Chapitre 6
Un résumé ? Pourquoi pas, après tant d'absence : Emerhyion et Anher tentent de retrouver Nähil, leur ami, destiné à devenir le futur Grand Njël mais disparu lors d'une partie de chasse. A force d'enquêter, le petit groupe d'elfes finit par capturer un Sombre.
De l'autre côté, dans le monde des humains que nous connaissons bien, Naël, détenu au centre psychothérapique, va être relâché dans la vie des gens autonomes. Ses affaires lui sont rendues, et là... trou noir. Toute sa vie lui revient en mémoire jusqu'à cette chose tellement étrange...
Si vous voulez des précisions sur certains points et que vous avez une crise de flemmatite aigüe en ce qui concerne une relecture, n'hésitez pas à me demander !
Je me réveillai sur quelque chose de moelleux. La matière qui le constituait m'était inconnue. Tout autour de moi, les choses étaient floues. La tête me tournait.
Que s'était-il passé ?
Je me souvenais des couleurs qui tourbillonnaient... puis plus rien. Le noir.
Petit à petit ma vision devint nette tandis que je me redressais.
La salle dans laquelle je me trouvais était faite de bois, et d'autres matières que je ne connaissais pas. En parcourant la pièce du regard, je m'aperçus qu'elle était plutôt exiguë, remplie d'objets sur la plupart desquels je ne pouvais mettre de mots. Il me sembla tout de même reconnaître une petite table et quelques étagères.
Dans la cloison étaient percées ce qui ressemblait à des fenêtres, à la différence près qu'elles étaient constituées d'une matière transparente bien différente de la magie.
La curiosité passée, je pris peur. Cet univers m'était totalement inconnu, je ne pouvais pas être mort, je ne comprenais rien.
Dans un mouvement impulsif, je cherchai mon pendentif, tâtonnant au niveau des clavicules. Le cristal de roche était bien là, mais mon arc, à l'instar de mon couteau, ne se trouvait nulle part. Quelqu'un m'avait sûrement amené ici, et privé de mes armes. Mais dans quel but ? Pouvoir me maîtriser ?
En vain, je cherchai une échappatoire. La seule ouverture était obstruée par une sorte de porte. J'allai m'avancer dans sa direction, quand elle s'ouvrit doucement. Tenant ce que je supposais être la poignée, une main. Main à laquelle était rattachée un être. Le visage de cet être était couvert de taches rousses, et était encadré d'une chevelure bouclée. Il était vêtu de tissu, sûrement, aux couleurs artificielles, qui le serrait aux jambes et flottait sur le haut de son corps. Son autre main tenait un gobelet, de même matière que les fenêtres. Le liquide qu'il contenait était transparent. Etait-ce simplement de l'eau, ou un quelconque poison incolore ? L'être souriait. Etrange.
Je reculai prudemment. L'échappatoire était restée ouverte. J'aurais pu tenter de sortir, mais mon corps était lourd et ne répondrait sûrement pas à l'effort demandé.
Pendant mes calculs, l'être avait refermé l'ouverture, posé le gobelet et ouvert la bouche.
Je reculai d'avantage.
Alors, six sons me parvinrent. Ils semblaient articulés mais je ne les compris pas.
L'être semblait attendre une réponse. Je cherchai des yeux quelque chose qui pourrait m'être utile, un endroit où fuir... L'être réitéra les six sons. Voyant que je ne répondais pas, il en articula six autres en tournant la tête de droite à gauche. Ses sourcils se froncèrent imperceptiblement.
J'aurais dû sentir une sorte de menace, mais rien de tel ne flottait dans l'air. J'étais perdu. Que devais-je faire ? L'être n'avait pas une position hostile, mais je ne connaissais rien à ce qui m'entourait, mieux valait être prudent quant aux interprétations.
Je sursautai soudain. L'être avait changé de position, sa main avait attrapé le gobelet, et me le tendait. Sur son visage, la bouche souriait. Les yeux aussi. Mes muscles se détendirent d'eux-mêmes, mais je ne pris pas l'objet. Rien ne me prouvait que ce n'était pas un piège.
L'être alors le porta à ses lèvres et but une partie du liquide. Puis il me tendit le reste.
Ce geste acheva de me rassurer. Je me redressai et pris le gobelet. Je bus. C'était bien de l'eau, mais quel goût étrange elle avait ! On l'aurait crûe pleine de pierres, et sa saveur naturelle disparaissait presque sous une épaisse couche de quelque chose d'infect, qui piquait la langue. Je posai le gobelet sur la table et m'asseyais par terre. L'être en fit autant.
Des sons me parvinrent encore. Leur intonation me fit penser à une question, mais décidément je ne comprenais rien. Ce que j'expliquai dans ma langue avec l'aide précieuse de mes mains. L'être me parut embêté, mais son visage reprit vite une expression bienveillante. Il se désigna du doigt et dit :
"Méline."
J'attendais une suite à ces sons, mais il y en eût pas. Je tentais de répéter. Cette langue était étrange, il me fallut quelques minutes, avec l'aide de l'être, pour comprendre que le premier son était une jointure des lèvres en même temps qu'un résonnement derrière le nez. La deuxième partie de ce mot était plus proche de ce dont j'avais l'habitude.
Ce devait être son prénom. Comme il me pointait du doigt d'un air interrogatif, je prononçai le mien.
"Nähil.
- Nachele" prononça-t-il avec difficulté.
Je secouais la tête en mimant les lettres.
"Nähil.
- Nahel. Nael. Naël."
Ce n'était pas exactement ça, mais d'un commun accord nous convînmes que cela irait.
Après avoir bu et mangé, je commençai à me sentir inquiet. Mon environnement naturel avait été remplacé par celui-ci, qui semblait artificiel. Les arbres me manquaient, tout comme la simplicité de l'air. Je jetai des coups d'oeil furtifs aux quatre coins de la pièce. Mon inquiétude s'accentua quand je me rendis compte qu'il y avait quelque chose duquel il ne fallait surtout pas que je m'éloigne. Le problème était que je ne me rappelais plus ni de quoi, ni pourquoi...
Je fis de l'ordre dans mon esprit. Il était inutile de s'affoler... pour l'instant.
Premièrement, il fallait que je sache précisément où j'étais.
« Auriez-vous la moindre idée de l'endroit où nous sommes ? »
Mince... la langue posait problème, il ne fallait pas que je l'oublie.
Il allait falloir que je me livre à une pantomime singesque.
Je me levai et entourai l'espace de mes bras, joignant la grimace au geste. Après quelques efforts, l'être comprit. Il se leva, me faisant signe d'attendre, et revint quelques instants plus tard, un grand livre entre les mains. L'être agita la main et je me plaçai à ses côtés. Il me désigna la couverture. Ce qui devaient être des lettres y étaient tracées. Cinq lettres... indéchiffrables. Des runes auraient été plus lisibles.
Le livre s'ouvrit, découvrant des espaces emplis de traits, de couleurs, de limites, de mots.
L'être tourna quelques pages et s'arrêta sur l'une des cartes. Il me désigna un point qui était entouré d'un côté par une zone vert sombre, de l'autre par un vert un peu moins foncé.
L'être s'approcha des fenêtres et pointa du doigt une masse sombre à l'horizon. Les montagnes...
Si nous étions toujours sur Terre, nous pourrions nous trouver en territoire des Elfes croisés, sur le littoral de la Mer brumeuse... mais personne ne m'avait jamais averti de ce mode de vie, de toutes ces choses étranges...
Je m'approchai de l'atlas et en examinai chaque page. Toutes ces formes de paysages m'étaient totalement inconnues, agencées de manière étrange. Il y avait tant de bleu, d'eau, que je ne voyais que deux explications. Soit l'Ère glacière avait gardé quelques uns de ses secrets, soit je n'étais absolument plus sur Terre.
C'est alors que je tombai sur une double page qui représentait l'intégralité, en plus petit, des territoires que j'avais parcouru du regard dans les pages précédentes. Un planisphère. Ainsi tout ceci formait un globe en réalité !
Non, je n'étais décidément pas sur Terre.
Mon étonnement dû se lire sur mon visage, car l'être me demanda d'où je venais – toujours par gestes évidemment. Comment décrire la Grande Forêt, les hameaux, la Cité du Grand Njël, le Tilleul-Chêne... je tentai quelques mouvements mais abandonnai.
Maintenant que je savais où j'étais, ou plus précisément où je n'étais pas, il me fallait trouver un moyen de rentrer chez moi. Mais pour cela, je devais déjà me renseigner sur la culture de cet endroit. Et cela passait par la langue.
Pendant quelques heures, l'être m'enseigna comment utiliser l'alphabet, comment se présenter...
La logique de cette langue différait en tous points de la mienne, à l'instar des signes. Je m'efforçai donc de la comprendre jusqu'à ce que le soleil soit couché.
Le lendemain, le surlendemain et durant les cinq jours qui suivirent, j'appris, je lus, j'écoutai l'être parler... si bien que les mots, la façon de construire les phrases s'inscrivirent dans mon cerveau. J'aurais été tout à fait capable de mener une conversation, si la plupart des notions n'avaient pas échappé à ma compréhension.
Les "humains" comme ils se nommaient eux-mêmes, utilisaient des objets qui ne leur étaient pas indispensables et qui étaient tout à fait en-dehors de la nature qui les entourait...
Cette dernière était d'ailleurs d'une rareté qui m'étonnait. La plupart du temps, elle était domestiquée, ce qui était d'autant plus étrange, comme si elle n'avait aucune volonté propre.
"Vous voulez venir vous promener, Naël ? me demanda un jour Méline.
- Oui, bien sûr."
Ce jour-là je découvris la ville des humains.
Méline habitait dans un bâtiment mince, qui surplombait un parc. Ce parc était beau, il était rempli de fleurs que je ne connaissais pas, de grands arbres au tronc tordu par la vieillesse. Ces arbres étrangement ressemblaient vaguement à certains feuillus qui peuplaient la Grande Forêt.
Méline m'entraîna hors du parc, sur le bitume. Là, tout était gris par terre. Les voitures filaient sur la route à toute vitesse, l'air était encore plus pollué qu'à l'intérieur de l'appartement.
Des hommes, des femmes, des enfants, d'étranges animaux à quatre pattes bien plus petits qu'un cheval marchaient sur les trottoirs, rentraient dans des magasins, étaient assis sur des bancs...
Il y avait beaucoup de vie et pourtant, la plupart de ces bruits étaient recouverts par ceux des voitures ; pourtant, personne ne se saluait. Finalement, tout était morne et mort.
Décidément, ce monde était bien étrange.
Après une petite heure de déambulations sans buts, nous rentrâmes dans la chaleur de l'appartement. J'étais épuisé. Mes forces avaient beau commencé à revenir, j'étais encore loin de les avoir recouvert entièrement.
Le lendemain, mon hôte m'emmena voir le directeur de son travail à qui elle avait parlé, et qui voulait me rencontrer.
"Vous êtes très différent de nous, dit-elle alors que nous étions en chemin." Puis elle ajouta précipitamment :
"Ne le prenez pas mal, évidemment, c'est juste... très intéressant.
- Oui, oui, ne vous inquiétez pas."
Nous entrâmes dans un vaste espace vert qui entourait un château blanc. Après avoir traversé la propriété et grimpé quelques étages, nous parvînmes face à une porte. Méline me sourit puis frappa le panneau de bois.
Je fus surpris de cette pratique. A quoi cela pouvait-il bien servir ?
"Entrez !" parvint une voix.
C'était donc cela. Un mot de passe, en quelque sorte.
Méline ouvrit la porte et m'invita à me tenir face à un homme petit et corpulent.
"Bonjour, monsieur Exire.
- Bonjour Méline. Alors voilà le phénomène que tu m'apportes ? Mmmh... dit-il en m'examinant sous tous mes angles, que j'avais nombreux. Intéressant... ajouta-t-il tandis qu'il soulevait mes cheveux de mes oreilles. Tu les as coupées en pointes ?
- De... de... quoi ? demandai-je, déstabilisé.
- Tes oreilles... tu les as coupées ?
- Non, je... je ne sais plus...
- Tiens donc, troubles de mémoires..."
L'homme continua de me disséquer du regard, puis se tourna vers la femme.
"Tu m'as dit que tu l'avais trouvé...
- Il était inconscient, affalé dans les poubelles au bout de ma rue... et depuis, il ne semble pas vraiment avoir de souvenirs antérieurs à cet épisode. C'est bien cela, Naël ? me demanda-t-elle."
Le petit homme ne me laissa pas le loisir de répondre.
"Il s'appelle Naël ?
- C'est du moins ce que j'ai compris...
- Et tu ne te souviens pas d'où tu viens ? la coupa-t-il.
- Je... non.
- Quel âge as-tu ?
- Je... ne sais pas."
C'étaient de bonnes questions en effet. Il me semblait me souvenir de vert, de rouge foncé, d'orange... mais rien d'autre. Même ma langue, que je ne maniais pas bien, me paraissait avoir remplacé une autre dont je ne parvenais pas à me rappeler.
"Où comptes-tu habiter Naël ? me demanda monsieur Exire.
- Je n'en ai pas la moindre idée...
- Tu ne comptes tout de même pas rester chez Méline pour toujours ? ajouta-t-il en riant.
- Monsieur... intervint l'intéressée en me prenant par les épaules."
L'homme comprit le message et fit mine de réfléchir intensément, pour ensuite reporter son attention sur moi.
"En tous les cas, si vous avez besoin d'un logement, je pense que cet établissement vous sera tout désigné."
Cette phrase éveilla ma curiosité.
"Quelle en est sa fonction ? demandai-je.
- Nous traitons des cas similaires au tien, nous pouvons peut-être t'aider à retrouver la mémoire. Nous soignons aussi d'autre genres de personnes, mais évidemment tu n'es pas concerné par celles-ci. "
La nuit qui suivit, j'étais allongé sur le canapé. Les volets étaient ouverts, et je pouvais voir, à travers la fenêtre, les étoiles.
Que faire ? D'après ce que j'avais compris du moyen de vie ici, Méline avait besoin d'argent pour m'entretenir. Si je restais ici, elle n'en aurait sûrement plus assez. Elle ne pourrait donc plus vivre. Cela, il n'en était pas question.
Il me fallait partir.
"Cet établissement vous sera tout désigné" avait dit ce monsieur Exire. Très bien, ce serait là-bas que j'irais. Ainsi, je pourrais trouver un moyen pour rentrer sur Terre, revoir Emerhyion... pauvre Emerhyion...
Terre ? Mais qu'est-ce que je racontais, j'y étais ici même !
Je regardai les étoiles une dernière fois, et sombrai enfin dans le sommeil.
"Mais enfin, vous n'êtes pas obligé, vous pouvez rester ici si vous voulez ! me dit Méline le lendemain après que je lui eus exposé mon idée.
- Non, je crois que ce sera mieux ainsi."
Après une longue argumentation, je réussis à la convaincre de m'emmener chez M. Exire.
Les préparatifs furent vite faits, je ne possédais rien excepté mon pendentif, un coutelas, un carquois. Je les mis dans un sac. Je me faisais suffisamment remarquer avec mes vêtements.
En partant, je pris une grande inspiration, m'emplissant les poumons de l'air des arbres. Une image envahit mon esprit. Un Tilleul-Chêne gigantesque. Non, ce n'était pas ici que de telles magnificences existaient. Je regardai Méline qui me sourit, puis nous nous mîmes en route.
Arrivés à destination elle me déposa devant les grilles. Derrière, le parc qui entourait la résidence. Je levai les yeux. La façade de pierre était ornée d'une inscription que je ne parvins pas à lire.
Le lendemain je me réveillai dans ma nouvelle chambre. Ses murs étaient blancs. Tout était blanc ici, c'était amusant. Aucune couleur exceptées celles des personnes qui habitaient ici. C'était bien différent de l'Arbre au Grand Njël. La matinée passa sans que je ne m'en rende compte. Tout était à visiter, tous étaient à découvrir. C'était bien plus grand que chez Méline. Je suivais la femme qui me faisait terminer la visite quand, au détour d'un couloir, je croisai mon amie rousse.
"Ah, Naël, vous tombez bien, voici les horaires de vos visites quotidiennes, dit-elle en me tendant une feuille que je ne savais pas encore lire.
- Mes visites ?
- Oui, les visites médicales dont nous avons parlé hier avec M. Exire... vous vous rappelez ?"
Je réfléchi un moment puis acquiesçait. Ces troubles de mémoires devenaient fréquents... peut-être étaient-ils liés à la partie de ma vie dont je ne me souvenais pas... Quoi qu'il en soit, j'avais maintenant rendez vous. Je suivis donc Méline à travers les étages.
"Assied-toi, Naël, me convia M. Exire une fois que nous fûmes seuls. Tu as visité la totalité de la résidence ?
- Oui."
Dix, quinze minutes durant, les questions se succédèrent. L'organisation de cette nouvelle vie n'était pas des choses les plus simples que j'avais faites.
"Bien, j'ai maintenant une toute dernière question. Te souviens-tu, oui ou non, de ta vie avant que tu ne te retrouves dans ces poubelles ?"
Je réfléchis intensément. J'essayai de me figurer des faits précis, des visages, des sons...
"La seule chose qui me semble en faire partie, répondis-je finalement, est la quantité de couleurs du paysage.
- De quel paysage ?
- Je ne sais pas. Je ne me rappelle pas."
L'homme bedonnant soupira. Puis il se reprit, me sourit et me congédia.
Les semaines qui suivirent ne furent pas une partie de plaisir. Mais ce n'était rien comparé à l'année qui les succéda. Mes souvenirs s'envolaient de plus en plus. Bientôt, même mon séjour chez Méline m'apparut flou et incertain. Le personnel de l'hôpital me traitait comme étant un malade, ce qui m'amena à me demander si je ne l'étais pas vraiment.
Quand un jour, on proposa une sortie dans la montagne. Je m'inscrivis avec joie, heureux de pouvoir me sortir d'entre ces murs. Les encadrants étaient des infirmiers et infirmières, censés nous surveiller.
L'ascension commença, de belles plantes m'entouraient, l'air était vif et le soleil nous réchauffait les os. A mi-chemin, lors de la pause, je flânais alentours. Je m'éloignais, attiré par quelque feuille ici et là, quand mon attention fut alpaguée par une étrange fleur violette piquée d' orange.
Je m'accroupis, me mettant à sa hauteur.
La fleur semblait se nourrir du soleil. J'approchais ma main, quand...
« Naël, on repart ! »
Je sursautai au son de cette voix stridente, mais décidai de l'ignorer. Je reportai mon attention sur la plante, et effleurai un pétale du doigt.
Une décharge me traversa.
Que faisais-je ici ? Pourquoi ne tentais-je pas de retourner là d'où je venais ? Ce paysage m'était inconnu, à l'exception du lys.
Où était Emerhyion ? Il fallait absolument que je le trouve, nous avions un entraînement dans moins d'une heure. Mais... quel jour était-ce ?
Qui étaient ces gens qui s'approchaient, proférant des sons inarticulés ? Si j'étais sur Terre, cette région étrange n'avait jamais été évoquée par le Grand Njël.
La fleur... elle était la seule que je connaissais. Il fallait rester près d'elle. Il fallait la protéger.
Je cherchai mon épée, elle n'était pas à mes côtés.
Les êtres s'approchaient de plus en plus, je ne parvenais toujours pas à savoir s'ils étaient agressifs ou non. Mais je n'eus pas plus de temps pour réfléchir. L'un d'eux posa un de ses membres sur mon épaule...
Que s'était-il passé ? Je m'étais levé de ma place, et... un trou noir.
« Tout va bien Naël ? »
Je réfléchi un instant, puis acquiesçai.
Les semaines qui suivirent furent des plus mouvementées de ma vie.
Tout d'abord, des symptômes identiques à celui-ci surgirent de nouveau, de manière brève et le plus souvent lorsque j'entrais en contact avec un végétal. Puis ces « crises » comme les médecins les appelaient se rapprochèrent et devinrent inopinées. Je ne me souvenais jamais de ce qu'il se passait durant l'une d'entre elles, mais à chaque fois que je revenais à moi les personnes qui m'entouraient étaient blanches de peur et couvertes de coups.
Jugé dangereux, on m'enferma dans le pire endroit que je ne connaîtrai jamais. Là où le personnel redoutait de venir, là où les plus dangereux d'entre nous étaient enfermés à double tour dans une camisole de force. Les bas étages de l'hôpital. Ma cellule donnait sur le trottoir, que je ne pouvais voir à cause des barreaux si serrés qu'ils laissaient à peine filtrer un peu d'air. Un matelas était ma seule compagnie. On m'apportait mes repas après avoir vérifié que j'étais bien dans mon état « normal ». Bien que libre de mes mouvements dans la pièce, je me sentais entravé comme jamais. Les cris de bête sauvage qui provenaient des autres cellules ajoutaient à ce sentiment.
Un jour, alors qu'un infirmier m'apportait à manger, mon esprit se retourna. De nouveau je n'étais plus Naël. Agacé par ce long enfermement, je m'attaquai sauvagement à l'homme, tentant de lui arracher la peau, les yeux.
Lorsque je me réveillai, c'était pour constater que mes repas étaient passés par une fente de la porte. Je restai un nombre infini de jours dans cette situation, n'étant visité que par des hommes protégés jusqu'aux dents et anxieux au possible. L'un d'eux tentait de comprendre mes changements de comportements, apparemment. Je ne me souviens plus très exactement de cette période, étant donné que j'étais devenu une sorte de rat de laboratoire et que j'ingérais une quantité effrayante de substances plus ou moins digestes.
Lorsqu'enfin les crises s'espacèrent pour devenir de plus en plus rares, on me défit de la camisole, puis on me fit sortir et intégrer, petit à petit, les parties les moins sombres de l'hôpital. Je finis donc par retourner là où étaient logés les moins atteints d'entre nous.
J'étais installé depuis quelques instants dans ma nouvelle chambre, lorsqu'on frappa à la porte.
« Oui...
- Bonjour Naël. »
C'était Méline. Je l'accueillis avec un grand sourire. Dans mes souvenirs, jamais je n'avais été aussi heureux de voir quelqu'un.
Elle s'assit à côté de moi.
« Les médecins m'ont fait part de leurs pronostics quant aux crises que vous avez contractées.
- Qu'est-ce que c'était ? demandais-je, intrigué.
- Un cas extrêmement rare et fort de schysophrénie. »
Le noir ne dura pas plus d'une demi-seconde.
Nähil avala une grande goulée d'air, puis regarda autour de lui, pantelant. Il baissa alors les yeux sur le pendentif de cristal puis se rua sur la porte.
Et vualà, laissez donc un petit commentaire ça fait toujours plaisir, et à la revoyure !
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