Avril
à ceux qui lisent : je suis VRAIMENT désolée pour ce retard colossal, je suis trop nulle (bac, vacances, blocage...). mais c'est bon, j'ai le scénario des chapitres à venir alors je reprends le rythme un samedi sur deux, oui vous avez bien entendu ! j'en profite pour avertir que ce chapitre traite du suicide avec une certaine violence, ce qui fait que la lecture pourrait ne pas être adapté pour tout le monde. je précise aussi qu'il n'y a aucune glorification ou encouragement au suicide (on en est arrivé à ce point aujourd'hui...) mais une tentative pour en parler avec le plus de réalisme possible. en vous souhaitant malgré tout une bonne lecture. (emma)
Goner - twenty one pilots
Le temps est monotone ces jours-ci. Je n'ai pas revu Sirius depuis plus de dix jours, Astrid est souvent absente, ma mère est toujours ma mère, et mon père est toujours parti.
Alors j'étudie. Je passerai les épreuves anticipées du baccalauréat en candidat libre dans deux mois et si j'ai pu m'épargner les oraux de français et les TPE grâce à une signature de mon psychiatre me stipulant inapte en vue de ma phobie sociale, je ne pourrai pas échapper aux écrits. La filière ES m'a semblé la plus accessible et je ne pense pas m'être trompé en la choisissant. Je suis prêt pour les sciences, mais toujours inconfortable avec le français : la matière me semble si vaste.
Cela dit, je pense que le fait de faire école à la maison ne m'aide pas à ce niveau là. Les cours que je suis à travers le CNED sont amplement suffisants, mais ils sont si nombreux et variés que je dois faire attention de ne pas me perdre. Après avoir repérer les cours les plus importants sur les ordinateurs disponibles à la bibliothèque du bas de la rue, je demande à ma mère d'imprimer les éléments les plus importants à son travail (elle s'occupe de l'organisation d'un foyer étudiant catholique et le directeur et ami de longue date de la famille, Mr Richard, lui permet d'utiliser l'imprimante quand elle le veut) et quand je m'ennuie, j'évite le gâchis de papiers et réécris directement les cours sur des feuilles vierges. Cela prend du temps, oui, et ça tombe bien : j'en ai beaucoup à dépenser.
Ma mère insiste chaque jour pour me faire réviser la méthode de la dissertation, l'exercice que je maîtrise le moins, bien que je lui répète que je ne m'y risquerais sous aucun prétexte. Elle veut absolument être utile. Mais moi, je veux être seul.
Sirius me manque terriblement. Je l'ai revu deux fois depuis les cigarettes magiques et tout s'est déroulé dans la même légèreté presque fantasque. Sa présence me calme, la mienne lui permet d'appréhender ses émotions, et je crois ne pas tergiverser en disant qu'une réelle amitié est née.
Mais depuis, rien. Et il est encore trop tôt pour que ce soit moi qui fasse le premier pas.
Alors chaque jour, c'est pareil. Je me lève à huit heures, prends le petit déjeuner, travaille, écoute de la musique, repense aux jours heureux, déjeune avec ma mère, nous prions, je me sens hypocrite, broie du noir, croise éventuellement ma cousine, étudie un peu à nouveau, vais m'occuper des fleurs dans le jardin avec un casse croûte, ma mère m'appelle pour manger, je l'aide à préparer si nécessaire, Astrid arrive souvent à ce moment, dîne avec nous et repart, je joue de la guitare, je me perds dans mes pensées pendant que ma mère lit en buvant son Earl Grey dans le salon, je prétends être fatigué, embrasse ma mère et vais me coucher, mon coussin couvre mes sanglots et je m'endors vers deux heures du matin, épuisé.
J'en suis à l'étape du dîner en préparation. Ma mère n'a pas besoin de moi, alors je remplie une feuille de sudoku tandis qu'elle coupe les tomates à mes côtés. Rapidement, cela m'ennuie. L'exercice est beaucoup trop facile.
- Alors mon chéri, quand est-ce que tu revois ton ami ?
Ma mère me regarde tendrement. Elle affiche un sourire reposé. Depuis que je lui ai parlé de Sirius, elle sourit beaucoup. Il est à la fois fascinant et angoissant de voir que l'espoir transcende son visage.
- Bientôt, je mens.
Trop lâche pour la regarder dans les yeux, je commence un nouveau sudoku niveau très difficile.
- Super ! Que Dieu bénisse ce garçon. Il est baptisé, d'ailleurs ?
- Maman, je la réprimande dans un souffle.
- Oui, oui, pardon, je ne devrais pas ! C'était idiot, je te laisse tranquille avec ça.
- C'est pas grave, Maman. Je t'aime.
Elle laisse tomber son couteau, visiblement étonnée par ma déclaration soudaine. L'éclat de ses yeux clairs s'intensifie et son sourire est tellement sincère qu'il creuse délicatement ses joues et tord ses lèvres qui passent un instant d'un rosé à un blanc immaculé. Pourtant, je lui dis souvent que je l'aime. Et il se trouve qu'elle aussi.
Elle abandonne ses tomates pour venir m'enlacer. Je sers sa main et sa présence me rassure. Même si je suis seul, tout ira bien parce qu'elle est là.
- Je t'aime aussi, mon chéri.
Mon estomac se tord. Sa voix est brisée par l'émotion et ça ne peut signifier qu'une chose: elle croit que je suis sauvé, elle a espoir et je la laisse espérer. La vérité c'est que je suis toujours aussi malade. Sirius a apaisé mes souffrances, il ne m'a pas guéri.
- Maman ? J'implore presque.
Je ressens le besoin de lui faire des excuses.
- Oui ? (Voyant mon hésitation, elle ajoute :) Tu peux tout me dire, tu sais ?
- Je suis désolé, Maman. Je n'ai pas... Je n'ai pas été le meilleur fils.
Sa prise sur mon bras se raffermit.
- Naos, qu'est-ce que tu veux dire ?
Son ton, calme et doux, invite à la confession.
- Je veux dire que j'aurais aimé être le meilleur fils possible et je n'ai pas réussi, je n'y arriverai sans doute jamais. Et tout aurait été tellement plus facile pour toi si j'étais... Si j'étais normal.
Je fais le noir devant mes yeux. Honte et culpabilité me submergent et je dois lutter pour ne pas fondre en larmes comme un gamin de six ans. Je me détends légèrement quand ma mère m'embrasse la joue et que ses paroles viennent frôler mes oreilles comme un murmure :
- Écoute-moi mon garçon. Tu n'as pas besoin d'être le meilleur fils, tu n'as pas besoin d'être normal - qu'est-ce que ça veut dire, d'ailleurs ? Tout ce que j'ai besoin, c'est que tu sois toi. Et en étant toi, tu peux toujours devenir une meilleure personne. Ton intention est profondément bonne, je suis fière de toi, mais est-ce que tu crois vraiment être un mauvais fils ? Moi je pense que tu es un fils merveilleux et je t'aime comme tu es. Tu m'entends ?
J'acquiesce, à demi convaincu. Elle n'entend pas ce que je me dis dans ma tête quelques fois. Dans ces cas là, mes intentions ne sont pas bonnes. Elles sont mauvaises.
Mon pouce tremble et je m'empresse de le dissimuler sous la table pour ne pas que ma mère le remarque.
- Je ne suis pas toujours une bonne personne, j'objecte. On met toujours mes agissements sur le dos de la timidité mais moi aussi je... Moi aussi j'ai des vices. Par exemple je suis une personne très égoïste. Pourquoi personne ne le remarque ? Pourquoi toi, tu ne dis rien ?
Je lève la tête vers elle pour capter son regard. Si j'ai pensé un instant à lui parler de mes doutes, ceux qui m'empêchent de dormir et qui font venir les démons dans mon lit le soir, le bonheur que je lis sur chacun de ses traits m'a interdit de reconsidérer l'idée. Cela me permettrait bien de ne plus me sentir perpétuellement coupable et de perdre mon statut de menteur, mais ce serait surtout la détruire. Et je ne peux pas continuer d'être si égoïste.
Alors je me rabats sur cette question qui me tourmente depuis que j'ai compris que ma pathologie n'était pas seulement mauvaise pour moi, mais aussi pour les autres. Et les autres ce sont elle. Ma mère.
- Avec le bon vient souvent le mal, elle finit par répondre. Parfois, les deux se confondent, et il est difficile d'y voir clair. Cependant, au fond de toi (elle me montre mon cœur) tu sais toujours quel chemin tu dois suivre. Apprends à écouter, mon chéri, et tu trouveras les réponses à tes questions. Mais avant tout il faut que tu te fasses confiance. C'est le plus important.
Animée par une force nouvelle, ma mère me pousse à lui faire face. Elle n'a pas perdu son sourire et mon cœur se brise un peu plus.
- Tu essayeras ?
- J'essaierai.
*
Astrid m'a acheté un téléphone. Bleu électrique, une pomme croquée se dessine sur sa coque et il est possède un écran tactile dernier cri. En le considérant avec attention, le rendu me semble comique, voir ridicule. Mais apparemment, c'est très à la mode. Ma cousine a même dit que tout le monde possédait des téléphones de cette marque en particulier. Quand j'ai demandé pourquoi, elle m'a simplement répondu qu'ils étaient classes et que c'étaient les plus chers. Cela ne m'a pas avancé pour autant. A l'évidence, le monde d'aujourd'hui m'échappe encore.
Maman a bien pris la nouvelle. J'appréhendais sa réaction mais finalement, il s'agit d'un élément de plus qui la pousse à croire que je suis en train de guérir. J'ai l'impression de la trahir à nouveau.
Astrid m'a rentré son numéro et celui de Sirius. Mes contacts se composent donc de trois personnes en comptant mon numéro de messagerie. Si j'ai facilement réussi à retenir le numéro d'Astrid (qui est simple puisque les chiffres restent plus ou moins les mêmes et ne font que s'échanger de manière logique) celui de Sirius ne veut pas rentrer dans ma tête. Je le répéterai jusqu'à ce que je m'en souvienne.
L'arrivée de mon téléphone bouscule mon emploi du temps quotidien. Au lieu de jouer de la guitare, je découvre ses multiples fonctionnalités, essaie de comprendre comment ma seule empreinte parvient à déverrouiller l'écran et choisis minutieusement mon fond d'écran. Pour un garçon normal, ces choses là sont-elles vraiment importantes ?
Alors que je m'amuse à verrouiller et déverrouiller mon nouvel accessoire, l'écho des pas significatifs dans le couloir me fait sursauter. Quelqu'un arrive dans ma chambre. Dans la précipitation, j'enfile un t-shirt, aplatie ma couette d'un revers de la main pour donner l'impression que mon lit a été fait et j'ai juste le temps de m'asseoir sur mon lit avec mon téléphone en prenant un air concentré qu'Astrid débarque dans ma chambre, la mine radieuse.
- Salut ma carpe ! Alors, tu en dis quoi de ce nouveau téléphone ? Tu as l'air de l'aimer, je savais qu'il te plairait ! Et tant mieux parce que tu sais quoi ? C'est la première étape de ta réhabilitation dans la vie sociale.
Presque mécaniquement, ma cousine ouvre ma fenêtre, s'adosse au mur en envoyant valser son sac puis elle sort son briquet rose pour finalement allumer une cigarette d'un geste habile. Je la salue à mon tour et lui fait visiblement plaisir en confirmant ses dires. Elle a les joues rouges ; il est vrai que le vent souffle aujourd'hui.
- Tu as envoyé un message à Sirius ?
À l'entente du prénom de mon ami, ma respiration se coupe et une sensation désagréable se fait sentir dans mon ventre. Comme un millier de petites aiguilles qui me piquent en même temps, pas assez fort pour que je souffre mais suffisamment pour que je sois troublé.
- Non. Pourquoi, je devrais ? J'hasarde.
- Oui, me sourit Astrid en soufflant sa fumée. Comme ça il aura ton numéro et vous pourrez vous envoyez des messages, ouais ! Heureusement pour toi, Sirius n'utilise pas le langage SMS. Sinon tu serais complètement perdu ma carpe ! Et comme je suis une cousine géniale, je ferai l'effort d'écrire normalement moi aussi.
Une question sans réponse me frappe. Comment ma cousine sait-elle que Sirius n'est pas friand de ce langage apparemment subtil ?
- Comment on fait ?
Je m'efforce de prendre une voix normal alors que ma gorge me brûle. Si je détourne la conversation, je pourrai passer à autre chose et Astrid ne saisira pas les raisons de ma confusion soudaine.
- Tu vas dans les contacts, tu trouves Sirius - ce ne sera pas compliqué vu que tu n'as quasi personne - et tu cliques sur l'icône message. Tu écris et après tu appuis sur envoyer. Voilà, rien de plus simple !
J'essaie de suivre ses instructions avec minutie mais force est de constater que j'échoue misérablement. On requiert un accès à internet et je suis perdu. Je demande de l'aide à Astrid mais elle me met au défi de me débrouiller tout seul. Me prenant au jeu, je découvre un peu plus des possibilités de l'appareil (qui me semblent infinis) sans pourtant parvenir à envoyer un message. Si mon "Salut" apparaît sur le clavier, l'envoie est à chaque fois un échec.
- Laisse tomber, ma carpe, conclut Astrid en écrasant son mégot sur le rebord de la fenêtre. Je donnerai ton numéro à Sirius. Et d'ici là, essaie de comprendre où tu t'es foiré, envoyer un message c'est la base, tu ne peux pas sauter cette étape ! Je sors, à tout à l'heure cousin.
Un baiser baveux sur ma joue, ses mèches blondes qui se balancent sur ses épaules et Astrid a quitté la pièce qu'elle laisse dans un silence pesant, qui me donne l'impression d'étouffer. Je m'achemine jusqu'à la fenêtre qu'elle a laissé ouverte et fais l'effort de prendre des inspirations profondes. L'air qui circule dans mon nez est froid, abrupte, désagréable.
Soudain, la poignée de ma chambre tourne et la tête d'Astrid se matérialise dans l'encadrement de la porte. Pour une raison inconnue, elle affiche un sourire jusqu'aux oreilles et ses yeux brillent d'un éclat nouveau. Je sens mon cœur accélérer dans ma poitrine. Je ne suis pas sûr de vouloir connaître la suite.
- Au fait, Naos, je crois que je t'ai pas dit ! Sirius et moi on est ensemble ! Ça va faire quelques semaines maintenant et tu sais quoi ? Il embrasse mieux que Tim ! Bon il m'attend, j'y vais, on se voit ce soir ? J'aurai le temps de tout te raconter !
La porte claque et le bruit semble se répercuter sur les parois de mon cerveau comme une bille de Flipper lancée trop fort. La dernière chose que j'entends avant de sombrer sont les pas d'Astrid qui dévale les escaliers pour le rejoindre lui. Sirius Faure.
Après ça, j'ai parcouru une foule d'émotions contradictoires et oppressantes, exactement comme quand je dois traverser les allés d'un magasin le samedi après-midi et que les gens forment un essaim effrayant et impénétrable. Leur présence est insupportable mais ils sont bels et bien là et je le ressens.
L'incompréhension absolue, d'abord. Comment ai-je pu ne pas être au courant ? J'aurais dû le remarquer ! Et pourquoi Sirius et Astrid ne m'en ont jamais parlé avant ? M'ont-ils évité pour passer plus de temps ensemble ? Pourquoi Sirius m'a-t-il invité à jouer aux jeux vidéos, dans ce cas ? Était-ce finalement juste de la pitié ? Et qu'en est-il d'Astrid ? Elle ne m'aurait pas abandonné, si ?
Tout de suite après, un chagrin terrible, qui broie mon cœur, noue ma gorge et fait rouler des larmes froides le long de mes joues. Je me croyais lié à eux, mais tout ça n'était qu'une illusion. Mes deux seuls amis dans ce monde préfèrent passer leur temps ensemble, sans moi. Désillusion - moi qui voulais encore y croire, je suis toujours aussi seul et condamné à ne jamais guérir. Je ne suis rien, si ce n'est une présence désagréable dont on souhaite se débarrasser. J'ai toujours été un fardeau pour ma mère, le petit garçon à la phobie sociale, incapable de se débrouiller tout seul, que l'on doit protéger, rassurer, pousser parce qu'il est trop faible pour aller vers les autres. Et dans la nature, les faibles se font manger. Je ferais probablement mieux de mourir.
La colère s'est ensuite ajoutée sans réelle transition. Douce au début, elle s'est vite muée en une haine incommensurable qui m'a donné envie de tout détruire sur mon passage, moi y compris. Pourquoi faut-il que j'agisse toujours comme un taré fini ? Je ne pourrais donc jamais être normal ? Si je l'avais été, rien de tout ça ne serait arrivé. Mais non ! Il faut que je continue à être cette chose répugnante et incapable qui pue la faiblesse, la lâcheté et l'insignifiance et qui n'est même pas fichue de garder le seul ami qu'il ait jamais eu ! Je suis un bon à rien, je l'ai toujours été ! Et j'en suis arriver à un niveau si bas que je n'ai même pas le courage de l'admettre. Cela aurait pu rattraper un peu les choses, me rendre un semblant de dignité, mais non ! Parce que je n'en ai aucune. Je me déteste ! Je me déteste ! Je me déteste si fort que je devrais me tuer maintenant. Pourquoi Dieu a-t-il fallu que j'existe ne serait-ce un seul instant ? J'ai déjà souillé tout ce que j'ai touché en dix huit ans d'existence. Et c'est irrémédiable, oui, ma mort n'arrangera rien. Parce qu'il est trop tard. Mourir, au contraire, serait la solution de facilité. Et je ne la mérite pas, non je ne la mérite pas ! Je dois simplement continuer de souffrir en silence en essayant de faire le moins de mal possible pour ne pas aggraver tous les dommages que j'ai déjà causés.
Finalement, j'ai retrouvé un semblant de raison. Distante, froide, d'une neutralité presque inquiétante, elle m'a tout de même permis de faire le point sur ce j'allai faire.
Rester en vie parce que c'est tout ce que je mérite.
Rester en vie pour maman.
Incapable de faire quoi que ce soit d'autre, j'ai fermé la porte de ma chambre et j'y suis resté le reste de la journée, collé à ma fenêtre, observant l'étendu vide sous mes yeux et les tâches mouvantes que représentaient les passants. Puis je me suis endormi, le cœur un peu plus abîmer qu'hier mais toujours un peu moins qu'il ne le sera demain. En fermant les paupières, j'ai réalisé que pour la première fois de ma vie, je ne ressentais rien. Ni tristesse, ni colère, ni remords, ni regrets. J'aurais dû trouver ce vide absolu effrayant, mais il n'en a rien été. Que ce soit ça ou autre chose, je ne voyais aucune différence. Plus rien n'avait d'importance, désormais.
Je redescends le soir, quand ma mère m'appelle pour manger. J'ai oublié de manger aujourd'hui et j'ai faim. Quand j'arrive dans la cuisine, ma mère a déjà mis la table et m'attends à sa place, le sourire aux lèvres. Exceptionnellement elle a passé la journée au foyer, elle ne remarquera donc pas que je n'ai ni mangé, ni travaillé, ni gratté les cordes de ma guitare comme je l'ai toujours fait quotidiennement. Mon emploi du temps a été complètement bousculé par l'annonce d'Astrid et cette pensée ironique m'arrache un sourire contrit.
Une fois les bénédicités récitées, ma mère me demande comment s'est passée ma journée. Je me base sur la journée d'hier pour la lui raconter et elle n'y voit que du feu. La dissertation, ça va mieux, oui, et les fleurs dans le jardin se portent toujours aussi biens. Je m'informe à mon tour sur ce qu'elle a fait aujourd'hui et si j'essaie bien un moment de m'intéresser aux avancements de la rénovation du foyer, mon esprit ne peut s'empêcher de s'accrocher à un autre constat qui m'interpelle.
- Où est Astrid ? J'interromps ma mère en découpant vigoureusement mon poisson.
Bien que ne connaissant que trop bien la réponse, je lui pose la question parce que j'ai besoin de l'entendre. J'ai besoin de rendre ça réel.
- Elle m'a appelé pour me prévenir qu'elle dormait chez un ami. Tu sais quoi, mon chéri ? Je crois que notre Astrid a un petit copain !
En entendant l'évidence, je ne peux empêcher mon cœur de se rétracter dans ma poitrine. Je n'ai plus faim. Je débarrasse mon assiette en prétextant un mal de crâne et quand ma mère me demande s'il n'y a pas autre chose, je nie en insistant sur le fait que je suis vraiment fatigué. Elle acquiesce, répète qu'elle m'aime et qu'elle viendra me dire bonne nuit. Mais je n'ai pas envie qu'elle vienne. Je n'ai plus envie de rien.
La nuit suivant ce jour des révélations a probablement été l'une des plus longues de ma vie. Je n'ai pas dormi. La chambre de ma mère est au même étage que la mienne, alors j'ai fait l'effort de hurler en silence. Ma voix n'a pas couverte celle des démons, alors ils sont restés toute la nuit. Mais quand je sais qu'ils sont là, cela signifie que je me lèverai sereinement le lendemain matin. C'est quand j'oublie leur présence que c'est dangereux.
Je ne les ai pas oubliés. Alors quand le soleil a finalement filtré à travers le rideau de ma chambre, tout allait bien. Parce que j'avais compris.
Jusqu'ici, j'ai toujours cru que les choses se présentaient de cette façon. Il y avait Astrid, moi et ce lien qui ne cessait de se renforcer. Il y avait Sirius, moi et toutes ces couleurs que l'on découvrait ensemble. Mais j'ignorais qu'il y avait aussi Astrid et Sirius, sans moi. Pendant des heures, des jours et des mois, sans qu'aucun ne juge nécessaire de m'en parler. Et après cette nuit éveillé, ces choses qui, la veille encore, me semblaient si flous et obscurs ont fini par retrouver toute leur limpidité.
Sirius et Astrid ne m'ont pas prévenu pour leur couple, non pas parce qu'ils redoutaient ma réaction, mais bien parce qu'ils s'en moquaient complètement. L'amour s'est invité à leur rendez-vous, l'amour dont on parle dans les chansons, celui qui fait souffrir, celui qui fait vivre, celui qui abandonne, celui qu'on désire à en mourir, l'amour si puissant qu'il annihile tout.
Alors, je ne leur en veut pas. Sirius et Astrid s'aiment et c'est bien plus important que tout le reste. C'est bien plus important que moi. Je me suis senti trahi mais c'est simplement parce que je n'arrivais pas à accepter la vérité qui est qu'eux ont toujours été bien plus importants pour moi que je ne l'ai été pour eux.
Comme chaque humain, je suis coincé dans mon esprit, avec mes émotions et les choses avec lesquelles je lutte et j'ai tendance à oublier que la place des autres dans ma vie ne correspondra jamais exactement avec ma place dans la leur. Et ce n'est rien d'autre que du pur égoïsme. J'ai toujours voulu être le meilleur fils, le meilleur cousin, le meilleur ami. J'ai échoué. Alors il est normal que je sois puni.
Astrid, Sirius, je suis désolé. A partir de maintenant, je vous laisserai tranquille.
C'est promis.
*
J'ai tenu ma promesse. J'ai eu l'occasion de revoir Sirius hier et je n'ai pas cédé. Il m'a proposé d'aller chez lui, après cette troisième thérapie du samedi du mois d'avril. J'ai refusé en me trouvant une excuse plausible, il a hoché la tête, m'a souri et m'a dit à bientôt. Je n'ai pas réussi à lui répondre. Il y avait eu quatre après-midis jeux vidéos jusque là et j'ignorais s'il y en aurait d'autres.
Je sais que mentir est une mauvaise chose, mais je ne veux pas le blesser. Et me tenir à l'écart de lui est la bonne chose à faire pour tout le monde. Je découvre que pour faire le bien, il faut parfois passer par le mal et les concepts me semblent désormais vides de sens. Je n'ose même pas imaginer ce que penserait ma mère si elle entendait ça.
Astrid est heureuse. Et elle est amoureuse de Sirius. Elle ne l'a jamais dit, mais je l'ai compris tout de suite à la façon dont brillent ses yeux et à ce sourire sincère qui s'affiche sur son visage quand elle parle de lui. Chaque soir, elle vient dans ma chambre fumer une cigarette et après m'avoir demandé comment s'est passé ma journée, elle me raconte les principaux événements de la sienne. Depuis que je sais qu'il y a Sirius dans sa vie, je remarque qu'ils sont beaucoup moins nombreux. Elle ne sort plus avec Kim, sa prétendue meilleure amie, elle ne traîne plus tard le soir après des soirées douteuses. Je crois que Sirius fait d'elle une meilleure personne.
Les thérapies du samedi se succèdent, et je comprends de moins en moins leur intérêt. Hier, rien de changé, hormis le regard d'Aline Weil qui se faisait plus sombre que d'habitude. A-t-elle enfin compris que sa tentative de rassemblement était inutile ? Le déroulement des chaque séance est toujours plus ou moins le même. Une personne casse éventuellement les plombs (c'était Sirius et sa crise de panique la dernière fois) et c'est le seul événement notable de ces longues minutes passées ensemble vainement. Antarès fait toujours son petit numéro, Hélios est toujours absent, Orion toujours présent sans vraiment l'être, Oryne, Nysa et Adara demeurent toujours aussi discrètes et silencieuses (comme ce sont des filles, je n'ose pas vraiment les regarder) et Sirius est tout juste un peu moins perdu.
Être avec Astrid doit être une nouveauté difficile à saisir pour mon ancien ami. Si j'ai cru pouvoir l'aider à comprendre l'amitié, ma cousine va devoir lui faire appréhender l'amour. J'espère qu'elle n'échouera pas comme j'ai échoué. Sirius a besoin d'elle.
Aujourd'hui, on est dimanche, et le dimanche est souvent le jour le plus difficile de la semaine. Après la messe du matin où personne ne me parle puisque les habitués savent qu'ils n'obtiendront aucune réponse de ma part (ma génitrice a bien sûr raconté tous mes problèmes à chacun d'entre eux, je crois qu'elle ne connaît pas le principe de la vie privée) je rentre seul à la maison et ma mère me rejoint quelques heures après. Elle passe ensuite le reste de la journée avec moi, à me noyer sous ses questions pour vérifier que je vais bien. Je suis devenu un menteur hors pair. J'ai même réussi à lui faire croire que je suis allé au cabinet de Mr Henry, mon psychologue, ces deux derniers mercredi alors que je n'y ai pas mis les pieds depuis le mois de mars.
Cet après-midi, Astrid n'est pas là. Elle n'a pas vu Sirius depuis deux jours et elle attendait avec impatience que l'on soit dimanche pour passer du temps avec lui. Ma cousine m'avait dit qu'il m'enverrait un message vendredi. Il ne l'a toujours pas fait, et c'est tant mieux. Je garde tout de même mon téléphone dans ma poche par curiosité malsaine. Je sais que je ne devrais pas, mais impossible de m'en empêcher. Je n'ai jamais reçu d'SMS de ma vie, alors si cela arrive un jour, je veux entendre le son des notifications que j'ai pris soin de choisir par mes propres oreilles.
La journée est passée étonnamment vite. Mon emploi du temps demeure le même et pourtant, je ne ressens plus cette monotonie désagréable d'y il a quelques jours. En fait, je ne ressens plus grand-chose.
Un peu avant l'heure du dîner, je monte dans ma chambre sans réel objectif. Je tombe sur mon cahier de chansons, je les relie distraitement et elles me paraissent fades, larmoyantes et sans intérêt. J'en déchire quelques unes. Elles qui avaient tant d'importances pour moi avec ce rêve fou de faire de la musique, tout me semble dénué de sens désormais. Je me suis déjà fait avoir une fois avec ces fantasmes malsains et autres espoirs qui ne mèneront jamais à rien et il n'est pas question que cela arrive à nouveau. Mais je nage dans une telle désillusion que cet aboutissement me paraît tout bonnement impossible. Et il l'est sûrement.
Mes yeux se posent sur ma guitare que je n'ai pas touché depuis deux jours. Voilà quelque chose qui n'était jamais arrivé avant. On dirait que je viens de passer un nouveau cap.
Lassé par toutes ces constatations inutiles, je finis par me laisser glisser le long de mon armoire en soupirant. Un peu trop brusquement peut-être puisque celle-ci bascule et j'ai à peine le temps de me dégager qu'elle se fracasse sur le sol en un bruit sourd. Je crois que j'ai oublié le pied cassé et les recommandations de ma mère qui m'intimait de faire attention jusqu'à ce que Mr Richard vienne à la maison pour le réparer. Comme si cela avait de l'importance. J'entreprends nonchalamment de remettre l'armoire debout. Elle résiste un instant et je n'ai besoin que de forcer légèrement sur le pied pour qu'elle retrouve son équilibre. Mais ce que je découvre, là où l'armoire a percuté le sol, me donne une foudroyante envie de vomir.
Je demeure immobile un instant, incapable de faire preuve d'aucune réaction. Les émotions que je n'éprouvais plus depuis quelques jours se réveillent instantanément, plus extrêmes que jamais. Puis je me précipite vers les restes de ce qu'a été ma guitare, les mains tremblantes et le cœur plus vide qu'il ne l'a jamais été.
Des morceaux informes jonchent le sol et cette vision désolante rouvre une plaie si profonde que je commence à pleurer. Mon instrument est méconnaissable. L'armoire l'a véritablement éventré ; la caisse a été écrasée, il n'y a plus de rosace et le chevalet est brisé en deux morceaux. Seule la tête tient encore approximativement debout, rattachée au manche grâce aux deux seules cordes qui ont survécu. Les autres ont sauté sous l'impact et pendent misérablement sur les côtés tandis que les clefs blanches traînent sur le sol, disloquées.
Ma guitare est irréparable et même plus: elle est complètement fichue. Le seul souvenir de lui qui ne soit qu'à moi n'est plus rien et je suis seulement en train de le réaliser.
J'ai détruit la guitare de mon père. J'ai détruit mon père.
- Naos ? Qu'est-ce que...
La panique s'empare de moi quand je prends conscience que je n'ai pas entendu ma mère arriver et qu'elle est là, sur le seuil de ma porte, complètement abasourdie par le décor qui se tient sous ses yeux. Je commence à perdre le contrôle, il ne faut pas qu'elle me voit comme ça, non, il faut à tout prix l'éviter.
- Je venais t'appeler pour manger.
Sa voix, complètement brisée, me fait trembler davantage. Et là, alors qu'elle vient m'enlacer et m'assurer que ce n'est pas grave car tout va bien, ce n'était qu'une guitare, pas lui ! j'explose.
Mon père, Sirius, Astrid, lui, ma mère, la perspective stérile d'une vie de mort vivant, cette solitude qui me dévore, l'obligation de devoir être moi pour toujours, ces souvenirs qui ne s'effaceront jamais, ces rêves destructeurs qui resteront toujours, tous ces mensonges et ces gens que je n'arriverai jamais à satisfaire, ces émotions que je ressens trop fort, ma faiblesse, mon dégoût envers moi-même ; tout se mélange, se confond, s'embrouille et s'enchevêtre pour finalement ne plus constituer qu'une seule et même pensée, simple, nette, salvatrice et qui a le pouvoir de me faire retrouver mon calme instantanément.
Je dois en finir.
- Qu'est-ce qui se passe, mon chéri ? S'inquiète ma mère entre deux sanglots et je remarque seulement maintenant qu'elle me parle et me serre dans ses bras depuis de longues minutes, sans que je ne me rende compte de rien.
J'essaie de lui dire que je suis désolé, mais aucun mot ne sort de ma bouche. Je tente à nouveau, capte son regard pour me donner du courage mais rien, si ce n'est ma faiblesse qui encore, me saute aux yeux. Je me lève. Je dois en finir.
Ma mère me parle mais je n'entends plus rien. Je n'entends plus rien ! Ses lèvres bougent, je perçois les sons qu'elle émet mais je suis incapable d'assimiler leur sens, que se passe-t-il ? Je suis désolé ! Je suis tellement désolé, Maman ! Je suis désolé parce que je n'arrive pas à parler, je balbutie comme l'enfant terrorisé et faible que j'étais et que je suis encore.
Il est temps de partir, j'essaie de hurler à pleins poumons (en suis-je capable?) puis les lieux défilent sous mes yeux à toute vitesse, comme dans un film en accéléré. Le pas de ma chambre d'abord puis le parquet du couloir, la moquette des escaliers, le tapis de l'entrée, le béton, l'herbe, l'asphalte, encore et toujours l'asphalte, la terre, les graviers et je suis arrivé à destination.
Un bip aigu et incessant dans mes oreilles, cette pensée stimulante qui se matérialise dans mon esprit ; rien d'autre. Escalader les barrières. Se faufiler derrière. Trouver la vielle entrée secrète découverte par mon père. Éviter les débris. Se repérer dans la pénombre. Poser les mains sur les roches froides. Monter les longs escaliers en colimaçon, un pied après l'autre. Respirer. Sentir le vent qui souffle ici plus qu'ailleurs. Avancer près du vide. Encore plus près. Se retourner et admirer un instant la beauté de ce vieux château en ruines où plus personne ne se risque à aller depuis longtemps. Ne pas s'égarer. Faire volte face et observer l'étendue vide sous mon nez et les vagues qui s'écrasent doucement sur le massif de rochers en bas. Fondre en larmes.
Je ne suis pas fou. J'ai juste envie de mourir. Et le constat qui est que je suis incapable de me donner une raison de ne pas sauter est un déchirement.
Maman, Sirius et Astrid n'ont pas besoin de moi. Vivant, je suis un fardeau pour eux. Sirius sera heureux avec Astrid. Astrid sera heureuse avec Sirius. Et Maman, que j'ai déjà faite souffrir pendant dix-huit ans, mérite de vivre sans un fils qui lui rappelle constamment le mari qu'elle a perdu pour toujours.
Rester pour qui, dans ce cas ? Lui ? S'il veillait vraiment sur moi, cela aurait pu être une raison mais je suis sur le point de mourir et toujours pas un signe. N'est-ce pas là une preuve révélatrice ? J'aurais aimé qu'il me connaisse, mais encore une fois, j'ai été berné par mon imagination. J'ignore s'il existe ou pas, tout ce que je sais, c'est que j'ai été stupide de croire qu'à l'évidence, il était différent des autres. Pourquoi lui en aurait quelque chose à faire de moi ? Qui a dit que ses intentions à mon égard étaient bonnes ? Et s'il était vraiment là, comment pourrais-je être certain qu'il ne désire pas que je meurs, lui aussi ?
Le vent marin vient souffler doucement sur mon visage. Je m'assois sur le bord, exténué. Je souffre tellement que je ne sais plus où j'ai mal. Si je disparais, au contraire, je ne souffrirai plus.
Je regarde les rochers et me figure ce qui arrivera dans quelques instants. La chute sera rapide, le choc fulgurant, la souffrance abominable mais incroyablement brève, la mort presque instantanée et le répit éternel. On retrouvera mon cadavre bleu et gelé d'ici quelques jours. Les gens seraient à peine étonnés. Et ma mère...
Ma mère. Les pores de ma peau me brûlent. Non ! Non, Maman, ne m'oblige pas à changer d'avis ! Il fait trop chaud, j'étouffe. J'arrache mon t-shirt. Un regard pour mon torse si blanc, si maigre et cette peau décharnée sur mes os et je m'interroge: suis-je déjà mort ? Quelle différence entre mon corps mort et mon corps vivant ? Aucune ? C'est ça, aucune différence entre vivre et mourir, si ce n'est mon cœur qui se dissout.
Il est l'heure. Déterminé, je me lève et me prépare pour la dernière inspiration que je prendrai jamais. J'ignore si l'acte est en soi incroyablement lâche ou si c'est la chose la plus courageuse que j'entreprends de ma vie. Penser ainsi n'a plus aucun sens, à vrai dire. Ça ne fait aucune différence.
Quand je soulève le premier pied, je sens le sang affluer dans mes tempes et mes doigts trembler doucement. Mon cœur se relâche mais mes muscles se détendent et brusquement, je coupe ma respiration. Je prends du temps avant de me décider à enfin sauter. Je tourne mes yeux vers l'horizon: j'ai passé ma vie à regarder en bas, je la terminerai la tête dirigée vers le ciel. L'air manque déjà depuis longtemps et je sens que la lutte contre mon instinct de survie s'engage.
Soudain, ce que je perçois comme une note très brève et très aiguë vrille dans mes tympans et dans la surprise, je ne peux pas m'empêcher de respirer à nouveau et m'écarte précipitamment du bord de deux pas par peur de tomber par accident. Je tends l'oreille pour comprendre si le son était vraiment réel ou si c'est le manque d'air qui m'a fait délirer, mais seul le sifflement du vent se fait entendre. Je me remémore le son et cette projection me procure une douce sensation de bien être absolu. Je reste dans l'incompréhension quelques secondes de plus, puis je comprends.
Le son était une notification SMS de mon téléphone qui se cachait dans ma poche.
Complètement désorienté, je m'empresse de l'en sortir pour le déverrouiller, le souffle haletant et le doigt trop chevrotant pour que mon empreinte seule suffise à m'afficher l'écran d'accueil. Le code ! Qu'est-ce que le code ? La réponse me semble maintenant évidente, je rentre les quatre chiffres 1,2,3,4 et mon téléphone se déverrouille aussitôt, projetant ainsi une lumière agressive sur mes pupilles. Je titube et suis pris de vertige en laissant mon regard traîner sur les rochers sombres, tout en bas.
Je recule à nouveau et sans que j'ai le temps de me préparer psychologiquement à lire le message que j'ai reçu, mes yeux s'agrippent à l'écran avec une rapidité fulgurante et font monter l'information à mon cerveau qui, affolé par le danger omniprésent, ignore dans un premier temps quoi en faire. Finalement, je crois avoir assimiler ce qui m'apparaît comme rien d'autre qu'un miracle absolu.
Sirius m'a envoyé un message.
Son nom s'affiche au centre de l'écran d'accueil et juste en dessous je peux lire son texte qui, dans l'euphorie, me semble être sans aucun doute la plus belle chose jamais écrite jusqu'alors.
« C'est Sirius. Je n'aime pas les brocolis. »
Cette fois-ci, je n'ai besoin que de quelques secondes pour lui envoyer ma réponse :
« Moi, je n'aime pas les haricots. »
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