Chapitre Quatre-Vingt-Dix-Sept

     Maxence

J'aurais dû l'éliminer. Je savais d'avance que la laisser s'en sortir sans la moindre égratignures était une mauvaise idée. D'aussi longtemps que je la connaisse, elle a toujours eu un don de persuasion au dessus de la norme. Je me suis moi-même laissé avoir les premières années. Je l'ai sous-estimé. Tout ce que je souhaitais, c'était de le réduire à néant lui. Ma haine à son égard remonte au premier jour où nous nous sommes rencontrés. Ce moment restera gravé dans ma mémoire.

Je n'ai jamais porté les Anges dans mon cœur. La raison ? On m'a éduqué ainsi. Ne leur fait jamais confiance. Ne leur accorde pas la moindre sympathie ou le moindre intérêt si ce n'est que pour les éliminer ou les détruire de l'intérieur. Tout le monde est susceptible d'être ton ennemi alors ne te fie à personne. Ils sont ceux qui t'ont volé ton oncle, ton seul père. Il s'est laissé avoir et regarde ce qui a fini par lui arriver. Tu ne dois jamais suivre le même chemin que lui Maxence. Jamais. Ces mots. Je l'ai entendu toute ma vie.

Ma mère et moi n'avons jamais été proches. Du moins, pas comme une famille ordinaire devrait l'être. Chez les Démons, tout est différent. Nous n'avons pas le droit d'avoir de l'affection même pour nos proches. C'est ainsi que les choses fonctionnent et j'y ai toujours consenti. Mon père nous a abandonné et ma mère n'a jamais cherché à me faire preuve de la moindre affection. J'ai grandi par ma propre volonté de vivre. Enfin, il y avait lui. Seul mon oncle était là pour me comprendre et me guider. J'ai voulu le croire, outrepasser nos règles habituelles. Et pourtant, je me suis laissé avoir bêtement. Tomber amoureux d'un Ange ? Quelle idiote. Il est finalement devenu ma plus grande honte au lieu de demeurer le héro meurtrier que j'admirais tant.

C'est pour cette raison qu'à mon arrivée dans cette Académie, lorsque je l'ai vu si proche de son oncle, je n'ai pu m'empêcher de ressentir une haine sans fin à son égard. Je n'étais pas jaloux, je voulais simplement détruire son bonheur. Jusqu'à la dernière miette. Le bonheur n'a pas sa place dans ce monde. Il ne l'a jamais eu. Un bon nombre de plans me sont passés en tête mais ce n'est que lorsque je l'ai aperçu avec cette fille que j'ai compris. J'ai compris que pour détruire son bonheur, ce serait elle que je devrais détruire avant tout. Il l'aimait.

Mila a toujours été dotée d'une bonté sans nom. C'est sans aucun doute pour cette raison que l'approcher m'a demandé une quantité incalculable d'effort. Approcher un Ange comme elle, c'est comme se brûler au plus près des étoiles. C'est une chose terriblement nocive pour les Démons et j'en ai subi les conséquences. En dépit des nombreux Démons présents dans l'Académie et de son jeune âge, elle a toujours été la première à faire un pas vers nous lorsqu'il s'agissait de transmettre des informations. Et ce, au risque d'y perdre ses plumes dès lors qu'elle s'approchait de nous.

Je dois bien le reconnaître, son courage a rapidement eu le don d'attiser ma curiosité. La détruire s'était avéré être  encore plus satisfaisant. Alors, en parfait acteur, j'ai commencé à me jouer d'elle et à faire en sorte d'acquérir sa confiance. Les choses se sont avérées être plus simples que je ne me l'imaginais. En seulement quelques semaines, j'étais devenu le Démon qu'elle prenait plaisir à côtoyer comme si nous n'avions jamais été ennemis. Je la pensais tellement inconsciente et innocente à cette époque. Tout ceci était si risible. Et les réactions de mon ennemi ne faisait qu'ajouter à ma satisfaction.

Du moins jusqu'à ce jour. Ce jour où j'aurais dû la détruire de bon pour m'éviter tous ces problèmes aujourd'hui. Nos fautes du passé reviennent tôt ou tard nous hanter. Je n'échappe pas à cette foutue règle.

«Vous ne pouvez pas rester ici.»

La voix de la blonde me sort à nouveau de mes pensées. Les plaies sur mon corps me démangent à mesure que ma peau se régénère lentement mais je ne peux m'empêcher d'éprouver un sentiment de satisfaction en voyant mon adversaire dans le même état. Dire que je la déteste à l'heure actuelle est un euphémisme. J'étais si proche du but. Il m'aurait suffit de quelques minutes supplémentaires pour pouvoir m'en débarrasser une bonne fois pour toute. Tous ces efforts réduits à néant. Agacé, je rabats en arrière mes cheveux poisseux de sang.

«Qu'est-ce que tu veux dire par-là Mila ?» L'interroge le brun.

«Tout le monde a vu votre combat. Ils sont persuadés que vous êtes encore entrain de vous battre jusqu'à la mort. Comme je vous l'ai dit, le but n'est pas de prouver votre haine mutuelle mais plutôt de montrer que vous êtes prêts à défendre ces lieux avec le reste des élèves.»

«C'est une idée complètement sordide.» Grognais-je.

«Oh vraiment ? Et que comptes-tu faire une fois que ce lieu sera détruit ? Tu sais tout autant que moi que la plupart des élèves ici ont été recueillis à cause des guerres entre nos deux camps. Bon nombre d'entre eux ont perdu leurs familles ou leur camp tout entier. Tu penses peut-être que les laisser s'entre-tuer jusqu'à la mort et errer dans ce monde est une bonne idée ?»

Une fois de plus, je me dois de reconnaître que le cran de cette fille ne cessera de me surprendre. Dans un sens, la ressemblance peut parfois paraître frappante entre elle et Alyssa. Je retiens un rire sarcastique. Il est clair qu'à l'occasion, le délégué des Anges n'a pas cherché bien loin pour trouver sa dulcinée. Note à moi-même.

«N'est-ce donc pas le but de notre existence ? Que nous soyons dans cette Académie ou non n'y changera rien. Dès que nous sortirons de cet endroit, toutes les années que nous aurons passé dans cet endroit s'effaceront. C'est ainsi que sont faites les choses. Ouvrez un peu les yeux. Votre vision des choses est complètement faussée. C'est toujours la même chose avec vous les Anges. Vous n'êtes que des gamins.»

«Ce que tu ne comprends pas c'est qu'à ton contraire, nous avons le sens de la loyauté envers les nôtres. Tu ne survivras jamais si tu t'obstines à rester constamment seul. Tu serais prêt à abandonner n'importe qui si c'est pour survivre.»

Qu'il s'agisse de pure provocation ou non, je décide de ne pas relever aux mots de l'Ange alors que sa camarade se contente de me regarder fixement. Cette situation est tout bonnement hilarante tant elle me paraît irréelle. J'ignore encore ce qui me pousse à rester ici et à discuter avec eux comme si de rien n'était. Je pourrais tout aussi bien retourner en Enfer. Les choses seraient sans doute bien plus divertissantes en bas. Respirer le même air que ces ces créatures est un véritable poison.

«Je ne te demande qu'une chose Maxence. Juste d'aider Alyssa. C'est ta cousine.» M'implore Mila.

«Et alors ? Pourquoi devrais-je faire quelque chose pour elle ? C'est un Ange et elle refuse d'admettre son côté Démon. Je ne lui dois rien.»

Je l'aperçois de justesse intercepter l'Ange à ses côtés alors qu'un sourire se forme sur mes lèvres. Il est tout de suite bien trop susceptible lorsqu'il s'agit d'elle. Tout ceci en est tellement risible que j'en oublierais presque la gravité de la situation. Il faut croire que les choses sont bien faites par moment. Il m'en voudra toujours d'avoir un tel lien avec elle. Qu'il le veuille ou non, je ne serais jamais bien loin quand il s'agira de la femme qu'il aime.

«Que tu veuilles l'admettre ou non n'est pas important. Alyssa est importante pour nous tous, toi inclu. C'est l'une de nos élèves et ta cousine. Est-ce que tu serais vraiment prêt à la laisser aux mains de l'un de nos camps ? Nous n'avons nullement idée de ce qu'ils ont pour intention de faire avec elle. Tu aimes avoir le contrôle sur ce qui t'entoure. Et en l'abandonnant, tu perdrais toutes tes chances de continuer. Une fois dehors, tu n'auras plus le même rôle qu'au sein de cette Académie. Prends en bien conscience. Tu perdras tout pouvoir.»

«Mila qu'est-ce que tu racontes ? Tu es cinglée ?!»

«Tais-toi Lucas.» Rétorque-t-elle aussitôt en me fixant.

Elle est intelligente. Elle en a tout à fait conscience. Même si cela me tue sûrement de le reconnaître, je m'en suis rendue compte dès que j'ai commencé à m'approcher d'elle. Sous ses airs innocent et bienveillant, Mila est sans doute bien plus stratégique qu'elle ne veut le laisser paraître. Je n'ai aucun doute sur la question. Elle pourrait s'avérer être une adversaire redoutable pour plus tard. Je me dois de le garder en tête.

Lâchant un bref soupire alors que les muscles de mon corps commencent enfin à se détendre après avoir encaissé autant de coup, je décide de faire chemin arrière. Je lance un regard par-dessus mon épaule et constate que les deux me regardent d'un air intrigué.

«Tu as pour intention de la faire partir d'ici, non ? Alors faisons distraction autant que possible. J'ai encore un bon nombre de nuques à briser. Vous me revaudrez ça. Soyez-en sûrs. Et puis, de toute évidence, ce n'est pas comme si j'en avais encore fini avec toi.» Déclarais-je à l'intention du brun.

Je décidais rapidement de ne pas me préoccuper d'avantage du sourire perché aux lèvres de la délégué et reprenait route vers le champ de bataille principal. Tant qu'on me donnait l'occasion de pouvoir casser des corps, je ne dirais jamais non. Et ce, bien que l'idée de pouvoir m'occuper personnellement de mon ennemi semblait toute aussi distrayante. Ma cousine m'était bien trop utile pour que je puisse me permettre de perdre un tel avantage entre mes mains.

     Mélina

Mon corps resta figé encore quelques instants devant la masse géante désormais étalée au sol. Les choses s'étaient produites bien trop rapidement pour que je puisse comprendre véritablement ce qui venait tout juste de se produire. J'étais encore bien trop choquée et manquais un sursaut lorsque plusieurs voix au loin appelèrent mon nom.

Je fus toutefois bien assez vite rassurée en voyant les silhouettes de mes deux plus proches amis accoururent vers moi à bout de souffle. Leurs regards se posèrent à leur tour sur le Démon étalé au sol alors que je leur tendais directement la lame dans mes mains pour qu'ils puissent défaire mes liens au plus vite.

«Mon dieu Mélina... Qu'est-ce qui s'est passé ici ?! Ne me dis pas que c'est toi qui a réussi à mettre ce molosse à terre ?!»

Mes deux amis ne me laissèrent même pas l'occasion de pouvoir m'expliquer, bien trop occupés à faire état des nombreuses plaies sur mon corps. C'était à peine si j'arriverais encore à tenir correctement debout. Et malgré tout, je ne manquais pas de lâcher un profond soupire de soulagement lorsque mes poignets furent enfin libérés. La sensation n'était pas des plus agréables mais j'étais au moins soulagée de ne plus être prisonnière. Ce sentiment d'impuissance avait été bien trop frustrant à vivre.

«Ce n'est pas moi qui ait fait ça. Il vaut mieux que j'évite d'en parler d'ailleurs si je tiens à ma vie. Et croyez-moi, même si je vous disais le responsable, vous auriez du mal à y croire.»

Je capte à peine le regard curieux de Benjamin que Nelly s'empare aussitôt de mon visage pour inspecter mes plaies présentes à cet endroit. Il faut bien le reconnaître, ce Démon m'aura bien amochée jusqu'au bout. La plupart de mes muscles sont endoloris et je sens très bien le sang glisser le long de ma peau. Une sensation fort désagréable me direz-vous. Autre petit détail, ma cheville semble quant à elle cassée, m'empêchant de faire tout mouvement. Comme si je n'étais pas déjà assez en mauvais état.

«Il faut qu'on t'amène au plus vite voir Lindsay ou une soigneuse dans le coin. Tu ne peux pas rester dans cet état. Surtout pas dans une telle situation. Autrement, tu seras foutue.» S'exclame mon amie.

«Calmes-toi Nelly. Je vais bien. Et de toute évidence, on ne peut pas repartir sur le champ de bataille maintenant. Il nous faut d'abord retrouver Alyssa. C'est le plus important.»

«As-tu perdu la tête ? Imagine seulement que l'on croise à nouveaux ces Démons sur notre route. Tu n'es pas en état de te battre et ce serait jeter Alyssa dans la gueule du loup si on venait à la retrouver. En plus de ça, je n'ai aucune idée de l'endroit où elle se trouve. Lucas refuse de nous le dire par question de sécurité.»

«Que j'aille me faire soigner maintenant ou non, les choses reviendront au même. Nous risquons de croiser n'importe qui à tout moment. Elle ne pourra pas rester éternellement en sécurité ici si on ne fait rien. Je suis sûre qu'elle a besoin de notre aide. De nous avoir au moins auprès d'elle pour la soutenir.»

Peu convaincue par mes propos, je sais tout à fait que Nelly est inquiète à mon sujet. J'en ai bien conscience que c'est une idée risquée mais nous devons faire quelque chose. Retourner sur le champ de bataille ne nous avancera à rien pour le moment. Nos assaillants ne quitteront pas les lieux tant qu'ils n'auront pas obtenu la source de leur désir. Et à l'heure actuelle, je doute fortement du fait qu'une force supérieure nous vienne en aide pour stopper tout ce massacre.

«Tu as intérêt à être sûre de toi. Si jamais quelque chose-»

«Quelque chose se produira forcément quoi que l'on fasse. C'est un fait. Tout se produit en temps de guerre. Il y a aura des pertes et des blessés mais l'essentiel est de trouver une solution. Coûte que coûte.»

Après quelques instants de silence, nous nous décidons à reprendre rapidement notre route. Nous devons profiter du calme présent dans les couloirs avant que d'autres ne se décident à nous rejoindre. Un léger sourire se forme sur mes lèvres alors que Benjamin et Nelly se placent de chaque côté de moi pour me maintenir. Intérieurement, je suis réellement heureuse de pouvoir les revoir sains et sauf. J'ai bien cru que c'était ma fin il y a quelques instants plus tôt.

     FLASH-BACK

Un goût métallisé se propage dans ma bouche alors que mes dents percent la peau de mes lèvres. La douleur est si assommante que mon corps ne sait plus comment réagir. J'aimerais pouvoir hurler à plein poumons mais ce serait lui donner ce qu'il attend depuis le début. Je le sais. Il veut me voir témoigner de ma douleur de toutes les manières possibles.

A défaut de s'être lassé de son arme, mon bourreau a décidé bien assez vite de passer à une toute autre méthode. Un nouveau crachat de sang s'échappe de ma bouche alors que je sens les os de ma cheville se fissurer sous sa chaussure. Je n'en peux plus. Il sait constamment que je ne pourrais le mener à son but et cette idée le rend fou de rage. J'ignore quel sera son châtiment une fois que son maître aura découvert l'échec de sa mission mais cela suffit largement à le rendre complètement incontrôlable.

«Je vais te tuer. De la façon la plus horrible qui soit. Tu auras au moins servi à quelque chose comme ça.»

Une grimace déforme mon visage lorsque sa poigne saisit fermement mes cheveux et me force à me redresser. Sans la moindre once de douceur, mon dos se plaque au mur. La douleur se propage à nouveau dans mon corps prêt à céder à tout moment. Je la sens. C'est peut-être déjà ma fin. Devrais-je avoir des regrets ? Sûrement. Dans ce cas, pourquoi suis-je aussi sereine à l'idée de savoir qu'il s'agit de moi et non de quelqu'un d'autre ? Je dois avoir complètement perdu toute once de bon sens après avoir reçu autant de coups.

Un faible sourire se dessine à mes lèvres alors que je décide de fermer mes paupières. Durant un court instant, je décide d'oublier tout. La fin me sera sans doute plus simple et plus sereine de cette façon. Je vais les revoir. Je vais les retrouver. Je les sens proches de moi. Papa, maman, vous tous... Attendez-moi. Je serais bientôt avec vous tous.

Mon cœur se serre pendant un court instant alors que j'aperçois le visage de mes amis et de Nelly. Elle me tuerait sûrement à sa place si elle comprenait ma résignation.

«Un dernier mot à dire avant la fin ?»

Un dernier mot ? J'ai encore tant de choses à dire et pourtant aucune parole ne veut s'échapper de ma gorge. Je suis comme muette. Je suis déjà condamnée et cet homme n'en a que faire. Pourquoi devrais-je donc lui faire part de ce genre de confession ? Tout ceci est complètement absurde.

«Bien, tu l'auras voulu.»

Ma respiration se coupe un bref instant avant qu'un bruit sourd ne retentisse dans l'air. Cela en est finalement fini de moi.

Quelques secondes s'écoulent avant que je ne prenne conscience qu'aucune nouvelle douleur ne se propage dans mon corps en dehors de celle déjà présente. Confuse, j'ouvre les yeux et manque de m'étouffer avec ma propre salive en constatant qu'une main vient de traverser la poitrine du Démon face à moi. Le regard livide, l'armoire à glace s'écroule subitement au sol en relâchant son emprise sur moi.

Frigorifiée devant ce spectacle horrifiant, je suis d'autant plus apeurée en reconnaissant le propriétaire de cette main ensanglantée. Maxence ne prend même pas le temps de m'accorder un regard, se contentant de s'abaisser pour fouiller dans les poches de l'homme et s'essuyer au passage sur son corps inerte. Un énième sursaut me prend au moment où je reconnais les deux jumeaux à ses côtés. Ceux-ci me fixent attentivement comme s'ils étaient entrain de monter la garde aux alentours.

«Ne laissez aucune trace de vous ici. Je ne tiens pas à ce que l'on sache ce qui vient de se produire ici. C'est clair ? Vous savez ce qu'il vous reste à faire.»

Les deux loups se contentent de hocher vigoureusement leurs visages tandis que le Démon déserte immédiatement les lieux sans me prêter attention un seul instant. Plusieurs minutes s'écoulent avant qu'ils ne se décident à partir à leur tour non sans manquer de m'avertir par la même occasion.

«Si jamais tu oses parler de ce qui vient de se produire, nous nous chargerons de te tuer à sa place. N'oublies pas.»

     FIN FLASH-BACK

Même si l'idée m'effraie plus qu'autre chose, il faudra sans doute que je songe à remercier d'avoir épargner ma vie. Aussi surprenant cela soit-il venant de la part de l'un de nos ennemis. J'ignore toujours ce qui lui est passé par la tête à ce moment précis. Peut-être étais-je simplement au bon endroit au bon moment ? Quelle ironie.

     Alyssa

Mon cœur ne cesse de faire des montagnes russes alors que je lis attentivement les lignes inscrites sur le livre entre mes mains. Je ne saurais jamais remercier assez Martin pour avoir prit soin de garder les deux ouvrages que j'avais trouvé à mon arrivée ici. Inconsciemment, je savais qu'ils me serviraient un jour ou l'autre. Et il semblerait que ce jour soit arrivé. Avec le peu de connaissances qu'il me reste en mémoire, je tente tant bien que mal de déchiffrer les quelques mots manquant à mon puzzle.

L'orage ne cesse de gronder dehors alors que les hurlements et bruits de bataille parviennent jusqu'à me tympans. J'aimerais pouvoir faire attraction de tous ces bruits pour pouvoir me concentrer pleinement mais tout ceci est impossible. Je suis bien trop inquiète à leur sujet et tenter de prendre de leurs nouvelles serait bien trop risqué pour le moment.

«Tu as trouvé quelque chose Alyssa ?» Demande Martin d'une voix inquiète.

«Martin, ne la presse pas. Cette situation est déjà assez angoissante comme ça pour elle. Tu ne penses pas ?»

«Tu sais très bien que tôt ou tard, ils finiront par nous mettre la main dessus. Ce n'est qu'une question de temps. Ce lieu est certes bien protégé mais contre une armée de Démons et d'Anges, ça risque d'être compliqué. Je veux juste m'assurer que nous sommes sur la bonne voie.»

«Mon pauvre mari, t'inquiéter autant te donnera des rides avant l'âge.»

«Il semble que ce soit déjà bien trop tard pour ce genre de remarque venant de toi mon amour.»

Je décide d'ignorer la conversation entre les deux époux pour me concentrer d'avantage. Dire que la solution à mon problème est clairement inscrite entre ces lignes serait mentir. Il me faudrait un miracle pour qu'une telle chose se produise. Et pourtant, je sais que j'y trouverais quelque chose. Un indice qui s'avérera être capital pour arrêter tout ça. Il le faut.

[...]

Un énième grognement de frustration s'échappe d'entre mes lèvres alors que je décide d'abandonner ma lecture pour un court moment. Mes yeux commencent à me piquer à force de lire toujours et encore les mêmes mots. Je ne suis plus aussi sûre de moi. J'ignore depuis combien de temps tout ceci dure. Toujours est-il que j'ai l'impression de ne pas avancer.

Comment vont-ils ? Avons-nous déjà des victimes ? La question ne se pose pas. Il en va de soit. Mais, qui sont-ils ? Font-ils partis des gens que j'aime ? Cette simple question suffit à ce que ma gorge se resserre. Je passe une main fiévreuse sur mon front en lâchant un profond soupire. Martin et sa femme ont arrêté de se chamailler depuis un petit moment et ont estimé qu'il était nécessaire de m'aider à leur tour. En dépit de cette situation dramatique, je dois bien reconnaître que les avoir auprès de moi me réchauffe le cœur. Je me sens bien moins seule.

«Je t'en pris... Il faut que tu m'aides. Je ne peux pas réussir sans toi.» Me murmurais-je à moi-même.

A l'heure actuelle, s'il y a bien une personne dont j'aurais plus que besoin, c'est bien d'elle. Cela ne fait sûrement que quelques jours et pourtant, j'ai l'impression que cela fait une éternité que je n'ai pas eu l'occasion de m'adresser à elle. A cette voix. Ma main se glisse doucement contre mon cœur avant que je n'enveloppe la pierre à mon cou et que mes paupières ne se ferment lentement.

«Ne m'abandonne pas... Je te l'implore. J'ai besoin que tu sois encore là pour moi... Si tu es toujours là, donne-moi un signe. N'importe lequel.»

Un frisson parcoure mon échine au même moment où l'ouvrage tombe soudainement au sol. Confuse, j'ouvre de nouveau mes paupières et constate qu'il est désormais ouvert sur une nouvelle page. J'ignore s'il s'agit à l'heure actuelle du signe que j'attendais mais je ne perds pas plus de temps et me jette dessus pour en faire sa lecture sous le regard interloqué de mes deux aînés.

[...]

J'ignore réellement quelle devrait-être ma réaction à ce moment-même. Devrais-je être tétanisée de peur ou me laisser envahir par le soulagement ? Je n'en ai aucune idée. Toutefois, je sais enfin. Oui. J'ai enfin ma réponse sur ce qu'il me reste à faire si je veux faire cesser toute cette mascarade.

Contre toute attente, à l'issue de ma lecture sur cette mystérieuse page, Martin a proposé de me laisser m'entretenir avec ma mère. Je n'ai su quoi répondre, pensant qu'il s'agissait tout bonnement d'une mauvaise plaisanterie de sa part. Pourtant, ce n'est que lorsqu'il m'a tendu un téléphone que j'ai compris qu'il était bel et bien sérieux dans ces propos. Sûrement trop bouleversée par ce que je venais de lire, je n'ai su me résoudre à refuser cette offre. Si l'occasion d'entendre à nouveau sa voix m'était donnée, je ne pouvais pas la refuser. J'en avais besoin pour prendre pleinement conscience des choses qui se produisaient à cet instant.

L'émotion a été grande. Plus que je ne l'aurais imaginé. Le goût salé de mes larmes envahit encore mes lèvres alors que je repense à ces événements. Il aurait été bien trop beau venant d'elle que je ne reçoive pas le moindre sermons. Et pourtant, je n'ai pu m'empêcher de fondre en larmes en sentant l'inquiétude dans sa voix derrière sa colère. S'en est suivi un long silence durant lequel je n'ai cessé de penser à quel point je l'aimais. Je souhaitais plus que tout la revoir avec Steve et Vanessa. Mais que avant tout, ce que je souhaitais était leur sécurité. Et dans ma situation actuelle, leur garantir une telle chose ne pouvait être possible qu'en restant le plus éloignée possible.

Le reconnaître n'a pas été chose évidente mais il s'agit de la vérité. Aussi pure soit-elle. C'est la seule que je puisse leur souhaiter comme à toutes les personnes que j'aime. La sécurité de pouvoir vivre.

Le souffle entrecoupé, je poursuis ma course folle tout en slalomant vivement entre les couloirs. L'adrénaline doit sûrement m'être monté un peu trop au cerveau pour que je puisse envisager une telle chose mais c'est la seule solution. J'imagine parfaitement Martin et son épouse se morfondre dans la pièce cachée à regretter leur décision. Ils ne doivent pas s'en vouloir. C'était entièrement mon choix. Il fallait que je sorte de cet endroit. Je ne pouvais pas rester indéfiniment enfermée là-bas. J'ai préféré me jeter dans la gueule du loup plutôt que d'attendre.

«Faites attention !»

Un froncement de sourcil apparaît sur mon front au moment où j'entends plusieurs voix au niveau d'un croisement. Il est bien trop tard pour faire marche arrière à mon rythme. Ils ont dû sûrement m'entendre. Je décide de prendre une large inspiration et prend appui sur mes jambes pour sauter par-dessus les trois silhouettes qui viennent d'apparaître juste devant moi. Les entraînements d'Anna m'auront visiblement servi à bien plus que je ne le pensais.

Atterrissant de justesse sur mes deux jambes, je me prépare à reprendre immédiatement ma course avant de me stopper brutalement en reconnaissant ces voix si familières. Stupéfaite, je leur laisse tout juste le temps d'ajouter quelque chose que je me précipite pour les prendre contre moi, soulagée de les savoir ainsi vivants.

«Al- Bon dieu mais qu'est-ce que tu fais ici ?! Est-ce que tu as perdu la tête ?!»

Une fois de plus, je décide d'ignorer les sermons de mes amis et me serre d'avantage contre eux. Je suis bien trop heureuse à ce moment pour m'en préoccuper. Notre étreinte dure quelques instants avant que je ne me sépare d'eux. Mon attention est immédiatement redirigée sur l'état désastreux de Mélina. La pauvre semble être en difficulté pour pouvoir marcher et je ne saurais parler de l'état de son corps couverts de plaies.

«Mon dieu... Mais, qu'est-ce qui t'est arrivé ?!» M'offusquais-je.

«Longue histoire. Je t'expliquerais plus tard. En attendant, tu dois nous expliquer ce que tu fais ici. Tu es complètement inconsciente. As-tu seulement conscience du fait que tout le monde soit à ta poursuite ? On comptait te rejoindre mais pas te retrouver entrain de courir dans les couloirs.»

«J'en ai plus que conscience mais je serais devenue folle à force de rester enfermée là-bas alors que vous risquez vos vies pour moi. Je ne peux pas rester sans rien faire.»

«C'est ta vie que tu risques de mettre en péril maintenant que tu es dehors. Tu as de la chance que tu sois tombée sur nous et non d'autres.»

Un faible sourire se dessine sur mes lèvres alors que Benjamin m'accorde un regard sévère. Je sais constamment qu'il est inquiet pour moi. Ils l'ont toujours été. Tout simplement parce que je me montrais bien trop souvent inconsciente de mes propres actes. Toutefois, aujourd'hui les choses sont différentes. Je sais très clairement ce que je veux et ce qui doit se passer.

«Je suis ici pour une bonne raison. J'ai un plan. Je sais comment faire cesser toute cette guerre ici.»

Ils doivent très certainement me prendre pour une folle. A vrai dire, je le vois très bien à leur visage. Il faut bien reconnaître que trouver une solution à un tel conflit paraît tout bonnement impossible et pourtant, je l'ai. Suite à un lourd silence, je sens leur corps se détendre peu à peu alors qu'ils croisent leurs bras contre leur buste en me regardant curieusement. 

«Je vais avoir besoin d'aide. De beaucoup d'aide. Autant de vous que de la part de certains Démons. Il nous faudra collaborer pour réussir. Et surtout, vous ne me poserez aucune question sur le plan. Seule moi doit en avoir connaissance. Autrement, tout échouera. C'est clair ?» 

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Bonsoir les chatons ! Je reviens pour un nouveau chapitre. Bon, je tiens juste à vous prévenir, je l'ai rédigé rapidement aujourd'hui au vu de mes retards. Le chapitre n'est pas corrigé alors il sera sûrement modifier par la suite mais je vous laisse le plaisir de le lire en attendant que je le retravaille un peu mieux niveau formulation et fautes d'ici les prochains jours.

J'attends avec impatience vos avis les chatons. Attention, il ne reste désormais plus que deux chapitres avant l'épilogue ! ♥

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