Chapitre Quatre-Vingt-Douze
Alyssa
Mon corps tourne. A droite. A gauche. Encore et encore. Un grognement d'agacement franchit la barrière de mes lèvres tandis que je finis par me redresser de mon lit. L'obscurité présente dans la pièce me permet toutefois de dissocier la forme des meubles. Immédiatement, mon regard est dirigé de son côté. Pourquoi est-ce que je ressens un tel vide ? Agir ainsi ne rime à rien. C'est tout bonnement ridicule. Je ne peux pas me résoudre à jouer les enfants sages alors que quelque chose de grave se produit en bas.
«Comme si je pouvais dormir sereinement dans une situation pareille... Je ne me savais pas aussi hypocrite.» Murmurais-je.
Je décide de repousser mes draps pour me rendre vers la salle de bain. Me rafraîchir le visage et l'esprit au passage me fera le plus grand bien. Mes yeux sont finalement attirés par mon reflet dans le miroir. J'ai du mal à m'y reconnaître. Je n'ai pas tellement changé extérieurement parlant et pourtant, je vois bien que quelque chose n'est plus pareil. Il suffit d'observer les cernes sous mes yeux ainsi que la souffrance dans mes traits pour le comprendre. Je suis loin d'être celle d'il y a un an. Tout. Tout a changé. Ma vie a complètement basculé du jour au lendemain et j'ignore encore de quel côté la balance est-elle tombée.
Il faut que je fasse quelque chose. Je ne peux pas rester sagement dans ma chambre à attendre que l'on vienne à moi. Surtout pas en sachant qu'à l'heure actuelle mon cousin et mes deux amies sont sans doute entrain de se battre en Enfers pour sauver mon père. Mes poings se serrent à cette pensée et je me retiens de ne pas envoyer mon poing frapper la glace. J'aurais dû agir. Ce n'était pas à eux mais à moi d'agir ainsi. Pour le bien de tous. Je ne tiens pas à être protégé alors que je suis responsable.
«Quelle idiote... Si seulement j'avais...»
Mes mots restent en suspend comme coincés dans ma gorge. Chut. Tais-toi Alyssa. Tout ceci ne te servira à rien. Cherchant à me ressaisir un minimum, je laisse mes mains me claquer les joues pour me donner un coup de fouet avant de partir enfiler mes chaussures et une veste. Il faudra bien que j'affronte ces vieux cauchemars un jour ou l'autre. Pour le moment, la meilleure chose que je puisse faire c'est de prendre l'air.
[...]
Le moins que l'on puisse dire c'est que l'ambiance est plus que pesante. Les mains enfoncées dans mes poches, je continue tant bien que mal d'avancer. Peu d'élèves sont présents dehors, sûrement occupés à guetter les alentours ou à se protéger dans leurs dortoirs. Et pourtant, malgré ce peu de monde, un sentiment désagréable me traverse à chaque pas.
J'ai toujours eu l'habitude d'attirer l'attention sur moi depuis mon arrivée ici. Et ce, pas toujours dans le bon sens du terme. Néanmoins, cette fois-ci, les choses sont encore différentes. Je peux très clairement sentir une aura presque meurtrière chercher à m'atteindre à tout moment. Chacun de leurs yeux sont braqués sur moi. Certains me regardant avec effrois ou méfiance. La différence entre Démons et Anges n'est même plus prise en compte. Je ne suis qu'un malheur ambulant à leurs yeux.
«Ainsi, les rumeurs disaient vraies. Tu es vraiment de retour.»
La surprise doit sûrement se lire sur mon visage au vu de l'air de mon interlocuteur. Je ne tarde pas à me ressaisir lorsque les souvenirs de nos quelques échanges me reviennent en mémoire. Depuis mon arrivée, elle n'a jamais su m'apprécier. Je me souviens encore très bien de la sensation de mon chocolat chaud sur mon corps par sa faute. Je dois bien reconnaître que de toutes les personnes encore présentes ici, je ne m'attendais certainement pas à la revoir. Je m'en serais bien passé.
A croire que tôt ou tard, le passé nous rattrape toujours comme on nous le dit si souvent. Dans mon cas, cette règle s'applique assez souvent.
«Tu as vraiment du culot... Revenir ici et te promener fièrement comme si rien n'était arrivé. Je le savais. Je l'avais prédit depuis le début que tu ne nous attirerais que des problèmes. Tu aurais dû rentrer chez toi. Les Sangs-Mêlés comme toi ne sont jamais une bonne chose pour notre peuple. C'est à se demander pourquoi ils t'ont accepté ici.»
La colère a beau naître progressivement en moi, je me force d'étouffer ce sentiment au plus profond de moi. M'énerver ne servira sûrement pas à arranger la situation. Il ne faut pas que je me fasse remarquer. Autrement, je ne sais quel châtiment je pourrais recevoir en retour. Tout prétexte serait désormais bon pour me punir du moindre de mes actes.
«Quand je pense que tu as même réussi à avoir Lucas et Mila. Tu es drôlement douée pour pouvoir manipuler les gens et mieux atteindre ton but. On raconte même que tu aurais sacrifié ton propre cousin ainsi que ces deux Sorcières pour t'échapper. A croire que tu as choisi le mauvais camp au final. Tu comptes en tuer encore beaucoup ?»
«Je t'interdis de dire ça...» Murmurais-je.
«Pardon ? Tu penses peut-être pouvoir me donner des ordres ? Est-ce que tu penses véritablement que tu es en droit de faire ça ? Ce n'est pas parce que tu possèdes peut-être plus de pouvoir que nous que tu peux tout te permettre. C'est bien pour ça que je déteste les gens dans ton genre. Il suffit que vous soyez plus spéciaux que les autres pour vous penser tout permit ! Mets-toi bien ça dans le crâne, ce n'est pas parce que la plupart ont aidé à protéger cet endroit que nous te respectons. Tôt ou tard, tu subiras le revers à cette puissance. Alors vas-t-en d'ici et garde ta misère pour toi !»
J'ai beau essayer, me contenir me devient de plus en plus compliqué. Ce n'est pas après elle que j'en ai mais plutôt en la vérité de ses propos. Je sais très bien que toute cette situation ne durera pas éternellement. Que tôt ou tard, je subirais les conséquences de ma propre existence et qu'à ce moment-là, je risque de perdre tout ceux que j'aime. Toutefois, je ne veux pas l'entendre. Pas de sa bouche. Elle ne me connaît pas assez pour en avoir le droit.
Mes mains tremblent de plus en plus et je sens mes ongles transpercer ma peau tant j'essaie de me retenir de ne pas la brûler sur le champ. Son visage pâlit à vue d'œil et je devine que ce qu'elle voit de moi à l'heure actuelle doit certainement l'effrayer. Je n'en ai que faire. Le pouvoir afflue progressivement en moi alors que plusieurs murmures inquiets résonnent autour de nous. Je suis sur le point de lâcher prise pour lui faire payer mais une voix familière transperce l'air.
«Ça suffit vous tous. Éloignez-vous sur le champ !»
Mila arrive rapidement à notre niveau, faisant barrage entre nous deux. Ses bras écartés, elle semble regarder sévèrement l'Ange face à elle tout en reprenant son souffle. Elle a beau être là, je ne peux m'empêcher d'éprouver ce ressenti face à cette fille qui ne cesse de me provoquer depuis le début.
«Arrêtez toutes les deux. Ce n'est en aucun cas le moment d'agir de la sorte. Retournez tous à vos responsabilités, c'est un ordre ! A partir de maintenant, je vous interdit de vous provoquer entre vous. Il en va de votre sécurité à tous. Autrement, nous n'aurons pas d'autres choix que de vous sanctionner.»
L'Ange semble grincer des dents aux mots de notre déléguée, peu convaincue. Toutefois, un simple regard en ma direction semble la faire capituler. J'ai tout juste le temps de marmonner quelques insultes sous notre nez qu'elle est déjà repartie en compagnie de sa troupe habituelle. Je la fixe durement avant de revenir à la réalité en sentant mes mains encerclées. D'abord prise d'un mouvement de recul, je me détends en constatant qu'il s'agit encore une fois de Mila.
«Calmes-toi Alyssa. Tu ne dois pas utiliser tes pouvoirs dans l'enceinte de l'Académie pour le moment. C'est bien trop dangereux. Beaucoup te surveillent et attendent le moindre faux pas de ta part pour passer à l'action. Suis-moi.»
Bien qu'un peu réticente à ce genre de demande, je m'exécute bien assez vite en laissant ma colère s'estomper d'elle-même. Mon état redevient peu à peu normal alors que j'ignore où Mila compte m'amener. Toujours est-il que je la suis. Elle est sûrement l'une des rares personnes à qui je peux encore tenter de me fier ici. C'est d'ailleurs à se demander comment une telle chose est-elle possible. A croire que cette fille est bien trop gentille pour que tout cela soit réel.
«Je suis désolée pour leurs comportements. La situation est devenue plus instable et compliquée à gérer depuis les derniers événements. Je suppose que tu as pu facilement le remarquer. Les choses sont loin d'être comme avant. Ils sont effrayés et ils ont besoin de se défouler pour tenter de se rassurer malheureusement.»
«Tu n'as pas à t'excuser Mila. Cette fille n'a jamais su m'apprécier depuis mon arrivée ici. Dans un sens, je ne peux pas vraiment lui en vouloir. C'est juste que sur le moment... Quand je l'ai entendu dire toutes ces choses. Je n'avais qu'une seule envie.»
«Je sais. Ton côté Démon a tenté de reprendre le dessus sur toi. Je l'ai tout de suite vu à l'aura qui t'entourait à ce moment-là. Tout comme les autres. Ils ont dû prendre peur sur le coup.»
«Mon aura ?» Demandais-je tout en regardant la marque de mes ongles dans mes paumes.
«Oui, elle était bien plus sombre qu'à l'habitude. Il aurait été bien trop dangereux de te laisser agir. Comme je te l'ai dis tout à l'heure, beaucoup de personne ont désormais un œil sur toi. D'autant plus maintenant que tu es revenue ici. Ils ne peuvent certainement pas t'atteindre aussi facilement dans l'enceinte de l'Académie mais ils n'hésiteront pas à trouver tous les prétextes pour s'emparer de toi.»
«Moi qui ait toujours détesté être considérée comme un prix de tombola me voilà donc servie...»
La blonde se contente de m'adresser un sourire désolé avant de poursuivre calmement son chemin. Cette fois-ci, le reste des élèves se contentent de nous faire dos, préférant sûrement éviter de provoquer à nouveau l'Ange. Mila n'en a peut-être pas l'air mais je suis sûre qu'elle est bien plus redoutable que la plupart des élèves ici.
«Je peux savoir où est-ce que tu comptes m'amener ? Non que je n'ai pas confiance en toi, loin de là. Je me pose juste la question.»
«Tu en as tout à fait le droit crois-moi. Je comptais t'amener voir une vieille connaissance. Lucas et les autres sont occupés auprès des directeurs pour leurs entretiens personnels. Tu as donc assez de temps libre jusqu'à ce qu'ils en aient tous finis.»
«Une vieille connaissance ?» Demandais-je.
«Oui. Martin s'est fait beaucoup de soucis depuis que tu es parti. Nous leur avons proposé à lui et sa femme de rentrer parmi les humains pour plus de sécurité mais ils ont refusé. Je pense que te revoir leur fera le plus grand bien.»
Je décide de ne rien répondre. Son attention me touche. Revoir Martin sera sûrement l'une des meilleures choses qui me soient arrivés depuis quelques temps. J'en ai bien besoin. En plus de ça, je pense qu'il sera bien l'un des seuls à être ravi de me revoir.
[...]
«Vas-y. Je t'attends ici. Je pense qu'il serait préférable que je reste pour surveiller l'entrée au cas où. Prends ton temps.»
«Merci sincèrement Mila. Je te revaudrais ça un jour. Si j'en ai l'occasion du moins.» La remerciais-je.
«Cesse donc d'être aussi négative et vas-y. Et à ma place, ce serait plutôt ton petit ami que tu devrais remercier pour cette charmante idée.»
Un sourire sincère se dessine sur mes lèvres alors que je pousse la porte pour entrer dans la pièce. J'ai à peine le temps de remercier convenablement la porte que le bruit d'une chaise attire mon attention. Mon regard se dépose immédiatement sur Martin alors qu'il me regarde de ses yeux fatigués et à la fois émus. Je ne cherche nullement à le repousser lorsque son corps enlace le miens et que sa main caresse mes cheveux.
Un sentiment de bien être m'envahit immédiatement et je me laisse aller à cette sensation en passant mes mains dans son dos.
«Alyssa, mon enfant... Je suis tellement rassuré de te savoir en vie.»
«Crois-moi, je suis tout aussi soulagée de voir que tu es sain et sauf. Je suis tellement désolée d'être partie sans rien dire. Je n'avais pas vraiment le choix.»
«Ne t'excuse pas pour de telles choses. Je comprend tout à fait les raisons qui t'ont poussé à partir d'ici. Il le fallait. Pour ta sécurité. Maintenant, assieds-toi. Je suppose que tu as beaucoup de choses à me raconter.»
Il est vrai que pour l'occasion, Martin est sûrement l'une des rares personnes à qui je peux me confier entièrement sans tabou. Des oreilles indiscrètes pourraient d'ailleurs traîner dans les alentours mais je n'en ai que faire. Au point où j'en suis, la vérité éclatera tôt ou tard. Je décide donc de m'installer à ses côtés et de lui raconter toutes nos aventures depuis mon départ. Je n'omets aucun point, lui racontant le moindre détails en allant des révélations sur la séparation de mes parents, mon enlèvement ou bien encore mes retrouvailles inespérées avec mon père.
Martin reste bien évidement silencieux, ne m'interrompant à aucun moment. Son regard se fait compatissant. Il connaît bien la situation après avoir côtoyé ma mère comme si elle était sa propre fille. Je sais bien que toutes ces histoires doivent l'atteindre.
«Ainsi tout s'explique. J'aurais dû y penser. Tes parents s'aimaient bien trop pour pouvoir se séparer sur un coup de tête. Surtout après tout ce qu'ils avaient dû traverser pour vivre enfin ensemble. Tu penses réellement qu'il existe un moyen de le sauver ?»
«Je l'ignore. J'aimerais y croire pour me persuader que les efforts de Maxence, Nelly et Mélina ne sont pas vains mais...»
«Mais tu as du mal à y croire entièrement. Tu aimerais t'en convaincre mais ta raison l'emporte.»
«Tu aurais dû le voir à ce moment-là Martin. J'ai peut-être peu de souvenirs de mon père mais je l'ai vu dans ses yeux. Il semblait tellement résigné. Il ne voulait pas être sauvé. J'ignore pourquoi mais c'est comme s'il savait que tout espoir était vain.»
«Sûrement parce que c'était le cas. Il est peut-être vivant en Enfers mais nous ignorons encore s'il peut se rendre à nouveau sur Terre. Après tout, s'il a réussi à se faire passer pour mort durant toutes ces années c'est peut-être parce que son existence humaine l'était réellement.»
Pour l'occasion, je ne peux m'empêcher de reconnaître que les paroles de Martin paraissent plus vraies que n'importe qui. Bien que cette soit disant vérité me fait plus de mal que je ne le voudrais, je ne peux que m'y résoudre. Il n'y a que cette explication qui soit réellement possible. Dans ce cas, qu'adviendra-t-il de mes amis s'ils ne peuvent rien y faire ? Une multitude de question se bousculent à nouveau dans mon esprit et je suis obligée de souffler quelques secondes pour faire le vide dans mon esprit.
«Tu devrais partir d'ici tu sais. Cet endroit n'est plus aussi sûr. Surtout depuis que je suis de retour ici. Je ne me pardonnerais jamais si quelque chose venait à t'arriver par ma faute. Je suis sûre que ma mère serait d'accord pour t'accueillir chez nous pendant quelques temps. J'ignore si ce sera plus sûr mais tant que tu ne seras plus impliqué avec moi, je pense qu'ils pourront te laisser en dehors de tout ça.»
«Alyssa. J'apprécie vraiment que tu te sentes aussi concernée pour moi. Je me fais de plus en plus vieux et un jour, mon heure viendra. Je n'ai pas peur de la mort mon enfant. Je suis né ici et j'en partirais quand mon heure sera venue. Ma femme et moi avons longuement parlé de ce sujet. Si nous avons décidé de rester ici c'est que nous avions pris en compte tous les risques. Et ce, bien avant ton arrivée.»
«Je suppose qu'essayer de te faire changer d'avis ne servira à rien.»
«En effet. J'ai vécu bien trop de choses ici pour vouloir en partir sur un coup de tête. Alors, laisse-moi t'aider en attendant que mon heure ne vienne. Je suis sûr qu'à l'heure actuelle, tu dois essayer de trouver une solution à tous ces problèmes autour de toi. Bien que l'issue semble assez impossible.»
«Tu me connais bien plus que je ne le voudrais décidément...»
«Bien évidement. Tu ressembles tellement à ta mère que deviner ce à quoi tu penses me paraît plus qu'évident.»
«Très bien. Dans ce cas, je compte sur toi pour m'aider à trouver une solution. Qu'importe soit-elle. Je suis prête à tout. Je ne veux pas apporter plus d'ennuis. Tu dois me promettre que tu m'aideras à trouver une solution qu'elle qu'en soit l'issue qui m'attend. Il n'y a qu'à toi que je peux demander une telle chose. Je sais très bien que les autres s'y opposeront.»
Nous échangeons un bref regard complice avant qu'il ne se mette à hocher son visage. Il doit être le seul au courant. Je ne peux pas me permettre d'en parler aux autres sous risque de les voir m'empêcher d'atteindre mon but. Je ne pourrais pas continuer à vivre ainsi bien longtemps. Il faudra bien que je trouve une solution. Et pour l'occasion, l'aide de Martin me sera plus que nécessaire.
«Je ferais de mon mieux je te le promets. J'ai tenu à garder en lieu sûr les deux ouvrages que nous avions pour habitude d'étudier. Avec un peu de chance, j'y trouverais une solution. Et pour être tout à fait honnête, je savais d'avance que tu me ferais cette requête donc j'avais déjà commencé le travail.»
«Je compte sur toi dans ce cas.»
Je décide finalement de m'éclipser après ces longues minutes de discussion. Faire patienter aussi longtemps Mila me paraît peu raisonnable. J'échange une dernière embrassade avec mon ami avant de rejoindre l'Ange derrière la porte. Toujours au même poste, elle m'adresse un sourire tout en me lançant un regard interrogateur.
«Tout s'est bien passé ? La salle a été conçue spécialement pour éviter toutes oreilles indiscrètes alors je commençais un peu à m'inquiéter après tout ce temps.»
«Aucun soucis en vu. Vraiment ? Ce ne serait pas mieux de me mettre dans une pièce normale ? Enfin je veux dire, tu as l'air de me faire confiance aveuglément. Je pourrais tout aussi planifier un plan démoniaque comme certains le laissent entendre.»
«Je te fais confiance Alyssa. Je sais très bien qu'en compagnie de Martin tu n'aurais rien fait d'imprudent. Et ce n'est pas parce que je possède un rang plus élevé que le tien hiérarchiquement parlant que je peux me permettre de telles choses.»
«Parfois, je me demande vraiment comment est-ce que tu fais pour ne pas être déjà mère de famille ou à diriger les Troupes en plein combat. Les Anges sages comme toi semblent si... Rares de nos jours. Je suis surprise que tu sois toujours seule. Après tout, tu mérites amplement d'être heureuse. Crois-moi, je n'ai pas pour habitude de dire de telles choses à n'importe qui.»
«Disons simplement que cette Académie n'est pas le lieu le plus propice à ce genre de choses. Et puis, l'amour a été depuis longtemps mis de côté pour ma part. Certaines choses doivent appartenir au passé. J'aurais tout le temps pour ce genre de chose une fois que ma mission sera remplie.»
Bien que ses paroles semblent lourdes de sens, je décide de ne pas relever. Je ne pense que chercher à creuser dans son passé serait une chose bien raisonnable de ma part. Ma déléguée jette un rapide coup d'œil à sa montre avant de m'adresser à nouveau un sourire. Difficile de l'imaginer avec une expression plus sérieuse que celle-ci. Sans trop savoir où elle compte désormais me guider, je continue d'avancer silencieusement.
«Les entretiens ne devraient plus tarder à être terminés. Je vais bientôt te ramener auprès de Lucas et des autres ne t'en fait pas. Il ne doit s'agir plus que d'une question de minutes.»
Je me contente de hocher faiblement mon visage tout en continuant de marcher sur ses pas. Le silence refait à nouveau surface et je ne sais quoi dire. Mes mains dans mon dos, je commence à jouer nerveusement avec mes doigts. Ce n'est pas fini. J'ai encore quelque chose à lui demander. Quelque chose qui risque de me terrifier rien qu'à l'idée de l'évoquer mais je n'ai pas le choix. Je tiens réellement à apprendre d'avantage à ce sujet.
La gorge sèche, je décide de prendre mon courage à deux mains alors que nous traversons les longs couloirs du bâtiment principal. C'est comme si avec le temps, ce décor presque hors du temps était devenu habituel à mes yeux.
«Mila, au faite, j'aimerais te poser une question à propos de quelque chose. Si ce n'est pas indiscret bien sûr...»
«Je t'en pris exprime-toi. Je t'écoute.»
«C'est à propos d'Anna. Je voulais savoir... Que lui est-il arrivé depuis la dernière fois ? Après tout, je me sentirais toujours responsable pour ce qui lui est arrivé alors...»
L'Ange devant moi s'interrompt soudainement dans sa marche et je manque de lui rentrer dedans. Sachant pertinemment que ce sentiment épineux nous affecterait toutes les deux, je tente avec effort de contenir la moindre émotion. J'ai bien trop pleurer en son nom ces derniers jours et je ne veux pas craquer ici. Elle m'a tant appris et voilà comment je lui ai rendu la pareille. Je lui ai pris sa vie.
Toujours dos à moi, je peux toutefois constater que Mila se fait souffrance pour contenir ses émotions. Ses mains tremblent et elle est obligée de porter une main à son bras pour faire cesser les tremblements. Un petit soupire se fait entendre comme si elle souhaitait se donner également du courage.
«Anna a été renvoyé auprès de ses parents. C'est ce que nous faisons généralement pour les cas rares de décès d'élèves dans l'Académie. La famille peut ainsi s'occuper de la préparation des funérailles et nous convier si l'envie est présente. Nous avons toutefois érigé un lieu de recueil en son nom. Certains sont venus y déposer des fleurs.»
Un sentiment de douleur envahit directement mon cœur à ses paroles. J'avais encore un espoir, ne serait-ce qu'infime, qu'elle soit encore en vie. Il faut que je me rende à l'évidence. Avec une blessure comme la sienne, ses chances de survivre auraient été bien trop mince. Il aurait fallu agir de suite. Malheureusement, notre présence en plein champ de bataille n'a pas été le plus propice à cette action. Je le regretterais toujours. Et ce, jusqu'à ce que je rende mon dernier souffle.
Ma déléguée, qui semble comprendre tout autant mon désarroi, reprend rapidement sa marche sans plus rien ajouter. J'avance ainsi, tête basse et perdue dans mes pensées. Ce n'est qu'une voix semble nous interpeller au loin que je relève l'attention. Mes sourcils se haussent immédiatement. Un groupe d'adultes sont postés non loin de nous, nous observant attentivement. Il ne m'est nullement compliqué de comprendre qu'il s'agit là d'Anges. Pourtant, parmi eux, une femme me semble étrangement familière.
«Suis-moi et reste silencieuse.»
Sa main saisit rapidement mon poignet et je suis forcée à suivre Mila à la rencontre de cet attroupement. Un sourire rayonne à nouveau sur son visage mais la pression exercée sur ma peau me fait comprendre un tout autre message. Quelque chose ne la met pas à l'aise dans toute cette situation. Je soupçonne directement l'un d'eux d'en être la cause.
«Mila, quel plaisir de te croiser à nouveau ici. J'ai l'impression que ça devient de plus en plus difficile de vous voir avec toutes ces histoires.»
«Oui, nous avons beaucoup de choses à gérer. Je suis désolée mais cela me ravit tout autant de vous revoir. Je suppose que les retrouvailles ont été également d'un grand soulagement de votre côté ?»
«Disons simplement que je ne suis plus aussi enthousiaste que je l'étais auparavant vu son changement. Je ferais néanmoins en sorte de le faire changer d'avis. Je suis sa mère après tout.»
«Je le conçois. C'est votre rôle en tant que parent.»
Tentant de me faire aussi petite et insignifiante que possible, je ne peux m'empêcher de lever les yeux en direction de cette femme. Une aura particulière dégage de sa personne. Il me suffit de jeter un bref coup d'œil aux personnes à ses côtés pour en comprendre que c'est sûrement elle qui dirige ici. Intimidée, je reste sagement de mon coin en attendant impatiemment que toute cette conversation ne se termine. A bien comprendre, cette femme semble avoir un enfant ici. Un Ange ? Sûrement ? Est-ce que je le connais ? Je me le demande. Toujours est-il que ses traits me paraissent toujours aussi familiers.
«Tiens, qu'avons-nous par là ? Qui est la jeune fille à tes côtés ? Il ne me semble pas l'avoir déjà croisé.»
Mon corps se raidit immédiatement à ses mots. Je sais que je ne devrais pas avoir peur et pourtant, quelque chose dans sa voix me force à la craindre. Elle a beau faire émaner d'elle une certaine douceur, je ne peux m'empêcher de ressentir un sentiment de peur face à elle. Sa puissance se sent d'ici. Perturbée et ne sachant pas vraiment quoi répondre, je lance un regard à ma camarade à mes côtés. Celle-ci semble toute aussi bousculée par cette question.
«Il est normal que tu ne l'ais pas déjà vu. Il y a tellement d'élèves qui viennent et repartent ensuite dans cette Académie. Je comptais simplement la ramener à sa chambre. En tant que déléguée, nous devons nous charger d'apporter un certain soutient à nos camarades. C'est une épreuve difficile après tout.»
«Je te reconnais bien là Mila. Tu as bien raison d'agir ainsi. En tant de guerre, apporter soutient et réconfort au sien est la meilleure chose à faire si on veut s'assurer la victoire. Et dire que toute cette histoire s'est aggravée du jour au lendemain par cette découverte. Vous n'avez toujours aucune nouvelle à ce sujet?»
«Je pense que Monsieur Bright sera le plus apte à pouvoir répondre à vos interrogations. Il doit sûrement vous attendre à l'heure-même dans son bureau. Pour ma part, je dois vous laisser. J'ai encore beaucoup de travail. Si vous me le permettez.»
«Tu as certainement raison. Je ne vais pas vous importunez toutes les deux plus longtemps. A très vite sûrement.»
Nous nous contentons d'un simple hochement de tête avant de les dépasser. Toujours perdue dans cette situation, je lance plusieurs regards interloqués à Mila. Elle se contente de rester silencieuse, marchant encore plusieurs minutes jusqu'à sortir du bâtiment principal et rejoindre nos dortoirs. Ce n'est que lorsque nous parvenons à son entrée qu'elle plante son regard dans le miens en me regardant sérieusement.
«Alyssa, promets-moi que tu ne parleras à aucun d'entre eux si jamais tu te retrouves seule c'est compris ? Tu ne dois surtout pas leur parler.»
«Quoi ? Mais pourquoi me dire une telle chose ? Qu'est-ce qui se passe Mila ?»
«Contente-toi de me le promettre. Ces personnes sont des Anges, de notre côté. Ce sont des hauts gradés et ils en ont après toi. C'est pourquoi, tu ne dois surtout pas leur parler. Pas sans notre présence. Je les connais assez pour dire qu'ils seraient capable de tout pour mener à bien leur combat.»
Bien que terrorisée à cette idée, je me met rapidement à acquiescer tout en lui promettant de ne pas sortir sans la moindre compagnie à l'avenir. Un air soulagée passe sur son visage avant qu'elle ne m'invite à entrer dans nos dortoirs en veillant à jeter un regard méfiant autour d'elle.
«Monte dans ta chambre. Je dois prévenir les autres de quelque chose. Vous vous retrouverez plus tard ne t'en fait pas. Contente-toi simplement de ne pas bouger d'ici.»
Sur ce dernier avertissement de sa part, je monte rapidement les marches de l'escalier. Je peux déjà sentir les sentir, leurs regards pesant sur moi.
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Bonsoiiiir les chatons ! Ça faisait longtemps hein ? Ma coupure d'internet s'est malheureusement prolongée d'où mon absence. Heureusement pour vous, j'ai eu le temps d'écrire quelques chapitres et je vous sors donc le chapitre suivant. L'histoire touche bientôt à sa fin et les choses vont bientôt prendre un nouveau tournant. J'espère que l'histoire continue malgré tout de vous plaire. J'attends vos réactions avec impatience à propos des nouveaux événements bien que ce soit encore relativement calme. J'espère que l'on se retrouvera au plus vite pour la suite !
Je suis également à la recherche de gens volontaires pour corriger mes chapitres. Si certains sont intéressés, venez me contacter en mp. Bisous à vous ♥
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