées secrètes pour tous mais quand j'y repense aujourd'hui, tout est plus clair. Elle avait affronté ce Démon et en était ressortie sérieusement amochée ce jour-là. Vous devez sûrement penser, tout comme je l'avais pensé à l'époque, qu'il ne s'agissait que d'une rencontre habituelle entre vos deux races mais les choses ne s'en sont pas arrêtés là.»
Prenant une pause pour reprendre son souffle, le vieil homme déportait son regard sur le verre. Il sembla fixer quelques longues secondes son contenu avant de relever les yeux. Quelque chose dan son regard semblait avoir changé. Une once de noirceur s'y lisait. Ils regardaient les trois personnes présentes avec lui avant de reprendre :
«Ce n'était pas leur dernière rencontre. Ils se sont revus à de nombreuses reprises par la suite. Leurs échanges semblaient toujours aussi chaotiques. Se battant chacun pour la lutte et la victoire de leur propre nation. Toutefois, toutes ces rencontres restaient cachées aux yeux de tous. Il n'y avait qu'eux. Pour une raison énigmatique. Et bien que j'eus cru comme tous que tout se finirait en bain de sang au cours du temps, j'ai assez vite compris que les choses en étaient toutes autres à son regard complètement désespéré. Je n'y lisais pas de la colère dans son regard. Non c'était tout autre chose...»
Les battements de mon cœur résonnaient à une allure complètement folle dans ma cage thoracique. J'avais presque l'impression de l'entendre bourdonner dans mes oreilles tandis tout me semblait démesuré. Le souffle court, je tentais tant bien que mal de me contenir et de garder équilibre. Pendant ce temps, par je ne sais quel miracle de sa part, Maxence continuait de rester parfaitement silencieux. Il semblait écouter avec un calme presque légendaire que je ne lui connaissais pas.
«Ce Démon et cet Ange ont commis l'irréparable. Je l'ai bien assez vite compris. Ils se sont épris l'un de l'autre. Emilie l'a aimé. Plus qu'elle ne l'aurait jamais dû. Ce Démon avait su faire d'elle la captive de son cœur. Et pour ce péché, elle savait que les conséquences seraient lourdes. L'amour est interdit entre vos deux camps. J'avais bien évidement compris que les choses ne s'en arrêteraient pas là pour elle. Comme si cela ne suffisait pas... Ce n'est que lorsque je l'ai vu porter ses mains à son ventre en sanglotant que j'avais compris. Elle portait l'union de ce péché. Et Alyssa était le fruit de cet amour interdit.»
Un coup de massue vient m'assaillir en plein cœur. Je tangue. Non. Mon corps semble complètement figé. Je ne peux pas bouger. Ce doit être ma vue qui me joue des tours. Je la sens se brouiller. D'ailleurs, le silence reste maître suite à cette révélation. On pourrait presque y entendre le moindre petit bruit. Dont mon souffle bizarrement court, bruyant et bien plus irrégulier que la normale. Ma mère, un Ange, se serait éprise d'un Démon, mon père.
«L'union d'un Ange et d'un Démon me dites-vous ?» Balbutie Lucas en fronçant ses sourcils.
«Oui vous m'avez très bien entendu. Ils ont commis l'irréparable et ont engendré une descendance qui n'aurait jamais dû exister aux yeux de tous.»
«Qui était son père en réalité ?...» Rajoute le délégué d'une voix mal assurée.
«Un homme à l'importance considérable dans son monde. Tel que nous le connaissons aujourd'hui et à l'époque, il s'appelait Victor. Il est l'homme avec qui Alyssa a grandit. Ce père, considéré comme un humain aux yeux de tous, était en réalité un Démon. Ou plus précisément un Chevalier Noir. Vous devez sûrement en connaître dans cette Académie puisque la directrice de ces démons fait parti de cet ordre. Et si vous le pensez, sachez que vous avez raison. Victor et la directrice sont frères et sœurs. Emilie l'a apprit par erreur en visite à l'Académie. Elle a croisé son amant en pleine compagnie de sa soeur, madame Knight. Le rapprochement n'a pas été difficile à faire lorsqu'elle les a entendu se parler. Par conséquent, nous pouvons faire le rapprochement et dire que cela fait ainsi d'Alyssa la nièce de celle-ci et la cousine de Maxence...»
Mon corps en soudainement pris de violents frissons. Ma vue continue de se brouiller. J'ai l'impression de pouvoir devenir aveugle à tout moment. Les spasmes me traversent à une allure folle tandis que je sens le corps du Démon se tendre derrière moi. Je n'ose même pas y jeter un coup d'œil tant la surprise est considérable.
C'est impossible. Je ne peux. Maxence et moi ne pouvons pas partager ce lien de sang. Je ne veux pas y croire. J'ai l'impression que le Monde se dérobe sous mes pieds et que je pourrais y sombrer à n'importe quel moment. Je sens les larmes mes monter aux yeux. Non. Il ne faut pas. Je ne dois pas pleurer. Pas maintenant.
C'est peine perdue.
«Ce... C'est impossible ! Une telle chose ne peut pas être possible voyons ! Elle ne possède rien qui puisse paraître démoniaque en soi. Certes elle a parfois mauvais caractère mais cela ne prouve rien. Ses ailes sont parfaitement blanches. Il n'y a aucune trace de noirceur dessus !» S'exclame Lucas en perdant son sang-froid.
«Non... Ce n'est pas vrai...» Chuchote Lindsay en portant une main devant ses lèvres tandis que Keith reste complètement figé.
Mes yeux continuent tant bien que mal d'observer la scène. Je souffre. Mon cœur bat à tout rompre. J'ignore quelle est la réaction de Maxence. Je ne veux pas affronter son regard. Pas après cette révélation douloureuse sur notre lien de parenté. Comment puis-je le voir normalement désormais ?
Malheureusement, le Démon n'est pas d'avis à rester calme ou discret. Pris d'une impulsion dont je ne lui connaissais pas vraiment, il ouvre dans un grand fracas la porte, manquant de la décrocher au passage. Mon regard s'immobilise immédiatement sur les quatre silhouettes postées devant moi. L'air me reste bloquer dans les poumons et j'ai l'impression de suffoquer.
Tour à tour, je les vois se figer avant de pâlir d'une couleur à en retourner les morts. Leurs visages affichent d'abord de l'étonnement, de la surprise, de la peur, de l'angoisse, de l'embarras puis de la tristesse.
«Alyssa... Ne pleures pas je t'en pris...» Murmure la Naïade.
Je remarque Lindsay tenter une approche vers moi. Immédiatement, je me recule brutalement. Pleurer ? Je ne pleure pas. Je suis toute fois interpellée par ses mots et portent une main à mes joues. Elles sont humides et je constate que des larmes s'y sont déposés.
De violents sanglots s'échappent d'entre mes lèvres tandis que je marche à reculons en secouant vivement mon visage de droite à gauche. J'hoquette. Je tremble. Maintenant que je le sais, je pleure comme une pauvre enfant l'aurait fait face au plus grand malheur du Monde. Je ne dirais pas que j'ai atteint ce point mais une partie de mon univers vient de se bouleverser et de s'écrouler. Et mon cœur meurtri me le fait bien comprendre. Je suis née d'un péché. D'une abomination entre deux êtres à l'amour interdit. Et cette vérité me brise plus qu'elle ne le devrait.
«Ne... Ne m'approches pas !» Criais-je.
«Je t'en pris Alyssa calmes-toi... »
Leurs mots ne m'atteignent pas. Mes yeux se déportent sur Martin. Ses yeux. Tristesse et désolation s'y lisent. Je sais. Il ne voulait pas que j'apprenne cette terrible nouvelle et ma curiosité m'a sûrement joué le plus mauvais tour de toute ma courte existence.
Accablée, je tente de me contenir afin de pouvoir parler et m'exprimer au mieux. Un rire nerveux et sarcastique ne manque pas de s'échapper à l'entente des mots de la jeune fille.
«Me calmer ? Tu plaisantes j'espère ? C'est une blague ?»
«Alyssa...» Murmure-t-elle avec une mine attristée.
«C'est une putain de blague c'est ça ?! Vous êtes entrain de me demander de me calmer après ce que je viens d'entendre ?! J'apprends que je suis née d'un amour interdit qui a causé la déchéance de ma mère, que mon père est un démon et qu'en plus de ça cet homme est mon cousin !»
Je fulmine tout en pointant un doigt en direction de Maxence qui observe la scène en silence. Et ce, bien qu'ils semblent tout aussi tendu de par la situation. Mes nerfs s'échauffent et je sens une veine s'agiter sur mon front. Je ne cherche même plus à contrôler mes mots. Tout sort au quart de tour. Si je le pouvais, ils seraient déjà tous foudroyés par les éclairs dans mes yeux.
«Et vous me demandez de me calmer ?! Est-ce que vous vous foutez de ma gueule ou quoi ?! Vous n'avez aucunement le droit de me dire quelle réaction je dois adopter ! C'est clair ?!»
Essoufflée, je prends quelques secondes afin de reprendre mon souffle. Tous me regardent avec étonnement et désolation. Je sens que les larmes continuent de rouler sur mes joues tandis que j'hoquette fortement. Le goût salé de mes larmes me rentrent en bouche tant le flot se déchaîne.
Malgré tout, je persiste et déporte mon attention sur Lucas. Cette fois-ci, je pointe un doigt accusateur en sa direction et cris :
«Tu n'avais pas le droit... Tu n'avais pas le droit Lucas de fouiller dans ma vie. Pas pour me faire apprendre de telles horreurs... Je te l'interdis tu m'entends. Ce n'est pas juste !»
Et sans m'attarder une seconde de plus, je m'élance en dehors de la salle. Il faut que je fuis. Je ne peux pas rester une minute de plus. Mon corps s'échauffe. J'ai l'impression de perdre le contrôle de mon être.
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Hello hello les chatons ! On se retrouve aujourd'hui pour le chapitre Trente Cinq. Plutôt explosif n'est-ce pas ? Je dois bien vous l'avouer, j'ai adoré l'écrire ! N'hésitez pas à me donner votre avis et votre ressenti. Les révélations vous ont-elles étonné pour la plupart ?
Je sais que certain avait quelques idées mais je pense que personne n'avait vu le coup venir pour Alyssa et Maxence !! Je me doute que certain seront par conséquent déçus de savoir qu'il n'y aura pas d'issues amoureuses pour les deux personnages mais j'avais prévu de faire mon histoire ainsi et je me tiens à mes plans. Et puis, il reste encore l'aspect familiale à exploiter pour eux deux ! Peut-être que Maxence sera pour vous comme ça ?~
Bref, attendez-vous à une suite de l'action dans le prochain chapitre. Que compte faire l'héroïne selon vous ?
J'attends avec hâte vos réactions ! Bisouuus et on se retrouve samedi prochain les amours ♥
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