Tome I - Chapitre troisième

Au coucher du soleil, on atteint l'extrémité Nord de la forêt, comme je l'avais prédit. Quand nous sortons des feuillages, Kasey est perplexe face au vide d'une plaine aux allures dorées. Un arbre est planté au beau milieu du néant, seul envers et contre tout.

Kasey me regarde et fronce les sourcils. Il va pour parler, sans doute pour me dire que je n'étais qu'une menteuse, que je ne servais à rien ou qu'il n'aurait jamais dû me demander de l'aide.

Mais je le stoppe et siffle trois coups d'une même note. Et quelques secondes plus tard, un homme noir sort comme par magie de la dorure de la terre. Kasey recule d'un pas, ayant peur. Je rigole et lui tapote l'épaule.

_ C'est rien. C'est juste un ami à moi.

Je souris et m'avance vers l'homme qui vient de faire son apparition. Je marche et lui sourit.

_ Bonjour Tobias.

_ Nam. Comment tu vas ? Je me suis inquiétée pour toi !, dit-il en me prenant par les épaules. Qui est-ce ?, me demande-t-il avec un mouvement de tête indiquant en arrière.

Je tourne ma tête et vois Kasey s'avancer vers nous, méfiant. Quand il arrive à notre hauteur, il a l'air encore plus nerveux.

_ Tobias, Kasey. Kasey, Tobias. Kasey n'est pas mon ami. C'est un gars que j'aide à regagner la Capitale. Tobias est le chef de la Garde du village.

Les deux hommes se jaugent du regard. Kasey baisse les yeux face à Tobias. Bien que sa cicatrice sur sa joue - plusieurs lignes parallèles barrées d'une autre – formant comme une crevasse pleine d'argent face au soleil fasse de l'effet à tout le monde, Tobias a un visage avenant. Seulement, Tobias n'a pas l'air de bonne humeur.

_ Vous êtes au courant ?, demandé-je à Tobias pour changer de sujet. L'Armée a débarqué cette nuit, on ne sait pas pourquoi.

_ Oui, on est au courant. Et on pense savoir pourquoi mais je ne peux rien te dire.

Kara et sa paranoïa...

_ Bon, je descends. Kasey, suis-moi.

Ce dernier me regarde, étonné, et me suis avec Tobias sur les talons. La trappe menant à l'échelle d'entrée du village est encore ouverte. Je m'accroupis et commence à entamer ma descente. Plus Kasey avance, plus il pousse des petits cris de surprises. Ça m'agace énormément. J'entends la trappe se refermer au-dessus de nous et nous plonger dans la pénombre. Je continue de descendre en faisant attention à où je mets les pieds. Je connais cette échelle comme le fond de ma poche mais celui au-dessus de moi un peu moins.

Une fois arrivée en bas, je saute pour atterrir. Je me retourne et revois cette immense grotte illuminée par les lumières des torches et du système électrique qui passe par le plafond. Ça éclaire tout le village. C'est comme une mini ville souterraine. Et, merci Seigneur, ce n'est pas une fournaise.

Kasey vient à côté de moi et contemple la vue.

_ Wow.

Soudain, à gauche, surgit un robot humanoïde tout en rouages et en câbles, serrant autour de son cou mécanique une cravate orange effilé sur les côtés. Il marche mais Kasey lui barre la route. Le robot lui lance :

_ Yo, tu n'veux pas te décaler, mec ?

Kasey le regarde avec de grands yeux choqués. Tobias et moi pouffons de rire en le voyant se décaler doucement pour laisser passer le robot.

_ Mais attend ! Les robots ne sont pas seulement à Acropolis ?

Je jette un regard à Kasey en fronçant les sourcils.

_ T'as vraiment beaucoup de choses à apprendre, toi !

Tobias ricane et s'approche de Kasey avec un sourcil relevé.

_ Mon ami, l'interrompt Tobias en posant sa main sur son épaule. Bienvenue à Faniath.

Tobias passe devant nous et descend la petite pente qui mène aux premières allées. Il y a un monde fou, sur la place. Encore plus que d'habitude. Il y a de petites tentes où sont cachées des tables ornées de nourriture, d'armes et de vêtements qui forment le cœur de Faniath. Et derrière, les infirmeries où les seuls rescapés de l'attaque qui connaissent le village sont venus se réfugier. Les gens parlent et rient entre eux. C'est comme s'ils n'étaient pas touchés par ce que qu'il se passait au-dessus du sol. Je lève la tête et regarde les cocons qui font office de lustres éteints. J'ai toujours voulu savoir comment ils les avaient construit mais personne ne m'a rien dit.

_ C'est normal qu'il y ait autant de monde ?

_ Des personnes de Laina sont venues se réfugier ici. Surtout pour guérir les blessés encore aptes à être aidés. Les infirmeries sont pleines à craquer.

_ Comment ils ont fait pour venir jusqu'ici ?, l'interroge Kasey.

_ Mon grand, l'échelle n'est pas la seule entrée de Faniath.

Ils ont fait un carnage, cette nuit.

J'avance dans l'allée en face de moi. L'allée des vêtements. Je n'en ai pas besoin. Je veux juste une douche et un peu de ravitaillement en victuailles et en sommeil. Tobias nous guide toujours, s'enfonçant au centre du village.

Là-bas se tient un grand chapiteau en toile blanche qui fait office de « mairie ». Là-bas, je verrai Kara, la chef du village. Ici, ils vivent un peu comme des marginaux de la société. C'est « comment faire plus avec moins ».

Tobias s'arrête à côté de l'entrée de la grande tente et nous invite à entrer de la main. Kasey me suit et nous faisons enfin face à Kara.

C'est une femme d'une quarantaine d'année, habillée comme une guerrière, remplie de tatouages sur les bras, avec une majorité d'épaisses lignes noires. C'est une dure-à-cuire à vue d'œil, mais je ne l'ai jamais aimé. Et c'est réciproque. Elle a tué plus de dix hommes pour libérer ce village quand elle avait trente-deux ans. Et maintenant, la voilà trônant fièrement dans le plus beau fauteuil de tout Atorn, hormis ceux d'Acropolis.

_ Bonjour à vous, chers visiteurs. Que pouvons-nous faire pour vous ?, nous demande la chef du village.

_ Nous venons pour nous reposer et vous acheter des provisions.

_ Et vous allez où ?

_ Je dois emmener cet homme à Acropolis. Il recherche son frère.

Kara tourne la tête vers Kasey, qui se balance d'un pied sur l'autre, l'air gêné. Kara se lève et s'approche de nous. Il est vrai qu'elle est belle. Une beauté mystérieuse qui éblouie mais qui a son côté vénéneux aussi. Ses yeux noirs profonds me sourient.

_ Je vous en prie. Prenez ce dont vous avez besoin. Tobias doit remonter en haut pour surveiller. Tania vous conduira où vous voudrez. Tania ?

Une jeune fille d'à peine quinze ans rentre dans la tente, nous scrutant Kasey, Kara et moi. Puis, revenant sur Kara, elle incline la tête d'un air entendu pour inciter Kara à prononcer sa requête.

Elle a de longues mèches rouges autour du visage, des yeux noirs et un visage tout rond. Elle est un peu intimidée mais elle joint ses mains en se tenant droite, parant à toutes éventualités.

Je l'ai déjà croisé, allant dans un des tunnels au fond de la place principale. Seulement je n'ai jamais été autre part qu'aux douches et dans les allées marchandes. Elle me scrutait quelques fois, cachée à l'angle d'une allée ou dans un tunnel. Elle a l'air d'une petite femme.

_ Ma chère, peux-tu emmener nos invités vers les douches et leur préparer une chambre pour la nuit ? Ces messieurs et dames seront nos invités.

_ Bien, Kara.

_ Merci beaucoup, remercie Kasey.

Nous ressortons de la tente et nous suivons l'adolescente vers les escaliers les plus proches. Ses longs cheveux cuivrés se balancent nonchalamment dans son dos alors qu'elle nous indique le premier cocon sur la droite. Le rideau blanc en lin, attaché sur le côté, nous ouvre la voie.

C'est une chambre petite mais confortable, faite d'osier et de bois. Le rideau fait office de porte. Tout fait contraste avec les draps blancs du lit. Le seul problème, c'est qu'il n'y a justement qu'un lit. Je fais le tour de la chambre et croise mon reflet dans un miroir. Des petites taches rouges constellent mes joues et mon front. Du sang. J'essaie de frotter mais ça part difficilement.

Et je repense à la petite fille, et à ces autres personnes sur le toit voisin. A tout ce qu'il s'est passé hier soir.

Il n'y a plus rien à Laina. Plus rien. Je n'ai plus de chez moi. Je n'en ai jamais eu, pourtant un pincement fait frissonner mon cœur. Qu'est-ce que je ne donnerai pas pour avoir une maison à moi et être tranquille, loin de tout jusqu'à la fin de ma vie ?

Kasey fronce les sourcils et se retourne sur la jeune fille.

_ Il n'y a pas deux chambres séparées ?, fulminait-il.

La fille fait non de la tête. Super !

En soupirant, je pose mes sacs sur le côté gauche du lit et défais mon gilet en cuir où mes couteaux sont accrochés pour le poser sur le drap blanc-cassé. Mon fusil et mon Wheellock resteront à côté du lit, au cas où il y aurait un problème. Je récupère des bons payants et ressors du cocon. Une odeur un peu nauséeuse, mélangée à du métal vient à mon nez. Je vais devoir prendre une douche, mais avant, je dois prendre des vêtements. Je n'en ai pas vraiment besoin mais ça va être un long voyage et je n'ai pas pensé à des rechanges alors...

Je me dirige vers l'allée des vêtements et ralentis le pas devant le premier stand. Mes yeux parcourent tous les étalages et ce n'est qu'au troisième que je trouve mon bonheur : un pantalon souple noir, un débardeur de la même couleur et des bottes de randonnée grises. Plus loin encore, je trouve des sous-vêtements et une veste marron vieillie par le temps.

On ne sait jamais s'il fait froid au Nord. Certes, il n'a pas plus depuis des dizaines d'années mais nous ne sommes jamais trop prudents. Je prends tout et paie. La femme aux cheveux gris derrière son comptoir me sourit tristement en fixant ses yeux livides sur mon visage. Lorsqu'elle me tend le reste de la monnaie, elle commence à desserrer ses lèvres mais se ravise en soupirant. Je récupère le reste de mes bons payants et me retourne pour tomber nez à nez avec Tobias. Je lui fais un signe de tête qu'il me rend aussitôt. Je fais l'effort de baisser la tête pour longer les allées des fruits et légumes. Le regard de la vendeuse m'a bien prouvé une chose : je fais pitié avec ce sang sur le visage. Je m'enfonce dans un couloir étroit et non éclairé pour atteindre les douches.

En réalité, ce ne sont pas vraiment des douches, mais de grands bassins d'eau douce. Il fait assez sombre pour ne pas discerner les formes en détails, mais on peut quand même voir où nous mettons les pieds. Un jet d'eau sort du plafond pour remplacer l'eau sale par l'eau propre. Il doit sûrement y avoir un système d'évacuation dans le sol ou sur une paroi. Après tout ce n'est pas mon souci. Le principal, c'est que ça marche.

Je me déshabille en vitesse et me glisse tout doucement dans l'eau chaude du bassin. Ça fait beaucoup de bien de se laver, surtout après cette nuit. A chaque fois que je tue un animal, ça va. Parce que ce sont des animaux dangereux qui font du mal à ceux qu'ils croisent. Et quand bien même, je voudrais ne pas les tuer, j'y suis obligée de toute manière. Je ne dois pas mourir de faim. Mais tuer des êtres humains, c'est autre chose. On les voit partout après. Dans nos rêves, tout autour de nous, derrière les bruits inquiétants de la nuit. Et au final, on finit par vivre avec, à discuter seul dans le noir, comme si leur esprits nous tenaient compagnie. Il faudra que je rajoute un soldat rouge à ma petite liste.

Je plonge le corps entier jusqu'au-dessus de ma tête et remonte à la surface. Je me frotte fort mes joues et mon front pour effacer toute trace de sang de la nuit dernière. A tâtons, j'attrape un savon parmi tous ceux dans le large bol prévu pour ça. Tout doucement, je commence à me frotter. Puis encore plus fort, jusqu'à ne plus sentir mes doigts. Je replonge sous l'eau pour enlever le savon qui s'accumule sur ma tête. Puis j'entends des bruits de pas arriver vers moi. Puis une silhouette assez large. Ma main s'aventure vers mon pantalon sale pour récupérer mon neuf millimètre. Je le déclenche et attends le moment propice pour m'en servir.

_ Ce n'est rien, ce n'est que moi.

Je reconnais la voix de Kasey de suite. Je soupire en rejetant mon arme et reprends mon nettoyage.

_ Comment savais-tu que j'étais ici ?

_ C'est Tania. Elle t'a vu entrer.

Je détourne la tête quand je vois que Kasey pose ses affaires au sol pour se déshabiller. Oh non... Il ne va pas faire... Ah si, il va se laver ici, aussi. Super. Génial. Il ne manquait plus que ça !

Je tente un regard vers lui. Il est torse nu et de dos. A travers la pénombre, je peux discerner les muscles de son dos, mais vaguement. La première fois que je l'ai vu, je n'aurais pas dit comme ça, mais il est plutôt développé. Il détache ses cheveux et les laissent pendre juste au-dessus de ses trapèzes.

Je reviens à moi et finis de me laver. Une fois tout ça fait, je récupère une serviette et la glisse sur le côté pour pouvoir remonter et l'enfiler directement. Je me rince vite et profite que Kasey soit de dos pour sortir du bassin. Une fois extirpée de l'eau, je déplie la serviette duveteuse en coton et l'enroule autour de moi. J'en prends une deuxième pour les cheveux et me sèche rapidement.

Je suis habillée quand Kasey rentre dans l'eau. Je récupère les serviettes et les pose dans le bac pour qu'elles soient nettoyées. Je vais laver mes affaires sales mais avant...

_ Nam ?

Je me retourne sur Kasey qui se frotte le bras gauche avec le savon.

_ Oui ?

_ On part à quelle heure demain ?

_ Aucune idée, mais on a le temps. Repose-toi. Tes problèmes seront toujours là, demain matin. Alors essaie de te vider la tête.

Je tourne les talons et sors de la salle d'eau. Je passe dans un autre couloir et pénètre dans une pièce pleine de bassines remplies de liquide clair et de nettoyant pour linge fait maison. Je m'agenouille devant la bassine la plus éloignée de la porte, prends mon t-shirt et le frotte dans l'eau savonneuse. Comme pour laver tous mes souvenirs de cette nuit d'horreur.

Une demi-heure plus tard, je fais le tour des stands pour les provisions alimentaires et les armes. Pour la deuxième catégorie, je n'ai pas trop à me plaindre. J'ai déjà deux couteaux, un neuf millimètres, un fusil et mon Wheellock. Il n'y a pas de quoi faire un drame. Je marche en sens inverse pour remonter à la chambre mais je croise Kasey qui regarde les armes blanches. Je m'avance vers lui et me poste à côté.

_ Tu sais te servir de ça, au moins ?, lui demandé-je en regardant les haches de bouchers attaquées par la rouille.

_ Oui. A ton avis, comment j'ai fait avant que tu n'arrives au sous-sol ? Et dois-je te rappeler que j'ai failli te trouer le ventre, à côté de ta voiture ? J'aurais très bien pu t'embrocher, si ça me chantait.

_ Tu es peut-être resté dans ta petite cachette le temps que j'arrive. Et je te conseille de ne pas tenir ce genre de discours. On ne sait jamais, ça peut se réaliser plus tôt que tu ne le crois. Sauf que la personne qui tiendrait l'arme n'est pas forcément celle que tu imagines.

Je le regarde. Ce mec est vraiment un suicidaire. J'ai hâte de savoir s'il sait qu'on ne se fout pas de ma gueule longtemps. Mais il a l'air de s'y connaître. Enfin, je l'espère pour lui. Sinon, moi, nous défendre nous deux en même temps ? Ça va être compliqué.

_ Mon père m'a appris à m'en servir, dit-il en prenant une machette prête à tomber en poussière.

_ Il est où, maintenant ?

Le visage de Kasey s'assombrit et il repose la machette là où elle était placée. Il me regarde et fais non de la tête. Ah... Quelle cruche, il me l'a dit en plus quand je l'ai trouvé !

_ Il est mort cette nuit. J'étais en train de dormir. Il a déboulé dans ma chambre. Il était totalement paniqué. Il m'a dit d'aller dans le sous-sol de l'immeuble. Je suis passé par le petit monte-charge qui sert pour la nourriture. Et quand la porte allait se refermer sur moi, je l'ai vu se faire abattre. J'avais son sang sur mes vêtements et...

Je ne savais pas quoi répondre à ça. Je fais juste un signe de tête et regarde autre part.

_ Ne t'inquiète pas. Ça va aller. Et puis j'ai encore l'espoir de retrouver mon frère.

_ Tu as eu des nouvelles de lui récemment. Il est doit être encore parmi nous. Tu le retrouveras. Ne perds pas espoir.

Une minute, pourquoi je suis gentille, maintenant ? Je dodeline la tête et lui lance un regard sans expression.

_ Fais-vite ton choix. Et choisis-le bien. Je ne serai plus avec toi, une fois les portes de la Capitale franchies.

Je le contourne et je monte à la chambre. Une fois à l'intérieur, je me jette sur le lit et me roule en boule du côté droit. Je m'endors aussi sec.

*

Plus tard dans la journée, je me réveille en sentant quelqu'un se hisser sur le lit. Et la première chose que je remarque, c'est que j'ai froid. Des craquements, puis un grincement. Je baisse la main aussi discrètement que possible vers mon gilet et extirpe un de mes couteaux. Un fois bien en main, je me retourne et lève la jambe pour avoir le dessus sur l'intrus. Le couteau sur la gorge, je vois enfin le visage de la personne. De grands yeux noisette me fixent en levant les mains placées haut au-dessus de sa tête.

_ Wow ! Stop, ce n'est que moi !

Kasey est coincé. Sa taille est impossible à remuer à cause de mes genoux qui la bloquent. Je soupire, me redresse et me remets à ma place. Mes doigts remontent les draps à ma taille, tournant le dos à Kasey. Je jette le couteau sur la table de chevet et m'enfonce encore plus dans les coussins. Je sens qu'il se retourne mais j'espère qu'il ne parlera pas.

_ Nam, c'est quoi ces cicatrices dans ton dos ?

Et de toutes les questions du monde, celle-ci était la pire de toutes celles qu'il pouvait me poser. Je bouge de façon à remonter les couvertures jusqu'à mon cou pour ne pas laisser mes marques sous ses yeux.

_ Lâche-moi, Kasey.

Je me force à me rendormir tant bien que mal. Pourquoi fallait-il qu'il les voit, ces foutues marques ?

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