Chapitre 27
C'est le chaos, il n'y a que ce mot pour décrire l'horreur qui se déroule sous les yeux de Jeno : le chaos.
Il se fait crier dessus et pousser dans tous les sens, on lui demande de retourner près des soldats du fond pour combattre les ours, mais il n'arrive même plus à bouger.
Des centaines de personnes s'arrachent la vie sur le champ de bataille, alors qu'hier tout allait bien. Baekhyun est venu le réveiller au petit jour paniqué en lui annonçant qu'une attaque avait lieu, et sans même qu'il ne s'en rende compte, il s'est retrouvé au milieu de la guerre la plus violente qu'il n'a jamais connu.
Lui, l'un des meilleurs combattants de Narnia, doit affronter des ennemis d'Aslan qui se trouvent être au service d'une personne vraisemblablement nommée la Sorcière Blanche, qui s'est auto-proclamée reine de Narnia.
L'hiver à prit possession des lieux et les flocons tombent en masse. Les aigles ont l'avantage dans le ciel, mais à terre, les ours et les loups sont beaucoup trop nombreux pour eux, ils n'ont aucune chance de gagner.
Aslan n'a plus donné de signe de vie depuis plusieurs jours, et tout le monde est dans l'incompréhension. Contre qui se battent-ils et pourquoi ? Que s'est-il passé pour en arriver là ? Où sont ses amis et sa famille ?
Il reprend conscience de la réalité lorsque sa tête rencontre le sol enneigé de la clairière abritant la bataille. Il grimace et lève les yeux pour tomber sur son meilleur ami qui tue d'un coup d'épée l'un des ennemis qui l'aurait probablement assassiné si Sanha ne l'avait pas poussé.
Le blond s'approche de Jeno et lui tend la main, le regard montrant clairement la peur qu'il ressent à l'idée que son ami soit en pleine bataille alors qu'il ne semble pas comprendre ce qu'il se passe.
— Jeno, debout, il ne faut pas que tu restes là. Donghyuck a besoin de ton aide, Mark est blessé et il doit le protéger pour qu'il puisse être rapatrié au camp.
Le noiraud se relève en hochant la tête. Sanha n'attend pas plus longtemps et repart en courant en direction d'un ennemi pour lui asséner un coup dans le ventre et lui couper la tête.
Jeno détourne le regard en sentant son estomac se retourner et titube lentement vers un endroit inconnu. Il n'arrive plus à se concentrer, il n'a pas été entraîné pour ça, ce n'est pas un meurtrier.
Où est Jaemin ? Où est-il ? Pourquoi n'est-il pas près de lui ?
Jeno grince des dents en se tenant la tête, mais inspire en commençant à courir en n'ayant qu'une seule idée en tête : retrouver son amant, celui qui fait battre son cœur depuis des années.
Une boule d'angoisse se forme dans sa gorge en imaginant son petit ami en train de se battre pour sa vie et cette vision boost Jeno qui court de plus belle, évitant le coup de ses ennemis. Il se dirige naturellement vers l'endroit où se battent les loups, puisqu'après tout, Jaemin en est un lui aussi.
Puis il s'arrête soudainement en voyant l'un des amis de son amoureux tuer une fille aigle de son camp qu'il a côtoyé lorsqu'il était petit. En observant plus les lieux, il réalise que les loups ne se battent pas avec eux, mais contre eux, et cette constatation résonne comme un douloureux coup de poignard dans sa poitrine.
Il doit trouver Jaemin, il le doit, c'est une obligation.
Alors il hurle son prénom, il court en se défendant grâce à son épée qui n'est même pas la sienne. Il crie à en perdre les poumons, comme si sa vie en dépendait. Il regarde attentivement autour de lui, mais ne repère pas son amant, car tous les loups sont sous leur forme métamorphique, seul leur pelage est visible.
En reprenant son souffle, Jeno ferme les yeux pour tenter d'utiliser son lien d'imprégnation sur Jaemin. Un grognement retentit dans sa tête et il ouvre soudainement les yeux.
Il le sent, Jaemin est tout près. En écoutant son intuition, Jeno court au milieu des combats, croisant Chanyeol ou encore Ravi, se battant corps et âme pour remporter la bataille. Puis quelques mètres plus loin, des dizaines de nymphes se sauvent dans la forêt pour abandonner le combat, Joy aux avant-postes criant à ses troupes de s'enfuir. Jeno repère aussi Daisy au sol, ensanglantée et se défendant comme elle peut contre un ours polaire géant.
L'aigle en lui n'aurait pas hésité à partir l'aider dès qu'elle serait entrée dans son champ de vision, mais son cœur de compagnon résonne bien plus fort et trouver Jaemin est la priorité, c'est une question de vie ou de mort. Il doit s'assurer que son petit ami va bien, il doit le voir de ses propres yeux.
Alors il court, encore et toujours, jusqu'à tomber sur une scène qui restera gravée dans sa mémoire pour toujours.
À une dizaine de mètres en contre-bas, le combat continue de faire rage, encore plus qu'avant, mais ses yeux se posent sur une seule image. Une image qui fait dévaler un nombre incalculable de larmes sur ses joues, une vision d'horreur qui lui donne la nausée et lui fait tourner la tête.
Jaemin relâchant fièrement sa dernière tuerie, le sourire aux lèvres et du sang sur le visage. Le corps pâle de Sanha gît sur le sol, épée toujours enfoncée dans sa poitrine, et la respiration de Jeno se bloque.
— Jaemin... Non..
Le loup remonte lentement les yeux pour tomber sur le visage horrifié et douloureux de son âme-sœur. La main tremblante, Jaemin récupère l'épée d'un coup, et fait un pas en direction de Jeno, le regard peiné et amoureux. Pourtant, l'espoir de Jeno est réduit en cendres lorsque Jaemin repart au combat comme si de rien n'était.
Et le cœur dépendant de Jeno lui ordonne de le poursuivre, alors il court, le regard flou à cause des larmes qui ne cessent de couler.
Jaemin achève un nouvel ennemi et son âme-sœur lui attrape fermement le bras pour le regarder dans les yeux. Le loup se fige lorsque le parfum de Jeno arrive jusqu'à lui ; le noiraud utilise son lien d'âme-sœur pour le calmer, communiquer avec lui, le faire revenir à la raison.
Leurs fronts se touchent et la respiration des deux garçons se met sur le même tempo, leurs cœurs tambourinent ensemble, leur lien les unit.
— Jeno !
Une secousse, un effleurement, tout juste deux lèvres qui se touchent, et le noiraud réouvre les yeux pour apercevoir Jaemin reprendre ses esprits et Hyunjin commencer à combattre contre lui.
Un cri puissant sort de la bouche de Jeno qui tente de se défaire de l'emprise que Seungmin a sur lui.
— On doit se replier, c'est un ordre de Jongin, on ne peut plus rien faire pour lui Jeno, il a sombré depuis longtemps déjà.
Des hurlements continuent de sortir, et Jeno ne perçoit que le regard de Jaemin qui s'accroche une dernière fois au sien avant de le voir s'enfuir avec d'autres loups. Puis une douleur horrifiante circule dans tout son corps, et Jeno n'a pas le temps de dire un seul mot qu'il se sent sombrer, laissant une dernière larme couler le long de sa joue et finir sa route sur une terre devenue la plus hantée de tout Narnia.
Leur lien d'âme-soeur vient d'être brisé.
Jaemin a détruit tout ce qu'ils avaient construit.
Ils ne sont plus rien l'un pour l'autre à présent.
Le lien est définitivement rompu.
***
Jeno est enragé. Il coupe un tronc d'arbre à l'aide d'une hache en serrant les dents. Il a utilisé l'excuse du feu de camp qui manquait de bois pour s'éclipser alors qu'il cherche juste à taper dans quelque chose pour assouvir sa haine.
Il sent les regards sur lui, les autres ne sont pas stupides, si les enfants ne se préoccupent de rien d'autre que les parties de cache-cache géant, ce n'est pas la même chose pour les plus vieux. Ils doutent, ils ont peur, ils ont une famille, des bébés, et ils savent que tout change.
Ils sont anxieux parce qu'ils sont au courant que les Contrées du Nord ont été attaqués, et que sur les quelques milliers d'habitants qui y vivaient, un quart n'y ont pas survécu. Sans compter tous les blessés, les bâtisses parties en fumée, le traumatisme que tout cela a engendré.
Le traumatisme, il le connaît très bien, il l'a vécu et ne s'en est jamais remis. Alors il a de la peine pour tous ces habitants qui n'ont rien demandé. Et il comprend ceux qui doutent ici. Ils ne se sentent plus en sécurité, parce que tuer le quart des habitants du village de Yuta n'était qu'un entraînement, une mise en bouche, un avertissement, tout a été minutieusement mis en place par les troupes de cette Sorcière.
Et ils ont raison de douter.
Ils ne sont plus en sécurité.
L'emplacement du camp a été découvert, et même si pourtant, les ennemis n'ont pas encore trouvé l'entrée, ça risque de ne pas tarder. Ils semblent avoir compris qu'un sort entoure la résidence, et ils ont des informations qu'ils ne sont pas censés avoir.
Un bruit se fait entendre derrière lui, et il se retourne en pointant son arme sur l'inconnu, avant d'abaisser sa hache lorsqu'il aperçoit Mark lever les bras en l'air.
De mauvaise humeur, Jeno lui demande ce qu'il fait là d'un air colérique tout en continuant à détruire les morceaux de bois qui se font déchiqueter encore et encore.
— Il faut les former. Mis à part Kun, les autres ne savent pas utiliser des armes, pourtant ils devront bien devoir apprendre à se défendre. Si le plan ne se passe pas comme prévu, nous ne pourrons pas tous les protéger.
Jeno souffle en lâchant enfin son arme pour s'assoir à même le sol, puis il prend d'un geste tremblant la bouteille que lui tend Mark.
— Je suis désolé, je voulais pas être désagréable. Je suis sur les nerfs en ce moment.
Le blond secoue la main comme pour lui montrer qu'il ne lui en tient pas rigueur. Ils sont tous terrifiés à l'idée de se faire repérer, surtout qu'après l'attaque envers Yuta, certains alliés ne sont plus vraiment sûrs de vouloir se battre, ce qui compromet encore plus leur victoire.
— C'est à cause de tu sais qui que tu es comme ça ?
Un frisson parcourt Jeno qui arbore des yeux encore plus noir qu'à l'accoutumée. Il écrase la bouteille d'eau entre ses mains et ferme les yeux en soupirant.
— Tu sais sur quel terrain tu t'aventures, n'est-ce pas ?
— Je ne t'en tiendrais pas rigueur, comme toujours. Ramène toi.
Alors Jeno se lève sans plus attendre, se mettant en position d'attaque pendant que Mark se prépare mentalement à devenir un punching-ball.
C'est toujours comme ça. Dès que quelqu'un aborde ce sujet avec lui, il devient complètement fou, un besoin enivrant de se libérer, de ne plus être maître de lui-même pour quelques minutes, le temps de faire redescendre la tension et d'évacuer tout son mal-être.
Mark et Jeno le font souvent, même si l'un d'eux ressort toujours avec de nombreuses blessures, chaque coup représente une personne, un mot, une sensation, un souvenir, quelque chose qui fait si mal que le garder pour soi n'est pas supportable.
Alors Mark hoche la tête et Jeno n'attend pas avant de violemment frapper la joue du blond qui recule de quelques pas.
— Je déteste les loups.
Un deuxième, un troisième et un quatrième coup retentissent, faisant tanguer Mark qui a du mal à tenir sous la force des droites que lui inflige Jeno.
— Je veux que tout redevienne comme avant. Je ne veux plus faire de cauchemars. Je veux tourner la page.
Peu à peu, les coups se font moins fort, en même temps que Jeno s'épuise, que les larmes coulent sur ses joues, que le sang envahit le visage boursouflé de Mark.
Malgré l'envie de s'évanouir, le blond récupère un Jeno hurlant silencieusement sa peine, pleurant sur son épaule comme lors de tous ces moments douloureux à vivre, mais nécessaire.
— Je veux le revoir...
***
Taemin lance un coup d'œil à Renjun qui hoche la tête, les deux garçons se séparent et commencent à marcher au milieu des habitants qui se déplacent vers les réfectoires puisque midi à résonné.
Mais ni Taemin, ni Renjun n'iront manger, ils doivent d'abord trouver Jisung. Celui-ci s'est enfui après les explications que le plus vieux à donnée au Chinois, il avait l'air d'être perdu, et il a dû entendre pas mal de choses compromettantes qui pourraient avoir une grande répercussion si ça venait à s'effriter.
Ils ont tenté de le chercher toute la soirée, en vain, alors ils se sont couchés en priant pour que le lionceau garde sa langue dans sa poche, lui qui a tendance à raconter tous les secrets dès qu'il en a l'occasion.
Maintenant qu'ils sont debout, ils reprennent leur recherche. Ils se sont mis d'accord pour tout lui révéler, même si Taemin n'était pas vraiment d'accord avec cette option, il était carrément inquiet à vrai dire. Est-ce que Jisung a les épaules pour tout encaisser et garder ça pour lui ?
Le liseur de pensées lui a expliqué que le jeune métamorphe est au courant à propos de l'identité de son père, mais personne ne lui a jamais parlé de ce qu'il s'était vraiment passé, seule une poignée de personnes connaissent ce secret et tous refusent de lâcher un indice. Il faut aussi prendre en compte le fait que même Irene qui a élevé Jisung n'est pas au courant de tous les détails qui entourent la naissance du beau blond.
Renjun jette quelques coups d'œil à certains rebelles ; comme d'habitude lorsqu'il est dans une situation stressante, il a l'impression d'être observé, que les gens savent, qu'il a été démasqué. Mais non, personne ne peut savoir, pas même Jongin ou ses frères.
Taemin est parti voir aux alentours du complexe pour essayer de trouver le blond qui adore se balader, tandis que l'adolescent à décidé de partir vers l'est pour trouver la tente de Chenle. Il est presque sûr d'y trouver son frère puisque Kun l'empêche d'en sortir, peut-être que celui-ci sait où se trouve Jisung.
Arrivé à destination, il fronce les sourcils. D'habitude, Chenle laisse toujours la fermeture éclair à moitié ouverte la journée à cause de la chaleur, il adore sentir le vent et voir la lumière du soleil.
Renjun lève les yeux au ciel en jurant, et attrape la fermeture en la baissant d'un coup rageusement, avant d'entrer pour la remonter juste après.
Il se tourne vers Chenle qui a le visage rouge et baissé, comme s'il venait d'être pris la main dans le sac en train de faire une bêtise.
Et quelle bêtise !
Le Chinois, ne supportant plus le regard accusateur de son frère, enfouit son visage dans le cou d'un Jisung méfiant, qui tente de ne pas montrer son inquiétude.
— Ne dis rien, je t'en supplie.
Les mains entremêlées, les deux garçons semblent prier silencieusement, et Renjun soupire en se passant une main sur le visage.
— Vous êtes stupides. Vous m'entendez ? Stupides ! N'importe qui aurait pu rentrer, vous avez de la chance que ce soit moi qui vous ai trouvé en premier et pas Kun ou Jongin. Vous auriez été dans un sacré pétrin.
Dans un même geste, les deux garçons baissent la tête, coupables et gênés. Ils se rendent compte maintenant que la discrétion n'est pas leur point fort. Mais Jisung, après ce qu'il a entendu, avait vraiment besoin de Chenle. Il a attendu toute la nuit près de la tente de celui-ci, sans dormir une seule fois, il n'y arrivait pas. Dès que Kun a déserté les lieux pour rejoindre le chef, Jisung s'est engouffré à l'intérieur, aidé par Seungmin qui a menti en indiquant à Jongin que le plus jeune était avec lui pour un entraînement personnalisé.
Ils avaient passé de nombreuses minutes tous les deux, s'enlaçant sans parler une seule fois. Ils se souriaient, ils étaient heureux ensemble, ils n'avaient rien fait de mal après tout.
— Vous êtes au courant des conséquences n'est-ce pas ? Chenle devra rentrer à la maison, et toi Jisung, tu resteras ici. Vous en êtes conscients au moins ?
Le lionceau hoche vivement la tête, bien qu'une grimace qu'il tente de cacher se forme sur son visage. Chenle se tourne encore plus pour être dos à Renjun et ne pas le regarder dans les yeux. Il ne veut pas que le Chinois voie ses yeux larmoyants.
— Ça me va alors. Vous savez ce qui se passera et c'est ce qui importe, à partir de ce moment-là, vos histoires, ça ne me regarde plus. Et d'ailleurs ça ne regarde personne, arrêtez d'écouter tout ce qu'on vous dit, rebellez-vous un peu. Ne laissez personne vous piétiner, ça vous rend faibles, et après vous me faites pitié. Si vous voulez être ensemble, personne ne vous en empêchera, et si quelqu'un n'est pas d'accord, qu'il aille bien se faire voir, compris ?
Si Jisung est choqué, Chenle est bien plus que ça.
Il a toujours su que Renjun était le genre de personne à ne pas écouter les règles, il n'aime pas qu'on lui donne des ordres parce que c'est une personne qui n'exige rien des autres. C'est-à-dire qu'il ne doit rien à personne, et il ne demande rien à personne, il ne vit que par lui-même. Si les autres meurent, lui restera vivant, et s'il meurt, les autres le resteront aussi. Il vit dans un monde où l'entièreté des humains est indépendant, personne n'est lié, ils se battent chacun pour soi.
Alors Renjun refuse de se plier aux exigences de quiconque, il fait ce qui lui semble être le mieux pour lui, et seulement lui. Pas les autres. Lui. Simplement sa propre personne.
Tout le monde le sait, mais Chenle ne peut s'empêcher de se sentir triste, déçu ?
Renjun doit savoir que deux personnes imprégnées peuvent en mourir, que ça peut être fatal pour son petit frère. Néanmoins, il ne semble pas s'en intéresser, comme s'il n'était qu'une personne lambda, qu'un simple humain parmi tous les autres, sans particularité à ses yeux.
— Après tout, ça ne changera rien, parce que tu vas mourir Jisung, n'est-ce pas ? C'est la prophétie.
L'horloge de vie s'arrêtera lors des dix-huit ans du Lionceau, et le Lion scellera le destin de son fils lorsque son dernier souffle résonnera.
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