Chapitre 34
Le cœur battant la chamade, je me réveillai en sursaut dans mon lit. Trempée de sueur, je me passai une main dans les cheveux pour les chasser de mon visage, mes yeux parcourant ma chambre comme si je pouvais y découvrir un fantôme à tout moment. La respiration saccadée, je n'essayai même pas de la calmer.
Ma première rencontre avec Dray.
Je venais de rêver de ma première rencontre avec Dray.
Je ne savais même pas ce qui me brisait le plus le cœur. De faire face à la rencontre qui avait changé ma vie, ou de revoir une dernière fois le sourire de mon frère.
Une main posée sur la poitrine, je réprimai un sanglot qui résonna étrangement dans le silence de ma chambre. Assise au milieu de mes couvertures, je serrai les poings contre mes draps. Des larmes ruisselaient sur mes joues sans que je ne parvienne à les retenir. Je les gardais en moi depuis si longtemps que je ne parvenais plus à les contrôler.
Je prenais soin d'oublier le jour où j'avais rencontré Dray depuis le moment où il avait tenté de m'effacer la mémoire. Il y avait des moments que je préférais ne pas revivre, et celui-là en faisait partie. Tout comme le jour où nous nous étions embrassés pour la première fois ou encore ce fameux moment dans la maison abandonnée qui avait mit fin à notre relation.
Je jetai un coup d'œil par la fenêtre, et me sentis immédiatement oppressée dans cette chambre qui me rappelait bien trop de souvenirs. Je sortis immédiatement de mon lit, les jambes flageolantes et les mains tremblantes. Le chemin jusqu'à mon armoire me parut bien plus long qu'il ne l'était réellement, alors je sortis de la pièce sans même prendre la peine d'enfiler quelque par-dessus mon pyjama ou de prendre mon portable avec moi.
Le froid m'assaillit dès lors que je mis un pied dehors, mais cela ne m'arrêta pas. Les yeux rivés vers le sol, sans même regarder la direction que je prenais, je me mis à marcher afin de calmer mes pensées.
Trente minutes plus tard, je tombai nez à porte avec une maison. Je réprimai une profonde envie de hurler en me rendant compte de l'endroit où mes pas m'avaient automatiquement conduite.
La maison abandonnée où je retrouvais toujours Dray. Notre unique lieu de rendez-vous.
Je n'y avais pas remis les pieds depuis ce fameux jour, trop apeurée à l'idée d'y croiser mon ancien petit copain. Comment est-ce que j'aurais pu lui expliquer ma présence ici, alors qu'il n'y avait jamais personne qui venait dans cet endroit ?
Durant de longues minutes, je restai debout devant la bâtisse, sans savoir quoi faire. Les bras croisés pour tenter de me réchauffer, je posai un pied sur les marches du perron, avant d'hésiter à nouveau. Ma poitrine se remit à battre de manière désordonnée rien qu'à l'idée d'entrer à l'intérieur de ce lieu qui renfermait tant de souvenirs pour moi. Que des bons, malgré un. Un seul souvenir gâchait toutes les expériences que j'avais vécues ici. Le bois craqua sous mon poids, et j'observai la matière à moitié pourrie en grimaçant. La maison semblait sur le point de s'effondrer. Si je n'entrais pas maintenant, il y avait de fortes chances que je ne puisse pas le faire plus tard. J'avais le pressentiment que la maison ne passerait pas l'hiver.
Je fis un autre pas sur les marches et un nouveau craquement accueillit mon arrivée. Je me stoppai, avant de soupirer face à mon propre comportement. C'était une maison ! Pourquoi j'avais peur d'entrer à l'intérieur ? Ce n'était pas comme si elle allait me manger ! Je n'allais croiser personne ! Nous étions au beau milieu de la nuit ! Il faudrait que j'aie vraiment un niveau de poisse inimaginable pour que quelqu'un vienne me surprendre ici. Je n'étais tout de même pas malchanceuse à ce point.
Je ne devrais peut-être pas penser trop vite.
Secouant la tête, j'eus envie de me gifler. Il fallait vraiment que j'arrête d'être aussi pessimiste ! Je terminai de gravir les marches et ouvrit la porte d'entrée. Les gonds grincèrent, m'arracha une grimace. Au moins, s'il y avait quelqu'un, je ne passais pas inaperçue. Immonile, j'attendais le moindre signe me montrant que je n'étais pas seule dans ses lieux. Aucun son ne me parvint, aussi j'entrai dans la bâtisse en inspirant. Malgré le temps qui était passé, j'avais toujours l'impression de sentir l'odeur de Dray, comme s'il continuait à venir tous les jours. Son parfum me paraissait bien plus présent que les effluves de bois pourri qui devraient imprégner l'endroit.
Les doigts sur la surface rugueuse, j'avançai dans le hall d'entrée, luttant contre le flot de souvenirs qui remontait. C'était ici qu'il m'avait effacé la mémoire. Je me tenais à l'endroit exact où j'étais lorsqu'il avait lancé son sort.
Les yeux dans le vague, je commençai à fixer l'espace en face de moi. Là où lui se trouvait quand il avait ruiné notre relation. Je fermai les paupières, poings serrés, revivant ce moment bien malgré moi.
— Tu penses vraiment que c'est à toi de décider pour nous deux ? Tu crois vraiment que c'est en rompant que ça va changer quelque chose ? Je ne vais pas t'oublier juste parce que tu décides que c'est mieux pour moi !
J'eus envie de rire devant ses paroles stupides que j'avais prononcées. Bien sûr qu'il le pouvait. C'était un sorcier.
— Non, ne fait pas ça !
Sous mes paupières closes, je revis Dray s'approcher de moi et essuyer les larmes qui maculaient mes joues depuis l'instant où j'avais compris ce qu'il voulait me faire. Je revis notre dernier baiser. Ressentis la sensation de ses lèvres contre les miennes au moment où il m'embrassa pour la dernière fois.
— Je dois le faire, Maeve. Pour toi.
Des paroles qu'encore aujourd'hui, je ne digérais pas. Il ne l'avait pas fait pour moi, mais pour lui. Pour se faciliter la vie. Si je ne me souvenais de rien, j'étais un problème à rayer sur sa liste.
— Je t'aime.
— Je ne t'oublierai jamais.
Je me demandais si c'était vrai. S'il ne m'avait toujours pas oubliée. A en juger par le coup de téléphone auquel j'avais eu droit quelques jours plus tôt, c'était le cas.
Un éclat brillant sur le sol attira mon attention et je m'agenouillai pour regarder de quoi il s'agissait. Mes mains se mirent à trembler quand je pris l'objet entre mes mains, le reconnaissant immédiatement. Une bague. Un bijou que je croyais avoir perdu mais qui, au final, se trouvait là où je l'avais vu pour la dernière fois. C'était le seul et unique cadeau que Dray m'avait jamais fait. Sa bague préférée.
Je serrai l'objet dans le creux de ma paume, déglutissant. Lentement, je me laissai tomber par terre, la tête appuyée contre la structure en bois. Le jour où le blond m'avait fait ce cadeau me frappa de plein fouet, et je ne parvins pas à retenir mes larmes.
Qu'est-ce que je faisais ici ? C'était une idée de merde. Il avait suffit que je rêve de notre première rencontre pour venir pleurer dans ce taudis. Je me faisais pitié. D'un geste rageur, j'essuyai mes larmes avant de me relever.
Il était temps que je cesse de vivre dans le passé de cette manière. Dray et moi, c'était terminé. Il fallait vraiment que je me fasse à cette idée.
Dans ma main, la blague de Dray sembla peser une tonne. Je l'observai de longues secondes, hésitant à la laisser ici. Elle m'appartenait, dans un sens. Dray me l'avait offerte.
J'étais en train de la passer à mon doigt quand l'entrée grinça. Je ne me retournai pas, pensant qu'il s'agissait simplement du vent.
— Maeve ?
Mes poumons se contractèrent à tel point que je ne parvins plus à respirer.
Non mais sérieusement, Ursala. Tu te fous de ma gueule ?
Dray se trouvait derrière moi.
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