Chapitre 16 - Fin de l'initiation
Quand nous arrivions enfin au lac, la lumière du jour commençait à baisser. Mais on ne pouvait manquer le spectacle d'Audrey et Baptiste trop heureux dans l'eau, qui avaient roulé en boule un t-shirt et qui se le lançaient comme un ballon par dessus Kiara, qui n'avait pas l'air de beaucoup s'amuser. Le lac était assez grand et l'eau bien moins chaude qu'à la source. On avait apporté la caisse avec les combinaisons de la cabine de Leila au lac, pour que tout le monde puisse enfiler une combinaison sèche après la baignade. Un simili de drap épais avait été tendu sur la rive opposée et faisait office de paravent pour se changer. Le temps que tout le monde se baigne et s'habille, le soleil s'était couché.
Quand nous arrivions au camp, Leila était déjà présente. Elle était en train de faire griller une vingtaine de poissons et des champignons sur une sorte de gigantesque barbecue (préhistorique). Elle avait également revêtu une combinaison entièrement dorée, et avait attaché ses cheveux longs en une queue de cheval haute. Elle était tout sourire et semblait en pleine forme malgré son deuxième entraînement de la journée. Audrey, qui n'avait cessé de parler de nourriture sur le chemin, s'empressa d'aller voir le dîner de ce soir de plus près, ce qui sembla beaucoup amuser Leila. Mais quand Audrey approcha sa main pour attraper un petit champignon, ce même petit champignon s'éloigna d'elle. Il sortit du grill pour atterrir ... dans la main de Leila.
« Désolé ma belle mais il va falloir attendre encore un peu avant que ça soit prêt! »
Je faisais rapidement un lien avec la déesse du vent de mes rêves. « C'est toi qui a fait volé le champignon Leila? »
Elle me jeta un regard complice : « Non, il s'est envolé avec ses petites ailes! Il n'était pas encore prêt à se faire croquer... » J'entendis Baptiste et Nathanel pouffer de rire à sa remarque. Mais je ne me vexais pas, je commençais à m'habituer aux petites piques de Leila, en action comme en parole. De toute façon, même si j'avais voulu répliqué, Audrey ne m'en aurait pas laissé le temps. Elle n'était restée hébétée que quelques secondes - le temps que Leila me réponde. Elle reprit vite ses esprits et se jeta sur cette dernière : « Attends tu es capable de faire léviter les champignons?».
« Les champignons, les poissons, les malles, tout ce qui a une masse en fait... » lui répondit-elle par la démonstration, en faisant léviter tour à tour notre repas et la malle de vêtements vide qu'on avait ramené. « Et tu pourrais me faire voler?? » l'interrogea Audrey immédiatement avec un grand sourire. « Je pourrais oui, mais tu n'auras peut-être pas besoin de moi. » C'est là que ça devenait intéressant, on allait enfin en savoir plus sur nos nouvelles capacités... « Tu veux dire qu'on va apprendre à voler Leila? ». Livia s'était avancée et avais pris la suite d'Audrey. «Quand tu parlais de contrôler l'énergie tu parlais de contrôler le vent? ». Nous étions tous attentifs, elle était le centre des regards. Leila nous dévisagea tous, et en guise de réponse fit décoller ses pieds du sol. Elle se tenait à une cinquantaine de centimètres du sol, sans aucun soutien. Elle leva la main et un autre champignon décolla du grill. Elle l' attrapa et le mangeai sous notre nez.
« Je parlais d'apprendre à ressentir et à utiliser tout ce qui possède de l'énergie. Le vent, en tant que corps en mouvement, le feu en tant que corps chaud, mais plus exactement toute la matière. Dites vous bien que la matière n'est que de l'énergie condensée à une très faible vibration sous différentes formes.» Elle ne nous laissa pas le temps de digérer sa tirade. Elle venait de nous balancer qu'on pouvait - en résumé - apprendre à contrôler tout ce qui possédait de l'énergie, à savoir tout ce qui existe. Pourtant, comme si ce n'était pas plus important que la pluie et le beau temps, elle enchaîna directement : «J'espère que vous n'avez pas trop faim. »
Audrey lui lança un regard de chiot affamé qui en disait long sur l'état de son estomac. Mais sans un regard pour elle, et tout en restant légèrement surélevée, elle fit leviter toute la plaque où cuisaient poissons et champignons. La plaque flottait au dessus de nous, deux mètres au delà de nos têtes, nous narguant presque. Après l'entraînement et la baignade nous avions tous faim. Soren pris la parole : «C'est quoi le principe du jeu maintenant? ». «Le principe c'est que vous devez ressentir l'énergie qui vous entoure, vous concentrer sur l'air autour de vous. Vous êtes tous capables de le faire en théorie. » Nous nous regardions entre nous, perdus entre diverses émotions : la colère de subir une sorte de chantage enfantin, la frustration de ne pas se sentir capable de réussir le ''jeu'', mais aussi l'excitation de cette nouvelle étape, de cette nouvelle pièce à ajouter au puzzle de l'aventure. D'un commun accord nous nous tournions donc malgré tout vers elle, attendant ses instructions : « Asseyez vous. Fermez les yeux et retrouvez le même état d'abandon que celui qui précédait vos sorties de corps. Ne pensez plus à rien d'autre que le vent qui vous chatouille. Et ressentez son potentiel, ressentez son énergie. Puis utilisez la. Laissez-vous porter par l'énergie du vent. ».
Même si son discours va te paraître très théorique et assez superficiel, je comprenais ce dont elle parlait. Mes entraînements hypnotiques m'avaient habituée à retrouver cet état de semi-conscience, et en me concentrant sur sa voix et sur la sensation du vent frais autour de moi, je commençais véritablement à ressentir. Je pouvais estimer d'où venait l'air qui arrivait sur moi, quels courants le portaient, la vitesse même à laquelle la masse d'air se déplaçait. Plus encore, j'arrivais à percevoir bien que faiblement les vibrations émises par les particules de l'air. C'était impressionnant. J'avais l'impression de faire partie du vent, d'être une molécule parmi les autres. Plus rien n'existait autour de moi. Pourtant, quand je rouvrais les yeux je n'avais pas bougé et je ne voyais pas comment plier le vent à ma volonté et leviter malgré tout. Aux expressions des autres, je devinais que je n'étais pas la seule. En fait, le seul qui n'avait pas réouvert les yeux était Timothee. Dans un silence complet nous restions ainsi à l'observer pendant plusieurs minutes, attendant le signal de Leila pour bouger de nouveau. Mais l'impensable se produisit avant, car Timothee parvint là où j'avais échoué. Petit à petit, ses jambes se décollèrent du sol, et comme Leila avant lui, il se mit finalement à leviter une dizaine de centimètres au dessus du sol. J'étais impressionnée, déçue de ne pas avoir réussi en premier, mais motivée par son succès -même si le pauvre retomba lourdement sur le sol à la seconde même où il ouvrit les yeux! Un peu sonné, il prit quelques secondes pour reprendre ses esprits. Leila mit ces secondes à profit pour redescendre à terre, et reposer avec elle notre dîner. « Bravo Timothee. C'est rare qu'un surdoué parvienne à leviter le premier jour. Félicitations vraiment! Et Alex, Cléo, Nathanel, j'ai senti que vous n'étiez pas si loin d'y parvenir non plus, je me trompe? »
Et bien sûr, elle ne se trompait pas. Mais je vais te passer les instants qui suivirent directement ce tout premier exercice pour te relater plutôt les révélations de la fin du repas à travers un nouveau discours de Leila.
« Pour répondre à quelques unes de vos questions, je dois vous dire qu'à partir de demain vous aurez dix jours pour vous révéler. Je vais vous guider, un par un, pour que vous appreniez à maîtriser au mieux l'énergie, et surtout pour que votre affection propre surgisse. A l'issue de ces dix jours, je saurai quels sont les cinq qui seront capable d'apprivoiser leur don pour le bien commun. Et nous pourrons continuer ensemble l'entraînement pendant dix autres jours. »
Tu commences à avoir l'habitude des petites bombes de Leila, elle aimait bien lâcher des bribes d'informations capitales pourtant sans queue ni tête car toujours incomplètes. Cette fois cependant, elle répondit à beaucoup de nos questions.
J'appris que traditionnellement cinq surdoués sur les dix décidaient - ou y étaient amenés - de rejoindre ta dimension. Ils se rappelaient de tout et ressentaient toujours mais ne pouvaient plus exercer comme dans cette dimension. En réintégrant entièrement leurs corps, ils enfermaient leurs consciences jusqu'à leur mort physique. Ils étaient en quelque sorte conscients et passifs devant l'énergie, mais ils retrouvaient leurs proches et leurs anciennes vies. Les autres en revanche, ceux qui restaient pour s'entraîner, développaient leurs dons et accroissaient leur maîtrise de l'énergie. Pour autant, Leila ne voulait toujours pas nous indiquer dans quel but. Pourquoi était-elle venue nous chercher, pourquoi nous « entraîner », que devenaient les cinq élus à la fin de ces dix plus dix jours au camp? Encore un énorme mystère à élucider, et tu l'imagines bien, le plus important et le plus sombre.... Mais il allait falloir être patiente, je l'avais compris. J'essayais donc au terme de ce repas de me tenir à cette philosophie à laquelle je n'ai jamais réussi à adhérer : vivre au jour le jour.
Et en l'occurrence, vivre la nuit car il commençait à faire assez sombre. Devant le bâillement de plusieurs, Leila nous envoya au lit - malgré nos protestations pour en savoir plus. Oui, Leila avait l'apparence d'une femme de 25 ans et elle nous envoyait au lit comme des enfants. Mais dans sa position d'autorité, personne ne contestait vraiment, tous ayant de plus compris que les hostilités commenceraient dès le lendemain. Et je ne protestais pas beaucoup plus quand elle m'envoya me coucher... dans la tente d'Alex et Nat. (...)
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